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"LE 17 OCTOBRE 1961" : DEUX NOUVEAUX LIVRES et UNE RÉ- ÉDITION

mercredi 12 octobre 2011


"LE 17 OCTOBRE 1961 PAR LES TEXTES DE L’ÉPOQUE" - Préface de Gilles Manceron - Postface de Henri Pouillot, éditions "Les Petits matins", septembre 2011 - 5 euros ;
La sortie du livre en septembre 2011 avait été annoncée par socialgerie le 7 septembre 2011, article 568 ...

L’article ci-dessous reprend intégralement la préface de Gilles Manceron ; une partie du livre lui-même est donnée en document joint ;


“LE 17 OCTOBRE DES ALGÉRIENS” - texte de Marcel et Paulette Péju de l’ été 1962 - inédit jusqu’à présent,
suivi de “LA TRIPLE OCCULTATION D’UN MASSACRE” - texte de Gilles Manceron
, éditions La Découverte, octobre 2011, - 14 euros.


“LES RATONNADES D’OCTOBRE - Un Meutre collectif à Paris en 1961”
Livre de Michel LEVINE, ré-édition, éd. Jean-Claude Gawsewtich, parution le 22 septembre 2011.


POST-SCRIPTUM : LIENS, DOCUMENTATIONS


"LE 17 OCTOBRE 1961, PAR LES TEXTES DE L’ÉPOQUE"

LA PRÉFACE DE GILLES MANCERON [1] :

UN MARDI PLUVIEUX
D ’OCTOBRE

Comment parler d’un événement qui est essentiel et, pourtant, est passé quasiment inaperçu de ses contemporains ? Les mots manquent à l’historien. Seul, peut-être, le poète peut-il s’en faire l’écho. Dire l’incommensurable douleur, pour les rares Français qui en étaient conscients, du silence entourant le drame. À la manière d’Aragon qui criait, lors d’une autre tragédie de notre histoire, quand aucun des passants ne semblait voir « l’Affiche rouge » : « Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant. » Ou à celle de Kateb Yacine qui écrivait à propos d’octobre 1961 :

« Peuple français, tu as tout vu
Oui, tout vu de tes propres yeux.
Tu as vu notre sang couler
Tu as vu la police
Assommer les manifestants
Et les jeter dans la Seine.
La Seine rougissante
N’a pas cessé les jours suivants
De vomir à la face
Du peuple de la Commune
Ces corps martyrisés
Qui rappelaient aux Parisiens
Leurs propres révolutions
Leur propre résistance.
Peuple français, tu as tout vu,
Oui, tout vu de tes propres yeux,
Et maintenant vas-tu parler ?
Et maintenant vas-tu te taire [2] ? »

Kateb Yacine avait dû quitter Paris après une perquisition par la DST de la chambre où il habitait, et c’est à Tunis que l’ont atteint les nouvelles de cette nuit d’octobre. Cette nuit où la capitale de la France a connu, dans l’ignorance de l’immense majorité de ses habitants, le plus grand massacre d’ouvriers et de gens du peuple depuis la Semaine sanglante de 1871.

Peut-être, pour tenter d’en parler, faut-il des mots d’écrivains. Ceux de Leïla Sebbar, par exemple, fille d’une Française et d’un instituteur algérien, qui, vingt-cinq ans après la nuit du drame, écrivait en regardant l’image d’un magazine montrant l’instant précédant la tragédie :
« Sur la photographie de presse, une femme porte haut le drapeau dont on distingue mal l’étoile. On ne voit pas d’oliviers, seulement un poteau avec des feux pour régler la circulation… En tête de la manifestation, une femme algérienne sans foulard, ni robe à fleurs, ni fouta, et autour d’elle, pressés dans la foule, des hommes déterminés. La femme sourit, les hommes sont graves.
Ils ne savent pas que la Seine, ce beau fleuve paisible qui fait des îles dans Paris, sera rouge à la fin de ce jour, et encore quelques jours [3]. »

Moins capables que d’autres à dire l’horreur de cette nuit pluvieuse d’octobre 1961, les mots de l’historien seront forcément assez plats.

La guerre d’Algérie touchait à sa fin puisque, après sept années de conflit et des centaines de milliers de morts, la politique du général de Gaulle, président de la Ve République, en faveur de l’autodétermination avait été approuvée par référendum, le 8 janvier 1961, par un score sans appel de 75,25 %, en France et 69,09 % en Algérie, et que les négociations entre l’État français et les Algériens représentés par le Front de libération nationale avaient commencé. Mais, au sein même du gouvernement, certains n’y étaient guère favorables et restaient de farouches partisans d’une répression accrue contre le FLN. Le garde des Sceaux, Edmond Michelet, partisan de la paix et hostile aux violences répressives qui compromettaient l’avenir et étaient contraires aux droits de l’homme, avait dû démissionner le 23 août 1961. Aussitôt, les conditions des détenus algériens dans les prisons et les camps de détention se sont aggravées, et les plaintes des immigrés algériens contre les exactions de la police ont été enterrées… De Gaulle sait qu’il devra faire la paix. Mais il doit compter avec ceux qui l’ont porté au pouvoir. En particulier le Premier ministre, Michel Debré, qui apporte son soutien au ministre de l’Intérieur, Roger Frey, et au préfet de police de la Seine, Maurice Papon, tous opposés aux négociations avec le FLN – dont de Gaulle avait chargé Louis Joxe – et qui font tout pour qu’elles échouent.

Maurice Papon, nommé préfet de police en mars 1958 dans le département de la Seine, n’avait pas encore été mis en cause pour son rôle pendant l’Occupation, comme secrétaire de la préfecture de la Gironde, dans la déportation des Juifs de Bordeaux, rôle qui le fera condamner en 1998 pour complicité de crime contre l’humanité. Il avait été, peu avant, IGAME, c’est-à-dire préfet doté de pouvoirs extraordinaires, dans le Constantinois, où il avait mis en place les premiers centres de torture institutionnels d’Algérie. Il était partisan d’une guerre à mort contre la Fédération de France du FLN, et contre l’immigration algérienne qui la finançait et la soutenait très majoritairement, par l’importation dans la capitale des pires méthodes utilisées en Algérie.

Pour mener cette guerre totale, Maurice Papon avait créé tout un dispositif : à sa tête, le Service de coordination des affaires algériennes (SCAA), dont dépendait le Service d’assistance technique (SAT), commandé par un militaire, le capitaine Raymond Montaner, revenu lui aussi d’Algérie. Celui-ci avait remis en juillet 1959 à Maurice Papon et à Michel Debré un projet intitulé Destruction de l’Organisation rebelle dans le département de la Seine – Une Solution – La Seule !, consistant à étendre à la région parisienne les moyens employés par les parachutistes lors de la bataille d’Alger. Le plan, approuvé en haut lieu, avait conduit à la création en décembre 1959 d’une Force de police auxiliaire (FPA) entièrement aux ordres de Montaner, composée d’hommes, souvent d’origine rurale, transplantés d’Algérie, dont certains ne parlaient pas français, dans un Paris qu’ils ne connaissaient pas. Maurice Papon raconte dans ses mémoires : « L’un de ces hommes se perd dans Paris dès sa première sortie. Il téléphone à la caserne. On lui demande de décrire le paysage qui l’entoure pour le remettre sur le bon chemin. Il répond qu’il se trouve à proximité d’un grand pont sous lequel ne coulait aucune rivière : c’était l’Arc de Triomphe [4] ! »C’est dire à quel point ces Algériens étaient à la merci de leur strict encadrement par des militaires.

Ces hommes de la FPA étaient encasernés au Fort de Noisy-le-Sec, à Romainville ou dans des cafés-hôtels réquisitionnés des 13e et 18e arrondissements de Paris. Leur unité, totalement autonome et qui apparaissait aux fonctionnaires de la police parisienne comme un « État dans l’État [5] », était chargée des formes les plus violentes de la répression. Pour identifier les collecteurs des cotisations pour le FLN, ils n’hésitaient pas à arrêter des Algériens quasiment au hasard pour obtenir d’eux, au besoin sous la torture, les renseignements à partir desquels ils pourraient opérer d’autres arrestations. Raymond Muelle, proche de Montaner et comme lui ancien d’Indochine et d’Algérie, qui faisait partie du service Action du SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage) [6], est installé à côté de lui au Fort de Noisy-le-Sec, ce qui facilite leur étroite coopération. Muelle rapporte que l’un de ses associés, l’inspecteur Esteva, a fait remarquer un jour à Montaner : « Alors ça y est ! Tu l’as, ton armée privée ! [7] »

Les méthodes de terreur employées par cette FPA suscitent l’indignation des habitants des quartiers où ils sévissent, notamment les 13e et 18e arrondissements. De nombreuses plaintes sont déposées à leur encontre pour séquestrations arbitraires, tortures et disparitions, qui resteront toutes sans suite. De vigoureuses protestations ont été émises dès avril 1960 au conseil municipal de Paris, notamment par Claude Bourdet, conseiller du 13e. Dans les organes de presse les plus divers, Libération, L’Humanité, France-Soir, Le Monde, La Croix, Témoignage chrétien, Réforme, France-Observateur, Tribune socialiste, Les Temps modernes…, paraissent des articles indignés sur ces hommes de la FPA, couramment et improprement appelés les harkis. Le Figaro lui-même titre : « Des traces de sévices sur des Algériens plaignants contre des harkis » [8] .

En représailles, plusieurs membres du SAT et de la FPA sont tués par le FLN. Maurice Papon signalera dans ses mémoires cinq tués au sein du SAT dans les huit mois précédant le 17 octobre 1961 [9]. Le 5 juin 1961, un groupe d’une vingtaine de soldats algériens du contingent, permissionnaires du 93e régiment d’infanterie stationné à Versailles, participent à une attaque contre des cantonnements de la FPA [10]. D’autres membres de cette police auxiliaire sont tués par des hommes du FLN dans des attentats isolés.
Mais une directive datée du 7 octobre 1961 de la direction de la Fédération de France, signée de Kaddour (Amar Lamrani), qui était pourtant connu plutôt pour ses tendances autoritaires et ses méthodes expéditives [11] , incite ses militants à tenter de rallier les hommes de la FPA : « Il serait plus rentable de les organiser au sein même de la caserne pour faire ensuite un coup spectaculaire, soit une désertion massive, soit provoquer une mutinerie à l’intérieur de la caserne.
Nous croyons qu’il [y a] des moyens de faire mieux que la liquidation physique et individuelle.
Si nous pouvions “récupérer” les harkis et faire une action politique spectaculaire, ça serait beaucoup plus rentable que la vengeance sur des pauvres types égarés. » Un appel avait été lancé dès l’été 1960 par la Fédération de France du FLN pour inciter ces derniers à l’aider [12].

Nombre des hommes qui avaient été incorporés à la FPA, en découvrant à Paris le rôle qu’on leur fait jouer, la quittent ou cherchent à le faire. Un rapport conservé aux archives de la préfecture de police de Paris relève que, sur les 600 membres de la Force de police auxiliaire durant sa première année d’existence, plus de 40 % n’en faisaient plus partie en décembre 1960, dont 101 qui l’avaient abandonnée en fin de contrat [13]. Mais en 1961, année où le FLN parvient à infiltrer la FPA et à y gagner un certain nombre de ses membres à sa lutte, plusieurs hommes qui ne voulaient plus en faire partie ou qui l’avaient quittée sont assassinés sur ordre de ses responsables. _ Ainsi, d’après Constantin Melnik, conseiller du Premier ministre Michel Debré pour les questions de sécurité, Raymond Montaner a demandé au SDECE d’assassiner un membre de la FPA, Rachid Khilou, alors en permission à Valence pour rendre visite à un membre de sa famille, parce qu’il soupçonnait ce dernier de vouloir en partir. Ce qui fut fait en pleine rue par les hommes de Raymond Muelle [14].

Signalons au passage que ce rôle particulier de la FPA a eu une conséquence très négative sur la perception par l’opinion française du phénomène des harkis en Algérie. En effet, c’est en entendant parler de cette troupe mise en place par Maurice Papon – qui n’était pas représentative de l’ensemble des forces auxiliaires indigènes en Algérie, qui, elles, constituaient au sens propre les harkis – que les Français ont entendu pour la première fois ce terme, associé le plus souvent à des actes qu’ils réprouvaient.
Il faut probablement y voir l’une des causes de l’assimilation aussi abusive que répandue des supplétifs algériens durant cette guerre avec les collaborateurs français des années 1940-1944.
Et de l’indifférence qui s’est trop souvent manifestée en France en 1962 vis-à-vis des hommes qui ont dû fuir des massacres avec leur famille lors de l’indépendance de l’Algérie.

Le 2 octobre 1961, le diplomate suisse Olivier Long transmet à Louis Joxe, représentant du gouvernement français, la proposition de la délégation algérienne de reprendre les négociations, dont une première session, à Évian, entre le 20 mai et le 13 juin, s’était interrompue sur un désaccord relatif au Sahara. Après les propos du général de Gaulle le 5 septembre, prenant acte de ce que les Algériens considéraient que le Sahara faisait partie de leur pays, le FLN était prêt à poursuivre le processus.

Le 6 octobre, Olivier Long avise le FLN que son message a été transmis et qu’il ne doute pas du désir du gouvernement français de poursuivre les négociations [15]. C’est précisément à ce moment que Maurice Papon, à la suite d’un conseil interministériel tenu le 5 octobre, décide de franchir un palier dans la guerre contre le FLN à Paris et dans le département de la Seine. Il annonce un couvre-feu à l’encontre des seuls Algériens, assorti de la fermeture des cafés qu’ils fréquentent, ce qui a notamment pour effet de rendre quasiment impossibles les collectes de fonds et les réunions. Olivier Long, après avoir rencontré à nouveau Louis Joxe le 13 octobre, écrira qu’il a senti « au cours de cet entretien, comme lors du précédent, une certaine réserve due probablement à des divergences de vues, peut-être au sein même du gouvernement français [16] ». Pour lui, ce couvre-feu comme la répression du 17 octobre sont apparus comme une tentative de sabotage des négociations en cours. Il est indéniable que ce couvre-feu, au moment même où la paix se dessinait à l’horizon, était une véritable déclaration de guerre au FLN.
Une guerre dont Maurice Papon avait achevé les préparatifs. Outre la mise en place du SCAA, du SAT et de la FPA, il avait constitué depuis juin 1960 des « équipes spéciales » composées de policiers en civil (un brigadier et cinq gardiens de la paix) à bord d’un véhicule devant opérer « aux heures estimées les plus propices, notamment en soirée et de nuit ». Ce sont elles qui, surtout à partir de l’été 1961, quand Papon a eu davantage les mains libres après le départ d’Edmond Michelet du ministère de la Justice, se sont livrées à des mitraillages de cafés et au meurtre de passants algériens, qui ont fait des dizaines de victimes.

Si on rapproche le déclenchement de la guerre que lance Maurice Papon contre le FLN à Paris de la chronologie des rencontres, le 2 puis le 13 octobre, entre Louis Joxe et Olivier Long, on peut sans conteste résoudre ce qui apparaissait à Pierre Vidal-Naquet comme une des « énigmes les plus étranges que pose à l’historien et à l’honnête homme la guerre d’Algérie » : le fait qu’au moment où la paix était désormais certaine, « c’est justement alors, en 1961-1962, que cette même guerre atteint à Paris son pic de violence [17] ». En effet, le 17 octobre 1961 à Paris, tout comme le déchaînement de violence terroriste de l’OAS, en France et surtout en Algérie, ne peuvent être compris que comme les derniers feux de la folie coloniale.
Ces événements sont le paroxysme et en même temps le révélateur de cet épisode colonial dans lequel la France, comme d’autres, s’est fourvoyée, et où elle a risqué de perdre les plus beaux principes que son histoire a portés.

En même temps, ce couvre-feu discriminatoire décidé le 5 octobre, qui fut l’un des derniers épisodes de la guerre d’Algérie, est emblématique de l’hypocrisie et du double langage qui ont caractérisé toute la période coloniale. Car Maurice Papon a informé ce 5 octobre tous les personnels de la police d’un « couvre-feu pour les Français musulmans d’Algérie », mais le communiqué qu’il a rendu public le lendemain, approuvé par le ministre de l’Intérieur Roger Frey, n’a pas repris le terme de couvre-feu. Pour éviter de formuler une interdiction s’adressant à une partie de la population sur un critère ethnique, qui était en contradiction avec les principes fondamentaux de la constitution républicaine, il a déguisé l’interdiction de circuler sous la forme d’un simple « conseil » ou, plus loin, d’une « vive recommandation »… Autant de substitutions de termes et de ruses du langage administratif qui étaient présentes tout au long de l’histoire coloniale et sont emblématiques de la distance qui a toujours séparé le discours colonial des pratiques réelles dans les colonies.
Les principes de la République n’ont cessé de s’arrêter, sans le dire, aux limites du fait colonial.
Dans la « République réelle »de l’ère coloniale, la liberté d’expression, par exemple, ne s’appliquait pas aux partisans de l’indépendance dans les colonies, car vouloir l’indépendance, ce n’était pas avoir une pensée ou une opinion, c’était mener des « activités subversives anti-françaises », donc se rendre coupable d’une activité criminelle. À ces gens, ne s’appliquait donc pas non plus le droit de manifestation. Arborer, par exemple, un drapeau algérien était un acte intolérable qui pouvait amener à ouvrir le feu sur ceux qui le portaient, comme c’est arrivé le 8 mai 1945 à Sétif ou, par extension des pratiques coloniales, à Paris même, le 14 juillet 1953, place de la Nation. De la même façon, dans la logique des pratiques coloniales, la manifestation du 17 octobre avait beau être dépourvue de drapeaux, de banderoles et de pancartes, elle était une démonstration muette en faveur de l’indépendance et, comme telle, absolument intolérable. Ceux qui refusaient qu’il soit mis fin au système colonial se sont acharnés à transposer cette logique jusqu’à l’absurde et jusqu’aux sommets de l’horreur, y compris en France même. À l’impression d’être confronté à une énigme doit faire place le constat de la cohérence et de la logique implacable du fait colonial à l’heure de son agonie.

La violence de la répression dans la nuit du 17 octobre 1961 et dans les jours qui ont suivi, en effet, ne doit rien au hasard. Elle témoigne d’une préparation. En plus de la mise en place par Maurice Papon, avec le soutien du ministre de l’Intérieur et du Premier ministre, des structures répressives déjà évoquées, cette répression résulte d’une forme d’encouragement et d’orchestration de la violence, dans les semaines qui ont précédé et durant la nuit fatidique, auprès de l’ensemble des personnels de la préfecture de police. Le 5 septembre, dans une note adressée au directeur du Service de coordination des affaires algériennes et au directeur général de la police municipale, le préfet de police a autorisé explicitement les exécutions sommaires d’Algériens interpellés : Les membres des groupes de choc surpris en flagrant crime doivent être abattus sur place par les forces de l’ordre. » La notion de « flagrant délit » étant, par ailleurs, dans des instructions verbales, laissée à l’entière appréciation des policiers avec promesse d’impunité. Le 2 octobre, Maurice Papon a tenu des propos qui sont allés encore davantage dans le sens d’un « permis de tuer ». Dans la cour d’honneur de la préfecture de police, lors des obsèques du brigadier Jean Demoen, tué par un groupe armé du FLN, il a lancé : « Pour un coup reçu, nous en porterons dix ! » Message qui a été compris par les policiers comme : « Pour un policier tué, nous tuerons dix Algériens suspects d’être des soutiens du FLN ». Dans ces conditions, une atmosphère de peur et de légitimation du meurtre a été systématiquement créée, donnant une parfaite bonne conscience à des actes présentés comme une riposte légitime au meurtre des policiers survenus récemment, assortie d’une garantie totale d’impunité.

Ces meurtres de policiers s’étaient bel et bien produits. Le 13 octobre, le ministre de l’Intérieur Roger Frey en a donné le bilan devant les députés : « Depuis le 1er mai 1961 […], 12 policiers ont payé de leur vie […] leur lutte contre la rébellion. » Mais il se gardait bien de dire qu’il s’agissait, du moins selon les consignes données par la direction de la Fédération de France du FLN – des consignes qui n’ont, certes, pas toujours été appliquées –, d’opérations nominales ciblées en riposte aux dizaines de fusillades par des policiers d’Algériens isolés et de cafés ou hôtels qu’ils fréquentaient, que la préfecture avait multipliées depuis l’été 1961. Des fusillades dont les victimes étaient toujours annoncées par la préfecture comme résultant de « règlements de compte entre Algériens ». À plusieurs reprises, face à cette situation, la direction de la Fédération de France du FLN – qui a établi que cette vague d’agressions venait de policiers et non de leurs adversaires messalistes – a demandé à ses militants de ne pas s’en prendre à des fonctionnaires qui ne seraient pas individuellement identifiés et jugés personnellement responsables d’actes précis de répression. La note du 7 octobre déjà citée qui incitait à tenter de rallier les auxiliaires de la FPA le rappelle « Dans une directive datée du 27 août 1961, nous vous avons posé la question à savoir sur quel principe se base-t-on pour abattre de simples gardiens de la paix ? Dans une autre directive datée du 16 septembre 1961, la même question vous a été reposée, nous n’avons reçu aucune explication à ce sujet jusqu’à ce jour. Nous vous demandons […] de cesser toute attaque contre les policiers, et s’il y a légitime défense, et qu’un policier est abattu, nous fournir un rapport circonstancié […] » La majeure partie de la presse française, en revanche, fait chorus au discours de Maurice Papon. Paris Presse titre le 10 octobre : « Les policiers parisiens ont 50 morts à faire payer au FLN ».

Pour Papon comme pour la grande presse, les ripostes contre des policiers responsables d’exécutions sommaires de militants du FLN ou d’immigrés algériens ne sont pas considérées comme telles. Tous les meurtres de policiers sont présentés comme des attentats aveugles et comme des actes premiers légitimant encore davantage de répression. Par les informations distillées aux policiers comme à la presse, le préfet de police a suscité et entretenu la répression du 17 octobre. Des policiers ont rapporté que Papon avait dit lors de plusieurs visites, en octobre, dans les commissariats de Paris et de banlieue : « Réglez vos affaires avec les Algériens vous-mêmes. Quoi qu’il arrive, vous êtes couverts », et qu’un de ses adjoints avait précisé : « Même si les Algériens ne portent pas d’armes sur eux, vous devez penser qu’ils ont toujours des armes [18]. » Et, dès le début de la soirée du 17 octobre, différents témoignages ont rapporté que la radio des cars de police avait annoncé des assassinats de policiers inventés dans le but d’abuser les fonctionnaires de police en suscitant chez eux un réflexe de vengeance [19].
Les violences de cette nuit, Papon les a assumées et en a couvert les auteurs. Dans son ordre du jour du 1er novembre destiné aux personnels de la préfecture, il les a félicités : « Lors des manifestations des musulmans algériens déclenchées par le FLN, vous avez rempli pleinement votre mission. » Même attitude chez le ministre de l’Intérieur Roger Frey. Confronté à l’interpellation indignée du député Claudius- Petit, le 30 octobre, à l’Assemblée nationale, il lui a fait la réponse que font tous ceux qui savent que l’absence de preuves permettra le déni des crimes qu’ils ont organisés : « Je n’ai pas eu encore entre les mains le début du commencement de l’ombre d’une preuve. » Quant à Maurice Papon, quand on lui montrera en 1999 des photos de victimes prises cette nuit-là, il dira : « Les photographies d’Élie Kagan ? Je n’y crois pas, c’est un montage [20]. »

Les faits, pourtant, sont les suivants : dans une situation où beaucoup d’Algériens avaient eu à subir les conséquences du couvre-feu et de l’accentuation de la répression, fortement incités à aller manifester par l’ordre diffusé par le FLN, des dizaines de milliers d’entre eux, entre 30 000 et 50 000, sont allés vers le centre de Paris sans aucune arme. Beaucoup ont été appréhendés à la sortie des stations de métro et conduits dans des cars de police, où ils ont été passés à tabac. Les cortèges qui ont réussi à se former, avenue de Neuilly, sur les grands boulevards ou au Quartier latin, ont été violemment chargés par les policiers, qui ont ouvert le feu à plusieurs endroits et frappé des manifestants qui ne résistaient pas. Les violences se sont poursuivies pendant plusieurs jours dans les lieux de rassemblement. Il y eut au total 15 000 arrestations, dont 3 000 furent maintenues.
Des milliers d’Algériens furent reconduits en Algérie, dont une partie aussitôt internée. Des hommes furent jetés à la Seine.
Le nombre des morts est probablement de l’ordre de deux cents [21].

Dans un texte écrit en 1986 pour le vingt-cinquième anniversaire de l’événement, soit à mi-chemin du temps qui nous en sépare, Pierre Vidal-Naquet écrivait : « En dépit d’efforts réels, ce drame est, encore aujourd’hui, un des moins bien connus de l’histoire de Paris. Sans doute un film lui a-t-il été consacré, Octobre à Paris, de Jacques Panijel. Sans doute a-t-on pu lire, l’an dernier, le livre de Michel Levine Les Ratonnades d’octobre, qui porte ce sous- titre exact : Un meurtre collectif à Paris. Il y a quelques années aussi, un roman de la série noire, dû à Didier Daeninckx : Meurtres pour mémoire. Beau titre et beau livre, mais, de mémoire, sauf chez les Algériens et chez le petit nombre de ceux qui s’étaient engagés contre la guerre d’Algérie par esprit de justice, il n’y en eut guère [22]. » Il a fallu attendre, en 1991 et 2001, les trentième et quarantième anniversaires du drame pour que d’autres films, d’autres livres et des articles de presse nous en parlent, qu’une plaque soit apposée par la Mairie de Paris sur le pont Saint-Michel et pour que des rassemblements de plus en plus nombreux marquent chaque année son anniversaire. À quand la reconnaissance officielle des responsabilités de l’État dans ce crime et l’ouverture complète des archives permettant de comprendre ce qui l’a rendu possible ? Pierre Vidal-Naquet ajoutait qu’il tenait à qualifier ce massacre de pogrom. Un éditeur l’ayant invité à ne pas utiliser ce terme en lui disant qu’il ne s’employait, d’après les dictionnaires, que pour le massacre des Juifs, il avait tenu à le faire rétablir et publier [23].
Il est un fait que le rapprochement entre cette explosion de haine anti-arabe à l’heure des derniers soubresauts du colonialisme avec les poussées de haine antijuive a été fait très souvent par les rares personnes qui s’en sont scandalisées sur le moment. Emblématique est l’indignation du photographe Élie Kagan, qui avait dû, enfant, porter l’étoile jaune et qui était comme ramené en arrière par ce qu’il voyait. Il écrira sur un carnet :

« […] Octobre 1961
Juillet 1942
Métro, wagons bondés
Français, nez contre vitres, indifférents,
on tire, on tue, et puis on efface vite.
Et moi Seul, tout seul avec ma peur au ventre
Qui fait mon métier d’homme
Et fixe pour toujours
Le crime, l’assassinat
La mort des innocents
En espérant, Naïf
Que peut-être les images réveilleront les Autres [24] […] »

Le 12 février 1962, lors des obsèques des victimes de la manifestation de Charonne [25], auxquelles participaient un demi-million de personnes, un seul orateur, celui qui intervenait au nom du syndicat CFTC (qui deviendrait la CFDT), a fait une allusion aux victimes algériennes du mois d’octobre précédent. Vérité-Liberté exprimait sa gêne en publiant une photo de l’immense foule assemblée surmontée du titre : « Et ceux du 17 octobre [26] ? »

Cinquante ans plus tard, la société française va-t-elle enfin comprendre la portée de
cet événement ? En bravant le couvre-feu, les manifestants algériens d’octobre 1961 ont affirmé leur volonté de transgresser l’interdit colonial, quels que soient les déguisements et les précautions de langage dont celui-ci cherchait à s’entourer. Ils ont affirmé en masse leur volonté de cesser d’être invisibles. « On a vu place de l’Opéra les parias des bidonvilles », a écrit Kateb [27]. Et ces parias ont eu, de surcroît, l’impudence de s’habiller comme des citoyens, de porter des vestons, des chemises blanches, des cravates, des robes et des vêtements du dimanche, pour affirmer en plein Paris qu’ils ne voulaient plus être les inconnus des colonies, des bidonvilles et des banlieues lointaines, dépourvus d’existence et d’égalité.

Ce fut l’un des quelques moments où le peuple algérien s’est exprimé et où il est apparu comme un acteur indéniable du conflit. Ces moments, en effet, n’ont pas été très nombreux durant cette guerre d’indépendance algérienne qui fut surtout une guerre de maquis et d’attentats. On peut probablement en distinguer quatre, avant la grande explosion populaire de juillet 1962, lors de l’indépendance. La manifestation du 17 octobre 1961 à Paris est l’un d’entre eux, avec, en Algérie : l’insurrection paysanne du 20 août 1955 dans le Constantinois, le départ des étudiants algériens de leurs universités le 19 mai 1956 et les manifestations populaires en faveur de l’indépendance du 11 décembre 1960. Tous furent de ces rares moments où le peuple algérien lui-même, indépendamment des consignes du FLN, qui l’encourageaient, certes, à prendre part à ces mouvements, a montré, par l’importance de sa mobilisation, qu’il voulait entrer en scène et faire entendre sa propre voix. On peut se demander si, dans ces moments, le FLN n’a pas parfois plutôt suivi, en tentant de les encadrer de manière plus ou moins efficace ou discutable, des besoins d’expression populaire qui s’exprimaient fortement indépendamment de lui. Quoi qu’il en soit, davantage probablement que les actions militaires, ce sont ces mouvements populaires qui ont provoqué la défaite de la puissance coloniale. Qui ont fait que la guerre d’Algérie s’est achevée pour la France par un « Dien Bien Phu politique [28] ».

Cela n’exclut pas, au contraire, de poser des questions sur l’autoritarisme qui a prévalu au sein du FLN. L’arbitraire qui s’est déployé dans la société algérienne au lendemain de l’indépendance n’est pas né de rien, il s’est construit au sein même du FLN durant la guerre. Le chef de la Fédération de France, Omar Boudaoud, nommé en juin 1957, au moment où la direction du FLN a décidé d’éliminer, par tous les moyens, les rivaux du MNA pourtant issus du même mouvement indépendantiste, le PPA-MTLD, était représentatif du comportement autoritaire qui s’est imposé un peu partout au sein du Front et qui a eu des conséquences sur l’organisation de la mobilisation d’octobre 1961 [29]. La question des menaces contre ceux qui ne manifesteraient pas et celle des risques qu’on faisait courir aux manifestants doivent être aussi posées. De tout cela, il faut écrire l’histoire, une histoire qui ne peut se réduire au seul recueil des souvenirs individuels. Les mémoires sont trompeuses, comme l’ont montré les historiens britanniques Neil MacMaster et Jim House en établissant que le militant du FLN qui avait déclaré être le principal organisateur à Paris du 17 octobre et porter le pseudonyme de « Maurice » s’était en réalité attribué la fonction et le pseudonyme d’un autre militant [30]. Selon eux, la notice biographique rédigée par sa fille dans le livre paru en 2001, Le 17 octobre 1961. Un crime d’État à Paris, n’est donc pas exacte sur ce point [31]. Ces historiens ont aussi montré, sur la base d’une étude minutieuse des archives du FLN saisies par la police, que « les processus qui présidèrent à l’organisation des manifestations d’octobre furent très complexes » et qu’ils doivent être également rapprochés des enjeux politiques internes au FLN, relatifs notamment aux rapports de force entre la Fédération de France et le GPRA [32]. Le travail historique nécessaire sur toutes ces questions doit être poursuivi [33].

Mais l’essentiel est de prendre la mesure de l’événement. Pour dire ce qu’était le colonialisme contre lequel ces manifestants se sont dressés, revenons aux mots d’un écrivain. Dans son Journal, en décembre 1961, Jean Amrouche, auteur algérien d’origine berbère reconnu alors en France par nombre d’intellectuels et de gens de culture, ami de Gide, de Mauriac, de Claudel et de Camus, disait sa douleur personnelle de se heurter dans la société française à une sorte de mur qui le repoussait. Cela dans une phrase lapidaire et elliptique, mais qui définit bien cet impensé colonial à l’origine des violences d’octobre comme de leur déni : « Condition du Paria : Français selon la loi, en partie selon ses mœurs, l’esprit, mais une partie de la demeure m’a toujours été interdite [34]. »

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LES TEXTE DE L’ÉPOQUE


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SOMMAIRE DU LIVRE :

PRÉFACE : Un mardi pluvieux d’octobre, par Gilles Manceron

LES TEXTES DE L’ÉPOQUE

Ordre du jour du préfet de police Maurice Papon, 5 octobre 1961
Communiqué du préfet de police Maurice Papon, 5 octobre 1961 à 17 heures
Circulaire n° 43-61 du directeur général de la police municipale de Paris concernant la « circulation des Français musulmans algériens », 7 octobre 1961
Circulaire du comité fédéral de la Fédération de France du FLN, 10 octobre 1961
Déclaration du MRAP à propos des mesures prises contre les Algériens, 12 octobre 1961
Note de la Fédération de France du FLN, 17 octobre 1961
Communiqué de la préfecture de police, 17 octobre 1961 à minuit
Appel au peuple français de la Fédération de France du FLN, 18 octobre 1961
Déclaration du Bureau politique du Parti communiste français, L’Humanité, 18 octobre 1961
Appel lancé par Les Temps modernes, 18 octobre 1961
« Pourquoi les attentats ? » Déclaration de la Fédération de France du FLN, 22 octobre 1961
Appel de la Fédération de France du FLN aux membres de la Force de police auxiliaire
Question de Claude Bourdet, membre du Conseil municipal de Paris, à Maurice Papon, préfet de police, 27 octobre 1961
Déclarations recueillies par le MRAP, 27 et 31 octobre 1961
« Un groupe de policiers républicains déclare… »Tract anonyme, 31 octobre 1961
« Les Algériens au Parc des expositions », Vérité-Liberté, novembre 1961

POSTFACE : 17 octobre 1961, un crime d’État de la République française, par Henri Pouillot

BIBLIOGRAPHIE, FILMOGRAPHIE, ASSOCIATIONS

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“LE 17 OCTOBRE DES ALGÉRIENS”

suivi de

“LA TRIPLE OCCULTATION D’UN MASSACRE”

Présentation

À cinq mois de la fin de la guerre d’Algérie, le 17 octobre 1961, Paris a connu le plus grand massacre de gens du peuple depuis la Semaine sanglante de 1871. Des dizaines de milliers d’Algériens manifestant sans armes ont été violemment réprimés par des policiers aux ordres du préfet Maurice Papon, faisant peut-être deux cents morts. Et pendant une trentaine d’années, ce drame a été« oublié ». Pourtant, dès l’époque, des femmes et hommes courageux ont tenté de le faire connaître. En témoigne le texte inédit que Marcel et Paulette Péju devaient faire paraître à l’été 1962 et publié ici pour la première fois. Nourri de nombreux témoignages d’Algériens recueillis à chaud, sa lecture ne laisse pas indemne.

Il est complété par “La triple occultation d’un massacre” de Gilles Manceron, qui jette une lumière neuve sur cet événement. Papon était appuyé dans le gouvernement par ceux qui désapprouvaient les choix du général de Gaulle dans les négociations en cours pour l’indépendance de l’Algérie. Il a préparé et orchestré la violence de la répression en donnant aux policiers une sorte de permis de tuer. Gilles Manceron éclaire également les raisons de la longue occultation du massacre : sa dissimulation par ses organisateurs au sein de l’État français ; l’effacement de sa mémoire au profit de celle de Charonne en février 1962 ; et le silence des premiers gouvernants de l’Algérie indépendante, car les organisateurs de la manifestation étaient devenus leurs opposants.

Ce livre explique la logique implacable d’un événement qui correspond aux derniers feux de la folie coloniale, paroxysme d’une période où la France s’est écartée des principes hérités des plus grands moments de son histoire.

Editions La Découverte
Collection : Cahiers libres
Parution : octobre 2011
Prix : 14 €
ISBN : 9782707171177


TABLE DES MATIÈRES

Préface : Une publication nécessaire, par Gilles Manceron
Un drame longtemps occulté
« Faire éclater la mystification »

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I / Le 17 octobre des Algériens, par Marcel et Paulette Péju

Introduction

1. La bataille de Paris

2. Le 17 octobre : pourquoi ? Comment ?

3. Ce soir-là…

4. La manifestation des femmes

Annexes
1. El Moudjahid : « La politique du crime »
2. Fédération de France du FLN : « Appel au peuple français » -
3. Appel des intellectuels français du 18 octobre
4. L’opinion française dénonce
5. Des Algériens accusent

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II / La triple occultation d’un massacre, par Gilles Manceron

Un gouvernement français divisé face à la perspective de l’indépendance de l’Algérie
Août 1961 : Michel Debré\"débarque\" le garde des Sceaux Edmond Michelet
Le système de répression extrajudiciaire mis en place par Maurice Papon
L’obstacle représenté par Edmond Michelet
L’habillage légal d’une répression extrajudiciaire
La provocation de la décision du couvre-feu du 5 octobre pour les Algériens
Le peuple algérien est entré en scène
Mensonges et dissimulation du crime
Un déni qui a la vie dure
L’occultation par le PCF et la mémoire de Charonne
Les blocages du côté algérien
Le rôle méconnu des femmes
La nécessaire reconnaissance

Bibliographie et références

Ouvrages et documents
Théâtre
Radio
Filmographie
Musique
Associations.

Sources : éditions "La Découverte"

La sortie du livre a aussi été annoncé sur le site Al-Oufok
“ALGÉRIE : UN TEXTE INEDIT TEMOIGNE DE L’HORREUR DU 17 OCTOBRE 1961 À PARIS”
cliquer ici

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{{{ {{LES RATONNADES D’OCTOBRE _ Un Meutre collectif à Paris en 1961}}

Livre de Michel LEVINE
ré-édition
éditions Jean-Claude Gawsewtich

PARUTION
LE 22 SEPTEMBRE 2011

Isbn 9782350132761
Sodis 7261570
288 pages
18,90 euros

Octobre 1961. À Paris, en pleine guerre d’Algérie, Maurice Papon, préfet de police et grand manœuvre de la répression, instaure un couvre-feu pour les Algériens, citoyens français de seconde zone : chasse au faciès, interpellations systématiques, bouclages de quartiers, etc.
Les conditions de vie deviennent infernales pour des milliers d’hommes et de femmes.
En protestation contre ces mesures qui rappellent l’occupation nazie, le F.N.L. organise le 17 octobre une manifestation pacifique.

Papon planifie la répression. La machine à tuer est en marche… On retrouvera des cadavres dans la Seine.

Le crime commis, de la part des autorités et des médias, c’est le grand silence, le mutisme absolu qui durera 24 ans jusqu’à la publication en 1985 des Ratonnades d’octobre. Pour la 1ère fois, un livre dévoile ce qui était ignoré de l’historiographie officielle ou soigneusement refoulé.
L’auteur s’est livré à une véritable enquête, interrogeant victimes, avocats, témoins.

Alors que l’Algérie tourne une page et prépare son avenir, Michel Levine revient sur cette période tragique de l’Histoire à l’occasion du 50e anniversaire du tragique événement d’octobre 1961 avec une édition augmentée.

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[1Gilles Manceron est historien, spécialiste du colonialisme français.

[2Kateb Yacine, « Dans la gueule du loup », dans 17 octobre 1961. Mémoire d’une communauté , éditions Actualité de l’immigration, Amicale des Algériens en Europe, Montreuil, 1987, p. 115-117

[3Leïla Sebbar, « La Seine était rouge », dans 17 octobre 1961. Mémoire d’une communauté, op. cit. , p. 119-121.

[4Maurice Papon, Les Chevaux du pouvoir. Le préfet de police du général de Gaulle ouvre ses dossiers, 1958-1967 Plon, Paris, 1988, p. 190.

[5Témoignage anonyme cité par Rémy Valat, Les Calots bleus et la bataille de Paris. Une force de police auxiliaire pendant la guerre d’Algérie, Michalon, Paris, 2007, p. 107.

[6Maurice Faivre, « L’affaire K comme Kabyle (1956) », dans Revue d’histoire. Guerres mondiales et conflits contemporains , n° 191, 1998, p. 38.

[7Raymond Muelle, Sept ans de guerre en France. Quand le FLN frappait en métropole , Éditions du Patrimoine, Monaco, 2001, p. 179.

[8Paulette Péju, Les Harkis à Paris , François Maspero, 1961, rééd. La Découverte, Paris, 2000, p. 59.

[9Maurice Papon, Les Chevaux du pouvoir, op. cit. , p. 185.

[10 Ibid , p. 199-200

[11Cette directive a peut-être été rédigée en réalité par Ali Haroun, qui a signé « Kr » pour « Kaddour » un certain nombre de notes. Voir Neil MacMaster et Jim House, « La Fédération de France du FLN et l’organisation du 17 octobre 1961 », dans Raphaëlle Branche (dir.), La Guerre d’indépendance des Algériens (1954-1962) , Perrin, coll. « Tempus », Paris, 2009, p. 312.

[12« Harkis ! “Calots bleus” ! Membres des “Forces de police auxiliaire” ! », appel de la Fédération de France du FLN publié dans le n° 68, du 5 août 1960, d’El Moudjahid, organe central du Front de libération nationale. Un tract qui le reproduit figure dans les archives de la préfecture de police de Paris (H1B7), publié par Rémy Valat, Les Calots bleus et la bataille de Paris, op.cit. , p. 250-251. Voir p. 68.

[13Archives de la préfecture de police de Paris, Ha 84, dossier « FPA : création de l’unité 1959-1960 », rapport adressé à Pierre Somveille par Roland Faugère, daté du 27 décembre 1960. Cité dans Linda Amiri, La Bataille de France. La guerre d’Algérie en métropole , préface de Benjamin Stora, Robert Laffont, Paris, 2004, p. 112.

[14Constantin Melnik, La mort était leur mission. Le service Action pendant la guerre d’Algérie , Plon, Paris, 1996, p. 181. Ce meurtre est confirmé par Rémy Valat, Les Calots bleus et la bataille de Paris, op. cit. , p. 126-129.

[15Olivier Long, Le Dossier secret des Accords d’Évian. Une mission suisse pour la paix en Algérie , Office des publications universitaires, Alger, 1989, p. 101.

[16 Ibid. , p. 102.

[17Pierre Vidal-Naquet, « Alger-Paris-Alger », préface à la réédition de Paulette Péju, Ratonnades à Paris , précédé des Harkis à Paris , La Découverte/Poche, Paris, 2000, p. 5.

[18Voir le texte du policier ancien résistant Émile Portzer et du brigadier-chef Bernej ( infra, p.90).

[19Voir les questions posées par Claude Bourdet à Maurice Papon le 27 octobre 1961 au conseil municipal de Paris ( infra, p.72).

[20Le Monde, 7/8 février 1999, p. 9.

[21La liste actualisée qu’a publiée en 2009 Jean-Luc Einaudi recense 389 cas de Nord-Africains, des Algériens pour la plupart, morts ou disparus durant l’automne 1961, dans les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise de l’époque. Jean-Luc Einaudi, Scènes de la guerre d’Algérie en France. Automne 1961 , Le Cherche-Midi, Paris, 2009, p. 391-406.

[22Pierre Vidal-Naquet, « Ce jour qui n’ébranla pas Paris », dans 17 octobre 1961. Mémoire d’une communauté, op. cit. , p.45.

[23 Ibid , p. 45-46.

[24Jean-Luc Einaudi et Élie Kagan, 17 octobre 1961 , postface de Thérèse Blondet-Bisch, Actes Sud/Solin, 2001, p. 74.

[25Le 8 février 1962, à l’appel du PCF, de la CGT, de la CFTC, de l’Unef, du PSU et d’autres organisations de gauche, une manifestation est organisée à Paris pour dénoncer les agissements de l’OAS et la guerre d’Algérie.
Ce rassemblement interdit, le préfet Papon donne l’ordre de le réprimer. Parmi les manifestants, chargés violemment au métro Charonne, neuf trouveront la mort.

[26 Vérité-Liberté. Cahiers d’information sur la guerre d’Algérie , n° 16-17, février-mars 1962, p. 1.

[27Yacine Kateb Yacine, « Dans la gueule du loup », op. cit. , p. 116.

[28 11 décembre 1960. Le Dien Bien Phu politique de la guerre d’Algérie , NAQD, « Petite Collection-histoire », Alger, 2010.

[29« En désaccord sur le mot d’ordre de porter en France la guerre sans qu’il en eût été sérieusement discuté, [Mohammed] Harbi préféra finalement démissionner en septembre 1958 du comité fédéral et reprendre un temps ses études en Suisse », Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, 1954-1962 , Fayard, Paris, 2002, p. 534.

[30Ils montrent que « Maurice » n’était pas Mohammedi Saddek mais était en réalité Mohamed Zouaoui. Neil MacMaster et Jim House, « La Fédération de France du FLN et l’organisation du 17 octobre 1961 », dans Raphaëlle Branche (dir.), La Guerre d’indépendance des Algériens (1954-1962), op. cit. , p. 127-149.

[31Anissa Mohammedi, « Mohammedi Saddek, un combattant du FLN », dans Olivier Le Cour Grandmaison (dir.), Le 17 octobre 1961. Un crime d’État à Paris , La Dispute, Paris, 2001, p. 141-156.

[32Le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) était le bras politique du Front de libération nationale (FLN) durant la guerre d’Algérie. Il négociera les accords de paix (accords d’Évian) avec la France en 1962.

[33Voir sur ce point la thèse de Linda Amiri (2011) sur la Fédération de France du FLN, ainsi que celle d’Amar Mohand Amer (2010) sur la crise du FLN de l’été 1962. Et aussi : Le 17 octobre des Algériens, la triple occultation d’un massacre , texte inédit de Paulette et Marcel Péju, introduction de Gilles Manceron, La Découverte, Paris, 2011.

[34Jean El Mouhoub Amrouche, Journal 1928-1962, édité et présenté par Tassadit Yacine Titouh, Non Lieu, Paris, 2009, p.354.

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