Accueil > ECONOMIE > POLITIQUES PUBLIQUES, MONNAIE ET DETTE SOUVERAINE : DES DÉFICITS BUDGÉTAIRES (...)

POLITIQUES PUBLIQUES, MONNAIE ET DETTE SOUVERAINE : DES DÉFICITS BUDGÉTAIRES AUX CRISES AUTO-RÉALISATRICES

mercredi 13 mars 2013

par Ahcène AMAROUCHE (*)
“Recherches internationales,” n° 94, janvier-mars 2013

La question de la dette souveraine a fait irruption dans
les débats qui ont lieu présentement entre économistes
politologues et publicistes sur les tenants et aboutissants
de la crise actuelle, passée de la sphère financière à la
sphère réelle des économies nationales et de l’économie
mondiale. Le rapport direct établi entre les politiques
publiques et les déficits budgétaires – qui alimentent la dette
souveraine – paraît devoir être revisité en mobilisant fortement
l’histoire économique, de laquelle il ressort qu’il existe un
lien étroit entre dette souveraine et phénomènes monétaires.
L’ambition de la présente contribution est de déconstruire la
mécanique selon laquelle la dette souveraine s’alimente à la
fois des politiques publiques et des phénomènes monétaires
déconnectés de ces politiques ; lesquels conduisent aux crises
auto-réalisatrices de la dette souveraine.

« Le progrès des dettes énormes, qui écrasent à présent
toutes les grandes nations d’Europe et qui probablement
les ruineront toutes à la longue, a eu un cours uniforme. »

Adam Smith

La crise de la dette souveraine dans de nombreux pays est-elle de nature à mettre en cause les fondements du système économique ou bien prélude-t-elle seulement à l’abandon par les États de certains volets des politiques publiques ?

C’est la question qu’on peut légitimement se poser au vu de l’ampleur de cette crise et des mesures de réduction des dépenses budgétaires censées y mettre fin. Les cas de certains pays européens – Irlande,
Islande, Grèce – qui ont successivement défrayé la chronique ces
dernières années ne sont pas des cas isolés : l’Espagne, l’Italie, le
Portugal, voire la France semblent être dans la même trajectoire
si l’on se fie aux décisions récentes des agences de notation de
dégrader leur note et à la réaction immédiate des marchés financiers
consistant à relever les taux d’intérêt à l’emprunt pour ces pays.
L’administration Obama est passée à deux doigts d’être bloquée par
le Congrès le 2 août 2011 après que la dette souveraine du pays a
franchi le plafond légal de 14 294 milliards de dollars. Dans les années
1980 et 1990, de nombreux pays émergents et sous-développés
ont fait défaut sur leur dette souveraine et ont dû passer sous les
fourches caudines du FMI pour son rééchelonnement.

Cette question n’est pourtant toujours pas posée en des
termes susceptibles de mettre en cause le mécanisme pervers qui
conduit les États au surendettement, mais seulement en termes
de capacités d’emprunt de ces derniers. Les investisseurs [1] comme
les autorités publiques et les organismes multilatéraux (FMI,
Banque mondiale, BCE, etc.) mettent directement en cause les
politiques publiques comme facteur déterminant le volume et le
taux des déficits budgétaires à niveau donné de recettes fiscales.
On peut néanmoins se demander si les politiques publiques sont
responsables des déficits récurrents et si le retour à une discipline
budgétaire stricte est de nature à résoudre la crise – non pas tant
seulement d’ailleurs la crise de la dette souveraine mais la crise, plus
globale, de l’économie dont elle est partie intégrante. La question
de la monnaie se trouvant au coeur de la problématique de la crise,
il nous paraît logique de l’associer à la crise de la dette souveraine
dans l’analyse des causes de cette dernière : elle n’est pas étrangère
en effet à ce que certains auteurs désignent sous le nom de crises
auto-réalisatrices.

L’objet de la présente contribution est de tenter de faire le lien
entre les trois termes de la problématique annoncée en recherchant
aussi bien dans l’histoire ancienne que dans l’histoire moderne les
déterminants de la crise de la dette souveraine. Précisons au préalable
que, pour ne pas devoir traiter en détail de toutes les actions de
l’État qui entrent dans la définition des politiques publiques, nous
entendrons de façon restrictive par politiques publiques celles de
ces actions qui se traduisent directement par l’amélioration des
conditions de vie des franges de la population les plus sujettes
à précarité (politiques en faveur de l’emploi, du logement, de la
protection sociale, etc.).

Nous chercherons, tout d’abord, à mettre en exergue la genèse
de la dette souveraine et à en indiquer le lien organique, quoique
ambivalent, avec la monnaie dans ses trois principaux attributs : ceux
de souveraineté, de confiance et d’universalité. Puis, nous essaierons
de faire le distinguo entre les causes de la dette souveraine relevant
des politiques publiques (crises budgétaires) et celles relevant de
phénomènes purement monétaires (crises auto-réalisatrices).

Aux origines de la dette publique :
au-delà de la souveraineté, la crédibilité et l’universalité monétaires

La question de la dette publique a un triple rapport à la monnaie :

–* Le premier est un rapport de confiance : en tant qu’elle articule
des offres et des demandes sociales de toutes natures, la monnaie
est une institution fondée sur la confiance, laquelle suppose la
crédibilité – qualité qui se retrouve dans la notion de crédit, terme par
lequel on désigne aussi la dette, celle-ci fût-elle la dette souveraine.

–* Le second est un rapport de souveraineté : la frappe des monnaies
dévolue à l’autorité, qui remonte à l’antiquité, est l’expression même
du lien entre la monnaie et la souveraineté politique : « dans les cités
grecques comme dans les royaumes asiatiques, la monnaie signée
et frappée a affirmé la prérogative étatique […] » écrit J.-M. Carrié,
[2007, p. 78] qui ajoute : « la question de la fiduciarité est née avec
la monnaie signée et frappée » [id. p. 79].

–* Le troisième est un rapport d’universalité : la monnaie comme
équivalent général se double de la transnationalité quand une
partie de la dette souveraine est libellée en monnaie étrangère (dette
publique extérieure).

La monnaie dans ses rapports organiques à la dette souveraine

Que le lien entre monnaie frappée et État ait toujours été fort,
c’est un fait avéré dans la totalité des empires et royaumes des temps
anciens (jusques et y compris les régimes féodaux de type asiatique
et européen antérieurs à l’avènement de l’ordre libéral moderne,
où la monnaie ne possédait pourtant pas totalement l’attribut
d’universalité qu’elle a de nos jours). Ce lien est établi au travers de
l’impôt, dont le Trésor (public), organe de souveraineté s’il en est,
est l’institution de sa gestion. « La logique qui prime dans le circuit
fiscal [étant] celle de la reproduction de l’autorité politique » [Yildirim,
2007, p. 208], l’objectif d’alimenter par l’impôt le Trésor central en
revenus réguliers ou en revenus exceptionnels a toujours été réalisé
au moyen de la monnaie signée et frappée qui, en tant qu’attribut
de la souveraineté, a cours légal dans le pays. Si, par suite, l’on a pu
établir que des réformes monétaires ont eu lieu dans l’empire romain
(iiie siècle av. J.-C.) comme dans l’empire ottoman (xvie-xviie siècles)
ou sous le régime du shogunat au Japon (xviie-xixe siècles) et que ces
réformes ont souvent consisté en une manipulation de la valeur des
monnaies en circulation, c’est en vue de faire entrer plus d’argent
au Trésor ou, à défaut, de lui permettre d’en dépenser moins ; ce
qui n’est possible que parce que l’attribut de souveraineté dont jouit
la monnaie signée et frappée lui est conféré par l’autorité politique
qui peut par conséquent en modifier la teneur. Aussi, la confiance
en la monnaie reflète-t-elle presque immédiatement la confiance en
l’autorité et les crises monétaires sont toujours, à un degré ou à un
autre, l’expression de crises politiques.

Cependant, dans tous les pays et sous tous les régimes, la forme
institutionnelle Monnaie est aussi dans un rapport ambivalent avec
les institutions de sa gestion – le Trésor public et la Banque centrale
qui sont des sièges de souveraineté – ne serait-ce que parce que, en
partie tout du moins, elle leur échappe dans la circulation : « Monnaie
et souveraineté entretiennent donc une relation constitutive étroite
jusque dans leurs ambivalences respectives » [Théret, 2007, p. 23].
Cela est-il encore vrai depuis l’avènement des monnaies nationales
autoréférentielles
qui « a fait faire un bond à l’abstraction monétaire »
[Aglietta, 2007, p. 38)] ? La question mérite un examen approfondi
mais nous ne ferons qu’en signaler ici les présupposés.

Si l’on convient de partir de l’idée que la monnaie est une
forme institutionnelle par le pouvoir qu’elle a de représenter en les
désincarnant les rapports entre les personnes (qui se dégagent de la
sorte d’une situation conflictuelle larvée – les rapports de force réels
étant dépouillés de la subjectivité des personnes en présence pour
revêtir le caractère de rapports impersonnels) –, on doit conclure
qu’elle contient nécessairement un principe d’ordre : celui à la base
de toutes les institutions qui se résume dans le concept d’autorité
entendu ici au sens générique d’ascendance sur autrui. Aussi n’est-il
pas étonnant que la monnaie, qui a pu naître de la nécessité de la
double coïncidence des besoins en économie d’échange, n’ait pu se
développer que sous l’impulsion du « pouvoir supra individuel de
l’organisation collective » [Alary, 2009]. Dès que l’autorité en question
a revêtu la forme État et que l’organisation collective a revêtu une
forme quelconque de gouvernement, la monnaie, représentant
symbolique des rapports économiques dans la sphère de l’échange
[Théret, 1992], acquiert aussi la fonction de représentant symbolique
d’autres types de rapports sociaux dans les sphères politique et culturelle.
Les monnaies autoréférentielles n’échappent pas à cette loi puisqu’elles
font l’objet d’une réglementation de leurs usages au même titre que les
monnaies dont la valeur leur est conférée par l’or ou l’argent.

De fait, la monnaie a partie liée avec le droit puisqu’elle est
elle-même l’expression de droits (créances) sur autrui – l’émetteur,
qui se trouve donc en situation de débiteur vis-à-vis du détenteur
de la monnaie, celui-ci fût-il étranger à l’espace économique où a
cours légal la monnaie signée et frappée. Il s’établit de la sorte, au
travers de la monnaie, une hiérarchie de positions sociales qui confère
à la monnaie en tant que médium des relations sociales l’attribut
de la fiduciarité. Confiance, souveraineté et universalité sont donc
les trois termes de l’équation Monnaie, celle-ci fût-elle la monnaie
autoréférentielle : la monnaie procède de la dette dans son rapport
à la souveraineté, écrivent Michel Aglietta et André Orléan [1998].

La monnaie dans l’histoire du crédit à l’État

On trouve la monnaie sous la forme de métaux précieux dans
la Haute Antiquité comme au Moyen-Âge et jusque dans les temps
modernes. Dans tous les âges, des pièces d’or et d’argent sont frappées
à l’effigie de rois, princes et autres seigneurs et à l’effigie d’hommes
d’État moins favorisés par le ciel mais investis d’une autorité non moins
réelle. Le monopole de la frappe des monnaies que se sont arrogé les
gouvernants est un signe du lien indéfectible qui existait dans les
temps anciens entre le pouvoir et la monnaie. Bien que se présentant
sous une forme différente, ce lien n’est pas moins fort de nos jours.
Qu’est-ce qui justifie sa permanence sous des régimes, en des époques
et en des lieux si éloignés les uns des autres ? Cette question n’est pas
oiseuse pour qui veut comprendre les rapports intimes que le pouvoir
entretient avec la monnaie. Mais peut-être ne faut-il pas remonter très
loin dans l’histoire pour découvrir la genèse de ce rapport : il suffit de
se reporter à l’Occident médiéval pour voir comment, dans certains
cas, le seigneur est sorti des flancs de l’homme riche et comment, par
suite, il se servit de la monnaie pour asseoir son pouvoir.

Des études portant sur les conditions de la naissance du système
seigneurial [2] ont montré en effet que, dès le xe siècle en Europe, la
majeure partie des paysans qui désiraient s’installer sur de nouvelles
terres contractaient, pour les défricher, y construire leur maison et
les travailler, des dettes trop lourdes pour espérer un jour pouvoir
les rembourser. Le prêteur, qui pouvait être un homme riche du
voisinage, un abbé ou un prieur à la tête d’un couvent, « consentit à
n’être jamais remboursé en échange de quoi l’emprunteur s’engagea
à mettre en valeur une terre jusque-là sans valeur et à servir au
prêteur, à perpétuité l’intérêt de la somme avancée » [Corriéras,
1996, p. 250].

Relatant les conditions économiques de la formation du système
seigneurial, J. L Corriéras fait le commentaire suivant qui indique
combien pouvoir et monnaie sont liés : « La féodalité a surtout laissé
l’image du seigneur chef de guerre et justicier mais le rayonnement
de la gloire chevaleresque a caché le pouvoir économique : le seigneur
est d’abord un créancier ».

Bientôt cependant, le seigneur lui-même, sous l’effet de
l’amenuisement des rentes et redevances qu’il percevait du paysan, et
alors qu’il est pris dans le tourbillon de la vie de château, exubérante
et luxueuse, « fait le bonheur des prêteurs bourgeois » [Braudel,
1986, p. 226]. Alors, le seigneur ruiné cède la place « à d’autres
seigneurs, souvent de riches bourgeois qui n’en maintiennent pas
moins le système » (id.).

Ce système consiste à faire payer au paysan, même libéré des
liens du servage, toutes sortes de redevances auxquelles s’ajoutent
la dîme versée à l’église et l’impôt, versé à l’État, tout entier
représenté en la personne du roi, lui-même n’étant qu’un seigneur
de plus grande envergure que les autres. Le souverain a beau se
présenter alors comme l’incarnation du pouvoir céleste, le maître
absolu « ne dépendant quant au contenu de ses décisions que de
Dieu » [Burdeau, 1970, p. 63], son pouvoir, il le tient en réalité de
sa capacité à lever l’impôt et, le cas échéant, à faire valoir autorité
et confiance pour contracter des emprunts.

L’impôt est la source sinon unique, du moins primordiale, de
la richesse pérenne du souverain. Mais l’impôt n’est pas autre chose
qu’une partie du surproduit de l’économie paysanne, peut-être la plus
importante, en tous cas la plus apte à se convertir en monnaie si on
en juge par l’importance et la diversité des dépenses du souverain
qui servent à entretenir la cour, à mener des guerres incessantes, à
construire châteaux et cathédrales, etc. ; toutes choses qui attestent
de l’universalité de la monnaie comme équivalent général.

Mais il vient un temps où l’impôt ne suffit plus à financer ces
dépenses. Pour rétablir la paix, pour asseoir l’ordre et la discipline
ou pour mener une guerre, « l’État a besoin d’argent, et de plus en
plus à mesure qu’il étend et diversifie son autorité » [Braudel, 1986,
p. 467]. Le pouvoir central est pris dans la tourmente : il a beau
« se retourner contre les contribuables, les pourchasser, inventer
de nouveaux impôts, créer des loteries – rien n’y fait ; le déficit se
creuse comme un gouffre. Il n’est pas possible d’aller au-delà de
certaines limites, de faire entrer dans les caisses de l’État la totalité
du stock monétaire du royaume » (ibid.). Il recourt à l’emprunt.

Venise, cité-État comme il en existe tant dans l’Europe
médiévale, inventa l’emprunt forcé. C’est Venise, « plus ouverte
encore que ses voisines aux influences de l’Orient, qui devint le grand
laboratoire européen du crédit » [Ferguson, 2011, p. 39]. L’emprunt
forcé consistait à contraindre les riches à souscrire, au profit de
l’État, à un emprunt remboursable pour financer la guerre. La dette
souveraine était née et avec elle tout un arsenal de procédés qui
conduisirent à l’éclosion de ce que bien plus tard on désignera par
l’expression de marché financier – qui allait fournir à l’État cette
nouvelle source de revenus : l’emprunt. Tous les États européens,
grands ou petits, eurent recours à l’emprunt. Le pape lui-même
fit appel au crédit « pour équilibrer les finances pontificales… au
moment où s’amoindrissent ou disparaissent les redevances de la
chrétienté » [Braudel, 1986, p. 467].

Certains États lancent des emprunts à l’extérieur de leur
territoire, auprès d’autres États. Les rois d’Angleterre, de France,
d’Espagne et de bien d’autres pays encore ont ainsi fait usage de
l’emprunt public « qui ne fera que grandir », note F. Braudel, qui
ajoute : « Bien des capitaux accumulés à Amsterdam s’engouffreront
au xviiie siècle dans les caisses des princes d’Europe. » (ibid). C’est
maintenant les marchands, les capitalistes qui, par le biais de
l’emprunt public, deviennent les créanciers de l’État – à perpétuité,
pourrait-on presque ajouter, tant les déficits s’accumulent, offrant
aux créanciers des perspectives sans fin de profit garanti [3].

Quand la bourgeoisie s’empara enfin du pouvoir d’État, elle
ne fit pour ainsi dire que rentrer dans ses fonds : économiquement,
le pouvoir lui appartenait déjà et elle n’avait plus pour souci que
de le consolider : en perpétuant l’emprunt d’État dont elle tire au
passage un profit garanti. Quand, donc, survient la crise de la
dette, le pouvoir d’État est ébranlé dans l’un de ses fondements :
la confiance, dont la monnaie est le porteur attitré.

Crises de la dette souveraine et crises monétaires : la « nature versatile de la confiance » [4]

Si l’on admet, avec Michel Aglietta, que la monnaie procède de
la dette [Aglietta, 2007, p. 18], on doit conclure que l’émission de
monnaie par l’État institue l’État comme débiteur social universel.
« La monnaie est le principe social de la valeur qui apparaît, écrit
l’auteur, lorsque la société se divise, se stratifie, et polarise la
conservation de son unité dans un centre unificateur, l’État »
[Aglietta, PDF non daté, p. 5]. En ce sens, l’État, qu’il soit ou non
l’émanation de la société, est son débiteur perpétuel alors même
qu’il apparaît comme le siège d’un pouvoir qui la transcende ! En
tant que tel, il doit jouir en permanence de la confiance de la société
pour continuer de jouir de l’attribut de souveraineté ; ce que la
monnaie signée et frappée lui assure tant qu’il ne sombre pas dans
une crise politique susceptible de le déposséder du droit d’exercer
la violence légitime au sens de Max Weber.

La crise de la dette souveraine est-elle de nature à conduire
à cette issue fatale ? Ce qui est sûr, c’est qu’elle a, dans maintes
situations historiques, fortement érodé la confiance en la monnaie
qui sombre alors dans un processus de dépréciation plus ou moins
accéléré. Pour recouvrer ses attributs de souveraineté et de légitimité,
l’État n’a d’autre choix que de procéder à une réforme monétaire
susceptible d’alléger le fardeau de la dette souveraine.

Cette situation se rencontre d’abord dans les crises de la dette
publique intérieure libellée en monnaie locale. Alors que le premier
attribut de la monnaie – la confiance – est fortement entamé par
l’altération monétaire (physique dans le cas des pièces en or ou en
argent, morale dans le cas de la monnaie papier) qui se résout en
inflation, le second attribut de la monnaie – la souveraineté – est
mobilisé pour opérer une réforme monétaire de grande ampleur
(conversion monétaire) à même de réduire très sensiblement la dette
publique intérieure. Ce fut le cas dans les royaumes et empires
anciens depuis l’époque de la Grèce antique jusqu’à celle du Japon
des shoguns. Ainsi, dans la Grèce ancienne, « certaines cités […]
ont réformé leur système monétaire pour y introduire des fractions
de bronze frappées de manière régulière, l’argent étant désormais
réservé aux plus grosses dénominations » [Granjean, 2007, p. 88].
Au Japon, sous le shogunat, de nombreuses refontes eurent lieu,
dont la dernière « battit tous les records et aboutit à inverser les
proportions de métal […] : de 80 % d’argent et 20 % de plomb, on
était finalement passé, pour les monnaies dites yotsutakari-gin (ou
shihôgin) produites en 1711, à 20 % d’argent et 80 % de plomb »
[Carré, 2007, p. 242].

Plus près de nous, et bien que des réformes monétaires de
grande ampleur aient eu lieu dans certains pays pour réduire la
dette publique intérieure selon les mêmes procédés que dans les
temps anciens, les gouvernements préfèrent le plus souvent « laisser
aller l’inflation » [Reinart et Rogoff, 2010, p. 145] pour obtenir le
même effet. Reinart et Rogoff analysent l’inflation – toujours très
élevée en période de crise de la dette publique intérieure – comme
une forme implicite d’expropriation des résidents (id. p. 153) –, ce
qui évite aux détenteurs de l’autorité de recourir inconsidérément à
l’attribut de souveraineté pour réduire la dette de l’État. L’inflation
permet en outre de contourner l’obstacle de la détention des actifs
constitutifs de la dette par des « groupes d’intérêts politiquement
importants » (id. p. 156) qui empêchent que la dette soit abolie
purement et simplement. Selon ces auteurs, des centaines de
défauts sur la dette intérieure ont ainsi pu être sinon évités, du
moins surmontés au cours des xixe et xxe siècles de par le monde [5].

La dette publique intérieure a donc ceci de particulier qu’elle
met directement en cause le premier attribut de la monnaie : la
confiance. Aussi, la crise de la dette souveraine, quand la composition
de celle-ci est à forte teneur en dette publique intérieure, se traduitelle
presque systématiquement en crise monétaire. Dans le cas de
certains pays émergents à l’ère de l’économie d’endettement, la perte
de confiance en la monnaie nationale est telle que ceux-ci finissent
par adosser leur monnaie à une monnaie de référence (le dollar par
exemple dans le cas du Mexique à la fin des années 1980) ou à
l’or (cas de l’Argentine à la fin de la décennie 1980). Dans d’autres
cas, les autorités fermèrent les yeux sur l’intrusion d’une monnaie
étrangère dans les transactions locales ou même acceptèrent et
facilitèrent la détention d’actifs en monnaie(s) étrangère(s) (ouverture
de comptes devises pour les résidents dans le cas de l’Algérie sous
le gouvernement réformateur en 1990). Enfin, un marché parallèle
de devises se développe dans d’autres cas, où la dépréciation de la
monnaie nationale se reflète immédiatement dans la baisse du taux
de change, alors que les prix des produits domestiques peuvent ne
pas connaître d’augmentation proportionnelle à cette dépréciation.
Mais ces situations sont pour l’essentiel caractéristiques des défauts
sur la dette publique extérieure dont il nous faut dire à présent
quelques mots.

La dette publique extérieure mobilise l’attribut d’universalité
de la monnaie dans sa dimension transnationale. Tout comme la
dette publique intérieure, elle a une longue histoire. Les défauts
sur la dette extérieure ne sont pas l’apanage des pays émergents
ni même de pays sous-développés confrontés à la contrainte de
ressources : l’Allemagne, l’Angleterre, l’Autriche, l’Espagne, la France
et le Portugal connurent des défauts sur la dette extérieure dès le
xive siècle – certains, comme l’Espagne et la France, ayant vécu une
série de défauts entre le xive et le xixe siècles. Dans le cas des pays
émergents d’Amérique latine, les défauts sur leur dette extérieure
étaient en rapport direct avec les guerres d’indépendance, tandis
que, à l’inverse, d’autres pays comme l’égypte se virent confisquer
leur indépendance à cause du défaut sur leur dette extérieure [6].

Depuis la fin des années 1970, et en dépit de la très forte revalorisation
des prix des matières premières dont sont pourvoyeurs les pays émergents
et les pays nouvellement indépendants d’Afrique, le recours à la dette
extérieure était devenu systématique, alimenté par les énormes excédents
des banques occidentales en pétrodollars et autres devises fortes. Les
défauts sur la dette publique extérieure ont commencé à poindre dès qu’il
y eut un retournement de situation sur le marché mondial des matières
premières ; certains de ces défauts s’étant transformés en de graves
crises de la dette souveraine dont les effets pervers se sont répercutés sur
d’autres pays de la région – voire sur des pays d’autres continents. Ce
fut en particulier le cas de la crise mexicaine de 1982 à partir de laquelle
on peut dater la fin de l’ère d’abondance des ressources en provenance
de l’étranger et le début de l’interférence du Club de Londres et du Club
de Paris – via le FMI – dans la gestion des budgets des États.

Comme indiqué supra, la crise de la dette publique extérieure
s’est traduite sur le plan intérieur par des perturbations monétaires
majeures qui se sont conclues par des dépréciations rampantes
des monnaies locales. Des dévaluations ont eu lieu ensuite, qui ont
laminé le pouvoir d’achat de ces monnaies et incité le FMI (2009) à
élaborer une « stratégie de gestion de la dette à moyen terme – SDMT »
à l’adresse des autorités des pays endettés. La question du taux de
change est placée au coeur de cette stratégie puisque « dans certains
pays (par exemple l’Argentine, le Brésil, l’Indonésie et la Russie), le
risque de change fut un déterminant clé dans l’accroissement des
niveaux de la dette [alors que] dans le cas particulier des pays à
faible revenu (PFR), les développements des taux de change effectif
réel, souvent provoqués par des tendances défavorables des prix
des matières premières, ont contribué de façon significative aux
problèmes de vulnérabilité de la dette » (p. 1).

Comme on peut le comprendre à la lecture de ce qui précède,
la crise de la dette souveraine a donc aussi pour déterminants des
phénomènes monétaires à l’origine des crises auto-réalisatrices.
Dans quelle proportion ces phénomènes l’alimentent-elles ?, c’est
la question qu’on peut se poser à bon droit. Dans la prochaine
section nous tenterons de faire le point sur les déterminants de
la dette souveraine en opérant une distinction entre les politiques
publiques comme source éventuelle de déficits budgétaires et les
phénomènes monétaires et financiers à l’origine des crises autoréalisatrices.

Les politiques publiques à l’épreuve
de la crise de la dette souveraine

L’encours de la dette souveraine d’un pays au cours d’un exercice
est le cumul des emprunts qu’il aura contractés pour combler les
déficits budgétaires annuels, diminués des amortissements de la
dette effectués au cours des exercices antérieurs et augmentés des
intérêts échus non acquittés. Aussi, quand l’encours de la dette
dépasse un certain seuil – 60 % du PIB dans le cas des pays de
l’UE signataires du Traité de Maastricht – le problème des déficits
budgétaires suscite-t-il inquiétudes et débats. Les politiques
publiques que les gouvernements mettent en oeuvre sont alors
directement visées par les adeptes de l’équilibre budgétaire. Ce
sont en premier lieu les politiques publiques les plus en prise
sur le bien-être de la population qui sont prises pour cibles :
éducation, logement, santé, etc., pour ne rien dire des transferts
sociaux au profit des retraités, des chômeurs et des franges
démunies de la population. Dans l’esprit de l’individualisme
méthodologique revisité par le courant néolibéral, l’État social
de type keynésien est pris pour cible et l’on cherche à revenir à
une perception néosmithienne d’un « laissez faire laissez passer »
dénué d’attaches morales où tout peut prendre la forme de
marchandise [Amarouche, 2011].

Mais l’impossibilité virtuelle des manipulations monétaires
en situation d’interconnexion mondiale des marchés financiers est
une raison majeure de nonréduction en interne de la crise de la
dette souveraine, en dépit des tentatives partiellement abouties de
réduire les politiques publiques à la portion congrue.

Aux origines des politiques publiques

La crise de la dette souveraine de nombreux pays de l’OCDE a
amorcé un cycle de commentaires catastrophistes qui aboutissent à
la nécessité de revoir de fond en comble – voire d’annuler purement
et simplement – les politiques publiques mises en oeuvre par les
États dans le cadre du consensus classico-keynésien [Hugon, 1999]
adopté après la Deuxième Guerre mondiale par la plupart de ces
pays. Ces commentaires s’inscrivent dans la ligne des analyses
néolibérales inspirées par Robert Barro selon lequel les agents,
considérant le déficit public comme un impôt différé, diminueraient
leur consommation (privée) à proportion de l’augmentation de la
consommation publique permise par le déficit ; ce qui annulerait les
effets attendus des politiques d’inspiration keynésienne de relance
par la dépense publique [Grenier, 2006, p. 14].

Sans doute doit-on imputer à Keynes la théorisation de
l’interventionnisme étatique sous la forme de politiques publiques
destinées à relancer la consommation et à redonner ce faisant un
nouveau souffle à l’économie en période de récession, voire de crise
ouverte. Mais la logique des circonstances étant toujours plus forte
que la logique des intentions [Fursov, 2012], il faut bien admettre que
le mouvement ayant conduit à l’adoption des politiques publiques
dans tous les pays occidentaux, puis dans les pays émergents, est
parti des États-Unis avant même la publication de la Théorie générale
et qu’il ne peut être dissocié d’une conjoncture historique incitant
à « un interventionnisme à la fois plus direct et plus structuré de
l’État dont le New Deal fut l’expression exemplaire » [Duran, 2010,
p. 290].

Cependant, plus que la Grande Dépression, ce sont les
destructions causées par la Deuxième Guerre mondiale qui ont
obligé les États à devenir des acteurs de policy process, quitte à ce
que leurs programmes connussent des déconvenues parce qu’ils
reposaient sur des prémisses fausses ou qu’ils fussent en partie
détournés de leurs finalités par de puissants lobbies. Toujours
est-il que, grâce à ces programmes, les années 1950 et 1960 ont
enregistré une croissance économique sans précédent dans les
pays occidentaux, en même temps qu’elles virent se produire
des mutations profondes dans les systèmes socioéconomiques à
vocation nationale, devenus tellement productifs que le marché
domestique ne leur a plus suffi pour se maintenir aux niveaux de
croissance qu’ils avaient atteints. Si, par suite, à partir des années
1970, l’ensemble du monde occidental s’est trouvé affecté par
une crise « dont l’ampleur va marquer durablement le devenir des
sociétés industrielles et remettre gravement en question le modèle
même de l’État providence qui avait fondé jusque-là la légitimité de
l’intervention étatique » [Duran, op. cit., p. 293], c’est parce que les
frontières des possibilités de croissance domestique furent atteintes,
tandis que se profilaient de nouvelles possibilités de croissance à
l’international, pour autant du moins que le système économique
de chaque pays fût apte à affronter une rude concurrence où de
nouvelles puissances industrielles (NPI) commençaient à émerger.

Dans ce contexte, les politiques publiques à contenu social
peuvent devenir un frein à la croissance si leur seule finalité est
d’opérer des transferts sociaux en faveur des franges de la population
inactives ou défavorisées. Car la perte de pouvoir d’achat qui
résulterait pour les industries domestiques de l’arrêt des subventions
à la consommation des ménages concernés serait largement
compensée par le gain en force de vente des industries exportatrices
du pays qui, de surcroît, peuvent occuper in situ le marché des pays
émergents en y développant l’investissement direct (IDE). Grâce à
une libéralisation toujours plus poussée du commerce mondial en
situation d’inégalités de développement des pays en concurrence,
grâce aussi à l’inversion de la structure sectionnelle des économies
nationales en faveur de la section I au sens de Marx (qui intègre
l’industrie de l’armement dans la croissance de laquelle les guerres
trouvent un mobile à défaut de justification), la perspective d’une
compensation toujours plus forte du déficit de demande effective
domestique par un surcroît de demande effective externe a produit
un retournement de perception des élites dirigeantes des pays
occidentaux ; lequel s’est traduit dans un double rejet :
–* le rejet de l’État providence – voire de l’État tout court – assimilé
à un simple agent dépensier 7 ;
–* le rejet de la hausse des impôts pour financer les déficits et réduire
en conséquence la dette souveraine.

Ces deux postures élitaires, marquées du sceau de l’idéologie
néolibérale adossée à la philosophie hayekienne de la liberté,
eurent pour conséquence logique que la réduction des déficits
budgétaires ne pouvait être obtenue que par la contraction des
dépenses gouvernementales en faveur des franges de la société à
faible revenu, celles-ci n’étaient plus porteuses d’un même niveau
de demande effective que par le passé pour contribuer au maintien
de la croissance. Bien avant la crise de la dette souveraine des
pays occidentaux dont ceux de la zone euro semblent les plus
affectés, des pays émergents ont expérimenté le remède consistant
à tailler dans les dépenses publiques en visant tout spécialement
les chapitres budgétaires les plus en lien avec le pouvoir d’achat
des franges nécessiteuses de la population. Des pays d’Amérique
latine à l’exemple du Mexique, de l’Argentine, etc., d’Afrique à
l’exemple de l’Algérie, etc., ont dû passer par l’exigence du FMI
dite de stabilisation macroéconomique pour bénéficier d’un report
d’échéances sur leur dette souveraine contractée auprès des pays
membres des Clubs de Paris et de Londres. Mais la crise ayant
atteint le coeur du système capitaliste, il ne pouvait être autrement
que de faire valoir les mêmes arguments contre les populations
bénéficiaires de certains volets des politiques publiques dans les
pays de l’OCDE eux-mêmes. Or la crise actuelle a pour partie
sa source dans les décisions des autorités publiques de porter
secours aux banques d’affaires qui ont développé un système de
crédits à base de capital spéculatif et d’actifs toxiques. Comme « il
est dans la nature du capital de faire fructifier sa propre valeur
indépendamment de la reproduction » [Marx, 1969, p. 56], les
effets pervers sur l’économie réelle de la spirale spéculative sont
passés au second plan, jusqu’à ce que la crise se traduise aussi en
fermetures d’usines et en compressions d’effectifs dans la plupart
des pays touchés par la récession.

Dans la mesure où le capital, qu’il soit réel ou fictif, est
donné dans la même monnaie et que la monnaie elle-même fait
l’objet d’attaques spéculatives, la crise de la dette souveraine est
aggravée par la perte des attributs de confiance et de souveraineté
de la monnaie. Dans le cas de la zone euro, des contradictions
interétatiques se font jour de surcroît, empêchant les États les plus
endettés (ceux de l’Europe du Sud) d’user des procédés classiques
de réduction de la dette par la dépréciation de la monnaie – sur
laquelle ils n’ont plus de souveraineté – ou par une intervention
massive de la Banque centrale sur les marchés financiers pour
contenir l’emballement des taux d’intérêt. Si on ajoute à cela
que, bien que la dette publique ait joué un rôle crucial dans la
prospérité des nations, la raison première qui a toujours conduit
à un endettement massif est le besoin de financement de la guerre
[Stasavage, 2011], on peut se faire une idée des causes autres que
les politiques publiques d’accroissement de la dette souveraine. Mais
l’idéologie de l’efficacité des politiques publiques les a dissimulées
jusqu’à l’éclatement de la crise financière internationale où elles se
révélèrent au grand jour.

L’efficacité des politiques publiques : entre nécessité et ambiguïté

Venons-en donc à la question de l’efficacité des politiques
publiques. Celle-ci n’est évidemment pas neutre socialement :
la logique à la base de l’intervention des pouvoirs publics
dans les champs social et économique consiste à réduire les
dysfonctionnements socioéconomiques susceptibles de remettre en
cause sinon le consensus social – toujours mouvant en fonction
des conjonctures – du moins la cohésion sur le moyen-long terme
des strates de la société formant le corps social. Aussi n’obéitelle
guère, dans son principe fondateur, à la loi du marché, en
dépit des imbrications des sphères marchande (économie privée)
et non marchande (économie publique) de l’économie. La sphère
non marchande étant celle des activités socialisées entrant dans
la reproduction d’ensemble, elle participe de la reproduction
des invariants à la base de la formation sociale. Le recul de
l’économie publique, quand il a lieu, revient donc à recentrer la
reproduction sociale sur certains pans de la société au détriment
d’autres. L’exercice est évidemment périlleux dans la mesure où
l’économie publique, dont au moins une partie des strates qui se
nourrissent de l’économie privée tire un substantiel avantage [7],
est située au croisement des rapports entre les forces politiques
en présence : l’économie publique – ou ce qui lui tient lieu de
mode opératoire : les politiques publiques – a aussi pour fonction
de produire des externalités publiques [Vianès, 1980] destinées à
soutenir la rentabilité d’activités relevant de la sphère marchande.
Les politiques publiques « véhiculent des contenus, se traduisent
par des prestations et génèrent des effets » [Thoenig, 2010, p. 420]
qu’il n’est pas aisé d’évaluer sans a priori sociaux et politiques –
autrement dit, sans prise de position implicite dans le champ des
conflits sociaux et des luttes d’influence politique. Les politiques
publiques donnent ainsi lieu à une pluralité de significations qui
crée une « situation d’ambiguïté cognitive » [Salais, 2010, p. 131]
pour toute entreprise d’évaluation de leurs performances. Aussi,
est-il toujours politiquement inconfortable pour les autorités d’un
pays d’introduire des réformes dans les politiques publiques sur la
base d’évaluation de leurs performances passées. Si, par suite, en
période de crise de la dette souveraine, de telles réformes s’avèrent
nécessaires, l’attention ne peut rester focalisée sur la viabilité
budgétaire pour tailler dans les dépenses sans « compromettre la
croissance à long terme et les niveaux de vie » [OCDE, 2010, p. 22].

Sur le plan théorique, le curseur se déplace constamment
entre les rôles respectifs de l’État et du marché pour situer le
paradigme de référence [Diarra et Plane, 2012/2, p. 52], mais
l’ambiguïté cognitive demeure, modulée seulement par « la logique
des circonstances ». Dans la version mise au goût du jour par
la Banque mondiale à partir de 1989 sous la dénomination de
« bonne gouvernance », cette ambiguïté reparaît en des termes
qui semblent pourtant relever du bon sens, où il est question de,
« la qualité d’exécution des fonctions régaliennes de l’État dans sa
capacité à dynamiser l’économie, à la stabiliser, à redistribuer les
ressources sous une forme permettant d’atténuer les inégalités de
revenus » (ibid). Mais en pratique, l’institution de Bretton-Woods
a réussi la gageure de concilier État et marché en élargissant les
domaines d’intervention du premier pour y inclure la conduite de
la libéralisation de la sphère des biens et services dans les pays en
transition et celle des facteurs de production (flexibilité du marché
du travail) dans les pays à économie de marché constituée. Pour
les premiers, les programmes d’ajustement structurel que le FMI
leur a dictés en étaient souvent réduits à n’être qu’une « politique
de stabilisation de long terme » comme le faisaient remarquer
Corbo et Fischer dans une étude pour le compte de la Banque
mondiale [8]. Pour les seconds, c’est par un transfert de charge de
l’impôt sur le revenu (impôts directs) vers la consommation (impôts
indirects) que les organismes multilatéraux (FMI, OCDE) veulent
relancer la croissance [OCDE, 2010, p. 22] parce que la croissance
ne dépend plus de la consommation domestique autant qu’avant
la libéralisation planétaire. D’où leurs recommandations visant
à flexibiliser le marché du travail pour rester dans la course à la
compétitivité internationale.

Les causes autres que les politiques publiques de la crise de la dette souveraine

L’accroissement exponentiel de la dette souveraine de nombreux
pays occidentaux et de certains pays émergents soulève depuis
la crise financière internationale de 2007-2008 de lancinantes
interrogations. Pour irrationnelle qu’elle puisse paraître [Bernestein,
2011, p. 29], la peur qu’elle suscite n’en est pas moins justifiée tant
le niveau de la dette est élevé : 60, 70, voire 100 % du PIB ou plus.
Reste pourtant que, ainsi que le souligne Jared Bernstein, le ratio
dette/PIB n’est pas le plus pertinent pour juger de la soutenabilité
de la dette souveraine : « nous n’avons pas à refinancer la dette
publique tout entière chaque année » écrit-il à l’appui de cette
assertion (op. cit. p. 33). Ce qu’il y a lieu de considérer en revanche
comme le motif implicite de la peur, c’est la nature des causes de
son déclenchement ou de son aggravation.

Indépendamment même des baisses inconsidérées d’impôts
dont Jared Bernstein dit que (dans le cas des États-Unis) celles
opérées par G.W. Bush « ajoutent 20 % de dette cette année [2012]
et, si elles restent en place, 34 % d’ici à 2019 » (p. 32), on peut
recenser au moins deux types de motifs autres que les politiques
publiques pouvant conduire à une crise de la dette souveraine.
–* Le premier à trait à la perte de confiance des investisseurs ;
–* Le second à la dégradation des fondamentaux de l’économie
consécutive à la globalisation financière.

Reprenons ces deux motifs par le menu.

  • La perte de confiance des investisseurs

C’est au moyen de l’intérêt et des manipulations du change
que l’oligarchie financière, qui a partie liée avec le pouvoir politique,
assure sa mainmise sur les affaires de l’État. Stasavage avait déjà
souligné l’intérêt, dans les régimes anciens de l’Europe médiévale,
de la présence d’une oligarchie marchande au sein des institutions
publiques et municipales : « la meilleure recette pour avoir accès
au crédit est de posséder une oligarchie marchande » écrit-il (p. 2).
Cet intérêt ne s’est jamais démenti depuis. Bien au contraire : les
intérêts de l’élite des affaires ont joué un rôle déterminant dans
l’amoncellement des dettes. « L’industrie financière américaine,
écrit Johnson [2009, p. 55], a choisi de renforcer son pouvoir
politique en accumulant une sorte de capital culturel au moyen
d’un système de croyances » (p. 56) ; la principale de ces croyances
étant la foi indéfectible dans les vertus du marché (financier), fûtil
complètement déconnecté de l’économie réelle. Selon Cohen et
Portes [2003, p. 11], le poids de la composante « intérêt et crise de
change » dans l’amoncellement des dettes de l’État peut représenter
jusqu’à 40 % dans le cas de certains pays endettés.

Préludant à ce que la littérature économique a retenu des
développements théoriques consécutifs à la crise de l’État providence
sous la dénomination de « Consensus de Washington », l’industrie
financière états-unienne a profité en effet de la volatilité accrue des
taux d’intérêt pour rendre le commerce des obligations très lucratif.
On connaît la suite des événements : abrogation de la loi américaine
de 1933 dite Glass-Steagall Act qui interdisait aux banques de dépôt
les activités d’investissement, dérèglementations bancaires ayant
conduit à des montages financiers de plus en plus sophistiqués
sous le nom de titrisation – en fait la transformation en actifs
fictifs de crédits hypothécaires quasiment irrécouvrables – volatilité
internationale des capitaux, falsification de comptes de grandes
entreprises et de sociétés financières, distribution de stock-options
sans commune mesure avec les résultats comptables dûment
certifiés, apparition de comptes off shore et, last but not least, abandon
des systèmes de comptabilité fondés sur les valeurs historiques au
profit d’un système universel fondé sur les valeurs de marché dit
IFRS (International Financial Reporting Standards). Paraphrasant
Barry Eichengreen [9], on peut dire des banques primaires qu’elles
se trouvèrent dans l’obligation de construire une pyramide toujours
croissante de superstructure de crédits sur une base de dépôts assez
étroite. Rien d’étonnant donc à ce que la « surenchère, avec l’accord
tacite du gouvernement, a[it] conduit à l’inévitable effondrement [de
la confiance] » [Johnson, 2009, p. 55].

Quand la crise financière internationale s’est produite au milieu
de l’année 2007, ce furent d’abord les banques qui souffrirent de
la perte de confiance des investisseurs, laquelle a vite fait de se
propager, par le biais des créances interbancaires. La faillite de la
banque Lehman Brothers sonna comme un avertissement pour les
marchés financiers ainsi que pour le gouvernement des États-Unis.
Celui-ci intervint donc massivement pour racheter ou garantir les
crédits hypothécaires dits toxiques dont les banques se sont fait
d’énormes stocks à la faveur de la bulle immobilière du début des
années 2000. Ainsi que le dit fort joliment Simon Johnson, « on se
persuada que ce qui était bon pour Wall Street l’était aussi pour les
États-Unis » (p. 57) et la dette bancaire put ainsi être partiellement
transformée en dette souveraine sans effet négatif notable sur la
confiance dans le dollar ni sur la souveraineté de la monnaie des
États-Unis, étant donné le privilège exorbitant, selon l’expression
du général de Gaulle, dont jouissait ce pays ; privilège qui revenait
pratiquement à battre monnaie en partie pour le reste du monde.

Il en va tout autrement des autres pays occidentaux qui, soit
parce qu’ils sont intervenus massivement pour racheter de la dette
bancaire, soit parce que les fondamentaux de leur économie s’étaient
dégradés, ont vu leur dette publique s’accroître inconsidérément
sans qu’ils aient la possibilité d’intervenir souverainement sur les
marchés financiers selon les procédés classiques évoqués supra.
Ne leur restait alors que de renflouer les banques en rachetant
les crédits hypothécaires réputés les plus toxiques et, ce faisant, à
accroître du jour au lendemain leur dette souveraine de plusieurs
points de pourcentage du PIB.

Confrontés à l’imminence d’un défaut sur leur dette, certains
pays de la zone euro, à l’exemple de la Grèce, ont vu les taux d’intérêt
de celle-ci grimper en flèche, accélérant de la sorte l’avènement de
la crise auto-réalisatrice.

  • La dégradation des fondamentaux de l’économie consécutive à la globalisation financière

Bien que l’économie mondiale ait trouvé, dans la libéralisation
des marchés et dans la dérégulation, de puissants moteurs de
croissance après la crise de la fin des années 1970, la situation au
début des années 2000 n’en a pas moins été paradoxale en ce sens
que la prospérité annoncée (soutenue par une élévation jamais égalée
de la productivité dans les pays les plus développés) était d’une
fragilité inouïe en raison de la déconnexion grandissante de la sphère
financière de l’économie réelle. D’importants excédents commerciaux
et de forts taux d’épargne ont permis une augmentation des réserves
monétaires mais celles-ci n’ont pu être que partiellement stérilisées
tandis que se profilait déjà, à travers l’éclatement de la bulle Internet,
les limites d’un modèle de croissance fondé sur une économie de
services. Un accroissement sans précédent de la masse monétaire
par rapport au PIB dans les six grands pays ou zones monétaires
représentant les principaux centres de croissance mondiale a donc
pu être observé à partir de 2002 [Arthus et al., 2008, p. 15] [10]. Si,
par suite, dans les pays de l’OCDE, l’accroissement inexorable du
chômage a constitué un frein à la croissance tout en remettant en
question le bienfondé de l’approche orthodoxe de la relation emploi/
croissance, la faiblesse du pouvoir d’achat des salariés et des autres
franges de la population dans certains pays hors OCDE a joué le
même rôle, en dépit des taux d’épargne élevés que certains – à l’instar
des BRICS – ont pu réaliser : « le PIB a reculé de quatre points de
pourcentage en 2009, la production industrielle et le commerce
mondial se sont fortement contractés […] et le chômage a dépassé
10 % dans nombre de pays de l’OCDE » [OCDE, 2010, p. 18]. Dans
le prolongement logique de l’éclatement de la bulle internet, celui
de la bulle immobilière provoqué par la crise des subprimes a mis
en évidence les déséquilibres entre les sphères réelle et financière
des économies et « contribué à affaiblir les finances publiques »
[OCDE, 2012/9, p. 35] en situation de crise de la dette souveraine.
Le recours à l’emprunt pour payer le service de la dette devint une
nécessité pour de nombreux États, alors même que ce procédé ne
faisait qu’aggraver la crise auto-réalisatrice de la dette.

Conclusion

L’analyse qui précède a tenté de montrer le poids des
phénomènes monétaires dans la crise de la dette souveraine des
pays aujourd’hui lourdement endettés. Ces phénomènes ont été
dissociés des facteurs relevant des politiques publiques qui, dans
la conjoncture internationale marquée du sceau de la libéralisation
et de la globalisation financière, peuvent avoir un impact effectif
sur les déficits budgétaires.

L’analyse a montré l’importance des crises auto-réalisatrices en
situation de surendettement des États, surendettement qui, depuis 2007,
s’est alimenté du rachat par les pouvoirs publics des titres toxiques
que les banques ont créés de toutes pièces dans la phase ascendante
du cycle économique nourri par les bulles Internet et de l’immobilier.

Cependant, c’est moins le retournement du cycle, après
l’éclatement de la bulle immobilière, que la logique même du
capital porteur d’intérêt, forme fétichisée du rapport économique
fondamental sous le capitalisme en tant qu’il apparaît comme rapport
de l’argent à lui-même, qui est la source du surendettement des
États puis de la crise de la dette souveraine. Dans ces conditions,
la réforme du système financier mondial est-elle envisageable ?
Sans doute. Mais pas tant que la crise financière internationale,
dont celle de la dette souveraine est partie intégrante, n’ait produit
tous ses effets sur l’économie réelle.

par Ahcène AMAROUCHE (*)
“Recherches internationales,” n° 94, janvier-mars 2013

(*) École nationale supérieure de statistique et d’économie appliquée (ENSSEA), Alger


Bibliographie

  • Aglietta M., doc. PDF non daté, Monnaie et histoire : les univers des monnaies métalliques jusqu’à la Première Guerre mondiale. Pour le Collège international de philosophie.
  • Aglietta M., 2007, vol. II, « Universalité et transformations de la monnaie : la nature des crises monétaires », in (Théret B.), “La monnaie dévoilée par ses crises”, éd. de l’EHESS, Paris.
  • Aglietta M., Orléan A., 1998, La monnaie souveraine, éd. Odile Jacob, Paris.
  • Alary P., 2009, « La genèse de la monnaie, les théories économiques face aux enseignements de l’anthropologie et de l’histoire », Revue Cahiers d’économie politique, n° 56, Paris.
  • Amarouche A., 2012, « Les nouveaux paradigmes de l’économie libérale et la marchandisation du social », Revue des politiques publiques, Université d’Alger III.
  • Arthus P. et all., La crise des subprimes, rapport, La Documentation française.
  • Bernstein J., 2012, Repenser la dette, in « Quelle théorie économique d’après-guerre », Revue L’économie politique, juillet.
  • Braudel F., 1986, Civilisation matérielle, économie et capitalisme, T2 : Les jeux de l’échange, éd. A. Colin.
  • Burdeau G., 1970, L’État, éd. Seuil.
  • Carré G., 2007, « Stratagèmes monétaires : les crises du numéraire en métal précieux dans le Japon du xviiie siècle », in (Théret B.), La monnaie dévoilée par ses crises, éd. de l’EHESS, Paris.
  • Carrié J.M., 2007, « Premières monnaies frappées, premières crises de confiance », in (Théret B.) La monnaie dévoilée par ses crises, vol. I, éd. de l’EHESS, Paris.
  • Cohen D., Portes R., 2003, Crises de la dette, prévention et résolution, La Documentation française.
  • Corriéras J.-L, 1996, « Fraude fiscale et pratiques monétaires au MoyenÂge : le cas de l‘évaluation et du paiement du cens », Revue Économies et Sociétés n° 4-5, p. 248-249.
  • Diarra G., Plane P., 2012/2, « La Banque mondiale et la genèse de la notion de bonne gouvernance », Mondes en développement, n° 158, p. 51 à 70.
  • Duran P., 2010, « Genèse de l’analyse des politiques publiques », in Laurie Boussaguet et al. Dictionnaire des politiques publiques, p. 289-299, éd. Presses de Sciences po, Paris.
  • Eichengreen B., 1997, L’expansion du capital, une histoire du système monétaire international, éd. l’Harmattan.
  • Ferguson N., L’Irrésistible Ascension de l’argent. De Babylone à Wall Street, Paris, Éd. Saint-Simon, 2009.
  • FMI, 2009 (24 février), « Stratégie de gestion de la dette à moyen terme – SDMT », doc. PDF.
  • Fontaine J.-M., 1990, Mécanismes et politiques de développement économique, du « big push » à l’ajustement structurel, éd. Cujas.
  • Fursov A., 2012, Entretien accordé à Horizons et Débats, 11 septembre.
  • Granjean C., 2007, « Guerres et crise de la monnaie en Grèce ancienne à la fin du ve siècle avant J.-C. », in (Théret B.), La monnaie dévoilée par ses crises, éd. de l’EHESS, Paris.
  • Grenier (J. -Y.), La Dette publique dans l’histoire, Paris, CHEFF, 2006.
  • Hugon (Ph.), 1999, « Le consensus de Washington en question », Revue Tiers-Monde, n° 137, janvier-mars 1999.
  • Johnson (S), 2009 /5, « Coup d’État en douce », Le débat, n° 157, p. 52-66.
  • Marx K., 1969, Le Capital, L III T3, éditions sociales, Paris.
  • OCDE, 2010, Répondre à la crise en préservant la croissance à long terme.
  • OCDE, 2012/9, Une zone euro viable, études économiques de l’OCDE, p. 31 à 63.
  • Reinhart C., Kenneth Rogoff K., Cette fois, c’est différent. Huit siècles de folie financière, Paris, Pearson, 2010 [éd. originale : 2009].
  • Salais R., 2010/1, « Usages et mésusages de l’argument statistique : le pilotage de la politique publique par les performances », Revue française des affaires sociales.
  • Smith A., 1976, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, éd. Gallimard, Paris.
  • Stasavage D., 2011, States of Credit, Size, Power, and the Development of European Polities, Princeton, Princeton University Press.
  • Théret B., 2007, « La monnaie au prisme de ses crises d’hier et d’aujourd’hui », in (sous la dir. de Théret B.), La monnaie dévoilée par ses crises, éd. de l’EHESS, Paris.
  • Théret B., 1992, Régimes économiques de l’ordre politique, esquisse d’une théorie régulationniste des limites de l’État, éd. PUF, Paris.
  • Thoenig J.-C., 2010, « Politique publique », in Boussaguet L. et al., Dictionnaire des politiques publiques, éd. Presses de Sciences po, Paris.
  • Vianès A., 1980, La raison économique d’État, éd. Presses universitaires de Lyon.
  • Yildirim Z., 2007, « Crise monétaire, mutation sociale et consolidation dynastique dans l’empire ottoman (1586-1680) », in (sous la dir. de Théret B.) La monnaie dévoilée par ses crises, éd. de l’EHESS, Paris.

[1Dans le langage de l’économie orthodoxe, le terme investisseur désigne aussi
bien le détenteur d’actifs réels, susceptibles d’être investis productivement,
que le détenteur d’actifs financiers, pouvant donner lieu à des placements
spéculatifs.

[2M. Gonon, Le Moyen-Âge, archives départementales de la Loire, cité par
J.L. Corriéras in : « Fraude fiscale et pratiques monétaires au Moyen Âge:le cas de l’évaluation et du paiement du cens », Économies et Sociétés,
n° 4-5, 1996.

[3A. Smith écrit au sujet des dettes publiques accumulées par les souverains
de l’Europe : « Les besoins de l’État rendent le gouvernement très disposé,
dans la plupart des occasions, à emprunter à des conditions extrêmement
avantageuses pour le prêteur ». Il ajoute une page plus loin la phrase mise
en exergue dans la présente recherche.

[4L’expression est de Reinart C. M. et Rogoff K. S. (2010, p. 13).

[5Voir échantillon, tableau n° 8.1 de leur ouvrage susmentionné p. 140.

[6« Gladstone n’aurait sans doute pas ordonné l’invasion de l’égypte en 1882
si le gouvernement égyptien n’avait pas menacé de refuser d’honorer sa
promesse envers les détenteurs d’obligations, lui-même au premier chef »
(Ferguson [2011] p. 96).

[7Il suffit de penser au poids des marchés publics dans le maintien en
activité d’entreprises privées – voire de secteurs industriels tout entiers.

[8« Adjustment lending revisited : policies to restore growth », Washington,
World Bank. Cité par J.-M. Fontaine, 1990, p. 493.

[9L’auteur écrit en effet au sujet de la tendance à l’expansion du capital
de la période d’après-guerre : « Les banques centrales se trouvèrent
dans l’obligation de construire une pyramide toujours croissante de
superstructure de dettes sur une base d’or monétaire assez étroite » (p. 86).

[10De 18-20 % en moyenne sur la période 1980-2000, ce rapport est passé
à 26 % à partir de 2002 selon les auteurs.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

  • Lien hypertexte

    (Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)