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PREMIER ATTENTAT CONTRE L’AVENIR D’UNE ALGERIE DEMOCRATIQUE

AOÛT 1949 : AU-DELÀ DE FERHAT ALI

POUR DES DECENNIES, PRIMAUTE DE LA VIOLENCE SUR LE DEBAT

jeudi 20 août 2009

LE 18 AOUT 1949, à LA SORTIE DE LARBAA NATH IRATHEN, REVENANT LE JOUR DE MARCHE vers taddart-is (son village), Ferhat Ali, vétéran et cadre du mouvement nationaliste depuis l’Etoile Nord Africaine, est victime d’un attentat. Il restera miraculeusement en vie après presque un mois d’hospitalisation à Tizi Ouzou.

Je l’ai revu après cette période à l’hôpital de Mustapha d’Alger où je lui ai donné les soins liés à sa convalescence. Sa poitrine avait été traversée de part en part par un projectile provenant d’un gros calibre. Ses agresseurs n’étaient ni des bandits ni des hommes de main à la solde des officines colonialistes, même si un tel acte faisait l’affaire des officiers du Deuxième Bureau français qui, à l’affût depuis longtemps, se sont frotté les mains de satisfaction.

Il ne s’agissait ni d’un fait divers ni d’un méfait politique regrettable et vite corrigé par ses auteurs. On venait d’assister au premier acte d’une dérive infernale. Pour la première fois dans l’itinéraire du mouvement nationaliste, l’arme d’un militant n’avait pas été tournée contre les forces de l’occupant colonial ou ses valets, mais délibérément contre un compagnon de lutte, un militant intègre, ardemment acquis à la cause patriotique.

Cet évènement, précédé les mois précédents par quelques autres faits tout aussi condamnables mais d’une moindre gravité, a constitué un tournant néfaste. D’une part pour l’immédiat dans la crise appelée faussement berbériste (en fait crise de déficit démocratique dans le parti nationaliste). D’autre part, pour le futur, avec des dégâts incommensurables dans la trajectoire ultérieure de l’ensemble du mouvement national, avant comme après l’indépendance.

Je ne reviendrai pas dans cet article sur les racines et les développements bien antérieurs à l’évènement, qui ont débouché sur cette situation dangereuse. Les faits qui se situent en amont et longtemps occultés, commencent à être mieux connus depuis la dernière décennie. Si besoin était, je pourrais, dans les limites de mon information, répondre à quelques demandes de précisions ou renvoyer à plusieurs de mes interventions passées. Par exemple les entretiens donnés à Ali Guenoun pour son ouvrage « Chronologie du mouvement berbère » ou une série de quatre articles parus dans El Watan en juillet 1998, peu après l’assassinat de Maâtoub Lounès.

Je ne m’attarderai pas trop non plus aux conséquences sur le long terme, bien que ce soit une problématique majeure. Car l’attentat contre Ferhat Ali fut l’acte inaugural et le prototype d’une série de comportements et d’enchaînements similaires qui iront en s’amplifiant. Ils vont miner même les étapes historiques les plus fastes des six décennies suivantes, tout en laissant planer de nos jours un point d’interrogation sur les temps à venir. Là aussi, la liste de ces dégâts est longue et massive, elle est largement connue, même si leurs mécanismes demandent à être encore plus explorés et analysés.

Par contre, dans les limites de cet article, je me limiterai aux répercussions immédiates de l’évènement, d’autant qu’elles sont elles-mêmes très éclairantes.

CURIEUSES CONVERGENCES

Dès le lendemain matin, 19 août, « L’Echo d’Alger », le journal porte parole des colons apparemment mobilisé presque instantanément par les services du Gouvernement Général français, titrait sur la constitution d’un nouveau parti, il lui donnait même un sigle, le « PPK », autrement dit un fantomatique Parti du Peuple Kabyle, dissident du P.P.Algérien.

Le quotidien raciste ne se faisait pas seulement plaisir en prenant son rêve pour des réalités. Il brandissait surtout une arme redoutable dont les autorités françaises escomptaient un double impact : diviser les rangs de sa bête noire le PPA- MTLD par cette rumeur alarmiste, et qui plus est, isoler sa fraction la plus dangereuse selon lui, c’est-à-dire le courant qui n’avait cessé non seulement de préconiser mais aussi de mettre en œuvre une orientation radicalement anticolonialiste.

Les cadres de Grande-Kabylie et en particulier BennaÏ Ouali, avec la nouvelle génération de ce qu’on a appelé le « groupe de Ben Aknoun », n’avaient-ils pas joué un rôle prépondérant pour l’adoption en 1947 de la décision créant l’Organisation Spéciale, l’OS ? Ne continuaient-ils pas à mettre en garde contre maintes défaillances et incohérences qui nourrissaient le désarroi des militants et creusaient un fossé d’incompréhensions entre « légalistes » et « révolutionnaires », au lieu de forger une cohérence et une complémentarité politique entre ces deux volets ? L’occasion était propice pour les stratèges du « GG » (Gouvernement Général) de favoriser les groupes d’influence dans la direction du MTLD qui amorçaient la ligne de « coopération », celle concrétisée plus tard avec le courant colonialiste « rénové » du groupe de Jacques Chevallier à la mairie d’Alger.

Déjà au mois de Septembre de l’année précédente, les services français avaient, comme par hasard, procédé aux arrestations successives de Bennaï Ouali et plusieurs responsables de la tendance radicale, dont Ammar Ould-Hammouda et Omar Oussedik, recherchés jusque là sans succès depuis Mai 1945. Je pense que Hocine Aït Ahmed ne doit d’avoir échappé à ce coup de filet qu’en raison des précautions exceptionnelles qu’exigeaient ses fonctions de premier responsable de l’OS, fonctions très cloisonnées par rapport à l’appareil organique et de direction du MTLD. Peut -être un jour les archives de la police coloniale, si elles ne sont pas escamotées, nous renseigneront sur le secret de ces arrestations, opérées étrangement à un pareil « bon moment ».

Dans tous les cas, objectivement, les services français n’ignoraient pas ce qui bouillonnait dans les milieux militants d’Alger, de Kabylie et d’autres régions du pays ainsi que dans la Fédération MTLD de Paris. Ces services avaient déjà mené leur opération de dévoiement d’« Al Maghreb Al Arabi » qui fut un moment l’organe de presse officieux du MTLD, dirigé par leur agent le Cheikh Zahiri. La mission de ce dernier était de propager nombre de confusions très nocives pour la vocation d’un nationalisme libérateur.

Nul doute que parallèlement, ces services étaient décidés à donner un coup d’arrêt à la volonté affichée du courant démocratique et radical du PPA de proposer la discussion et l’adoption d’un document doctrinal consensuel. Un document dont le manque se faisait cruellement sentir au parti et qui viendrait mettre fin au désarroi et aux flottements dangereux pour la cohésion dans les rangs militants.

Ce document « L’Algérie libre vivra », signé Idir El Watani, paraîtra d’ailleurs en juillet 49, plusieurs mois après l’arrestation de ses initiateurs qui nous avaient encouragé à sa rédaction. Cette parution se fit dans des conditions mouvementées (tentative ratée de s’emparer de la brochure à sa sortie de l’imprimerie, perquisitions brutales aux domiciles ou sièges d’associations, etc.).

DES REACTIONS DOUTEUSES ET CONTRE-PRODUCTIVES

Au lieu d’être saisie par les dirigeants en place du MTLD comme une opportunité pour ouvrir des débats qui auraient été bénéfiques pour tous, le document leur donna le prétexte d’une répression multiforme et d’une campagne de calomnies qui inquiéta fortement les milieux militants.

En même temps, ils mirent à profit les arrestations des cadres en Septembre de l’année précédente pour parachuter en Grande Kabylie une direction plus acquise à leurs visions et pratiques d’appareils. La décision fut prise, en dépit des délégations de cadres et militants de base venus exposer son inopportunité et ses dangers. Ils estimaient que dans des conditions aussi confuses, il fallait différer les remaniements et les subordonner à des explications émanant de tous les acteurs en cause. Devant l’intransigeance de la direction, la protestation s’est durcie ; elle a pris la forme d’un refus d’acheminer les cotisations tant que la direction ne fournirait pas des explications et tant qu’elle ne se tournerait pas vers des discussions et mesures constructives, impliquant notamment la participation des dirigeants arrêtés. C’est sur ce fond de tension, arguments d’autorité menaçante contre demande d’explications, qu’est survenue la vive altercation qui a précédé de quelques heures l’attentat contre Ferhat Ali, celui-ci étant, si je me souviens bien, responsable des fonds du district.

LA DEROBADE FATIDIQUE

On s’attendait, après le communiqué provocateur de l’Echo d’Alger, à ce que la direction du MTLD, dans un sursaut de sauvegarde nationale, publie immédiatement un démenti catégorique. Si c’était trop lui demander que de dénoncer un acte dans tous les cas condamnable, il lui suffisait seulement de dire que le fait relevait d’incidents ou de conflits locaux internes regrettables et n’avait rien à voir avec un quelconque « séparatisme » kabyle.

Pareille démarche aurait été d’autant plus facile que le démenti aurait été aussitôt appuyé et accompagné du soutien des militants et cadres mis en cause pour soi-disant « séparatisme ». Car qui aurait été assez fou pour imaginer dans le contexte de cette époque une position suicidaire de « sécession » kabyle, que même les valets locaux de l’administration française ne soutenaient pas. Au point qu’il y avait déjà belle lurette que la ségrégation arabes/kabyles dans les Assemblées des ex « Délégations financières » avait été supprimée par les autorités françaises. A plus forte raison apparaissaient ridicules et tendancieuses les insinuations selon lesquelles les cadres de Kabylie dont on connaissait le nationalisme algérien ombrageux étaient influencés par les idées du colonialisme. La seule chose réellement positive que ce dernier avait réalisée malgré lui, comme résultat d’un siècle d’occupation, est d’avoir fait lever une génération d’Algériens décidés à enterrer le colonialisme et ses pratiques de division. La preuve n’en avait elle pas été fournie lorsque ces mêmes cadres que la direction fustigeait aujourd’hui avaient organisé à Messali l’accueil le plus extraordinaire de ferveur patriotique qu’il ait jamais reçu à travers ses tournées dans toutes les autres régions du pays ? L’un des couplets originaux de « Ekker a mis Oumazigh » ne glorifiaient-ils pas l’alliance de Allal (al Fassi), Messali, Bourguiba ?

Aussi l’étonnement fut grand, suivi d’inquiétude dans de larges milieux nationaux, de constater que la direction du MTLD ne réagissait pas à la provocation de l’ Echo d’Alger. Face à l’attente générale, elle gardait un silence qui nous apparut très vite comme une dérobade empreinte de calculs et d’étroitesse politicienne, alors que se jouait un problème national d’une gravité exceptionnelle. La direction perdit à ce moment le reste de confiance que gardaient encore sur ce point les militants les mieux informés de la crise, qui espéraient malgré tout la voir intervenir avec une hauteur de vue conforme à l’intérêt général.

Heureusement que sans attendre, une délégation des militants contestataires est allée rendre visite à Ali Ferhat hospitalisé. Elle revint avec une déclaration hautement responsable qui soulignait notamment : « " … Il n’a jamais existé et il n’existera jamais de"P.P.Kabyle", pour la bonne raison qu’il n’y a qu’un peuple algérien dont les éléments, quoique d’origine ou de langues différentes, vivent fraternellement unis dans une même volonté de libération nationale… Pour ma part, j’ai toujours pensé que l’Algérie ne peut être qu’algérienne et que dans notre patrie, toutes les cultures et tous les éléments de notre patrimoine commun méritent le respect et le libre développement..."

Adressé à toute la presse, le démenti ne fut évidemment pas publié par l’Echo d’Alger. Le plus étonnant est que l’organe du MTLD perdit une dernière chance de servir à un moment si crucial l’aspiration des patriotes algériens à l’unité nationale. Seul le quotidien « Alger républicain » publia le 21 août le communiqué intégralement. Fidèle à sa devise, il disait la vérité, rien que la vérité, mais il ne pouvait pas dire TOUTE la vérité. J’ai su à cette période que ses rédacteurs auraient souhaité interviewer les uns et les autres, publier des commentaires qui contribuent à maintenir un climat de confiance entre toutes les composantes du mouvement national et de la société algérienne. ll ne le fit pas, car devant le silence public de la principale formation concernée, son intervention aurait pu être interprété comme une ingérence et une volonté de jeter de l’huile sur le feu.

LA DEMAGOGIE AUTORITAIRE CONTRE LE MURISSEMENT POLITIQUE

Pourquoi ce silence public des dirigeants MTLD autour du grave incident et des données réelles du contentieux, alors qu’en sous-main et dans les appareils internes, les calomnies se déchaînaient, multipliant les invectives, les accusations virulentes de complot séparatiste anti-arabe, anti-islamique etc. ? Quelles étaient les motivations inavouées de certaines composantes de la direction et les raisons pour lesquelles d’autres composantes dans le parti et la société se sont montrées passives ou vulnérables à l’escamotage d’un problème national et démocratique de premier plan ?

Pour mieux le comprendre, il faudrait remonter à longtemps avant l’évènement malheureux du 18 août, aux raisons plus générales qui ont alimenté la dégradation politique interne et qui remontent à plusieurs années Je les évoquerai dans leurs manifestations des mois précédents. Elles déboucheront sur des implications plus concrètes dans les semaines qui ont précédé l’évènement.

Les raisons générales, c’est le pourrissement des pratiques politiques illustré au niveau de la direction par le choix des solutions autoritaires, en lieu et place d’un travail sérieux d’élaboration et de formation politique. Vaste question, qui aurait mérité une étude à part. Je précise que quand je parle de direction, j’entends par là ceux qui étaient en situation de prendre à ce moment là des décisions opérationnelles. Car au sein des acteurs qui se coalisaient ou s’opposaient au sein de la direction, il y avait une grande hétérogénéité et même une conflictualité aussi bien dans leurs inclinations politiques et idéologiques, que dans leurs motivations conjoncturelles.
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Autour du même mot d’ordre d’indépendance, les convictions (ou préjugés) sincères et les calculs de pouvoirs et de prérogatives s’entrecroisaient chez les uns et les autres dans la confusion, y compris parfois dans la tête du même militant ou responsable. Seul un débat tenant compte des aspirations et des inquiétudes saines dans la base militante et la population, aurait pu éclaircir cette complexité, Car quant au fond, la confusion et l’hétérogénéité étaient inhérentes à un mouvement national et à des militants encore en train de chercher leurs repères. Il était encore possible, et c’était le bon moment, de répondre de façon constructive aux attentes des uns et des autres, au lieu de favoriser un climat passionnel en nourrissant ces attentes de slogans démagogiques et de rejets réciproques qui aggravaient les confusions.

La brochure de Idir El Watani, ou une autre plate forme présentée par la direction, auraient pu quelles que soient leurs insuffisances, jouer ce rôle d’effort doctrinal consensuel. Il est significatif que certains dans la direction, à défaut de fournir les aliments attendus, aient préféré briser cette possibilité, pour reprendre quelques années plus tard à leur compte, une fois l’irrémédiable accompli, des pans entiers de « L’Algérie libre vivra ». Trop tard, ce mea culpa à retardement inaugurait une nouvelle pratique qui aura hélas de beaux jours devant elle : produire des documents mirobolants contredits par des pratiques toujours marquées par leur péché originel de 1949 : parlez toujours, je détiens les rênes de l’appareil.

Précisément, le refus du débat, reflet de la maturité générale insuffisante, a débouché sur une situation qui accentuait l’arbitraire des dirigeants nantis des leviers de décision et des moyens de l’appareil exécutif. Ils légitimaient ce privilège auto octroyé par la situation de clandestinité. Jouer sur l’alarmisme était pour eux une façon d’éviter de rendre des comptes sur nombre de problèmes d’orientation et de gestion. Ils ont tranché de manière brutale là où il fallait s’efforcer de dénouer et de déminer le terrain en écoutant tout le monde. D’autres, nombreux, plus hésitants et circonspects, ont subi plus ou moins passivement le climat et les préjugés ambiants et surtout le fait accompli. Plusieurs d’entre eux s’expliqueront plus tard, trop tard, jusqu’à de longues années après avoir constaté les dégâts ou subi eux-mêmes des pratiques similaires. Ils se contenteront, chose déjà positive, d’émettre des doutes et d’affirmer que les torts étaient partagés, que la crise de 1949 aurait pu être dénouée autrement. Seuls deux ou trois resteront irréductibles sur leur point de vue d’alors, déformant les faits et surtout demeurant aveugles aux leçons qu’ont données les décennies suivantes.

MENTALITES ET BATAILLES DE « KOURSIS »,

Le climat et le mode de fonctionnement de la direction favorisaient donc le recours aux ficelles politiciennes, au détriment de la recherche des solutions de fond. Procédé de plus en plus dominant, il fut l’une des raisons de la crise.

Avant de décrire comment ce « mode d’emploi » s’est traduit dans les semaines précédant le mois d’août, je rappellerai en passant que le rôle de « bouc émissaire » du « complot séparatiste » kabyle aura eu aussi pour effet de faire passer à l’arrière plan une autre contestation, celle du Dr Lamine Debbaghine. Sur certains aspects de fond, les points de vue de ce nationaliste de la première heure, intègre et attaché à une conception plus saine et moderne de l’arabité et de l’islamité de l’Algérie, rejoignaient les nôtres. A sa façon et indépendamment de nous, il dérangeait beaucoup les deux pôles qui bien avant les crises du MTLD des années cinquante, étaient en concurrence pour le leadership. D’un côté les bureaux de direction de la rue Marengo, et de l’autre côté Messali, ses fidèles et ses réseaux à partir de sa résidence de Bouzaréah. Beaucoup plus tard, au début des années cinquante, le Dr Lamine sera lui aussi éloigné, victime des pratiques de sérail et des méthodes de règlement en circuit fermé, qui avaient fonctionné si bien contre les amis politiques de Bennaï Ouali.

Abordons maintenant comment, dans ce contexte de dégradation, les particularités de la situation en Kabylie ont été utilisées au cours des semaines qui ont précédé le 18 août par les dirigeants en question, en suscitant et allumant des conflits organiques et d’appareils. De sorte que, sans qu’ils l’aient forcément voulu directement, cela aboutit à un incident tragique et lourd de conséquences. Leur responsabilité politique tient au fait qu’ils souhaitaient la cassure avec les courants démocratiques et partisans de la discussion dans les instances régulières. Passant à côté de l’essentiel, ils ont mis à profit les arrestations des responsables de Kabylie pour des changements organiques qui leur permettent d’asseoir leur autorité en faisant d’une pierre deux coups. Leur calcul était d’opposer les uns aux autres deux courants issus de la région de Kabylie et qui les inquiétaient l’un et l’autre. Les dirigeants d’Alger tournaient ainsi le dos à leur vocation et fonction de dirigeants nationaux qui auraient dû les inciter à tout faire pour rapprocher et unir ces deux courants dans le cadre d’une solution plus globale de sauvegarde nationale.

Leur première bête noire était ceux qu’on a traités de « séparatistes berbéristes » qui en réalité voulaient ouvertement, sans intrigues ni jeux de coulisses, faire avancer le parti vers une base doctrinale sérieuse et des règles de fonctionnement transparentes. Ils voulaient fonder cette base doctrinale et organique sur le triptyque «  Nation cohérente, Révolution active et Démocratie dans le contenu et les méthodes ». Cela supposait entre autres, crime de lèse-majesté, qu’on mette fin à des situations de bricolage dans lequel s’affrontaient sournoisement différents groupes pour privatiser un temple dont ils se considéraient les seuls défenseurs. Les contours de ces groupes d’influence étaient flous et mobiles car les principes invoqués étaient faussés et pollués par les rivalités de pouvoir. D’un côté les surenchères radicales et populistes des uns, plus ou moins illustrées par le groupe Messali et de l’autre côté les signes d’un opportunisme rampant des autres, véhiculé par quelques uns des animateurs pro Chevallier dans le futur groupe des « centralistes ».

La deuxième bête noire de la direction, était constituée par le gros des « maquisards » recherchés, notamment les militants issus de Kabylie ou s’y réfugiant. Considérés avec méfiance par la direction qui les considérait acquis à Bennaï Ouali et ses compagnons, ils étaient en quête de repères politiques depuis que leurs responsables emblématiques et organiques avaient été arrêtés.

DES ACTIVISTES FAIBLEMENT POLITISÉS

D’une façon générale, l’activisme de ces partisans de la lutte « directe » (ils entendaient par là le volet exclusif de la lutte armée), que ce soit en Kabylie ou dans les autres zones géographiques, embarrassait depuis longtemps les courants de la direction qui craignaient des débordements préjudiciables à leurs propres orientations. Il est bien établi que des membres de la direction du MTLD, sans en arriver à remettre en cause ouvertement la décision de création de l’OS, considéraient ces activistes comme un boulet, gênant ou dangereux pour leur démarche penchant davantage vers le légalisme.

Il est vrai qu’à cette époque déjà, la montée au djebel n’était pas dans tous les cas le résultat d’un volontariat et d’une sélection sur la base de critères politiques et de trempe morale, Pour certains, leur montée résultait de motifs pressants de sécurité pour se soustraire à la répression colonialiste. Il est arrivé que Bennaï Ouali et ses compagnons prennent des mesures de vigilance pour brider chez certains de leurs subordonnés des initiatives individuelles mal inspirées ou suggérées par d’autres cercles de la direction de façon irresponsable ou manoeuvrières, qui risquaient de porter tort aux objectifs politiques locaux ou nationaux du mouvement.

C’est justement en mettant à profit ce genre de faiblesses politiques que la direction qui boudait jusque là les maquisards, s’est adressée à certains d’entre eux. Elle les invita à prendre bureaucratiquement la succession des responsables de Grande Kabylie, tout en les mettant en garde contre les cadres et militants étudiants et syndicalistes qui continuaient, notamment à travers la diffusion de la brochure « L’Algérie libre vivra » à revendiquer une rénovation démocratique des orientations du parti. Ces activités, selon les dirigeants en place, étaient la cause du climat perturbé dans les rangs des militants de Grande Kabylie et en France. Sans crainte de se contredire, ils en attribuaient la source à l’influence pernicieuse tantôt de courants colonialistes, tantôt de courants communistes, inventant même pour l’occasion la formule de « berbéro-marxistes » accolée à celle de séparatistes .

J’ai eu à cette même époque la confirmation de cette démarche des dirigeants et des arguments qu’ils avaient utilisés auprès de certains maquisards de Kabylie. C’était à l’occasion de la rencontre que j’eus avec l’un d’entre eux, Fernane Hanafi, venu aux nouvelles et s’informer sur nos intentions. Je ne me souviens plus si c’était Yahia Henine ou Said Oubouzar qui m’accompagnait à cette rencontre. Nous avons discuté toute une après-midi dans le minuscule atelier de tailleur du vieux Si Djilani, ancien cadre de l’Etoile Nord Africaine, au quartier la Marine, détruit quelques années plus tard sur l’emplacement actuel de l’avenue du 1er Novembre. Fernane voulait connaître nos points de vue et nos intentions. Nous l’avons rassuré en lui précisant que nous n’avions pas d’objectif organique, Nos activités visaient à informer les militants sur les problèmes qui avaient surgi. Notre souhait était qu’un large débat se déroule sur les questions essentielles, l’idéal étant la réunion d’un Congrès. Nous souhaitions que la direction s’engage sur la voie de solutions démocratiques et de sagesse.

Fernane Hanafi m’a paru attentif et de bonne foi. Sa mort dans les premiers mois de l’insurrection m’a attristé, lorsque mon ami le restaurateur Saïd Akli me l’a annoncée. Accueillant fréquemment les responsables de maquis après le 1er novembre, il s’était occupé de le faire soigner après les blessures mortelles qu’il avait reçues lors d’un échange de coups de feu avec une patrouille de police sur le chemin ex-Vauban qui porte aujourd’hui son nom à Hussein Dey.

LA DESCENTE VERS LE PIRE

Malgré le climat ouvert de cette rencontre, plusieurs raisons nous incitaient à penser que notre entrevue aurait beaucoup de difficulté à contrecarrer les pressions de la direction. Celle-ci préférerait la voie des manipulations organiques et de la division, laissant intactes les causes politiques du malaise. Nous en avions déjà eu une illustration quand ces dirigeants, croyant désamorcer la crise par une distribution de «  koursis », proposa de faire accéder deux d’entre nous au Comité central du MTLD, dont moi-même. Nous avions pensé alors que ces dirigeants n’avaient rien compris à ce qui se passait, ou au contraire, ils le comprenaient très bien mais redoutaient d’affronter les vrais problèmes à l’origine du mécontentement. Ils persistaient à naviguer entre la carotte et le bâton. Or nous avions quelques raisons de penser que certains de nos frères maquisards seraient vulnérables à ce genre de sollicitations et de pressions.

La première de ces raisons était que les maquisards dépendaient entièrement de la direction pour leur soutien logistique. Ils comprenaient bien la portée du chantage de la direction mais n’avaient pas d’autre moyen de s’y soustraire. De plus, la vie qu’ils menaient et le type de préoccupations au jour le jour qu’elle impliquait n’aidait pas certains d’entre eux à mieux saisir la portée politique et de long terme des problèmes en litige. Par un sentiment humain normal mais non maîtrisé, l’esprit activiste se détachait du contenu politique parce qu’il se résumait en un seul point, engager dès que possible le combat armé pour en finir avec les atermoiements et l’attente fastidieuse qui les rongeait. Ils étaient plus enclins à considérer les préoccupations politiques comme des spéculations fumeuses et sans intérêt ou des diversions propres à semer la division. Avec le recul, je me suis souvenu à ce propos comment Ho Chi Minh avait convaincu ses premiers volontaires, prêts techniquement et impatients d’agir, de patienter pour tenir compte à la fois des évolutions politiques et des besoins d’une formation politique plus poussée des combattants.

La sous-estimation du politique n’existait pas chez Bennaï Ouali, pourtant l’un des pionniers de la lutte armée (voir témoignage de Yousfi dans un de ses ouvrages). Cet homme du peuple, lié au terroir et soucieux de protéger les siens des impulsions qui pouvaient se retourner contre eux, était servi par un solide bon sens et en même temps, ouvert à conjuguer l’expérience de terrain avec la réflexion. Il était attentif aux mouvements d’idées qu’il débattait avec ses compagnons d’armes issus des lycées et de l’université. Ensemble, ils avaient beaucoup fait pour transformer la région de Kabylie en un des bastions les plus dynamiques du mouvement national. L’interaction entre le terrain et la vie intellectuelle, entre les racines identitaires et l’ouverture sur l’universel devenaient une force.
C’est ce que ne comprenaient pas nombre de dirigeants d’Alger, qui croyaient faire preuve de patriotisme en cultivant chez les militants l’état d’esprit anti-intellectuel. En vérité, ils souhaitaient s’entourer de gens ayant des capacités intellectuelles, mais les appréciaient avant tout dans les fonctions de scribes ou de producteurs d’arguments pour légitimer leurs positions du moment. Sinon ils n’étaient que des « intellectomanes » voués à leur mépris. Quelle différence avec un Laïmèche Ali que j’entendais dire un jour à Ben Aknoun en 1945 à un de nos camarades : « Tu as un cerveau, c’est pour t’en servir, ce n’est pas pour le mettre en location ! »

LES DANGERS DE L’ARRIVISME

Une dernière raison était venue s’ajouter chez certains activistes à la méfiance entretenue envers les « intellectuels ». Accepter la « montée en grade » pour succéder aux dirigeants arrêtés n’était pas seulement pour eux une perspective plus sécurisante qu’un combat politique et idéologique incertain pour des solutions démocratiques et de consensus national. Cela flattait aussi en eux l’ambition normale de l’individu, surtout quand l’idée de l’émancipation nationale se fond totalement avec l’objectif de promotion individuelle ou se réduit à elle, alors que cette aspiration individuelle légitime en est seulement une des dimensions, elle ne devient viable et morale qu’en s’harmonisant avec les intérêts collectifs de tous les nationaux.

En l’occurrence, succéder à son supérieur hiérarchique est apparu à d’aucuns plus important et valorisant que le contenu à donner à cette succession et à ses suites. Quitte, pour mériter cette promotion aux yeux de ceux qui l’ont promu, à briser si nécessaire les réticences des compagnons d’armes et militants non consultés, considérés comme des subordonnés et des « sujets » n’ayant aucun droit, sinon celui d’obéir aveuglément. La tentation pour le nouveau « mas’oul » est de le faire par tous les moyens, y compris ceux qui ne lui ont pas été prescrits expressément par les dirigeants qui l’ont promu.

Ce n’est pas un hasard si le successeur sur lequel le choix s’est porté durant l’été 49 est le même qui, avant Novembre 54, ne se ralliera au plan insurrectionnel du FLN qu’à la condition qu’on lui reconnaisse la direction de la région qu’il assumait jusque là en tant que messaliste. Pas un hasard non plus si pour mieux asseoir cette promotion individuelle, il lui a été indifférent d’informer toute une région importante du changement d’allégeance organique, qu’il aurait dû et pu par de hautes raisons patriotiques et en oeuvrant à faire de cette mutation organique délicate une transition politique unitaire. Pas un hasard enfin si malheureusement la « transition » s’est soldée par des centaines de « cas Ferhat Ali » dont l’affaire de Melouza a été une illustration et la préfiguration de bien d’autres tragédies qui ont ensanglanté la région et le pays.

L’ENTERREMENT DE LA CULTURE POLITIQUE

Ainsi, en août 1949, un mal irrémédiable venait de commencer son chemin vers toute l’Algérie, depuis ce coin de l’embuscade contre Ferhat Ali à Larbâa Nath Irathen et les bureaux centraux du MTLD de la rue Marengo. On a trop tendance à oublier aujourd’hui ces responsabilités politiques quand on parle de façon trop absolue de la montée des dérives militaristes. On serait tenté de rappeler que « messieurs les civils, vous avez politiquement tiré les premiers ou encouragé à tirer sur les vôtres ! » Sur le champ, la portée immédiate et surtout à long terme d’un tel acte n’a été perçue, et encore partiellement, que par des militants sans préjugés, pourvu qu’ils soient suffisamment informés de ce qui s’était passé. En réalité un tournant venait de se produire.

C’est ce que m’a dit à sa façon deux mois plus tard, à Larbâa (Beni Moussa, Mitidja) où je militais en même temps que dans le secteur étudiant d’Alger, un de mes compagnons de lutte du PPA, mon ami H’midat. Ancien de la branche « Routiers » du groupe local des SMA que je dirigeais, il était « maquisard » depuis mai 1945, circulant armé dans les monts entre Larbâa et Tablat pour échapper aux recherches de la gendarmerie française. Arabophone et attaché aux valeurs de l’arabisme qu’il assumait de façon critique et progressiste, mécontent comme de nombreux militants de base des directives incohérentes et parfois contradictoires que le MTLD donnait en cette période, il était intervenu de façon très vive à une réunion nocturne tenue dans la forêt communale. Des responsables du MTLD (Lahouel Hocine et je crois Said Lamrani) étaient venus, en présence de Si Mustapha Sahraoui, membre du CC et responsable local, donner leur version de la crise qui secouait le parti. Outré par les calomnies qu’il entendait dont celles me visant en mon absence, H’midat surgit de l’ombre où il s’était abrité et répliqua durement (épisode relaté dans un article d’El Watan de juillet 1998) ce qui eut pour effet de troubler et disperser la réunion. Quand je le rencontrai deux semaines plus tard, je lui reprochai de ne pas avoir plutôt laissé s’engager un débat et argumenté malgré son indignation, Il me dit : « mais tu ne les connais pas ? Maintenant « wellat drâa » (c’est devenu une question du « plus fort »).

Il ne croyait pas si bien dire. Mais sans mesurer la gravité de ce constat bien réel, il venait de basculer dans la logique contre laquelle il s’était indigné. Et comme beaucoup d’autres, envers ses compatriotes qui se trouvaient dans le même camp que lui pour l’indépendance, il aurait sans doute préféré discuter, mais il faisait désormais davantage confiance au pistolet qu’il dissimulait sous sa kachabia. pour emporter la conviction des autres.

CONSEQUENCES AU LONG COURS ET CONDITIONS POUR L’ESPOIR

En fait, la balle de colt qui avait atteint Ferhat Ali venait de toucher l’Algérie en ce qu’elle avait de plus précieux, l’espoir démocratique, avant même que ne s’ouvre l’étape la plus décisive de la lutte qui débutera en Novembre 54. Le coup avait atteint en même temps l’accompagnement obligé de toute démarche démocratique qui ne veut pas basculer dans l’hégémonisme et la mentalité de parti unique : l’esprit et la pratique de l’unité d’action, seule capable de féconder la diversité politique et culturelle au bénéfice des objectifs nationaux et sociaux communs.

Le handicap sera lourd et chèrement payé pour les luttes et les réalisations futures. Cette journée fatale d’août 1949 avait glacé notre image idéalisée de l’élan national. Elle fut un sinistre présage, le premier signal d’une longue série d’enchaînements. Faute de régulation politique appropriée, le mal ira en s’amplifiant avant comme après l’indépendance, rebondissant chaque fois vers des situations impensables auparavant.

Même après l’aboutissement monstrueux des années 90 et ses 150 000 victimes, même après l’impact du sinistre printemps noir qui pèse lourdement sur la Kabylie, nous gagnerons à considérer les ressorts qui ont rendu possibles ces aberrations comme des enseignements, en refrénant les passions et l’esprit de vengeance. Ces sentiments, même s’ils sont compréhensibles, aveuglent le discernement et nous poussent vers des gouffres plus profonds.

Laissons donc à leurs seuls actes méritoires de guerriers anticoloniaux les acteurs qui ont failli gravement par des manques de discernement politique. Leurs défaillances individuelles sont celles de toute une époque et la logique de l’Histoire a voulu que la plupart d’entre eux aient connu les retournements de situation inévitables des calculs de court terme. Je n’en fais pas ici la liste, elle est impressionnante. Comme dirait Lounes Aït Manguellat, ils avaient fabriqué eux-mêmes le bâton qui les a frappés. Mais ils ne furent pas les seuls à en souffrir. Le peuple et la nation en ont été massivement les victimes.

C’est volontairement que je n’ai pas voulu mettre de nom sur chaque personnage alors que chacun peut les reconnaître. J’ai voulu fortement indiquer par là que l’important ce n’est pas tel ou tel, car si ce n’avait été lui, cela aurait été un autre placé dans le contexte qui fabrique ou favorise ce type de comportement.

Je voulais ainsi souligner que la maîtrise salutaire et collective ne consiste pas à s’enliser dans les procès rétrospectifs contre des acteurs disparus, en les réinstallant artificiellement sur une scène politique qui n’est plus la même.

Il n’est nullement question d’oublier comme si rien ne s’était passé. Mais, ce faisant, il est mille fois plus important de tirer de ces faits douloureux des enseignements utiles et d’examiner à leur lumière les faits similaires qui nous menacent aujourd’hui. Faisons-le avec l’esprit et le sang-froid attendus d’un médecin ou d’un proche qui tiennent à la survie de leur patient. Voyons-y essentiellement une maladie politique terrible dont personne n’est à l’abri, un monstre caché et toujours à l’affût en chacun de nous et dans la société, un empoisonnement que ne pourra guérir aucun remède de cheval ni exorcisme de charlatan, aucun changement du rapport des forces militaire ou policier. Seul moyen radical de guérison, l’antidote démocratique adapté à la nature même du poison. Il coûte cher et il faut apprendre à le manier. Mais là réside le seul et vrai espoir.

Aux sceptiques qui mettent en doute l’opportunité ou l’efficacité de la lutte pour la liberté, la vraie démocratie et la justice sociale, je dirai seulement que malgré les grandes insuffisances passées que nous gagnerons à corriger, les sacrifices et la résistance de tous ceux qui ont mené cette lutte à l’instar de Ferhat Ali n’ont pas été et ne resteront pas vains. Le problème est, à la lumière de l’expérience, de donner à cette lutte l’efficacité qu’elle mérite.

Le tribunal de l’Histoire a tranché. Si les atteintes à la Constitution et aux lois algériennes devaient être jugées à titre rétrospectif, ceux qui seraient condamnés seraient ceux qui durant des décennies, se sont opposés à la reconnaissance de l’amazighité comme valeur composante de la Nation, tout en portant un tort considérable aussi bien à l’arabité qu’à la démocratie sociale, à l’unité nationale et à la coopération fructueuse entre peuples et civilisations comme autres valeurs précieuses de notre peuple.

Soyons donc fiers, optimistes, vigilants et critiques en pensant aux luttes passées et à venir.

Sadek Hadjerès,

le 08 octobre 2006


[1voir à ce propos la description de Belaid Abdesselam, témoignage recueilli dans son entretien des années 1980 avec Ali El Kenz.

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