Accueil > MOUVEMENT COMMUNISTE ALGERIEN > Décès de Hamid Aït Amara

Décès de Hamid Aït Amara

Hommage par Omar Bessaoud

jeudi 26 novembre 2009

De Omar Bessaoud (Master Recherche CIHEAM – IAMM, Montpellier) parvient le message suivant qui annonce à tous les amis et connaissances du défunt :

La famille de Hamid Aït Amara rentre demain sur Alger. La soirée de demain jeudi 26 novembre sera consacrée à la famille mais vendredi et samedi ils seront chez eux pour recevoir les condoléances des amis d’Alger, universitaires et autres collègues et amis qu’il comptait à Alger. Voudriez-vous bien diffuser l’info !

Par la même occasion, Omar Bessaoud apporte son témoignage sur l’itinéraire de chercheur militant de son camarade et ami Hamid Aït Amara.

Chers amis,

C’est avec douleur que je vous annonce le décès de notre ami Hamid Aït Amara le mercredi 11Novembre 2009 à la suite d’une longue maladie. Hamid avait décidé peu avant de cesser les traitement qu’on lui dispensait pour un cancer de la plèvre. Il a exprimé la volonté d’être enterré à Montpellier car c’est là que vivent ses enfants et ses petits enfants. C’est avec courage et beaucoup de sérénité qu’il aura vécu les derniers moments. Hamid fut un intellectuel exemplaire, intransigeant sur les principes et fidèle à ses engagements pour une Algérie de progrès, de justice(il n’a pas cédé d’un pouce sur l’utopie socialiste à laquelle il croyait fermement). Il est parti avec la douleur de l’Algérie dans le coeur et ses activités ses dernières années. Ses obsèques ont été émouvantes et nous avons eu l’occasion de lui rendre hommage. Hamid était discret sur sa vie personnelle. Il était originaire d’une localité proche de Tmzirit Il Matten en petite Kabylie. Il s’est engagé très jeune dans le combat libérateur du pays. Arrêté par l’armée française en 1957 puis interné à Ksar Tir prés de Sétif, il a rejoint la fédération de France du FLN où il a continué le combat libérateur. Ses amis et compagnons de lutte -le Pr Mustapha Mazouni et Hachemi Boukari son ami d’enfance de Sétif- ont évoqué lors de l’hommage funèbre les souvenirs de cette glorieuse époque.
Il a repris ses études après l’indépendance du pays (Ecole Pratique des Hautes Etudes de Paris où il soutenu sa thèse sur l’Autogestion en Algérie qui fait encore référence pour ceux qui engagent des travaux sur les formes d’organisation de l’agriculture algérienne). Après quelques années passées au sein du ministère de l’agriculture (son directeur de thèse Desroches l’ayant fortement certainement influencé, il s’occupait de promotion de la coopération agricole -"économie solidaire" selon la terminologie d’aujourd’hui), il a rejoint l’Institut d’agronomie d’Alger puis (près des démêlés syndicaux avec le directeur de l’INA de l’époque- Mourad Benachenou) puis la faculté de droit et de sciences économiques par la suite. Nous savons quel a été son rôle en tant qu’universitaire dans la défense de la Réforme Agraire, de la défense d’une base industrielle pour l’Algérie ; il s’était dressé ces dernières années (de nombreux articles de presse en témoignent) contre l’économie de la rente - faite de prédation et de soumission à une bourgeoisie paresseuse s’enrichissant alors que la Nation s’appauvrit- comme alternative stratégique à l’économie nationale . Il fut un homme fier, intransigeant, honnête est sans concession pour ceux qui renonçaient à un avenir socialiste pour le pays. Il vient de sorti r un livre -testament ("le futur alimentaire de l’Algérie") qui résume je crois assez bien les thèses sur l’agriculture algérienne - mais pour les agricultures des pays en développement- qu’il a défendu dans les multiples rencontres rencontres scientifiques, séminaires ou débats publics. Il a formé et accompagné dans leurs travaux de nombreux étudiants (dont moi même qui l’ai rencontré en 1973), à Alger mais aussi ailleurs et en particulier en Afrique (il fut professeur associé au Burundi) où il côtoya l’économiste Samir Amin. Deux livres furent écrit pendant le séjour africain (l’un avec Founou Tchuigoua "l’agriculture africaine en crise..." et l’autre "l’agriculture méditerranéenne et les rapports nord-sud" préfacé par Samir Amin) . Ce fut un intellectuel soucieux ces derniers temps de l’avenir de l’Algérie, pays fragilisé par les intégrismes religieux, les régionalismes ou par une gestion politique autoritaire et autocratique. Démocrate et républicain accompli il fut un animateur actif du comité des citoyens pour la défense de la république (CCDR) mais aussi un membre infatigable du forum social maghrébin. Son obsession était tournée vers une question majeure qui était celle du rôle crucial que devait jouer les intellectuels algériens ou les élites dans la reconstruction du lien social , de son lien avec la société civile afin de sortir l’Algérie de la crise sociale et politique dans laquelle elle est plongée depuis plus de deux décennies. Cette obsession qui l’habitait l’avait conduit à créer en 1991, une association de chercheurs en science sociale (l’association algérienne pour la recherche en Science sociale -AADRESS- dont il fut le 1er président et l’actuel président d’honneur). Cette association se replia à Montpellier entre 1993 et 1997 où Hamid fut accueilli à l’Institut agronomique Méditerranéen. Il organisa en s’appuyant sur la solidarité de nos amis français des rencontres scientifiques et 3 universités méditerranéennes d’été où des centaines de scientifiques, d’universitaires et artistes algériens furent invités pour un "temps de respiration" et de "pause" alors que l’Algérie était secouée par une violence sans nom, celle exercée par les intégristes du FIS et de ses émules sur les forces vives du pays . Un dernier mot. Il s’est intéressé aux paysans, aux intellectuels mais le combat des femmes et leur émancipation l’occupa particulièrement . Sid Al Mazif, cinéaste et son compagnon de toujours a mis en images les scénarios écrits ensemble : celui de "Leïla et les autres" qui est devenu un classique du cinéma algérien, "la cause des femmes", la "violence contre les femmes " et "Nana Taous" vieille centenaire qui fréquenta l’école de la République au début su siècle et qui témoigne de son époque réalisé récemment). Je rappelle - pour évoquer une autre facette de Hamid- aussi le film de Théo Robichet sur la "faim dans le monde" réalisé dans les années 1980 et qui dénonçait il y a plus de 20 ans- bien avant la crise de 23008- cette injustice majeure qui fait , qu’en ce siècle fait de progrès techniques et de records de production de denrées alimentaires (2008 et 2009), des hommes, des femmes et des enfants meurent encore aujourd’hui parce qu’ils ne mangent pas leur faim.
Voilà, ce que voulais rappeler pour mémoire et dire à ses amis quelques mots sur sa vie et évoquer "à chaud" quelques fragments de son activité intellectuelle. Le temps du calendrier était trop étroit pour lui, tant les projets d’écriture et de rencontres scientifiques, d’enquêtes et de débats publics venaient bousculer son quotidien. Sa voix nous manquera de même que les questions de société qu’il posait sans cesse alimentant ainsi nos réflexions.
Nous aurons certainement l’occasion de revenir vers vous pour vous associer à un hommage posthume à notre ami Hamid

— OmarBESSAOUD

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

  • Lien hypertexte

    (Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)