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Capitalisme, horizon indépassable ?

POURQUOI ONT-ILS TUÉ JAURÈS ?

& "CAPITALISM : A LOVE STORY" DE M MOORE

mardi 8 septembre 2009

Sous une forme ou sous une autre, l’actualité met quotidiennement à l’ordre du jour une question cruciale : l’Humanité est-elle condamnée à la malédiction capitaliste éternelle ? Et les réponses, comme autant d’appels à l’action unie, persévérante, vigoureuse et lucide, viennent de tous les horizons progressistes. C’est ce que nous rappellent les amis de "SOCIALGERIE" à travers deux fortes contributions, l’une à l’occasion du 150ème anniversaire de la naissance de Jean Jaurès et l’autre de la présentation d’un nouveau film de Michael Moore, au mordant toujours égal à lui même. Oui, on aura beau avoir tué Jaurès, Kaddour Belkaim, Guevara, Abbane, Boudiaf et tant d’autres, l’horizon de l’Humanité, la paix la liberté et la justice sociale passent par l’éradication du système capitaliste et la construction de vraies et puissantes alternatives socialistes.

POURQUOI ONT-ILS TUÉ JAURÈS ?

On ne peut pas dire qu’ils furent esclaves
De là à dire qu’ils ont vécu
Lorsque l’on part aussi vaincu
C’est dur de sortir de l’enclave
Et pourtant l’espoir fleurissait
Dans les rêves qui montaient aux yeux
Des quelques ceux qui refusaient
De ramper jusqu’à la vieillesse
Oui not’ bon Maître oui not’ Monsieur
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?

( Jacques Brel, 1977, Jaurès )

[1] voir aussi l’adaptation par le groupe "Zebda"

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Le 150ème anniversaire de Jaurès, né à Castres le 3 septembre 1859, m’a fait rencontrer son « Discours à la jeunesse » qu’il prononça le 30 juillet 1903 au lycée d’Albi où il avait été élève puis enseignant.

J’ai toujours à l’esprit ses rudes empoignades théoriques et politiques avec Guesde qui ne les empêchaient pas de militer à partir de 1905 dans le même parti, la SFIO, Section Française de l’Internationale Ouvrière, dont l’un des fondateurs fut également le gendre de Marx, Paul Lafargue...

LE CAPITALISME PORTE EN LUI LA GUERRE
COMME LA NUÉE PORTE L’ORAGE

La lutte de Jaurès contre la guerre que l’on sentait monter est bien connue.

La citation ci-dessus est en fait une reformulation issue de son discours à la Chambre en 1895 dans lequel il déclare :

« Tandis que tous les peuples et tous les gouvernements veulent la paix, malgré tous les congrès de la philanthropie internationale, la guerre peut naître toujours d’un hasard toujours possible...

« Toujours votre société violente et chaotique, même quand elle veut la paix, même quand elle est à l’état d’apparent repos, porte en elle la guerre, comme une nuée dormante porte l’orage.

« Messieurs, il n’y a qu’un moyen d’abolir la guerre entre les peuples, c’est d’abolir la guerre économique, le désordre de la société présente...

« Et voilà pourquoi si vous regardez, non aux intentions qui sont toujours vaines, mais à l’efficacité des principes et à la réalité des conséquences, logiquement, profondément, le Parti socialiste est, dans le monde, aujourd’hui, le seul parti de la paix. »

LES PROLÉTAIRES RÉFRACTAIRES A L’IVRESSE GUERRIÈRE

Dans son discours de 1903 à la jeunesse d’Albi, Jaurès tonne le même appel :

« Enfin, le commun idéal qui exalte et unit les prolétaires de tous les pays les rend plus réfractaires tous les jours à l’ivresse guerrière, aux haines et aux rivalités de nations et de races.

« Oui, comme l’histoire a donné le dernier mot à la République si souvent bafouée et piétinée, elle donnera le dernier mot à la paix...

« Je ne vous dis pas : c’est une certitude toute faite. Il n’y a pas de certitude toute faite en histoire...

« L’humanité est maudite, si pour faire preuve de courage elle est condamnée à tuer éternellement.

« Le courage, aujourd’hui, ce n’est pas de maintenir sur le monde la sombre nuée de la Guerre, nuée terrible, mais dormante, dont on peut toujours se flatter qu’elle va éclater sur d’autres.

« Le courage, ce n’est pas de laisser aux mains de la force la solution des conflits que la raison peut résoudre : car le courage est l’exaltation de l’homme, et ceci en est l’abdication... »

Et n’est-ce pas pour empêcher Jaurès de tenir ce langage pacifique jusqu’au bout, et pour permettre ainsi aux partis de la 2ème Internationale de s’engager majoritairement dans le soutien à leurs bourgeoisies respectives que Jaurès est mort une première fois ?

Car ce fut aussitôt le carnage de la première guerre mondiale qui succéda à son assassinat dans les conditions que l’on sait !

UN GRAND PEUPLE SE GOUVERNANT LUI-MÊME !

La République est, chez Jaurès, conjointement à celui de la paix, un thème dominant.

Pour lui, l’idée d’un grand peuple se gouvernant lui-même est si noble qu’aux heures de difficulté et de crise elle s’offrait à la conscience de la nation :

« Une première fois en 1793 le peuple de France avait gravi cette cime, et il y avait gouté un si haut orgueil, que toujours sous l’apparent oubli et l’apparente indifférence, le besoin subsistait de retrouver cette émotion extraordinaire.

« Ce qui faisait la force invincible de la République, c’est qu’elle n’apparaissait pas seulement de période en période, dans le désastre ou le désarroi des autres régimes, comme l’expédient nécessaire et la solution forcée. Elle était une consolation et une fierté. Elle seule avait assez de noblesse morale pour donner à la nation la force d’oublier les mécomptes et de dominer les désastres. C’est pourquoi elle devait avoir le dernier mot...

« La République a raison parce qu’elle est dans la direction des hauteurs, et que l’homme ne peut pas s’élever sans monter vers elle. La loi de la pesanteur n’agit pas souverainement sur les sociétés humaines et ce n’est pas dans les lieux bas qu’elles trouvent leur équilibre.

« Ceux qui, depuis un siècle, ont mis très haut leur idéal ont été justifiés par l’histoire. »

ORGANISER LA PROPRIÉTÉ ET LE TRAVAIL
SELON LE PRINCIPE RÉPUBLICAIN

Aussi, le statu quo ne peut être une fin en soi.

Pour Jaurès, ce ne peut être seulement dans les relations politiques des hommes mais c’est aussi dans leurs relations économiques et sociales qu’il faut faire entrer la liberté vraie, l’égalité, la justice.

Le prolétariat dans son ensemble commence à l’affirmer : la liberté, l’égalité, la justice, « c’est aussi l’atelier, c’est le travail, c’est la production, c’est la propriété qu’il veut organiser selon le type républicain.

« A un système qui divise et opprime, il entend substituer une vaste coopération sociale où tous les travailleurs de tout ordre, travailleurs de la main et travailleurs du cerveau, sous la direction de chefs librement élus par eux, administreront la production enfin organisée. »

EXIGER DES GARANTIES

Jaurès ne demande pas à être cru sur parole quant à la mise en œuvre des propositions qu’il formule :

« D’abord, envers une idée audacieuse qui ébranle autant d’intérêts et d’habitudes et qui prétend renouveler le fond même de la vie, vous avez le droit d’être exigeants. Vous avez le droit de lui demander de faire ses preuves, c’est-à-dire d’établir avec précision comment elle se rattache à toute l’évolution politique et sociale, et comment elle peut s’y insérer.

« Vous avez le droit de lui demander par quelle série de formes judiciaires et économiques elle assurera le passage de l’ordre existant à l’ordre nouveau.

« Vous avez le droit d’exiger d’elle que les premières applications qui peuvent en être faites ajoutent à la vitalité économique et morale de la nation.

« Et il faut qu’elle prouve, en se montrant capable de défendre ce qu’il y a déjà de noble et de bon dans le patrimoine humain, qu’elle ne vient pas le gaspiller, mais l’agrandir.

« Elle aurait bien peu de foi en elle-même si elle n’acceptait pas ces conditions. »

LA PREUVE PAR LA VERRERIE OUVRIÈRE D’ALBI

Et Jaurès poursuit à l’intention de ses auditeurs :

« Et si vous êtes tentés de dire encore qu’il ne faut pas s’attarder à examiner ou à discuter des songes, regardez-en un dans vos faubourgs !

« Que de railleries, que de prophéties sinistres sur l’œuvre qui est là !

« Que de lugubres pronostics opposés aux ouvriers qui prétendaient se diriger eux-mêmes, essayer dans une grande industrie la forme de la propriété collective et la vertu de la libre discipline !

« L’œuvre a duré pourtant, elle a grandi : elle permet d’entrevoir ce que peut donner la coopération collectiviste.

« Humble bourgeon à coup sûr, mais qui atteste le travail de la sève, la lente montée des idées nouvelles, la puissance de la transformation de la vie.

« Rien n’est plus menteur que le vieil adage pessimiste et réactionnaire de l’Ecclésiaste désabusé : il n’y a rien de nouveau sous le soleil. »

« Le soleil lui-même a été jadis une nouveauté.

« L’histoire humaine n’est qu’un effort incessant d’invention, et la perpétuelle évolution est une perpétuelle création. »

La Verrerie Ouvrière d’Albi a été créée en 1896. Après divers changements de statuts, dans un environnement de plus hostile, elle a finalement été rachetée par le groupe Saint-Gobain Emballage en 1993.

La seconde mort de Jaurès ?
Et François Mitterrand est Président de la République !

Michel Peyret

7 septembre 2009


Le dernier film du réalisateur Michael Moore à la Mostra de Venise :

"CAPITALISM : A LOVE STORY"

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Capitalism is Evil  ;
Dedicated to "good people who struggle, who work hard and who’ve had their lives ruined by decisions that are made by people who do not have their best interest at heart."

« Le capitalisme c’est le mal, et on ne réforme pas le mal, on l’éradique pour le remplacer par le bien pour tous : la démocratie », lance Michael Moore dans "Capitalism : a love story" , son dernier brûlot sur la crise économique aux Etats-Unis, ovationné à la 66e Mostra de Venise.

"...
les projecteurs sont braqués sur l’auteur de Bowling for Columbine, Oscar du meilleur documentaire en 2003 et de Fahrenheit 9/11, Palme d’or en 2004.

Vingt ans après avoir filmé les ravages causés dans sa ville de Flint (Michigan) par des licenciements massifs chez General Motors (Roger et moi), Moore constate que « bien des villes aux Etats-Unis » sont aussi mal en point.

« Une famille est expulsée de sa maison toutes les sept secondes et demie. C’est un chiffre frappant », a déclaré, samedi soir à Venise, l’Américain, à la veille de la projection de gala de son film, en lice pour le Lion d’or.

Enfants en larmes à la rue ou forcés de dormir dans un camion avec leurs parents, familles ou retraités ruinés émaillent "Capitalism : a love story".

Car la grave crise actuelle frappe de plein fouet les Américains modestes, dont cet « activiste politique » s’est fait le porte-parole. Elle est liée, dit le film, à la collusion entre les grandes banques d’affaires et l’administration de l’ex-président George W. Bush, mais aussi à un travail de sape antérieur nommé « dérégulation » , qui a permis à Wall Street de se transformer en « vrai casino où l’on peut parier sur n’importe quoi » . « Les gens ont permis à Wall Street de décimer l’infrastructure industrielle de notre pays pour dégager de plus grands bénéfices » , a expliqué Moore.

Car les États-Unis ne sont plus une démocratie mais une « plutonomie » où une infime minorité détient la quasi-totalité des richesses, affirme le réalisateur en voix off, reprenant le concept d’un économiste de la banque Citigroup.

Quant au plan de sauvetage des banques de quelque 700 milliards de dollars adopté cet automne aux frais du contribuable américain, c’est un « coup d’Etat financier » .

Dans une irrésistible séquence, le documentariste barre la luxueuse entrée d’une grande banque avec un ruban jaune portant la mention « scène de crime - ne pas franchir » .
Alors, pourquoi la majorité ne se rebelle-t-elle pas ? C’est qu’elle croit pouvoir s’enrichir un jour, dit Michael Moore sur d’hilarantes images d’un petit chien qui saute désespérément en l’air pour atteindre un petit bout de gâteau, posé sur une table.

Maniant habilement, comme à son habitude, interviews sauvages, images choc, ironie dévastatrice et commentaires à l’emporte-pièce, Michael Moore donne en vrac, quelques exemples des excès du capitalisme à l’américaine.

Des compagnies aériennes sous-paient leurs pilotes au point que ceux-ci doivent prendre un deuxième emploi pour vivre, des promoteurs rachètent pour rien mais revendent au prix fort les maisons saisies par les banques. Et de grandes entreprises comme Bank of America, Citibank ou AT&T contractent des polices d’assurance pour leurs employés qui leur permettent, lorsque ceux-ci décèdent, de toucher un pactole.

Très applaudi par la critique, "Capitalism : a love story" , qui se termine sur l’air de l’Internationale en version jazzy, poussera chaque spectateur à se mobiliser contre ce système, espère-t-il. Car un prêtre qu’il a interrogé l’assure : le capitalisme est « immoral, obscène, c’est le mal absolu »... "

extrait dépêche AFP

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