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HOMMAGE À BOUGUERMOUH

vendredi 8 février 2013

Salut, Abderahmane !

J’ai appris avec consternation la disparition de Abderhamane Bouguermouh. Bien que le sachant malade depuis longtemps, sa disparition m’afflige. C’est un homme de cœur et un homme pourvu d’une rare noblesse d’esprit qui nous quitte.

C’est aussi un homme de culture qui, par son cinéma, nous a donné à nous réconcilier avec nos racines et notre être profond tout en restant présent au monde.

On n’est pas près d’oublier son savoureux“ Kahla ou Beïda,” ce film plein de sensibilité et de finesse.
Et, bien sûr, avec “La Colline oubliée,” le cinéma amazigh lui doit un acte de naissance flamboyant qui, en outre, a transformé le modèle de production cinématographique en Algérie puisqu’il a été financé par des cotisations de particuliers.
En réalisant ce film qui demeurera quoi qu’il arrive le premier film amazigh du cinéma algérien, Abderhamane Bouguermouh tenait la promesse faite à Mouloud Mammeri qu’il porterait un jour son roman à l’écran.

Avec lui, disparaît aussi un écrivain qui, malheureusement, a peu produit.
Son livre de mémoires, cependant, nous révèle un écrivain accompli, un maître de la narration et de la langue qui nous aurait certainement légué une œuvre littéraire notable s’il s’y était consacré.

En cette douloureuse circonstance, je prie sa famille de croire en mes sentiments amicaux et en mes condoléances attristées.

Arezki Metre
Le Soir d’Algérie
le 7 février 2013


Né le 25 février 1936 à Ouzellaguène (Wilaya de Béjaia), fils d’un instituteur de la sévère école normale française et d’une mère analphabète qui ne connait que les poèmes et chants kabyles. Etudes secondaires à Sétif où il voit de prés l’horreur et la mort lors des événements de 1945. En 1957, il rencontre l’écrivain Mouloud Mameri ! Début d’une longue amitié. Après un passage à l’IDHEC (Institut des hautes des Etudes Cinématographiques) en 1960. Bouguermouh réalise des émissions de variétés pour la télévision, RTF, à Cognacq Jay.

En 1963, il retourne au pays et participe à la création du CNCA (Centre National Cinématographique Algérien). Il en est exclu en 1964, à cause de ses idées. En 1965, sur un texte de Malek Haddad, il tourne "Comme une âme", un moyen métrage en berbère. Le film est refusé par le ministère qui en exige une version arabe. Il part alors pour Paris où, il post-synchronise le film en français : cela lui vaudra un deuxième licenciement, la confiscation et la destruction des positifs et des négatifs. Le film ne sera jamais diffusé.

De 1965 à 1968, il réalise une série de documentaires de commande et prend contact avec les premiers intellectuels de la revendication berbère, Monsieur Hannouz, Taous Amrouche, Mouloud Mameri, Batouche Mouloud et Bessaoud Mohand Arab. Le réalisateur s’intéresse à un documentaire archéologique avant de tourner un autre moyen métrage "La grive", en 1967. Plusieurs fois primés, le film constitue selon les journalistes l’une des premières anthologies cinématographique algérienne.
À partir de la fin des années 60, il tourne plusieurs courts métrages et contribue par la réalisation d’un épisode au film collectif L’Enfer à dix ans (1968).
En 1968, il dépose "La colline oubliée" à la commission de censure. Dans une lettre d’intention, il précise que ce film ne peut se faire qu’en kabyle. Le projet est rejeté sans explication.

Commence alors une longue traversée du désert au cours de laquelle, il collabore avec Mohamed Lakhdar Hamina, comme assistant réalisateur, dans "Chronique des années de braises", en 1973.
Il réalise successivement pour la télévision (la RTA), deux longs métrages : Les Oiseaux de l’été (1978) et Noir et blanc / Kahla wa beida (1980), grand succès populaire. En 1987, il tourne son premier long métrage en 35mm Cri de pierre / Ourâkh al-hajar, plusieurs fois primé à l’étranger, mais très attaqué en Algérie. En 1989, on lui accorde enfin, l’autorisation de tourner en berbère La Colline oubliée (1996).

Abderrahmane Bouguermouh décède le 03 février 2013, à l’hôpital de Birtraria (Alger) à l’age de 77 ans, des suites d’une longue maladie.

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HOMMAGE À BOUGUERMOUH


9 février 09:02

« Il a été le pionnier. Vous pensez, avec sa ténacité, le film a eu droit à 32 km d’affiches dans le métro, abribus, salles de cinéma, Champs Elysées !, les plus grandes radios en plus avec des spots fréquents !

Pour la première fois, un film en berbère,un film de la visibilité ! Du jamais vu dans Paris et dans le monde.

J’ai revu Bouguermouh à Monaco, cette fois-ci dans une salle avec des spécialistes.
Il leur expliquait ce qu’est la misère, le typhus, les poux, lot des plus démunis dans la montagne de Kabylie, pendant la guerre !

Nous nous sommes revus une seule fois après, juste pour échanger quelques mots, la maladie ayant pris le dessus.

Humble parmi les humbles, il sait exprimer leur détresse.
Il ne pouvait que rejoindre Ighzer "Amweqran" , celui des « Imweqranen » , "des grands" comme l’indique le nom.

Gana Mammeri