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L’ESPRIT DU 1er NOVEMBRE 54

ALI - ZAAMOUM, ÉVEILLEUR ET RASSEMBLEUR

par Hakem RAMDANE

lundi 2 novembre 2009

Ali Zamoum nous a quitté le 27 août 2004, à deux mois du cinquantenaire du 1er Novembre 1954. Sa disparition aura été un moment particulièrement impressionnant, tout comme aura été exceptionnelle sa vie. Une foule immense avait accompagné sa dépouille d’Ighil Imoula au cimetière des martyrs de Tizi-n-tleta où il repose à côté de ses compagnons tombés au champ d’honneur. Il y avait en particulier ses amis de toujours, Mohand Saïd Mazouzi, Meziane Louanchi, Samir Imalayen…ou encore les anciens de Debza, la troupe de théâtre engagée. Il y avait surtout les anonymes, les jeunes, les gens du peuple venus si nombreux témoigner de leur considération pour Da Ali, l’ami des pauvres.

Un fait n’a toutefois pas manqué de m’interpeller : que ce soit à la levée du corps à l’hôpital Paul Broussais (Paris), ou lors de son enterrement au carré des martyrs de Tizi-n’Tleta, des personnalités d’horizons politiques tout à fait opposés se sont associées pour rendre un hommage éclatant au fils du Djurdjura.

Quelle signification peut-on donner au fait que Mohamed Harbi, l’irréductible opposant, et Mohamed Ghoualmi, l’ambassadeur d’Algérie en France, se soient retrouvés auprès du corps d’Ali Zamoum pour prononcer, à peu de choses près, les mêmes paroles ? Que nous dit la présence de Mustapha Bouhadef du FFS ou Ferhat M’henni du MAK dans le même rassemblement que Redha Malek et le Général Touati ? Qu’est-ce qui a fait se déplacer des personnalités aussi diverses que Aït Menguelet, Ben Mohamed, le professeur Abdelmoumène, Hachemi Cherif (lui-même aujourd’hui disparu), Arezki Aït Ouazou et tant d’autres encore… ?

Un début de réponse à cette interrogation, nous pouvons le trouver dans l’allocution que prononça Mohamed Harbi à la morgue de Paul Brousse, avant le départ du corps pour l’aéroport et l’Algérie ; il avait dit : Ali Zamoum est un des fondateurs de l’Algérie, un fondateur de la république algérienne.

Quel magnifique hommage au jeune Kabyle qui porta sur son dos la ronéo et le tract du 1er Novembre 1954 ! A l’un de ceux qui offrirent en sacrifice leur bien le plus précieux (la vie) pour que vive l’Algérie. A tous ceux qui, avec Ferhat Abbas, dirent : « être ou ne pas être, vivre en peuple Algérien libre et indépendant ou rester une multitude d’esclaves, devant cette alternative notre choix est fait ! »

En cette veille du 1er Novembre nous voulons aller plus loin : si la disparition d’Ali Zamoum avait suscité tant d’émotion, en particulier chez les jeunes et tous ceux que préoccupe le devenir de l’Algérie, c’est, nous semble-t-il, pour ce qu’il représente aujourd’hui encore comme attitude face aux grandes difficultés qu’affronte le pays.
L’assistance aux enfants abandonnés à l’indépendance, l’engagement conséquent en faveur de l’Autogestion, le soutien à Kateb Yacine et l’Action Culturelle des Travailleurs, la redynamisation des Djma’a de villages, l’accompagnement du mouvement de la jeunesse de Kabylie après 1980, la fondation de l’association de solidarité « Tag’mats » en 1996 sont autant de témoignages éloquents sur le sens et la constance des valeurs pour lesquelles Ali Zamoum s’est engagé.

Par son action politique, culturelle et sociale, par sa manière de vivre au quotidien, Ali Zamoum a œuvré, sa vie durant, à faire vivre des idéaux que nous nous permettons de résumer en cinq grands axes :

  1. Un attachement intransigeant à l’Algérie, que rend bien l’expression de Mohamed Boudiaf : l’Algérie avant tout.
  2. Une vision de la nation d’où est bannie toute forme d’exclusion, qu’elle soit d’essence ethnique, religieuse, de sexe ou régionaliste.
  3. Une exigence éthique permanente faite de primauté de l’intérêt collectif sur l’intérêt individuel ou de clan, de refus de la corruption et de la compromission sous toutes leurs formes ; de solidarité avec les faibles et les opprimés, du culte de la vérité et rejet du mensonge, « même pour la bonne cause » ; de fidélité aux principes et aux engagements pris.
  4. La démocratie sociale comme projet de société susceptible de donner corps au rêve d’une Algérie d’où seront bannies la misère, l’injustice et l’inculture .
  5. L’action politique, mais également l’action culturelle, l’action sociale et l’exemplarité des comportements comme autant d’instruments que les militants de l’Algérie se doivent d’utiliser afin de réaliser le progrès pour tous.

Ces idéaux, à notre avis, sont en vérité la traduction pratique, en permanence actualisée, du projet de Novembre 1954 ; ce dernier, loin de s’éteindre à l’indépendance, continue d’alimenter de son humanisme vivant la marche de l’Algérie vers son destin. En ce sens, et Ali Zamoum le dit explicitement dans son livre « Tamurth Imazighen », il aura été un « survivant », sa mission était de transmettre aux générations nouvelles le message de Novembre. Ce qu’il fit.

Et c’est pour se réchauffer à ce rêve collectif que des hommes et des femmes de tous bords, mais qui ont l’Algérie au cœur, s’étaient retrouvés afin de rendre un vibrant hommage à celui qui demeura fidèle à une si admirable promesse.

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