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"LA GUERRE DE LIBÉRATION NATIONALE ALGÉRIENNE 1954 – 1962" (LIVRE DE J NAGY LASZLO, TRADUIT DU HONGROIS EN FRANÇAIS)

jeudi 14 octobre 2010

C’est le premier livre écrit en hongrois sur la guerre d’Algérie qui fut une guerre de libération nationale et non pas une « simple » guerre. Elle fit partie de ce grand bouleversement violent d’importance historique déclenché après la deuxième guerre mondiale qui aboutira à l’accès à l’indépendance, à la souveraineté des anciennes colonies. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi en devise les mots de Frantz Fanon résumant bien l’essentiel de ce processus de décolonisation : « Libération nationale, renaissance nationale, restitution de la nation au peuple, Commonwealth, quelles que soient les rubriques utilisées ou les formules nouvelles introduites, la décolonisation est toujours un phénomène violent ». (Les damnés de la terre)

Mais comment et pourquoi un historien hongrois de l’Europe centrale s’intéresse-t-il à la guerre d’Algérie ? La guerre durant j’étais lycéen et comme tel ouvert, curieux de tout ce que se passait dans le monde. Et à l’époque – en 1961-62 – les événements d’Algérie se trouvaient à la Une des journaux. Plus tard, lors des études universitaires cette curiosité devint un intérêt scientifique, même un engagement intellectuel : faire connaître l’histoire de cette guerre au public le plus large possible. À travers mes recherches je connus une des plus extraordinaire guerre de libération nationale du tiers monde. Et depuis les années 1980 je ne cesse pas de transmettre les résultats de mes recherches aux étudiants.

Le livre repose en premier lieu sur les documents d’archives (Archives d’outre-mer, Sciences Po, Budapest). Ce qui est nouveau c’est la position du bloc communiste présentée et analysée à travers les archives hongroises (où se trouvent des documents soviétiques aussi).

Ce résumé ne veut pas être complet, mais il veut présenter l’opinion de l’auteur sur quelques questions de l’histoire de la guerre d’Algérie.

Elle fut une guerre de libération nationale parce qu’elle avait détruit les bases politiques et socio-économiques du système colonial qui entravait la formation de l’(État) nation algérienne. Par cette destruction, la guerre créa aussi les conditions d’une révolution sociale. Donc – à notre avis – la guerre peut être considérée comme le début d’une révolution. (Certains articles des derniers numéros d’El Moudjahid montrent nettement cette intention de la révolution sociale).

La prise de position des communistes est très discutée, même condamnée, surtout celle du PCF en raison de la fameuse phrase de la déclaration du 9 novembre : « …ne saurait approuver le recours à des actes individuels susceptibles de faire le jeu des pires colonialistes ». Mais on omet souvent de citer les causes indiquées des « événements » : « …refus opposé par les gouvernants français aux revendicationes nationales (souligné par nous NDLA) de l’immense majorité des Algériens » et « …misère généralisée et croissante, conséquence directe du régime colonial », ou « …l’existence en Algérie de problèmes politiques de caractère national ». Le PCF suivit rigoureusement la ligne de Moscou : pas de confiance en des mouvements anticoloniaux dirigés par les nationalistes !
Par contre certains membres du PCA – sa direction en étant informée – passèrent cette ligne et aidèrent les combattants algériens. Et en 1955 – bien avant que la ligne de Moscou ait changé – le PCA rejoignit la lutte armée en organisant son propre maquis.

Ce qui était une erreur grave – en premier lieu celle du PCF – c’était qu’ils n’avaient pas compris la situation particulière de l’Algérie qui ne permettait pas d’autre voie que celle de la lutte armée pour conquérir l’indépendance. La voie pacifique – « légale » – fut exclue ! Le PCF combla ses erreurs en mars 1956 : il vota les pouvoirs spéciaux. Il crut en un deuxième du Front populaire. Mais la majorité de gauche issue des éléctions du 2 janvier 1956 fut une majorité arithmétique et non point politique – contrairement à 1936 – en raison de l’anticommunisme très fort de la guerre froide.

Le FLN rencontra d’énorme difficultés après le déclenchement de la guerre de libération nationale. Ses premiers faits d’armes de type blanquiste ne souleva pas l’enthousiasme attendue de la population algérienne. Mais les combats d’août 1955 signifièrent déjà une étape supérieure de la guerre : une insurrection. En comparaison avec ceux-ci les « événements » du 1er novembre paraissent être des « actes indiividuels ».

La véritable rsponsabilité de l’élargissement de la guerre revient au gouvernement dirigé par le socialiste Guy Mollet du Front républicain. Contre la majorité de l’opinion publique et la promesse faite au cours de la campagne éléctorale il choisit les armes au lieu des moyens pacifiques. Et ce fut l’armée qui devint l’arbitre en Algérie, non pas le pouvoir civil de Paris. Elle organisa – « officiellement » en 1957 – la grande répression à Alger : torture, disparitions, assassinats devinrent quotidiens, ruinant les fondements politiques et moraux de la République et - en fin de compte - provoquant son effondrement.

Le coup dur subi dans la « bataille d’Alger » ébranla le FLN et provoqua les dissensions entre « l’intérieur et l’extérieur » (qui se manifesta déjà lors de l’organisatopn du congrès de la Soummam). Une certaine intolérence-intransigence commença à apparaître au sein du FLN (melouza, assassinat d’Abane Ramdane, épuration aveugle).

Le grand bruit de la « bataille d’Alger » et surtout le bombardement de Sakiet rendirent la guerre d’Algérie inéluctablement un problème international. Les « bons offices » des Anglo-Saxons à propos de ce dernier accélélèrent l’effondrement de la IVème République et permirent le retour au pouvoir du général de Gaulle.

Paradoxalement le PCF, force politique la plus antigaulliste, « contribua » au retour du Général. Cette « contribution » se manifesta dans l’anticommunisme extrêmement fort propre à toutes les formations politiques antiputschistes dont les socialistes qui – au début antigaullistes – refusèrent, comme en janvier 1956, la main tendue des communistes et choisirent « le moindre mal ». Cela n’empêche que l’analyse communiste des événements et la présentation de de Gaulle furent fausses.

De Gaulle pensa-t-il déjà en 1958 l’indépendance de l’Algérie inéluctable ? Et qu’ il en gérerait le processus ? Non, je ne partage pas cette opinion. Ce qu’il voulait c’était garder l’influence française en Algérie… même au prix de l’indépendance de la colonie.

La réponse du FLN à la nouvelle situation fut efficace, couronnée de succès :

  • sur le plan militaire l’offensive Challe peut être considérée comme un succès, mais sur le plan politique elle fut un échec elle ne réussit pas à obtenir le soutien des Algériens, et même elle renforça leur sentiment national et, par conséquent, la position du FLN.
  • changement de tactique de l’ALN : éviter des chocs décisifs avec l’adversaire. A la violence massive de l’armée française l’ALN opposa la violence « individuelle » embuscades, accrochages éclairs, des coups de main spéctaculaires, attentats (en Algérie et en France)
  • grandes manifestations de masse (décembre 1960, octobre 1961), élargissement du mouvement de la paix (manifestations en France à la fin 1961 – au début 1962)
  • internationalisation du problème algérien constitution du GPRA, sa reconnaissance de facto par l’une des superpuissances, l’URSS, le vote du droit à la libre disposition du peuple algérien par l’Assemblée générale de l’ONU en décembre 1960.

À propos des divergences entre le GPRA et l’État-major à mon avis cela ne veut pas dire l’opposition entre les « civils » et les « militaires » ou la luttes des clans. C’est simplifier le problème. Il s’agit plutôt de l’orientation politique à choisir dans l’Algérie indépendante (Ainsi l’implosion du FLN lors de l’accès à l’indépendance paraît – à mon avis – logique. Cela ne veut pas dire que les ambitions personelles n’y étaient rien !) Au sens professionel on ne peut pas parler de l’armée comme corps homogène pendant la guerre les soldats de l’ALN sont surtout des paysans en uniforme (Voir L’ALN, armée révolutionnaire in El Moudjahid, 1er octobre 1961). Parlant de la militarisation du FLN on ne peut pas s’empêcher de penser à l’instrumentalisation de l’époque ultérieure.

J. Lazlo



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