28-29 juin, GREVE GENERALE, LE PEUPLE GREC MANIFESTE POUR NE PAS LAISSER VENDRE SON PAYS

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Les premières images d’avant la grève (http://www.youtube.com/watch?v=h9I0nZb3qHw&feature=iv&) montrent la mobilisation pacifique

Après le succès massif de la grève générale, les images montrent au monde le visage répressif des gouvernants et puissances financières qui ont précipité tout un peuple dans une crise profonde et n’ont d’autre solution à proposer que l’austérité sélective envers les plus défavorisés, la brutalité et les gaz lacrymogènes
(29 06 ) http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=oOvwMRVI9Rk

Suivent les Informations et commentaires de Aliki PAPADOMICHELAKI

Socialgerie rappelle à cette occasion qu’au même moment, la flotille internationale de solidarité avec Gaza est temporairement retardée au port du PIrée, suite en particulier à un grave sabotage d’un des bateaux composant la flotille. Des pressions énormes sont exercées sur Athènes par les gouvernants et services sionistes pour bloquer cette solidarité. Comme pour rappeler qu’en 1967, le coup d’Etat du régime des colonels, grecs; inspiré et appuyé par la CIA et l’OTAN, avait comme l’un de ses objectifs de faire de la Grèce une base logistique pour l’agression de la Guerre des Six Jours contre les pays arabes qui sera déclenchée un peu plus tard.

LE PEUPLE GREC EN LUTTE NE LAISSERA PAS VENDRE SON PAYS

Une lettre d’Athènes, par Aliki Papadomichelaki

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Mardi 28/6/2011

Du Mardi 28/6 au Mercredi 29/6/2011 se discute au parlement grec le 2eme Memorandum, celui qu’on appelle de Moyen Terme. Il apporte des propositions pour des plus grandes mesures d’austérité sur le dos des travailleurs, ainsi que pour la vente des dernières parts de l’Etat grec dans les entreprises restantes non encore privatisées du secteur public de grande importance sociale (comme les compagnies d’électricité, d’eau, des transports), ainsi que des hôpitaux publics et de l’enseignement universitaire.

En outre, ce deuxième mémorandum contient de nouvelles mesures, qui rendent plus lourde l’imposition des salariés, alors que les grandes fortunes ne sont pas touchées proportionnellement..

La Grèce est ainsi devenue, depuis l’année dernière, le plus important cobaye de la crise économique et financière qui frappe l’Europe et l’ensemble de la planète. L’argumentation principale est le chantage au manque de liquidités, pour subvenir aux multiples payements, notamment des retraites, alors que nombreux grands capitalistes, banquiers et autres, détiennent dans leurs comptes en Suisse plus de 600 milliards d’euros. Il faut ajouter que la plupart d’entre eux n’ont pas paye depuis longtemps leurs parts au fisc grec.

Le peuple grec se soulève déjà depuis plus 30 jours dans plusieurs grandes villes grecques, avec à l’avant-garde les rassemblements de la Place de Syntagma (place de la Constitution) devant laquelle domine l’édifice du parlement.

Il ne s’agit plus du mouvement des indignés, comme ont l’habitude de le nommer les grands médiats. Il s’agit d’un mouvement de plus en plus conscient, sous le slogan « Nous ne payerons pas votre crise ». Il demande la démocratie directe, seule capable de combler les énormes lacunes d’un démocratie représentative de plus en plus effilochée par un système néolibéral en pleine crise politique sociale et civilisationnelle.

Jeudi 30 juin 2011
Le parlement grec a voté hier après midi le Memorandum de Moyen Terme et a perdu la confiance de la majorité écrasante de la nation.

La journée de Mercredi s’est déroulée dans un climat de protestation généralisée. Des dizaines des milliers de citoyens ont rempli la Place de Syntagma devant le Parlement et des représentants de manifestations d’autres grandes villes du pays sont arrivés. Une manifestation pacifique, de tout âges, avec une prédominance de jeunes gens, dont l’avenir se joue, du fait que le chômage chez les jeunes (18 a 25 ans) dépasse actuellement les 40%.

« Pain, enseignement, liberté, la junte n’est pas terminée en 1973 » crient les manifestants en se referant au slogan de l’année 1973, durant la dictature des colonels, ou les étudiants -tout d’abord- et la population entière par la suite a fait sonner les cloches de la chute de la junte. Ils veulent par ce slogan porter l’accent sur les conditions politiques et sociales nécessaires afin que la démocratie soit respectée. Pas une démocratie formelle mais une réelle démocratie directe, populaire et sociale.

La police, sous l’ordre du gouvernement, a noyé la place de lacrymogènes. Certains de ces gaz toxiques ont même été périmes depuis 1989. D’autres sont fortement dangereux pour la santé, provocant des cancers du système respiratoire.
Des organisations mondiales, comme celle des droits Humains, ont protesté contre la violence utilisée par la police, inédite pour un gouvernement qui se veut démocratique.

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« Nous ne sommes pas des cafards pour nous arroser ainsi de gaz » m’ont dit trois jeunettes d’à peine 18 ans, auxquelles j’ai offert des masques médicaux pour qu’elles se protègent des nuages infects. Elles sont pourtant restées là auprès de moi, jusqu’à la fin de la manif. Et certainement elles reviendront ce soir, à l’appel de l’Assemblée de la Place, pour empêcher l’application de la loi votée hier par 155 voix pour, 138 contre et 5 abstentions. Que vaut cette « majorité » dans un parlement désormais coupé de la population, pas seulement face aux 143 députés (138 + 5) qui n’ont pas approuvé le memorandum (dont 3 qui ont quitté le PASOK, parti social-démocrate de gouvernement en crise sérieuse), mais surtout face à un immense consensus dressé contre la braderie des intérêts nationaux et populaires?

Le peuple grec a une histoire trop pleine de luttes audacieuses, pour se soumettre.
Il a à ses côtés la solidarité des gens sensibles à la défense de la démocratie, ainsi que l’ensemble des forces de la Gauche dans le monde entier et particulièrement en Europe. De nombreuses organisations parmi lesquelles le Parti de la Gauche Européenne qui compte 35 partis en son sein, ont déjà envoyé des messages de solidarité, que les lecteurs de ce site peuvent trouver au: www.syn.gr à sa page en anglais.

Le combat des peuples contre la crise profonde d’un néolibéralisme aventurier n’est encore qu’à ses débuts. Soyez assurés que les forces progressistes et de gauche en Grèce poursuivront leurs actions sous les formes multiples pour assurer aux nouvelles générations des meilleures conditions d’une vie digne et non pas d’une simple survie dans le noir .

Aliki Papadomichelaki , Athenes le 30 juin 2011

LE CAIRE DANS L’OEIL DU CYCLONE

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Ces notes de voyage de Omar BENDERRA, fruit de contacts et d’observations directes, répond de façon vivante à de nombreuses interrogations. Il en tire une impression d’ensemble  » …Après la phase très active de janvier 2011, l’Égypte est entrée dans l’œil du cyclone. La réserve légendaire de patience des Égyptiens paraît épuisée. Ils ne veulent pas que leur révolution soit détournée par les milliardaires qui forment l’ossature invisible du système de pouvoir. Pour de nombreux militants, une authentique restructuration de la scène politique et la mise en œuvre de réformes économiques constituent l’unique voie pour une issue apaisée à une crise profonde et complexe. L’ampleur des déséquilibres socio-économiques est telle que si des mesures significatives ne sont pas rapidement mises en œuvre d’autres déflagrations paraissent inévitables. En Égypte, pour paraphraser Gramsci, le « vieux qui se meurt » dispose, en raison notamment des intérêts géostratégiques américains, des ressources pour se perpétuer à travers une alliance nouvelle entre militaires et Frères musulmans. La nouveauté est bien l’émergence d’une société politique qui refuse la soumission et revendique la justice et les libertés. Il reste à cette société à trouver le plus tôt possible ses modalités d’organisation… »

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LE CAIRE DANS L’OEIL DU CYCLONE

Quelques impressions et observations d’un séjour au Caire entre le 17 et le 22 juin 2011

Omar Benderra

Fondation Frantz Fanon[[http://www.fondation-frantzfanon.com/]].

Le Caire, juin 2011. Quatre mois après la «révolution» de janvier, la capitale égyptienne reste égale à elle-même et à sa réputation : embouteillages permanents, concert ininterrompu de klaxons, rugissements de moteurs, radios poussées à fond et invectives colorées de conducteurs stressés ; dans ce maelstrom, traverser la rue est toujours synonyme de risque sérieux. Au coucher du soleil et jusque tard dans la nuit les Cairotes sortent se promener pour profiter d’une fraicheur relative particulièrement agréable après une longue journée caniculaire. Les rôtisseurs, Chawarma et Koufta, et les glaciers sur la rue Talaat Harb sont comme partout pris d’assaut par des jeunes, des moins jeunes, des femmes en hidjab ou sans foulard et des nuées d’enfants. La foule est détendue et les sourires ne sont pas rares. Les conditions restent difficiles, mais les Égyptiens vivent le nouveau cours de leur histoire dans la décontraction et la bonne humeur. Cette même rue Talaat Harb avait pourtant vu des scènes de grande violence lors des journées de janvier fatidiques au vieux dictateur Hosni Moubarak, au pouvoir depuis trente ans.

Peu de stigmates visibles des événements qui ont abouti à la chute du clan Moubarak. Seul témoignage de ces journées intenses : le siège incendié du parti au pouvoir, le PND, qui surplombe le Musée des antiquités égyptiennes, place Tahrir. En ce vendredi de juin, la célèbre agora est quasiment vide. Une poignée de manifestants scandent des slogans anti-régime sous l’œil débonnaire de jeunes policiers en uniformes blancs. La ville semble avoir retrouvé son rythme habituel. Les apparences de normalité ne trompent pourtant pas les Cairotes. Ils savent que la transition est incertaine. Le gouvernement dirigé par Essam Charaf, chargé des affaires courantes et surtout de la préparation des élections législatives prévues en septembre 2011, se livre à un délicat numéro d’équilibrisme : gérer les puissantes revendications sociopolitiques de la population tout en veillant, selon la volonté clairement perceptible des décideurs militaires et de la grande bourgeoisie, à maintenir autant que possible le système en l’état.

Une scène politique en reconstruction

Pronostiquer la composition du prochain Parlement relève de la gageure. On s’accorde néanmoins sur l’influence des mouvements islamistes, avec à leur tête le nouveau parti Liberté et Justice, lancé par les Frères musulmans, qui se réfère au modèle turc de l’AKP. L’organisation des Frères musulmans, mouvement de droite derrière une façade religieuse, est animée par la grande bourgeoisie d’affaires et des dignitaires religieux particulièrement prospères. L’islam politique qu’ils promeuvent aussi sous d’autres formes, dans leur déclinaison « modérée » du Hizb el Wassat – certains le qualifient plutôt sommairement de « post-islamiste » – ou nettement plus radicale, comme le salafiste Hizb En-Nour, occupe une place centrale sur la scène politique égyptienne, même s’il a peu, et tardivement, participé aux manifestations de la place Tahrir.

Le paysage politique égyptien est une jungle de sigles et de partis plus ou moins structurés, reconnus ou en attente d’agrément. La droite non religieuse n’est pas – pas encore ? – réellement organisée. Elle est surtout incarnée par quelques personnalités très médiatiques, au premier rang desquelles le docteur Mohamed El Baradeï, l’ancien directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), et l’avocat Ayman Nour. Les grandes fortunes n’apparaissent pas au premier rang des partis libéraux, à l’exception d’un parti des « Égyptiens libres » créé en mars dernier par le milliardaire Naguib Sawiris, notoire propriétaire du groupe Orascom.

Face à ce courant conservateur majoritairement religieux, qui bénéficie du soutien actif d’Al-Azhar, véritable institution ecclésiastique en Égypte, la faiblesse relative des forces de gauche est visible. Ces groupes et partis, dont le Parti communiste, les Socialistes révolutionnaires, le Parti socialiste populaire, le Parti de l’Alliance populaire démocratique, le Parti socialiste d’Égypte, le Parti démocratique des travailleurs, des nassériens et marxistes de diverses obédiences, sont faiblement implantés et sans réel leadership. Ces formations, parfois groupusculaires, ont tenté un rapprochement en mai 2011 pour constituer un « Front des forces socialistes ». Au-delà des positionnements idéologiques, une des pierres d’achoppement entre ces courants est la différence d’analyse et de posture vis-à-vis des politiques néolibérales mises en œuvre sous l’égide du FMI et de la Banque mondiale. Les forces de gauche peinent à s’organiser dans le cadre légal mis en place pour permettre l’émergence de nouvelles forces politiques organisées. Les enjeux sont pourtant considérables pour les très larges couches de la population qui ne tirent aucun bénéfice d’une économie rentière dominée par les exportations d’hydrocarbures, les revenus du canal de Suez et du tourisme, ainsi que les transferts des travailleurs à l’étranger.

Les forces de progrès en ordre dispersé

Sur cet échiquier en construction, le nouveau Parti socialiste d’Égypte, altermondialiste et antilibéral, prend clairement position. Il a tenu son congrès constitutif le 18 juin 2011 et prône la rupture avec l’économie de rente en défendant un modèle de développement fondé sur la relance de la production industrielle et l’élévation du niveau de vie des exclus et des catégories les plus fragiles. Pour autant, le PSE, qui revendique un millier de militants, n’a pas la moindre chance d’obtenir l’agrément du ministère de l’Intérieur, qui exige en préalable un minimum de 5 000 adhérents dûment recensés. Les animateurs de ce nouveau parti, des intellectuels et des syndicalistes, ne se font d’ailleurs pas d’illusions : la participation aux élections n’est pas leur objectif premier. La construction d’un parti de progrès sur des bases claires et la consolidation de la démocratie dans un contexte mouvant constituent les priorités stratégiques du parti présidé par l’ingénieur Ahmed Baha’edine Chaabane.

Les forces de gauche émergent d’une longue période de clandestinité, où elles étaient en butte à une répression très brutale. Ces forces se reconstituent dans une société politique vibrante, mais encore largement embryonnaire. Les progressistes sont confrontés directement au défi lancé par l’armée et les Frères musulmans, qui cherchent à relooker le régime sans en changer les structures. Selon Mamdouh Al Habashi, chargé des relations internationales du parti, le PSE appuie les jeunes militants qui ont conduit le mouvement de la place Tahrir, très circonspects devant les manœuvres entre Frères musulmans et haut commandement militaire. Tous ceux qui exigent plus de libertés et une démocratisation effective entendent faire à nouveau entendre leur voix lors d’une grande manifestation prévue pour le 8 juillet 2011, qui devrait rassembler un million d’Égyptiens selon ses organisateurs.

Outre une réelle ouverture de la vie politique et l’instauration d’un État de droit, la priorité pour les Égyptiens est d’abord une amélioration de leurs conditions d’existence. La croissance de l’économie égyptienne ces dernières années est pour beaucoup un leurre. La dynamisation de l’activité n’a profité qu’à une infime minorité d’une population qui dépasse aujourd’hui 80 millions d’habitants. De fait, la politique néolibérale mise en œuvre depuis les premières années de l’Infitah il y a plus de quarante ans a permis l’émergence d’une classe d’affairistes en symbiose avec le pouvoir, appauvrissant les classes moyennes et aggravant terriblement la situation des classes populaires. Selon la Banque mondiale, plus de 18 % de la population vit avec moins de deux dollars par jour. En réalité, selon des journalistes et des économistes, plus de 40 % de la population – 30 millions de personnes – survivent en dessous du seuil de pauvreté.

Inégalités, pauvreté, injustice

La misère et la faim sont la réalité quotidienne de trop nombreux citoyens égyptiens. Nul besoin pour les voir de se rendre dans quelque banlieue « informelle » souvent cachée derrières de hauts murs, où vivent dans des conditions infrahumaines 12 millions d’Égyptiens, ou dans la tristement célèbre ville-cimetière du Caire, dont les tombes abritent 1,5 million de déshérités bien vivants. Il suffit de déambuler dans les rues de la capitale aux 20 millions de résidents qui n’habitent pas tous, loin de là, les quartiers chics de Garden City ou de Zamalek et qui ne fréquentent pas les hôtels internationaux ou les clubs huppés des berges du Nil…

Au Caire, comme dans les autres centres urbains et les zones touristiques, les turbulences politiques ont, bien entendu, davantage affecté les plus pauvres, ceux qui tirent quelques guinées des services aux touristes et de la vente d’objets artisanaux. Il suffit de visiter les hauts lieux du tourisme cairote, Pyramides de Guizeh, Musée des antiquités ou le marché Khan El Khalili, pour constater de visu la chute du tourisme. Les échoppes sont peu fréquentées et tous déplorent la raréfaction des visiteurs. Le nombre d’étrangers ayant visité l’Égypte en avril 2011 a connu une baisse de 36 % par rapport à la même période en 2010 ; et les analystes estiment que sur l’ensemble de l’année, le nombre de touristes devrait diminuer de 25 %. Les revenus du secteur devraient malgré tout atteindre 10 milliards de dollars en 2011 contre 12,5 en 2010.

Le même mouvement est observé pour les investissements étrangers. Cela dans un contexte marqué par une forte poussée inflationniste – le chiffre officiel est de 13 %, mais selon des économistes égyptiens, il se situerait plutôt au-dessus de 20 % – et la hausse du chômage, qui dépasse de très loin les 12 % admis par l’administration. Les recettes du canal de Suez ayant également pâti des événements de janvier, la croissance du produit intérieur brut (PIB) en volume devrait en conséquence avoisiner 1,5 % en 2011, contre un peu plus de 5 % en 2010.

Au cours des trois derniers mois, le coût de la vie a connu une hausse brutale, attribuée à la spéculation et à la volonté de faire payer – au sens littéral – au peuple une révolution ayant fait vaciller sur ses bases hautement sécuritaires l’édifice politico-administratif de corruption et de prédation qui constitue la seule vérité du régime. Les mouvements sociaux et les revendications syndicales d’un salaire mensuel minimum de 1 200 livres (autour de 150 euros) dans la fonction publique ont eu pour effet d’amener le Conseil militaire suprême à interdire les grèves. Le gouvernement a proposé que le salaire minimal soit porté à 700 livres (moins de 90 euros) pour atteindre 1 200 livres sur une période de cinq années. Il convient de préciser que le secteur privé n’est pas du tout concerné par un quelconque salaire minimum : dans la plupart des cas, les patrons égyptiens fonctionnent de manière informelle sans déclarations ni contrôles. Un autre indicateur de la nature du régime est la fiscalité : pour l’essentiel, la pression fiscale est supportée par les populations les plus pauvres, par le biais des taxes sur les produits de large consommation. L’impôt sur le revenu, qui concerne les mieux lotis, avait été ramené par l’administration Moubarak de 40 % à 20 % et vient d’être porté à 25 %, une hausse jugée dérisoire par un syndicaliste égyptien qui confie avec un sourire complice: «5 % de plus… Serait-ce le prix de la révolution?»

« Les pauvres d’abord, fils de chien ! »

Les inégalités, une redistribution extrêmement injuste et des choix économiques opérés au détriment du plus grand nombre ont considérablement contribué à l’écœurement d’une population considérée comme un fardeau par le régime. Les Égyptiens sont légitimement très fiers de ce qu’ils ont déjà réussi à obtenir. La chute du clan Moubarak n’a pas été une partie facile, son coût humain a été substantiel, mais ils ont redressé la tête et effacé des décennies d’humiliation. Cette fierté, partagée par tous, femmes et hommes à travers le monde qui luttent pour la dignité, les libertés et de meilleures conditions d’existence, est exprimée dans un langage très imagé par quelques amis égyptiens réunis dans un petit restaurant populaire près de la mosquée El-Hussein.

Un journaliste du site Web progressiste Al-Badil et un syndicaliste discutent à bâtons rompus autour d’un pigeon farci, plat emblématique et spécialité du restaurant Ferhat. Ce qui fait grand bruit et anime la discussion est l’article d’un jeune (23 ans) blogueur d’Al-Badil, Mohamed Abou El-Gheit, intitulé : « Les pauvres d’abord, fils de chien ! » Publié le 17 juin (http://elbadil.net/) et disponible sur sa page facebook ce papier, illustré de photos émouvantes de jeunes martyrs de la révolution, est un véhément rappel aux réalités. L’auteur y exprime avec force et conviction l’opinion de nombreux jeunes Égyptiens saturés par les discours idéologiques et les interminables controverses sur la laïcité et la religion qui dominent les débats publics. Il s’insurge contre la représentation médiatique d’une révolution qui aurait été le fait de jeunes issus des classes moyennes et revendique un traitement plus objectif pour tous ceux issus des milieux les plus défavorisés qui se sont sacrifiés pour la liberté et la justice.

Le blogueur Abou El-Gheit rappelle le courage et la détermination des jeunes des quartiers « informels » qui ont affronté les très brutales forces antiémeutes et fait reculer les blindés de la police à coups de cocktails Molotov. Il salue ces jeunes, pauvres parmi les pauvres, qui ont protégé les manifestants de la police et repoussé les baltadjias, voyous au service du régime : « Ces jeunes ne sont pas sortis pour réclamer une Constitution – avant ou après les élections – ni des élections. Ils ne sont pas sortis pour un État laïc ou religieux… Ils sont sortis pour des raisons ayant trait à leur vie quotidienne : les prix des produits alimentaires, des vêtements, du logement. Ils sont sortis contre le policier qui arrête le minibus du frère pour lui extorquer 50 livres, contre l’officier qui l’a arrêté et torturé pendant des jours, pour la sœur qu’ils n’arrivent pas à marier, pour l’oncle qui a perdu son travail parce que l’usine a été privatisée, et pour la tante morte d’un cancer parce qu’on ne lui a pas trouvé de lit dans l’hôpital public… »

Pour tous les exclus qui ont constitué le gros des troupes lors des manifestations, les débats autour de la Constitution et des élections ne sont que vains bavardages. « Ce qui n’a pas l’air d’être le souci des partis en conflit. Le résultat en est qu’une grande partie des gens insulte la révolution et les révolutionnaires et les politiciens suite à la hausse des prix ces derniers jours… Nous n’avons entendu personne parmi les élites s’élever contre la hausse des prix. Ceux qui ont bruyamment protesté après l’agression d’une activiste ne sont pas venus au secours des habitants de la ville d’Al-Salam qui ont vécu cinq jours à la belle étoile pour protester contre leur sort, et dont l’un a été renversé par une voiture et un autre s’est noyé. Ces gens n’avaient qu’à rester dans leurs trous jusqu’à ce que soient réglées nos controverses politiques bien plus importantes que leurs sottises ! »

La conclusion de l’article est impitoyable : « Dans les années 1990, [en Turquie], Erdogan participait à une conférence d’organisations islamiques. Plutôt que de proclamer son intention d’appliquer la charia, il avait déclaré qu’il s’attacherait à régler le problème des égouts d’Istanbul, ce qui avait provoqué la colère de l’assistance. […] Nous n’avons malheureusement pas aujourd’hui d’Erdogan égyptien, seulement de vieux élitistes uniformément ennuyeux, immergés dans des débats laïc/islamique, Constitution/élections. À tous ceux-là, je dis : les pauvres d’abord, fils de chien ! »

La transition et le contexte régional

Un rappel aux réalités salutaire qui remet quelques pendules à l’heure dans une situation où derrière le calme apparent et les interminables « débats de société » se dissimulent de réelles inquiétudes : « La période est trouble, on ne sait pas distinguer l’ami de l’ennemi, affirme un vieux Cairote. On veut nous faire croire que l’alternative est entre théocratie et État laïque. Les gens s’en fichent, ils veulent la vraie dignité : celle du travail, du pain et de la justice. » Les Égyptiens, dont beaucoup semblent vivre une histoire d’amour avec leur armée – elle n’a pas tiré sur le peuple –, ne sont pas tous dupes de la neutralité affichée des militaires. Le haut commandement, très proche des milieux d’affaires et de la grande bourgeoisie, négocie avec les Frères musulmans dans le but de stabiliser la situation politique au profit de la classe dominante. L’armée, étroitement liée aux États-Unis pour son équipement et l’aide annuelle d’un milliard et demi de dollars qu’elle reçoit de Washington, gère une transition qu’elle souhaite voir déboucher sur la continuité du système, avec quelques aménagements et le maintien en l’état de ses alliances internationales.

Mais pour nombre de citoyens de toutes les classes, la dignité, au premier rang des revendications du peuple égyptien, ne sera reconquise que lorsque les relations avec Israël se fonderont sur l’égalité et le respect des droits du peuple palestinien. Pour la majorité des Égyptiens, la soumission de Hosni Moubarak aux États-Unis et à Israël était une atteinte à l’honneur national. De ce fait, la solidarité avec les Palestiniens et l’hostilité à l’égard d’Israël s’expriment avec force. L’impressionnant déploiement de forces chargées de la protection de l’ambassade israélienne au Caire est une illustration éloquente de la perception des rapports avec Israël.

L’ouverture du terminal de Rafah avec la ville martyre de Gaza, le 28 mai dernier, est le moins que pouvaient faire les nouvelles autorités égyptiennes, soumises à une pression très vive. Pour la majorité des Égyptiens, la solidarité avec les palestiniens est une exigence absolue et la normalisation avec un voisin spoliateur et arrogant n’est pas à l’ordre du jour. Depuis mai 2008, l’Égypte fournit du gaz à des prix subventionnés à Israël en vertu d’un contrat à long terme. Le comble est que, pour pouvoir fournir les quantités contractuelles, Le Caire importe du gaz du Qatar aux prix mondiaux. Si le peuple égyptien perd beaucoup dans le contrat, ce n’était pas le cas semble-t-il du clan Moubarak, qui aurait reçu d’importants dessous de table pour « faciliter » la transaction.

Ce contrat scandaleux n’est pas le seul du genre. Beaucoup souhaitent l’abrogation de l’accord textile signé en décembre 2004 avec Israël, sous la supervision des États-Unis. Cet accord dispose que la production de produits textiles de sept zones industrielles qualifiées (ZIQ), notamment dans les régions du Caire, d’Alexandrie et du Canal de Suez, pourrait être exportée vers le marché américain sans quota ni droits de douane. Condition préalable : ces produits devront être constitués d’au moins 11,7 % de composants israéliens… L’exploitation des ressources d’eau souterraines du Sinaï est bloquée par Israël, qui ne s’interdit pourtant pas de pomper abondamment la même nappe de son côté de la frontière.

Le ressentiment à l’endroit d’Israël n’est donc pas seulement politique et les Égyptiens vivent très mal ce rapport inégal consenti par Sadate et généralisé par Moubarak. Les Israéliens ont donc bien raison de regretter Moubarak, qui était, selon la formule d’un diplomate de Tel-Aviv, « un allié d’une valeur inestimable ».

Les Égyptiens observent également avec inquiétude les développements de la situation en Libye, même si ce pays voisin paraît bien lointain vu du Caire. Si le consensus est rapidement trouvé autour de la dénonciation de Mouammar Kadhafi, les avis divergent sur les bombardements de l’OTAN. À droite, sans le dire trop haut, l’affaire est entendue : tous les moyens sont bons pour renverser le dictateur. À gauche, de manière bien plus inattendue, des cadres soutiennent l’intervention occidentale et acceptent avec une réticence marquée les critiques sur la guerre « humanitaire » de l’organisation atlantique.

Selon un avocat égyptien, le soutien à l’intervention occidentale est largement dû à l’influence des médias satellitaires arabes, qui avaient positivement couvert les manifestations de janvier. Al-Jazira a ainsi gagné la sympathie de tous les Égyptiens et le soutien actif de la chaîne à l’ingérence en Libye a été immédiatement intériorisé par une opinion qui exècre le « Guide » de la Jamahiriya. Une certaine inquiétude est néanmoins perceptible, car la déstabilisation de la Libye pourrait avoir des conséquences en Égypte, où circulent des rumeurs sur l’introduction d’armes en provenance de Cyrénaïque.

Réformes ou approfondissement de la crise:

le risque d’une issue « paskistanaise »

Le calme relatif qui règne en Égypte en juin 2011 ne doit pas faire illusion. Les insupportables inégalités socioéconomiques, l’absence de perspectives pour une jeunesse avide de changement, l’humiliation permanente et la soumission à l’ordre américain sont le carburant de futures explosions sociales. Le mal-être est alimenté par l’injustice et la brutalité d’un système où coexistent deux populations distinctes. Sur les rives du Nil, le fossé qui sépare les nantis et les pauvres est un abîme.

Combler ce fossé au moyen d’un surcroît de religion constitue aux yeux de ceux qui tirent avantage du système un palliatif commode. Soutenus par les Saoudiens et les Américains, les militaires qui contrôlent le pouvoir sont visiblement tentés par une approche « paskistanaise » : ils continueraient ainsi à tenir les commandes tout en confiant la gestion de la société aux partis religieux. Il reste à savoir si ce « deal » fonctionnera dans un pays caractérisé par une profonde religiosité, mais dont la jeunesse a montré un degré élevé de maturité politique. Et qui, tous le soulignent, ne s’est pas révoltée sur la base de slogans religieux, mais bien sûr des revendications politiques et sociales. Il est admis par tous que les Égyptiens ont brisé le tabou de la peur et ont osé contester un ordre établi sur la corruption et la répression. Un retour aux vieilles méthodes répressives pourrait donc se révéler très coûteux.

Après la phase très active de janvier 2011, l’Égypte est entrée dans l’œil du cyclone. La réserve légendaire de patience des Égyptiens paraît épuisée. Ils ne veulent pas que leur révolution soit détournée par les milliardaires qui forment l’ossature invisible du système de pouvoir. Pour de nombreux militants, une authentique restructuration de la scène politique et la mise en œuvre de réformes économiques constituent l’unique voie pour une issue apaisée à une crise profonde et complexe. L’ampleur des déséquilibres socio-économiques est telle que si des mesures significatives ne sont pas rapidement mises en œuvre d’autres déflagrations paraissent inévitables. En Égypte, pour paraphraser Gramsci, le « vieux qui se meurt » dispose, en raison notamment des intérêts géostratégiques américains, des ressources pour se perpétuer à travers une alliance nouvelle entre militaires et Frères musulmans. La nouveauté est bien l’émergence d’une société politique qui refuse la soumission et revendique la justice et les libertés. Il reste à cette société à trouver le plus tôt possible ses modalités d’organisation.

ALGÉRIE: À L’APPROCHE DES CONGRÈS SYNDICAUX, LE MONDE DU TRAVAIL SE DÉFEND

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« L’APPAREIL DE L’UGTA RÉSISTE « 

Pour un banquier qui sait compter, ces chiffres sont éloquents: les 1484 employés de banque de la CNEP de la wilaya d’Alger ont droit à 13 délégués, tandis que les 431 collègues de la wilaya de Sétif disposeront de 19 mandats. L’enjeu c’est l’élection du bureau du syndicat d’entreprise, le 28 juin prochain.

Onze des quinze secrétaires des syndicats de base conteste ces magouilles auprès de Sidi-Saïd, le patron de la centrale UGTA, dénonçant des pratiques «abjectes et immorales», violant les statuts. Ils menacent de créer un syndicat autonome.

À Annaba, ce sont les employés des impôts qui réclament l’élection d’un nouveau bureau syndical, dont le mandat a expiré depuis quatre ans. Dans leur lettre adressée à l’Union territoriale, ils expliquent: «Depuis 2005, aucune assemblée générale n’a été organisée par ce syndicat dont les membres s’accrochent désespérément à leur statut de partenaire social, synonyme d’impunité et autres indus avantages. Pis, à aucun moment les travailleurs n’ont été consultés pour donner leur avis lors des négociations sur le statut des travailleurs des impôts».

Face à l’exigence de démocratie syndicale interne, Sidi-Saïd soutient «l’émergence de la société civile», mais, pour l’heure, la préoccupation de la centrale semble le maintien du statut quo, alors que se rapprochent l’échéance des congrès nationaux.

Cette stratégie de résistance à la poussée démocratique, coordonnée par le secrétaire national à l’organique, M. Djenouhat, visant à sauver les meubles, vient d’être battue en brèche à Constantine, où, le 6 juin dernier, le tribunal a débouté la centrale et jugé illégale la révocation du secrétaire général indocile de l’Union de wilaya. La revendication démocratique interne autour du strict respect des statuts, initiée par les syndicats de la Seaco, d’Algérie Poste, et d’Algérie Télécom, s’est progressivement élargie après la création de la commission de préparation du congrès, issue de cette résistance.

Epilogue dans quelques jours avec la tenue du congrès de l’union de wilaya.

Samedi 25 juin 2011

Source: (…)


OUVRIERS QUALIFIÉS EN CDD DEPUIS DIX ANS »

Une semaine après le déclenchement de la grève, dont nous avons rendu compte, le conseil d’administration de GESI-BAT Annaba a été dissout hier. Un nouveau bureau est chargé de gérer les affaires de l’entreprise. Le groupe dont dépend l’entreprise a reconnu le bien fondé des onze revendications, mais aucun engagement n’a été pris.

Selon les grévistes, ces mesures ne sont pas suffisantes pour reprendre le travail dans les chantiers, totalement paralysés depuis le début de la grève. Les chantiers arrêtés participent à la construction, sur quatre ans, de 60 000 logements et autres infrastructures, dont la réalisation a été confiée au groupe.

D’autre part, le directeur général, qui a intenté une action judiciaire à l’encontre des grévistes, est toujours à son poste. Smaïl Kouadria, le secrétaire du syndicat UGTA du complexe sidérurgique d’El-Hadjar qui assiste les grévistes a affirmé: «l’intervention des pouvoirs publics est plus que souhaitable afin d’éviter tout dérapage préjudiciable et de trouver des solutions à même de régler définitivement ce conflit qui couve une éruption imminente avec de graves conséquences».

La situation est en effet intenable. Elle est décrite par le comité des grévistes : 1 468 salariés, dont 1 255 exerçant des métiers qualifiés -maçons, coffreurs, carreleurs…- sont toujours sous contrat à durée déterminée (CDD), après 10 ans de présence ininterrompue au sein de cette entreprise.

Non seulement ils sont contractuels, mais ils perçoivent un salaire de base de 10 000 DA.

Samedi 25 juin 2011

Source: (…)


LU SUR LE SITE DU « LIEN », ORGANE DU PADS (Parti Algérien de la démocratie et du socialisme

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« MARCHER AVEC QUI ET POUR QUELLE ALTERNATIVE?»PARTI ALGERIEN POUR LA DEMOCRATIE ET LE SOCIALISMEEdito du Lien;

«F. IVETON:“ POUR L’ ALGÉRIE DE DEMAIN, AVEC LA LUTTE DE CLASSE QUI S’ANNONCE, NOUS AURONS BESOIN DE TOUS LES CAMARADES…?”» Le Lien, le 27 avril 2011;

«PADS : RÉPONSE À UN CALOMNIATEUR “LAMENTABLE”?» Le Lien, le 27 avril 2011.


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MARCHER AVEC QUI ET POUR QUELLE ALTERNATIVE?

PARTI ALGERIEN POUR LA DEMOCRATIE ET LE SOCIALISME

Edito du “Lien

pads_logo-2.jpg Les forces de l’ultra libéralisme multiplient ces dernières semaines leurs appels à un changement de régime, « à la liberté, à la démocratie et à la dignité ». Elles rejettent toute tentative d’inscrire les revendications sociales des travailleurs dans leur plate-forme politique sous l’argument trompeur que la « démocratie » va résoudre ces questions. De nombreux citoyens et de participants à l’organisation de la marche du 12 février sont d’accord pour centrer le but des mouvements de contestation du régime sur la question démocratique et de renvoyer à « plus tard » la question des orientations économiques et sociales de leur mouvement. Ils sont dans l’erreur car au fond les ultra libéraux craignent avant tout que l’intervention des travailleurs sur des revendications politiques et sociales de classe claires débouche sur la revendication d’un Etat de démocratie populaire qui prépare le terrain à la liquidation de toute domination bourgeoise, y compris celle qui prend le masque de la « démocratie ». Nous ne confondons pas avec les libéraux les citoyens qui n’ont pas encore discerné les enjeux des luttes actuelles. Nous poursuivrons nos efforts d’explication auprès d’eux. Toutefois, il ne peut être question pour nous de contribuer à la tromperie en évitant de critiquer les organisateurs de la marche du 12 février.

Nous ne sommes plus en 1988 quand toutes les classes sociales, ouvriers, bourgeois, féodaux, couches moyennes, ne voulaient plus du parti unique devenu une entrave à l’expression de leurs intérêts sociaux opposés et un obstacle à leurs luttes pour le contrôle absolu de la machine d’Etat.

Durant ces 20 dernières années, les classes dirigeantes ont réussi à imposer une démocratie de façade. Le pays est passé par une terrible guerre civile déclenchée à l’initiative des franges les plus réactionnaires de la société sous l’étendard de la religion. La responsabilité de cette sanglante période incombe aux forces du libéralisme quel que fût leur habillage.

Elles ont fomenté, encouragé et même suscité l’islamisme pour tétaniser les forces de progrès et désorienter les masses. Le but de cette stratégie est maintenant apparu dans toute sa clarté à l’immense majorité de la population laborieuse: mener une contre-révolution antinationale et antipopulaire qui a fait passer l’essentiel des richesses du pays entre les mains d’une minorité, écraser sous la domination de celle-ci les travailleurs et les couches laborieuses, asservir les démunis sous le poids du pouvoir des voleurs des richesses de la nation. Les partisans du capitalisme dans le pouvoir et en dehors de lui ont donc réussi à imposer des orientations économiques et sociales capitalistes après le soulèvement du 5 octobre 1988. Ils avaient exploité et dévoyé le mécontentement des travailleurs et des jeunes contre le chômage, la misère, la corruption et les inégalités sociales propagés à grande échelle avec le virage à droite de ces années 1980.

Vingt ans après, les travailleurs n’acceptent pas de se ranger derrière n’importe quel appel « à la liberté et à la démocratie ». Leurs aspirations démocratiques sont chargées de revendications tel que le besoin d’avoir un travail que seule une société débarrassée des inégalités sociales peut garantir. Libertés démocratiques, travail, pain, logement, santé, éducation, sont étroitement liés. La dignité ne peut être assurée que dans une société qui garantit le plein emploi, bannit l’exploitation, la domination des capitalistes et la dictature des possesseurs de sacs d’argent, la fameuse « chkara ». Un pays qui ne se développe pas ne peut garantir une vie digne à ces forces laborieuses. Le libéralisme, dont la faillite totale sur tous les plans est maintenant manifeste dans notre pays, est le grand obstacle à une vie digne et à de vraies perspectives pour les jeunes.

Tout parti qui prétend défendre la dignité du citoyen mais refuse de poser les revendications matérielles des travailleurs et la nécessité vitale de relancer le développement grâce à la reconstruction d’un puissant secteur d’Etat, ou bien ne fait qu’étaler le mépris des « repus » pour ceux qui n’ont que leur force de travail pour vivre et n’arrivent ni manger à leur faim ni à se loger décemment. Ou bien, et cela va ensemble, il vise à utiliser la masse ouvrière pour remplacer une équipe au pouvoir par une autre soi-disant plus « crédible » sans mettre en danger les fondements du système à l’origine de la misère et les injustices.

La crise du système économique et politique a atteint un tel degré d’acuité que les partisans du capitalisme sont déchirés par de sérieuses divergences sur le mode de « gouvernance ».

L’un a tiré les leçons de la faillite du libéralisme et paraît vouloir faire jouer à l’Etat un nouveau rôle pour lancer un processus de ré-industrialisation. Cela implique notamment le contrôle des entrées et sorties de devises du pays. Sa grande préoccupation est de sauvegarder les intérêts et le pouvoir de la bourgeoisie en faisant éviter à cette dernière le risque d’être emportée par une révolution qui résultera inévitablement de l’aggravation de la crise mondiale actuelle du capitalisme. L’autre groupe se cramponne à des positions ultra libérales.

Il combat à mort cette tentative sans hésiter à rechercher l’appui des puissances impérialistes, pour lesquelles l’Algérie doit être cantonnée dans le rôle de comptoir économique, de vaste marché où se déversent les marchandises des pays capitalistes confrontés à une crise mondiale de leur système. En aucun cas ces puissances ne permettront à l’Algérie de reprendre le chemin du développement abandonné en 1980. Elles considèrent que le peuple algérien, trop fier de son combat séculaire pour se libérer de toute tutelle dominatrice étrangère, deviendrait dangereux pour leurs plans géostratégiques s’il parvenait à renouer les fils avec les grands objectifs libérateurs de la stratégie de développement amorcée à la fin des années 1960.

C’est le grand enjeu de l’heure. Et la question de la démocratie ne peut être coupée de la défense des intérêts des travailleurs et des intérêts généraux du pays confronté aux pressions et menaces voilées des pays impérialistes.

Quiconque tente de séparer ces deux aspects de la démocratie travaille, consciemment ou inconsciemment à faire prévaloir les intérêts de la bourgeoisie compradore, parasitaire et exploiteuse.

Aux amis qui peuvent ne pas comprendre notre refus de cautionner les objectifs des ultra libéraux nous rappelons nos positions de principe.

« Nous soutenons toute action, toute manifestation, toute grève dirigée contre ce régime et ses choix de classe. Nous dénonçons toute entrave à la liberté d’expression des travailleurs et des progressistes. Quand nous en avons les moyens, nous organisons nos propres initiatives, fussent-elles d’envergure limitée, sous des mots d’ordre clairs pour la réalisation des aspirations de classe des masses laborieuses. Quand nos forces ne nous le permettent pas, nous nous adressons aux travailleurs entraînés dans les marches organisées par les partis bourgeois ou petits-bourgeois pour qu’ils impriment à ces marches leurs revendications politiques et économiques de classe.

Cependant, le PADS ne marchera pas derrière les partisans de l’ultra-libéralisme et amis des magnats de l’huile et du sucre, affameurs du peuple et exploiteurs sans vergogne des travailleurs. Il ne marchera pas derrière ceux qui se concertent avec l’ambassadeur des USA pour obtenir son appui dans leur course au pouvoir après avoir conféré avec les responsables des services de sécurité algériens. Il ne marchera pas sous la banderole agitée par ceux qui n’ont rien trouvé de mieux à faire que de chercher à gagner la sympathie de Cohn-Bendit, ancien partisan de la libération de Ali Belhadj, au plus fort des massacres commis par les terroristes du FIS, et député européiste enragé, viscéralement hostile à tout peuple aspirant à se libérer de la tutelle des grandes puissances impérialistes.

Le PADS marchera avec les travailleurs, les jeunes, les petits fellahs, les intellectuels démocrates progressistes et humanistes, les cadres honnêtes et patriotes de l’Etat et de l’économie, pour un changement radical de régime, pour que soit enfin instaurée la république démocratique et populaire rêvée par les masses populaires et esquissée dans le Programme de Tripoli et le programme du Parti Communiste Agérien à la veille de la proclamation de l’indépendance de l’Algérie après une guerre de libération lourde de sacrifices.

Nous ne tromperons par les travailleurs et les jeunes par des mots d’ordre suivistes qui les pousseraient à se mettre à la remorque des partisans du capitalisme dits d’opposition, à servir de chair à canon pour favoriser la réalisation de leurs objectifs de rééquilibrage des forces en présence au sein du régime, sans rupture avec le système capitaliste, quels que soient les bavardages sur le « changement de régime ». Nous les mettrons en garde pour qu’ils ne soient pas les jouets des forces de l’ultra libéralisme et les instruments inconscients du plan des puissances impérialistes qui considèrent que le moment est venu de prendre complètement le contrôle de l’Algérie par l’intermédiaire d’hommes de paille totalement soumis à leurs visées et encore plus réactionnaires que les gens du régime.

Il serait criminel de cacher au peuple et aux travailleurs que les dirigeants de l’opposition ralliée à l’ultra libéralisme agissent de concert avec les pays impérialistes et jouent sur tous les tableaux pour arriver à leurs fins: exercer le pouvoir pour gérer « loyalement » un territoire selon les voeux des pilleurs impérialistes, les règles et les critères qu’ils ont définis pour le monde entier afin de soutirer le maximum de profits des pays pris dans leur filet. Il serait impardonnable de notre part de ne pas éveiller la vigilance des travailleurs pour qu’ils ne tombent pas dans le piège de leurs ennemis de classe déguisés en amis compatissant à leur détresse, sous prétexte que l’heure est d’abord à la lutte pour la démocratie et que les objectifs que nous poursuivons seront débattus plus tard grâce aux « acquis de la démocratie ».

Nous ne séparons pas le combat démocratique de la lutte pour mettre en échec les complots des pays impérialistes. Démocratie populaire en faveur de la classe ouvrière, de la paysannerie laborieuse, des couches intermédiaires vivant de leur travail et écrasées elles aussi par le système impérialiste-compradore ou démocratie bourgeoise inféodée à ce système? Telle est la question posée à l’étape actuelle des luttes.

Notre principe tactique est d’être dans toutes les manifestations avec nos propres analyses, nos propres mots d’ordre et nos propres objectifs sans se laisser lier les mains par aucun appel à la « trêve idéologique et politique » avec les partis de la bourgeoisie et de la petite-bourgeoisie « modernistes » au nom d’une soi-disant unité la plus large des « démocrates » qui serait « indispensable » pour abattre le régime. Notre tactique est de combattre les tentatives d’exploiter le mécontentement des travailleurs et les révoltes des jeunes, par les partis et organisations qui critiquent d’un point de vue encore plus réactionnaire certaines décisions économiques du pouvoir en se camouflant sous le drapeau de la lutte pour la démocratie pour cacher leurs objectifs de classe. (…)

La responsabilité historique des communistes algériens et de toutes les forces de progrès du pays est de travailler à la prise de conscience des travailleurs pour qu’ils jouent un rôle fondamental dans les luttes en vue d’un changement radical de régime. (…)
La tâche qui se pose à toutes les forces progressistes authentiques du pays est de conduire la lutte de classes des exploités et des catégories sociales marginalisées par le système politique et économique actuel sans servir de marche-pieds pour leurs ennemis de classe, fussent-ils « opposants » et « démocrates ». »

(Extraits de la réponse du PADS, datée du 31 janvier 2011, à la question d’un lecteur sur notre position par rapport à l’appel à la marche du 12 février)

[Mercredi 27 avril 2011

Edito Du Lien : “Marcher Avec Qui Et Pour Quelle Alternative?”

PARTI ALGERIEN POUR LA DEMOCRATIE ET LE SOCIALISME->http://www.lien-pads.fr/article-edito-du-lien-marcher-avec-qui-et-pour-quelle-alternative-72673670.html]

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« Pour L’Algérie de demain avec la lutte de classe qui s’annonce nous aurons besoin de tous les camarades…»

Fernand Iveton

L’article ci-dessous de notre camarade William Sportisse a été publié sur le site internet du journal Alger républicain. Nous le reproduisons pour nos lecteurs:

Après son arrestation le 14 novembre 1956 par les forces répressives du colonialisme français, Fernand Iveton a entretenu, avant son exécution le 11 février 1957, une correspondance suivie (une lettre par semaine) avec Maître Joë Nordmann, juriste international membre du Parti communiste Français qui prit en charge la défense de ses intérêts au côté de Maître Smadja alors membre du Parti communiste Algérien.

Le pouvoir colonial voulait impressionner les militants européens anticolonialistes qui désiraient s’engager dans la lutte armée. L’exemple donné par Iveton ne devait pas se reproduire. Il accéléra le rythme de la procédure en désignant d’office un avocat Me Lainé pour défendre Iveton qui fut traduit devant le tribunal et condamné à mort dix jours après son arrestation.

Le directeur de la prison de Barberousse où il est placé en détention le 19 novembre 1956 après avoir subi d’horribles tortures, l’informe le 2 décembre «qu’il n’a pas le droit de correspondre avec ses avocats» (lettre du 8 décembre à Joë Nordmann). Mais Iveton ne tient pas compte de ce mensonge du directeur de la prison exige du vaguemestre que ses lettres soient recommandées afin qu’un récépissé de transmission lui soit remis et qu’un accusé de réception lui confirme l’arrivée à leurs destinataires .

Dans son ouvrage qui dresse le bilan de sa vie professionnelle et politique intitulé «Aux vents de l’histoire» Maître Joë Nordmann écrit: «Parmi les affaires que j’eus à plaider pendant «les évènements d’Algérie», une, entre toutes m’a laissé le plus fort souvenir. Triste souvenir parce que mon client, mon camarade, est mort sur l’échafaud. Mais souvenir fervent, aussi, que celui de Fernand Iveton. Sa droiture, sa clarté d’esprit, sa fidélité aux principes de liberté et d’indépendance m’impressionnèrent lorsque pour la première fois je le rencontrai à la prison de Barberousse d’Alger. Il avait trente ans.»

Joë Nordmann écrit encore que le Président de la République Française René Coty qui «était bien convaincu de l’injustice de la condamnation à mort de Fernand Iveton l’a néanmoins envoyé à la guillotine. L’Algérie Française l’exigeait.»

La bourgeoisie capitaliste française et la grosse colonisation terrienne ne pouvaient pas lui pardonner de s’être dressé contre l’oppression d’un peuple.

Sa conscience de classe que partageait tous ses camarades du Parti communiste Algérien ne pouvait que le conduire à comprendre les liens étroits existant entre la lutte contre l’oppression des peuples et l’exploitation de l’homme par l’homme. Sa conscience de classe l’amenait à distinguer les peuples de leurs oppresseurs et de leurs exploiteurs. Elle l’avait éveillé à cette idée que seule la lutte des peuples sur leur sol national et leur union à l’échelle internationale dans le combat contre leurs oppresseurs et exploiteurs étaient décisives pour les vaincre. Enfin, il était convaincu que le socialisme était la solution pour se débarrasser de l’exploitation et de l’oppression.

Des passages de ses correspondances à Maître Joë Nordmann le confirment. En effet, dans sa lettre du 25 janvier 1957 à propos des illusions de compagnons de détention on relève cette phrase: «Tous ici attendent l’ONU. Quant à moi je suis sûr que cela ne changera rien car notre lutte se joue sur le sol Algérien avec nos alliés les plus sûrs le peuple de France et son P.C.F». Toujours dans cette lettre il ajoute: «Pour l’Algérie de demain avec la lutte de classe qui s’annonce nous aurons besoin de tous les camarades, et les Algériens d’origine européenne doivent y participer. Mais quand je dis cela, dans mon esprit il n’y a pas de distinction raciale car les Musulmans aussi savent qu’ils auront à lutter pour leurs revendications sociales».

Enfin dans sa lettre du 31 janvier 1987 il exprime à son avocat son ferme espoir «d’une libération prochaine avec la paix retrouvée dans la fraternité de nos deux peuples, gages certains de nos victoires futures pour le socialisme et la paix mondiale.»

Le combat qu’a mené Iveton n’est pas encore achevé, il est vrai.

Il se poursuit encore sous nos yeux de nos jours. Les soulèvements populaires de Tunisie et d’Egypte qui ont chassé du pouvoir des exploiteurs bourgeois corrompus et corrupteurs qui se sont vendus à l’impérialisme et qui l’ont servi annoncent les victoires de demain contre l’exploitation et l’oppression pour l’émancipation des peuples de notre planète.

[Source:

Le Lien

le 27 avril 2011->http://www.lien-pads.fr/article-fpour-l-algerie-de-demain-avec-la-lutte-de-classe-qui-annonce-nous-aurons-besoin-de-tous-les-camaradeserna-72672262.html]

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PADS : RÉPONSE À UN CALOMNIATEUR “LAMENTABLE”?

Le Lien, le 27 avril 2011.

Nos déclarations sur la situation dans notre pays et notre position sur la marche du 12 février prise en main par les dirigeants du RCD ne peuvent évidemment plaire à tout le monde. Leur lecture ont ainsi provoqué une grosse fureur chez Hakim Arabdiou, ancien militant du Parti de l’Avant-garde Socialiste, liquidé par Hachemi Cherif en 1993, ancien journaliste à Alger républicain. Il ne semble pas avoir apprécié notre critique des positions et des objectifs de ces dirigeants qui ont fait de l’ultra libéralisme et de la recherche des appuis des puissances impérialistes l’alpha et l’oméga de leur ligne stratégique dans la lutte contre « le système ». Aussi a-t-il entrepris de bombarder de messages d’anciens militants du PAGS pour les pousser à prendre leurs distances du PADS.

Notre déclaration du 22 janvier est selon lui « vraiment lamentable »! Apparemment, il aurait été déçu de ne pas nous voir défiler sous la bannière des organisateurs de cette marche. Nous en sommes réduits à émettre des suppositions parce qu’il évite de s’expliquer clairement sur les raisons de sa colère. En guise de « réfutation » nous avons droit à une bordée de mensonges ignobles accompagnées d’affirmations péremptoires sur notre incapacité à comprendre « grand-chose à la dialectique marxiste (confondant) analyse marxiste et discours marxiste ». Ainsi, « le sectarisme le dispute au gauchisme » dans notre déclaration.

En attendant qu’il nous expose comment il pense appliquer la dialectique marxiste aux réalités algériennes d’aujourd’hui et en quoi consistent le sectarisme et le gauchisme dans notre refus d’aller dans le sens des organisateurs de cette marche, Arabdiou n’a pas d’autres « arguments »pour chercher à discréditer notre parti que de lancer des inventions délirantes sur de prétendus liens que ses dirigeants auraient entretenus avec les chefs du parti islamo-fasciste du FIS en 1990.

Voici dans son intégralité un paragraphe de son message où le mensonge le plus éhonté « le dispute » à la calomnie:

« Pourtant, et comme l’avaient fait Aït-Ahmed et deux autres dirigeants du FFS, ces mêmes dirigeants du PADS, du MDS et les sans partis n’avaient pas hésité en 1990 à aller en cachette de leurs militants et des masses laborieuses lécher les bottes du parti fasciste du FIS, en lui envoyant plusieurs délégations quémandant l’unité d’action, avec un parti pire ennemi de la classe ouvrière et du peuple algérien, sans parler d’autres gestes de faillotage de leurs part envers ce parti que ce dernier avait rejeté avec le plus grand mépris, tels que l’invitation de Abassi Madani, Ali Benhadj… à la cérémonie de notre parti, le Parti de l’avant-garde socialiste (communiste), etc. « 

Chacun peut constater que notre procureur lance des accusations à la cantonade dans l’espoir de tromper ceux qui ne connaissent pas l’histoire du PAGS pour les monter contre tous ceux qui ne partagent pas son approche de l’issue à la crise algérienne.

1-

Notre parti n’existait pas en 1990.

Il a été créé en 1993 à la suite de la liquidation du PAGS par le groupe Hachemi Cherif. Notre parti est né du refus du fait accompli face à l’action des renégats qui ont privé la classe ouvrière, la paysannerie pauvre et la jeunesse d’une organisation de combat au moment où elles en avaient le plus besoin pour affronter les islamo-fascistes et les agents antinationaux du capitalisme et des ajustements structurels au pouvoir; à une période où il fallait lier la lutte contre les partisans de l’ultra libéralisme qui se cachaient sous le voile de l’Etat islamique et contre ceux qui prétendaient défendre la « république » mais se lançaient, sous prétexte qu’il n’y avait pas d’autre choix pour éviter un état de cessation de paiement, dans la destruction des acquis du développement de l’Algérie et les conquêtes sociales arrachées par le mouvement ouvrier algérien.

Toutes les analyses de notre parti depuis sa création ont défendu avec constance cette position de fond.

Mais Monsieur Arabdiou, qui laisse entendre qu’il maîtrise la dialectique marxiste, sans jamais avoir tenté quoi que ce soit pour organiser la classe ouvrière afin que celle-ci soit capable de combattre son « pire ennemi », ne semble pas s’embarrasser des petits détails de l’histoire.

2-

Contrairement à ce qu’il prétend, aucun des dirigeants du PAGS qui ont participé à la fondation du PADS n’a approché les dirigeants du FIS

à quelque moment que ce soit. Arabdiou ne peut fournir que des propos injurieux en guise de « preuves ».

3-

À notre connaissance aucun autre dirigeant du PAGS ne s’est livré en 1990 aux démarches dénoncées

avec le contenu qu’il leur attribue dans ses affirmations calomnieuses.

À la fête de la légalisation du PAGS, en septembre 1989, sa direction avait effectivement invité les représentants de tous les autres partis existant. Les dirigeants du FIS, dont les positions politiques n’étaient pas encore affirmées au grand jour n’avaient pas fait exception à cette décision. Il est vrai que quelques cadres du PAGS se dépêchèrent de l’interpréter avec un certain enthousiasme comme une application « créatrice » de la « nouvelle mentalité », si chère à Gorbatchev et à ses adeptes en Algérie.

Mais la préoccupation de la direction du PAGS, telle qu’elle avait été expliquée aux militants, était d’éviter toute démarche politique susceptible d’être présentée comme la manifestation d’une hostilité viscérale à l’Islam, inhérente à la nature même des buts politiques des communistes. Elle visait à mettre en échec toute tentative d’isoler le PAGS en l’entraînant dans un engrenage où il se serait retrouvé tout seul face au FIS, à éviter de commettre des erreurs tactiques faisant le jeu du régime qui avait encouragé le développement des mouvements islamistes pour contrer le PAGS et les courants progressistes.

De ce point de vue, on ne peut pas dire que cette tactique ne s’était pas avérée judicieuse, quelle que soit l’appréciation portée 20 ans après sur l’invitation adressée au FIS en septembre 1989, à une époque où tous les citoyens manifestaient d’abord leur joie de jouir du droit à s’organiser librement après l’abolition du système du parti unique.

L’affrontement FIS-PAGS ne s’est pas déroulé comme l’avait préparé tout un groupe du pouvoir qui espérait parvenir à liquider physiquement les militants du PAGS par le truchement des nervis du FIS, et à en finir ainsi « pour toujours » avec toute idée communiste dans notre pays.

Le FIS s’est retourné contre ceux-là mêmes qui l’avaient choyé. Si le FIS est aujourd’hui complètement discrédité auprès de larges couches de la société, c’est parce qu’il a trouvé en face de lui un large spectre de courants politiques mobilisés par le PAGS, et pas seulement les communistes, c’est parce que ces derniers ne sont pas tombés dans le grossier piège mortel que leur tendaient les ennemis des travailleurs et du progrès, c’est-à-dire les commanditaires nationaux et étrangers de l’islamisme réactionnaire.

Il faut être franchement animé d’une malhonnêteté sans borne pour soutenir des allégations aussi fantaisistes que celles de Arabdiou.

4-

Monsieur Arabdiou amalgame de façon désinvolte le PADS à AÏt Ahmed et des dirigeants du FFS.

Dans la mesure où il semble attaquer le FFS pour sa participation au Pacte de Sant’Egidio de janvier 1995 (pacte de réconciliation avec les tueurs islamistes et de relégalisation du FIS), qu’il nous explique alors comment se fait-il qu’il appuie une marche, celle de janvier ou celle du 12 février, dont l’initiative appartient depuis l’origine à Ali Yahia Abdennour, un des partisans les plus acharnés de ce pacte et avocat de Abassi Madani et de Ali Belhadj. Par rejet du « sectarisme » et du « gauchisme » envers des démocrates de « tous bords »?

5-

Monsieur Arabdiou tente de nous faire croire implicitement qu’il a toujours combattu toute compromission avec le FIS.

On l’aurait volontiers cru s’il n’avait pas appuyé en mai-juin 1991 – en pleine action insurrectionnelle du FIS – la tentative de prise de contrôle d’Alger républicain par Bentchicou, sous la direction duquel ce journal « quémandait » alors des interviews des chefs du FIS et affichait fréquemment leurs photos sur ses « Une » pour plaire à leur base, au nom d’une conception mercantile et opportuniste de l’information, une conception complètement étrangère à la ligne historique du journal et à ses principes journalistiques.

Que ce même journal ait été aussi convoité par le groupe du FAM pour le mettre au service du pouvoir, est une autre affaire. La tentative de ce groupe a été elle aussi déjouée.

le 17 février 2011

PADS

Source: “Le Lien”, le 27 avril 2011.

_____

* Rappelons que le PAGS avaient dénoncé dans une déclaration publique Ali Belhadj qui avait regroupé fin 1989 à la Soumaa, près de Blida, des centaines d’anciens gros propriétaires fonciers dont les terres avaient été nationalisées en 1972-1974 pour les exhorter à en chasser par les armes les attributaires de la Révolution agraire.

C’est sur la base de cette ferme prise de position que des militants du PAGS avaient entrepris un travail de mobilisation intense de la paysannerie dans les campagnes, pour dénoncer le FIS, ses liens avec les anciens féodaux, les gros spéculateurs et les exploiteurs de la classe ouvrière, ainsi que le gouvernement Hamrouche qui allait restituer les terres nationalisées.

La riposte aux appels de Ali Belhadj, notamment dans la région de Boufarik, sous l’impulsion de notre camarade Boualem Tiouerguiouine, assassiné en septembre 1995, par les sbires de Zouabri, a contribué à isoler le FIS au sein de larges couches de la paysannerie.

Ce travail d’implantation dans les campagnes, sur la base de la défense des intérêts de la paysannerie laborieuse, a été ensuite saboté sous l’action conjuguée de divers courants renégats ralliés à l’idéologie fumeuse du « capitalisme moderne » qui avaient pris le contrôle du PAGS, avant et après son congrès de décembre 1990.

[Source:

Le Lien

le 27 avril 2011
->http://www.lien-pads.fr/article-pads-reponse-a-un-calomniateur-lamentable-72671781.html]

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EN ALGÉRIE: LA TROMPETTE ET LA MODERNISATION DU RAÏ

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Remerciements à Boumediène LECHLECH pour cette riche étude à l’occasion de la Journée internationale de la musique.

L’auteur, universitaire est spécialiste en histoire de la musique algérienne;
Chercheur musicologue, et aussi auteur compositeur, reconnu dans la région de Oran, il a donné de nombreuses conférences dans toute l’ Algérie, produit plusieurs études écrites et audiovisuelles (émissions radiophoniques)

Il est un des initiateurs du premier syndicat autonome des artistes de la musique en 1998…

LA TROMPETTE ET LA MUSIQUE ALGERIENNE.

(Brève étude sur la région d’Aïn Temouchent

ex .province d’Oran)*

L’INTRODUCTION DE LA TROMPETTE

DANS LA MUSIQUE ALGÉRIENNE:

Elle a été introduite dans la musique algérienne moderne après la seconde guerre mondiale sous l’influence majeure du jazz et ses dérivés, de l’orchestration latino-américaine, de la musique militaire (fanfare), de la musique classique européenne et française, celle des lyres municipales (passacaille ) et du flamenco. [[ Le débarquement des alliés en 1942 avait donné lieu à une activité musicale intense des algériens avec les soldats américains et par exemple Blaoui Lahouari, au vu de son talent musical, avait reçu l’invitation d’émigrer aux USA.]]

Par contre, en Algérie elle a été introduite dés la colonisation française; mais bien sûr qu’il s’agît de la trompette moderne, c’est-à-dire à piston (lui -même inventé vers 1813), surtout en UT (do) et jouée par les militaires et les pieds-noirs. Elle devait supplanter toute une série d’instruments à vent comme la ghaïta, la gasba, zamer el mezoued, l’adjouak et parfois le ney selon les genres dans la vague d’acculturation coloniale, en une sorte de modernité subie; mais la résistance nationale se faisant aussi grâce à l’art musical d’où la prise de conscience aiguë, encore inachevée jusqu’à aujourd’hui chez nos jeunes trompettistes, pour sa meilleure adaptation à côté de l’instrumentation traditionnelle. Il faut noter aussi paradoxalement, son adoption sur le sol national bien avant l’émigration qui contribua aussi à l’évolution de notre musique dans sa diversité. [[Lexique inédit de la musique algérienne de l’auteur.]]

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À titre d’exemple en Oranie, et à surtout Oran à forte concentration européenne qui a accueilli en 1948 Louis Armstrong, et où a été organisée la semaine du jazz en 1960 à Canastel, on peut considérer Djelloul Bendaoued, l’un des rares autochtones élève du conservatoire municipal, comme le précurseur de la trompette, et qui deviendra chef d’un orchestre qui accueillera plusieurs musiciens parmi lesquels Lahouari Blaoui après son emprisonnement par l’administration coloniale (1958), comme aussi Maurice Medioni le pianiste oriental, Boutlélis le batteur, Manou le saxophoniste, les frères Serrour ( guitare et contre –basse )… Il accompagnera chanteurs et chanteuses à l’instar de Saïdi (Belhadj Ahmed), Cheikh Tayeb (Attar), Meriem Abed, Hasni Serrour , Ahmed Saber etc.[[Revue de presse, discographie de l’époque et témoignages d’acteurs.]]

Par contre les trompettistes issus de la communauté juive d’Algérie, excelleront en musique classique européenne, en jazz et autres genres contrairement à ceux, musiciens interprètes d’autres instruments et chanteurs célèbres de haouzi et d’andalou.[[Oran-Temouchent constitua une école d’andalou-haouzi contrairement à l’idée répandue des trois écoles constitutives et des soit disant 24 noubas.]]

Pour le genre raï, il faut attendre l’émergence de Messaoud Bellemou élève de la lyre municipale d’Aïn Témouchent, chez Henri Couton qui a épousé la cause algérienne lui et son fils martyr de la révolution marié à une autochtone. Le jeune Messaoud qui excellera dans les défilés des fêtes nationales à l’instar d’autres jeunes, créera (à 17 ans) son propre groupe pour animer le stade, et accompagner le club de football CRT (musique de scènes, airs flamenco …); ensuite il baignera dans la musique de cirque qu’il animera dans l’ouest algérien, et accompagnera les cortèges de mariage. La touche principale de ce modernisateur du raï c’est la transposition approximative des airs mélodiques du genre dit «Trab» avec des tentatives d’arrangements plus ou moins réussis, brassés à d’autres genres comme le diwan-gnaoui, musique zorna, haouzi , gherbi… d’où son chef – d’œuvre intarissable sur le mode «Boléabor» (mode ou plutôt bordj diwan-gnaoui): «Tarata». Malgré cela, la trompette n’a pas délogé à Aïn Temouchent la ghaïta citadine du duo des cheikhs Kaddour Abid et Boualem Goumbri, mais elles ont coexisté.[[Etude audio sur la genèse du raï moderne de l’auteur, émission de la radio d’Oran 1994 co-animée avec Mohamed Alem.]]

D’autres trompettistes ont émergé un peu partout en Algérie dans les lyres municipales et participent aux défilés des scouts dans la ferveur des premières années de l’indépendance. Et bien sûr des groupes à la mode sur le modèle latino-américain, notamment à Alger et les autres grandes villes du pays qu’il faudrait étudier de près.[[Mais aucun trompettiste n’avait connu la notoriété comme Messaoud Bellemou en Algérie et dans le monde grâce à l’internationalisation du genre raï et ses succès.]]

Par ailleurs, la trompette avait fait son apparition en pleine guerre de libération nationale dans l’hymne national «Qassaman», donc dans la musique militaire nationale, écrit par le grand poète Moufdi Zakaria et composé par le grand compositeur égyptien Mohamed Fawzi en 1957, qui l’introduit dans l’orchestration. Ensuite , cet instrument majestueux et toute la famille des cuivres se développeront au «Harasse El Djemhouri».[[Analyse d’enregistrement de l’époque; la percussion saccadée par l’alternance des tambours et timbales a été ajoutée ultérieurement par le compositeur Haroun Rachid en prélude à l’hymne national «Qassamen».]]

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Certainement , l’usage de cet instrument se développa en rapport avec le football après l’indépendance nationale, parce qu’avant il y avait les groupes zorna de «S’hab El Baroud» auxquels s’identifiaient les nationaux tout en se différenciant des pieds-noirs colonialistes. Et l’on verra à Oran émerger le jeune Djâffar Benssetti dans l’animation du groupe de l’ASMO sous l’influence de M. Bellemou avant de devenir membre du groupe de cheb Khaled.[[ Etude de l’auteur (conférence) sur «S’hab El Baroud» le chef-d’œuvre de Hanani Lahouari en réaction à la cantate «algérienne» du centenaire; le premier à appeler à l’insurrection armée contre le colonialisme en 1930.]]

Ceci dit, en auditionnant les anciens disques des années trente de la fantaisie algérienne, on en déduit l’enregistrement avec une section des cuivres comme chez Mohamed El Kamel sans pouvoir identifier les interprètes, qui sont des musiciens de studio inconnus, sur des airs de l’époque de Music – hall . Ainsi les premiers noyaux d’orchestres modernes, à ma connaissance, comme celui des frères Beys à Alger, celui de L.Blaoui à Oran et d’autres dans les centres urbains avant l’indépendance, ne comprenaient pas de trompettes, et ce malgré l’introduction de plusieurs instruments modernes comme la guitare, l’accordéon, le piano… ni d’ailleurs la troupe artistique mobile du FLN , dont faisait partie Ahmed Wahbi, auteur à l’époque de plusieurs hymnes et chants patriotiques. [[

  • Audition d’un enregistrement des années trente de Mohamed El Kamel sur un air de Music-hall.
  • Etude audio de l’auteur sur le style oranais moderne émission de la radio d’Oran 1994.]]

L’État algérien embryonnaire du temps de l’Emir Abdelkader hissait l’emblème national nouveau (vert -blanc) toujours comme du temps de la régence turque avec la ghaîta et le t’bal; alors que même les différents mouvements insurrectionnels de toutes les régions du pays encourageaient leurs combattants à l’aide de la poésie – dans les langues maternelles – déclamée et des divers instruments traditionnels, à vent et à percussion.[[Joseph Escoffier, le trompette du 2ème régiment de chasseurs d’Afrique fait prisonnier pendant presque un an prés de Sidi Youcef, depuis le 22septembre 1843, et libéré par l’Emir, joua parait-il un air de sonnerie de trompette à la demande de celui-ci qui lui remettra sa légion d’honneur envoyée par son roi. Subjugué par la personnalité de l’Emir, il demandera d’être affecté à Pau où été séquestré celui-ci pour le servir..! (S.H.D réf. 4M163, Emmanuel Dufour – transcripteur – Mai 2007).]]

Certes, certains algériens mobilisés dans l’armée française lors des deux guerres mondiales, notamment dans les régiments spahis, étaient musiciens interprètes de hautbois «ghaîta», à côté d’européens trompettistes – majors. Alors que l’ALN de l’intérieur anima des fêtes en pleine campagne avec des instruments traditionnels. Mais par contre celle des frontières tenait discrètement divers centres, surtout ceux du MALG, et n’usait surtout pas de trompette, sauf les radios qui émettaient les chants patriotiques enregistrés, et enfin en 1960 l’état-major général de l’ALN créa le premier noyau d’une fanfare militaire avec toutes sortes d’instruments dont la trompette. [[

  • Jules Rouanet avait signalé la création d’orchestre militaire indigène «La Nouba des tirailleurs» mais sans trompette , avec au répertoire «la Marseillaise» traduite à l’arabe, airs d’opéras, marches militaires et chansons coloniales vers 1912/13. Mais la visualisation de l’iconographie de l’époque démontre l’introduction des instruments à vent de la famille des cuivres comme le clairon… à côté de la ghaita en 1883 et peut-être avant!
  • L’auteur ayant rencontré en 2009 un «ghaït» – major mobilisé dans l’armée en 1936 habitant l’ex. Berthelot (Daoud-Youb).
  • À la base BenM’hidi à Oujda, A.Soudani dirigea cette 1ére fanfare militaire (temoignages oraux).]]

Même les groupes scouts de l’époque coloniale, dominés par le mouvement national (parfois comme couvertures à des activités illégales), dans leurs diversités utilisaient les instruments traditionnels pour se différencier symboliquement par rapport aux pieds-noirs; et ce n’est qu’ après l’indépendance nationale qu’ils ont introduit la trompette , et toute la famille des cuivres en puisant dans le potentiel des fanfares locales.[[

  • Etude citée sur «S’hab El Baroud».
  • Toutes les anciennes villes -garnisons de la période turque grouillaient de troupes pareilles avec diverses appellations (Zorna, Tbal, Idhebalen…) à ne pas confondre avec celles du sud dont les genres musicaux diffèrent totalement.]]

L’introduction de la trompette a – t – elle été décisive

dans la modernisation du raï?

La trompette a été précédée dans ce genre par le violon, la derbouka, le tar, le t’bal, les krakibs et l’accordéon; et elle a été suivie ensuite par le principal instrument d’accompagnement, en l’occurrence le clavier, et enfin le synthétiseur et d’autres comme le saxophone, la boîte à rythme, le bendir, la batterie, la guitare, la basse, les effets sonores produits lors d’enregistrement en studio… Alors que la chanteuse et le chanteur du rai rural, à distinguer des genres du bédoui, se faisaient accompagner par un guellal (Qallouz) et des guesbas. Donc il n’y a pas dans l’évolution du groupe raï que l’intrusion de nouveaux instruments qui détrônent d’anciens, mais aussi réintroduction d’anciens instruments ou de leurs timbres reproduits artificiellement , analogiquement et même numériquement.[[Étude citée sur le genre rai.]]

Certes la trompette instrument à vent, qui ne remplacera jamais la guesba, et qui est par définition considérée comme instrument transpositeur dans le groupe raï moderne correspond à la guesba dans le groupe traditionnel; mais son inconvénient c’est de ne produire que des tons et demi-tons, et le virtuose en trompette comble ces limites par les diverses techniques de jeux comme les appogiatures (trémolos , trilles , gruppettos…), mais surtout le flatterzung -mouvement oscillatoire-(de la langue et de la gorge).[[Vaclav Rubica , “La Qasba algérienne et sa musique” – Naprstek Muséum – Prague 1980.]]

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Et c’est pour cette raison fondamentale qu’ il est conseillé aux générations nouvelles des trompettistes, pour sauvegarder l’âme de certaines mélodies du raï, de jouer avec la trompette (ultra-chromatique) à quart de ton , dite atypique inventée dans les années soixante par Nassim Mâalouf, chez « Selmer» père de son principal interprète actuel et virtuose Ibrahim Mâalouf, neveu du célèbre écrivain libanais Amine Mâalouf, et comprenant quatre pistons au lieu de trois.(15)[[

  • Ilies Sehab, “les instruments à quart de ton” Beyrouth 1975 . (Article en arabe).
  • Le jazzman américain Don Eliss avait lui crée sa trompette à quatre pistons en 1965 chez «Holton» sous l’influence de la musique indienne pleine de subtilité, enchevêtrée de pentatonisme et d’ultra-chromatisme et d’une richesse rythmique inouïe.
  • Etude sur le piano à quart de ton de l’auteur, Oran 1993, éditions du PACO.
  • Il faudrait penser à inviter Ibrahim Maâlouf à un concert lors du prochain concours (en final) et en profiter pour faire connaitre et adopter sa trompette à quart de ton par nos jeunes artistes, car elle répond mieux à notre sensibilité musicale.]]

La modernisation du raï ne se mesure donc pas uniquement à l’introduction de nouvelles sonorités, comme la trompette en son temps, et l’amélioration de l’orchestration en général, mais surtout à la qualité des arrangements et compositions due au génie créateur du compositeur capable de puiser sa «matière première» dans le folklore populaire pour en produire de nouvelles et belles créations modernes agréables à l’oreille, et qui n’en déforment pas les habitudes auditives. Ainsi qu’au parfait dosage (bien mesuré) des techniques universelles polyphoniques, harmoniques et contrapunctiques sans exagération qui dépersonnalise et dilue la création artistique originale.[[Étude audio de l’auteur déjà citée sur le genre raï. ]]

La saga de la trompette à Aïn Temouchent :

À ma connaissance , celui qui secondait Messaoud Bellemou comme trompettiste dans son groupe avant de s’en séparer, et ensuite arrêter de jouer définitivement pour raison de santé ,c’est le jeune de l’époque Mouffok Boumediene dit «Mimi» qui a été aussi chanteur. Et les autres trompettistes qui vont émerger de la lyre municipale, ce sont l’un des deux frères Kerras (le junior), Yekhlef Larbi, « Tico »…

Ensuite, il y’a eu l’émergence de nouveaux jeunes grâce au travail de formation par des moyens rudimentaires et à «l’oreille», favorisé par l’engouement pour cet instrument en vogue très demandé dans les cortèges nuptiaux, et cela sous l’égide de Messaoud Bellemou.

Et dans le tas on peut citer parmi les participants et lauréats du premier concours de wilaya de la trompette, que j’ai eu l’honneur d’initier et d’en être le co-président de jury, en 1995 avec le pionnier de la trompette dans le genre raï M.Bellemou, (Le Quotidien d’Oran surtout et El Watan en avaient bien couvert les préparatifs et le déroulement à l’époque) comme les neveux Bellemou Miloud et Said, les cousins Blels, Benaffane, Bouhassoune… Depuis ce temps leur nombre s’éleva encore malgré les obstacles créés par des rentiers -bricoleurs. Certains ont eu la chance de faire une carrière , non seulement locale, mais nationale et internationale notamment dans le groupe de Bellemou, qui sillonna le monde, comme Miloud Bellemou qui avait été classé le premier.[[

  • Il semble que AïnTemouchent est devenue un véritable réservoir de trompettistes.
  • Said Mouas, La lyre municipale de Temouchent, et le concours régional de la trompette, articles de 2005 (Echo-d’Oran).
  • Brahim Bihi le saxophoniste avait débuté paraît-il comme trompettiste à la lyre municipale.]]

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Comparaison entre le saxophone et la trompette

dans la musique algérienne :

Le saxophone, création nouvelle en 1846 par rapport à la trompette qui est un instrument que l’on retrouve dans notre antiquité sous forme rudimentaire, et avec divers matériaux de fabrication, a été introduit dans la musique algérienne avant la trompette.[[Étude audio de l’auteur sur la musique moderne algérienne, émission de la radio d’Oran 1994.]]

À Oran , il était interprété par «Manou» Manuel Martinez d’origine hispanique et élève du conservatoire municipal, dans l’orchestre de Djelloul Bendaoued. À Aïn Temouchent il était interprété par le brillant Brahim Bihi dans l’orchestre El Farah, ensuite l’orchestre local; ceci dans la musique moderne «Asri» et le «Wahrani», mais dans le genre raï il a été introduit, après la trompette, par entre autres Ghana El Maghnaoui qui avait longtemps travaillé avec le groupe de Messaoud Bellemou à Alger.[[Études audios citées.]]

Mais malgré les apparences le saxophone est un instrument qui n’appartient pas à la même famille que la trompette, quoi qu’ils soient tous les deux des instruments à vent. Il est de la famille des bois (fabriqué généralement en alliage: Laiton) à cause de l’émission des sons musicaux et leur perception par le cerveau humain à travers l’appareil auditif, grâce à la vibration d’une anche fixée à son bec, très souvent en bois, par la vibration de la colonne d’air. Alors que par contre la trompette est un instrument de la famille des cuivres à embouchure dont le son est émis par la vibration de la colonne d’air et grâce à la forme de celle-ci, et au mouvement des lèvres de l’interprète.[[Georges Gourdet, “Les instruments à vent” – collection Que-sais-je? n° 267, PUF 1967.]]

Le concours de la trompette de Aïn Temouchent

et ses perspectives :

Le concours de la trompette a complètement dévié depuis son lancement il y a plus de quinze ans; et il vaudrait mieux le réorienter dans sa direction initiale, et le confiner exclusivement à cet instrument dont la région conserve une tradition et des acquis scientifiques. Comme il est temps d’asseoir sur de solides bases un conservatoire municipal, qui prendra en charge loin du bricolage actuel, scientifiquement, pédagogiquement, et humainement son organisation et son élargissement progressif national avant son institutionnalisation, ainsi jusqu’à lui donner peut-être avec le temps une dimension Maghrébine avec une périodicité plus étalée.[[le projet du concours sur la trompette en 1995 a été inspiré à l’auteur par celui du saxophone de Belgique (Dinant), sans plagiat et après un effort exceptionnel d’adaptation aux réalités nationales et locales par une étude musicologique approfondie.

  • N’est-il pas temps de former des jeunes filles en trompette malgré l’endurance qu’exige cet instrument? ]]

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Aïn Temouchent, le 08 juin 2011.**

Boumediene Lechleche***

Chercheur-musicologue

___________________________

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* Cette brève étude était à l’origine une interview (modifiée et approfondie) pour le compte du journal ElWatan non publiée datant de l’an passé avec son correspondant Mohamed Kali.

** L’idée de la journée de l’artiste coïncidant avec le 8 juin de chaque année a été suggérée par l’auteur en 1994 à travers une émission spéciale à la chaine une de la radio, sur le chahid Ali Maâchi chef d’orchestre et auteur-compositeur de la grande fresque «Angham El Djazair» qui repose sur les airs mélodiques de toutes les régions d’Algérie. Elle n’a été adoptée officiellement qu’en 1998.

*** L’auteur de formation universitaire en histoire (enseigna au lycée Lotfi et à l’université d’Oran dans les années 80) , il s’était spécialisé sur l’histoire de la musique algérienne (magister inachevé en 1988 sur ce thème); il avait introduit cette discipline ne figurant pas au programme officiel à l’institut régional de musique d’Oran où il l’a enseigné momentanément en 1995. Il a été auparavant conseiller au palais de la culture d’Oran, chargé du département musique de 1992 à 1995. Par ailleurs il a été membre de la commission de l’ONDA à Oran en sa qualité de chercheur musicologue et auteur-compositeur sur pianOranais, et initiateur du premier syndicat autonome des artistes de la musique en 1998… Il a donné depuis plus de 20 ans des conférences sur les musiques nationales à travers diverses régions du pays (Oranie, Algérois, Kabylie, Sud-Ouest ) et produit une série d’études écrites et audio-visuelles (et émissions radiophoniques) ainsi que quelques récitals solo de pianOranais, dont l’un à Alger télévisé en début avril 2001 mais censuré!!! etc.

JUIN 2011 – LECTURES

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“CONFLUENCES MÉDITERRANÉE” “REVUE n° 77 PRINTEMPS 2011”: “RÉVOLTES ARABES, PREMIERS REGARDS”

LA PENSÉE N° 365 PUBLICATION FONDATION GABRIEL PÉRI – JUIN 2011

“LA PENSÉE ALTERNATIVE EN ÉCONOMIE” ACTES DU SÉMINAIRE «LA PENSEE ALTERNATIVE EN ECONOMIE AUJOURD’HUI» (2006-2010) PUBLICATION FONDATION GABRIEL PÉRI – JUIN 2011

“LA DETTE OU LA VIE” Sous la direction de Damien Millet et Eric Toussaintédité par le CADTM.

“ALGÉRIE: L’HISTOIRE EN HÉRITAGE – ESSAI SUR L’HISTOIRE DE L’ ALGÉRIE DES ORIGINES À AVRIL 2011” (500 pages) – livre de Smaïl GOUMEZIANE – édition “Non Lieu” – Mai 2011



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L’équipe de la revue Confluences Méditerranée

vous informe de la parution

du numéro 77 Printemps 2011


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(…) Nous nous sommes beaucoup interrogés sur la nécessité de proposer un numéro sur les révoltes arabes dans un temps aussi court. N’était-il pas trop tôt pour comprendre les ressorts précis du mouvement? Cent vingt-cinq ans après la révolution française, Zhou Enlaï avançait l’idée qu’il était bien trop prématuré d’en analyser les conséquences. Voilà une réflexion qui donne le vertige quand on ose, en pleine transition politique, consacrer des analyses à un mouvement en pleine effervescence. Mais s’il est trop tôt pour appliquer encore les clefs d’analyse de la transitologie, il est de notre devoir de produire nous aussi des analyses, qui, si elles peuvent s’avérer plus tard caduques, n’en demeureront pas moins des matériaux pour les analyses qui viendront plus tard. Et puis si nous avons finalement opté pour une première livraison d’articles sur la question, nous avons pris le soin de circonscrire un peu le regard : l’Egypte et la Tunisie constituent le plus gros des articles même si nous n’avons pas voulu éviter quelques contrepoints comme la Jordanie où le mouvement a été éteint – au moins provisoirement – et l’Algérie où il ne s’est pas vraiment réveillé (ou de nouveau réveillé, ce qui est plus juste). Nous avons également évoqué ce qui se passe en Palestine et en Israël car l’été qui vient s’annonce peut-être décisif. (…)


Dossier :

  • Pierre Blanc:

    Avant-propos
  • Mohamed Chérif Ferjani:

    Inspiration et perspectives de la révolution tunisienne
  • Farah Rached:

    La révolution tunisienne et l’islam
  • Amélie Régnault:

    Opposition de gauche et opposition islamiste en Egypte:

    concepts et pratiques révolutionnaires partagés
  • Hayat Lydia Younga:

    La Révolution arabe de 2011: à la recherche du sens perdu….
  • Hakim Ben Hammouda:

    L’orientalisme et les révolutions tunisienne et égyptienne:

    pourquoi ne l’ont-ils pas aimée, la révolution?
  • Sarah Ben Nefissa:

    Révolution civiles arabes et paradigmes d’analyse du politique des pays de la région
  • Jamal Shalabi: Jordan :

    Revolutionaries without a Revolution
  • Salim Chena:

    Pourquoi l’Algérie n’a pas (encore) pris le train du «Printemps arabe»?
  • Bernard Ravenel:

    La modernité gandhienne de l’Intifada arabe
  • Roger Heacock:

    La révolution arabe de 2011 et son printemps palestinien
  • Pierre Berthelot:

    La révolution vue d’Israël
  • Jean-Yves Moisseron:

    Après les révolutions arabes: changer de paradigme dans le partenariat euro-méditerranéen

Actu :

  • Sébastien Abis:

    Insécurités alimentaires : les risques géopolitiques se précisent en Méditerranée
  • Guillaume Almeras:

    Impacts monétaires de la crise sur les pays méditerranéens et guerre des changes?

Culture :

  • Faouzia Zouari:

    Réjouissons-nous des révoltes arabes
  • Christophe Chiclet:

    L’instrumentalisation de la corrida: no pasaran

Histoire:

  • Pierrette et Gilbert Meynier:

    L’immigration algérienne en France

Vous pouvez vous procurer, en version numérique, cet article

ou l’intégralité du Numéro 76: “Stratégies islamistes” sur le site de Cairn.info

à l’adresse suivante :

http://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2011-1.htm


Confluences Méditerranée est une revue trimestrielle créée en 1991, dont l’ambition est d’aborder les grandes questions politiques et culturelles qui concernent les peuples et les sociétés du bassin méditerranéen.

Equipe du Comité de rédaction
Sébastien Abis, Paul Balta, Karine Bennafla, Robert Bistolfi, Pierre Blanc, Christophe Chiclet, Jean-François Coustillière, Sepideh Farkhondeh, Burhan Ghalioun, Nilüfer Göle, Abderrahim Lamchichi, Farouk Mardam-Bey, Ivan Martin, Barah Mikaïl, Bénédicte Muller, Bernard Ravenel, Claudine Rulleau, Anne Volery, Sylviane de Wangen

Fondateur : Hamadi Essid (1939-1991)

Directeur de la rédaction : Jean-Paul Chagnollaud

Rédacteur en chef : Pierre Blanc


Contact : Chloé Fraisse-Bonnaud

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FONDATION GABRIEL PÉRI

DERNIÈRES PUBLICATIONS

LA PENSÉE N° 365

DOSSIER:

QUELLE(S) CIVILISATION(S)

SOMMAIRE:

Antoine Casanova

Hommage à Jacques Texier

___

QUELLE(S) CIVILISATION(S)?

Christian Laval

L’éducation ou le commun de l’humanité

Anicet Le Pors

Quelle citoyenneté ?

Frédéric Boccara

Économie et écologie : pour une vraie alternative

Albert Rouet

Revenir à l’essentiel

___

LE COURS DES IDÉES

Serge Cleuziou

Un jour l’État viendra…

___

VIE DE LA RECHERCHE

Thomas C. Patterson

Une anthropologie pour le XXIe siècle (II)

René Lacroix Yvon Quiniou:

une pensée matérialiste de la morale

Luigi-Alberto Sanchi

Guillaume Budé, philosophe ?

___

DOCUMENTS

Georg Lukács

Moses Hess et les problèmes de la dialectique idéaliste (II)

Un récit inédit d’André Prenant.

Prix : 19€

Sommaire et abstracts des articles >>

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FONDATION GABRIEL PÉRI

DERNIÈRES PUBLICATIONS

“LA PENSÉE ALTERNATIVE EN ÉCONOMIE”

ACTES DU SÉMINAIRE

«LA PENSEE ALTERNATIVE EN ECONOMIE AUJOURD’HUI»

(2006-2010)

Les chercheurs et militants qui s’expriment dans ces actes du séminaire «La pensée alternative dans la science économique contemporaine» n’avaient prévu ni le moment ni les modalités de la crise débutée en septembre 2008.

Mais dès la fin 2006, lors de sa séance inaugurale, ils avaient mis en évidence les contradictions inhérentes aux exigences de rentabilité des capitaux et de la financiarisation à outrance de tous les secteurs de la vie économique et sociale.

Ainsi, d’emblée, le décor était planté quant à leur caractère potentiellement catastrophique, spectaculairement avéré moins de deux ans plus tard.

Au-delà de ce moment, les différentes séances de travail ont été immergées dans les turbulences de la crise.

Loin d’en affaiblir la portée, les textes qui en ont résulté illustrent la robustesse d’un certain nombre des analyses proposées.

Cela se vérifie ici, dans ces actes, au-delà de la diversité des approches développées et des discussions engagées tout au long du séminaire.

Prix : 7€

En savoir plus >>

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“LA DETTE OU LA VIE”

->http://www.cadtm.org/La-Dette-ou-la-Vie]

Sous la direction

de Damien Millet

et Eric Toussaint

384 pages

20 euros

ISBN Aden : 978-2-930402-96-3

ISBN CADTM : 978-2-930443-16-4

En 2007-2008 éclate la crise la plus importante depuis celle de 1929. Les banques sont sauvées à coup de centaines de milliards de dollars et d’euros par les petits soldats du G20 aux ordres de la finance mondiale et les États financent ce sauvetage en appliquant au Nord l’équivalent des plans d’ajustement structurel de sinistre mémoire au Sud.

Cet ouvrage analyse méticuleusement l’enchaînement des processus ayant submergé le Nord à cette occasion, des États-Unis à la Grèce, de l’Islande aux pays d’Europe de l’Est, du Japon à la zone euro, tout en examinant les conséquences pour le Sud.

Il y avait le premier monde, celui du bloc occidental sous la guerre froide; le deuxième monde, celui du bloc soviétique; le tiers-monde regroupant les peuples du Sud soumis aux diktats des deux autres mondes. Le deuxième monde s’est effondré au début des années 1990 avec la chute du Mur de Berlin. Aujourd’hui, avec la crise qui a éclaté aux États-Unis en 2007-2008, c’est le premier monde qui bascule. La face de la planète entière s’en trouve durablement changée.

Il reste deux catégories principales: la poignée de ceux qui profitent de ce capitalisme inique, et la grande majorité qui le subit.

Cet ouvrage veut expliquer ce changement fondamental et apporter des alternatives radicales pour s’attaquer à cette logique dont nous ne voulons pas.

Les Auteurs

“Olivier Bonfond”, économiste, CADTM Belgique (Liège)

“Jérôme Duval”, Patas Arriba / CADTM Espagne (Valence)

“Pascal Franchet”, contrôleur des impôts, CADTM France (Rennes)

“Antony Guillonneau”, économiste, stagiaire au CADTM (Bordeaux)

“Yvette et Mike Krolikowski”, CADTM France (Nîmes)

“Cécile Lamarque”, CADTM Belgique (Liège)

“Damien Millet” (dir.), professeur, porte-parole du CADTM France (Orléans)

“Daniel Munevar”, économiste, CADTM Colombie (Bogota)

“Virginie de Romanet”, CADTM Belgique (Bruxelles)

“Éric Toussaint” (dir.), docteur en sciences politiques, président du CADTM Belgique (Liège)

“Renaud Vivien”, juriste, CADTM Belgique (Liège)

“Darius Zalega”, collaborateur du Monde diplomatique, Pologne (Katowice)


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Table des matières

Introduction

Extension des domaines de la lutte


Damien Millet

Chapitre 1

Historique et perspectives de la crise de la dette au Nord

Éric Toussaint

Une politique du choc différée – La crise de la dette menace les banquiers européens – Au secours des banques ouest-européennes et états-uniennes – La peur des dominos – Une dette privée bien plus lourde – Après les plans d’austérité en Europe.

Chapitre 2

La religion du marché


Éric Toussaint

Les milliards du culte – Sacrifices sur l’autel.

Chapitre 3

Le retour en force du FMI en Europe


Jérôme Duval

Une crise qui tombe à pic – Derrière la rhétorique du changement, toujours le même FMI – La Hongrie empêchée de choisir une autre voie – L’Ukraine empêchée d’augmenter les salaires – Le FMI salue l’austérité, la Lettonie la juge inconstitutionnelle – La Roumanie et la Serbie sous le choc de l’austérité – Déni de démocratie en Grèce – L’Irlande emboîte le pas – Préparer les opinions publiques – L’Europe des peuples – Quelques rappels utiles sur Dominique Strauss-Kahn – Ultralibéral, anti-démocratique et pro-Washington.

Chapitre 4

Islande: du paradis à l’enfer grâce aux marchés


Yvette et Mike Krolikowski

Désastreuses privatisations – L’arrivée du FMI – Icesave: la population refuse de payer -Nouvel accord en vue – Une nouvelle Constitution? – Triste état des lieux.

Chapitre 5

Grèce : Tout un symbole de dette illégitime


Éric Toussaint

Des éléments évidents d’illégitimité de la dette publique – L’emballement de l’endettement au cours de la dernière décennie – Le comportement odieux de la Commission européenne – Multiples atteintes aux droits sociaux depuis 2010 – L’exigence d’un audit de la dette gagne du terrain.

Chapitre 6

La crise irlandaise: fiasco complet du néolibéralisme


Éric Toussaint

L’Irlande, un exemple? – Aide insuffisante contre austérité fracassante.

Chapitre 7

Europe de l’Est : entre pays émergents et Union européenne


Daniel Munevar
Financement externe et expansion du secteur bancaire européen – Crédit privé et spéculation – Crise économique et dette publique – L’augmentation de la dette publique est le résultat, et non la cause.

Chapitre 8

Pologne, la domination des fonds de pension


Darius Zalega

Privatisation des profits, socialisation des pertes – Le nœud coulant de la dette – Croisade bruxelloise.

Chapitre 9

L’Union européenne et la zone euro en crise

Éric Toussaint

Une intégration européenne jugée très négative – Un centre et une périphérie au sein de l’UE – Les aides empoisonnées de la Commission européenne et du FMI – L’émission des eurobonds – La perspective d’un plan Brady pour les pays européens les plus endettés.

Chapitre 10

Dette publique de la France : des vérités qui dérangent


Pascal Franchet

Une campagne idéologique mensongère – Quelle charge de la dette ? – Rétablir la réalité des chiffres – Des remboursements colossaux – 37 % des dépenses publiques – Vers une remise en cause de cette dette publique?

Chapitre 11

La Belgique menacée par sa dette


Olivier Bonfond

Ajustement structurel à la sauce belge – Une gestion saine de la dette publique (1993–2007)? – Au final, combien la Belgique a-t-elle remboursé depuis la crise de la dette de 1982? – Crise capitaliste et dette publique belge – Vers une crise de la dette belge?

Chapitre 12

Alternatives pour une Union européenne solidaire


Éric Toussaint
Réaliser un audit de la dette publique afin d’annuler la partie illégitime – Stopper les plans d’austérité, ils sont injustes et approfondissent la crise – Instaurer une véritable justice fiscale européenne et une juste redistribution de la richesse. Interdire les transactions avec les paradis judiciaires et fiscaux. Lutter contre la fraude fiscale massive des grandes entreprises et des plus riches – Remettre au pas les marchés financiers, notamment par la création d’un registre des propriétaires de titres, par l’interdiction des ventes à découvert et de la spéculation dans une série de domaines. Créer une agence publique européenne de notation – Transférer sous contrôle citoyen les banques au secteur public – Socialiser les nombreuses entreprises et services privatisés depuis 1980 – Réduire radicalement le temps de travail pour créer des emplois tout en augmentant les salaires et les retraites – Refonder démocratiquement une autre Union européenne basée sur la solidarité.

Chapitre 13

Convergences entre mouvements sociaux en Europe


Éric Toussaint

Chapitre 14

États-Unis, antre de la dérégulation financière


Daniel Munevar

Régulation financière et stabilité économique – L’âge d’or de la déréglementation: l’administration Clinton – Guerres et baisses d’impôts: l’administration de Georges W. Bush – La Grande Récession: causes et conséquences – Dette publique aux États-Unis: quelles perspectives?

Chapitre 15

Décennies perdues au Japon


Daniel Munevar

Un scénario familier – Une dette publique colossale, mais apparemment sous contrôle.

Chapitre 16

Quels sont les points communs entre dette publique des pays en développement et dette publique au Nord?


Damien Millet et Éric Toussaint

Mêmes créanciers, mêmes effets… – FMI partout, justice nulle part!

Chapitre 17

La dette publique : cette aliénation de l’État


Karl Marx

Chapitre 18

Dangereuse insouciance pour la dette publique au Sud

Éric Toussaint

Des montants astronomiques au Nord – Une conjoncture qui génère des illusions – Des évolutions que le Sud n’est pas en mesure de contrôler – Des actions énergiques pour empêcher un bégaiement de l’Histoire – Stiglitz apporte de l’eau au moulin de la suspension de paiement.

Chapitre 19

Là où le Sud nous montre la voie


Éric Toussaint

Audit de la dette publique sous contrôle citoyen – Recours par les États à des «actes souverains» – La Constitution équatorienne : un modèle en matière d’endettement public – Développer des initiatives d’intégration régionale qui renforcent la solidarité – Fathi Chamkhi devant le Parlement européen.

Chapitre 20

Comment suspendre le paiement des dettes publiques sur une base légale


Cécile Lamarque et Renaud Vivien

Rembourser la dette publique n’est pas une fatalité – Une austérité à l’encontre des obligations relatives aux droits humains – Quels textes juridiques invoquer?

Chapitre 21

Comment déclarer la nullité des dettes publiques en toute légalité


Cécile Lamarque et Renaud Vivien

Les vices du consentement – La cause illicite ou immorale du contrat – L’usage illicite des fonds prêtés – Pour des actes unilatéraux contre la dette illégitime.

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Annexe 1

Les chiffres de la dette 2011

Damien Millet, Daniel Munevar et Éric Toussaint

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Annexe 2

Les plans d’austérité en Europe

Antony Guillonneau et Virginie de Romanet

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Glossaire


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ALGÉRIE: l’Histoire en héritage

Essai sur l’histoire de l’Algérie

des origines à avril 2011

(500 pages)

Smaïl GOUMEZIANE

édition “Non Lieu”

Mai 2011

INTRODUCTION

Un demi-siècle après l’Indépendance, les Algériens sont toujours dans l’attente de cette histoire qui leur permettrait de comprendre d’où ils viennent, qui ils sont et d’envisager leur avenir sur des bases et des repères objectifs. Car c’est bien l’histoire de l’Algérie qui a fait ce qu’ils sont aujourd’hui. Jusqu’ici, ils n’ont accédé, à l’école ou ailleurs, qu’aux histoires ou bribes d’histoires rédigées et diffusées de façon dominante par les «représentants» directs ou indirects des multiples conquérants, pouvoirs et autres opposants irréductibles de l’Algérie.

Avec, en filigrane, l’idée qu’il y aurait, selon les besoins ou selon les auteurs, une histoire officielle, une histoire des vaincus ou une histoire des vainqueurs! Pour les Algériens, cette quête permanente d’une histoire qui soit leur patrimoine commun, dans laquelle ils puissent se connaître et se reconnaître, est donc récurrente. Ne dit-on pas d’un peuple sans histoire qu’il est un peuple sans humanité! Cette quête symbolise, à elle seule, l’instabilité qui continue de caractériser le pays, les préjugés, les incompréhensions et les haines qu’il suscite encore en son sein et à l’étranger, notamment en France, et les incertitudes qui pèsent sur le futur individuel et collectif de ses habitants. Car, en Algérie comme ailleurs, les processus historiques contemporains ont le plus souvent leur origine dans le passé proche ou lointain. Le présent est gros du passé. C’est dire l’urgence d’une réponse objective à ce questionnement.

Bien sûr, d’importants travaux de recherche, se rapportant à telle ou telle période, à tel ou tel événement, à tel ou tel dirigeant de tel ou tel parti politique, ont été menés avec le souci de la rigueur scientifique par plusieurs générations d’historiens. À l’époque romaine ce fut le cas avec Salluste, Tacite ou Tite-Live. Puis au XIVe siècle il y eut le génial Ibn Khaldoun. La période ottomane fut décrite par Diego de Haedo ou Henri Delmas de Grammont. La conquête coloniale française ne fut pas en reste avec Hamdan Khodja, Amar Saïd Boulifa, Stephane Gsell. Plus récemment, une génération qu’on pourrait qualifier «d’historiens de la décolonisation» s’est particulièrement distinguée: de Charles-André Julien à Gilbert Meynier, en passant par Claude Liauzu et par les incontournables Fernand Braudel et Charles-Robert Ageron; de Mahfoud Kaddache à Mohammed Harbi, en passant par Benjamin Stora, Merrouche Lemnouer, Malika Hachid et tant d’autres.

Cependant, il n’y a pas à ce jour, et à proprement parler, de vision globale et consensuelle de toute l’histoire de l’Algérie, ni dans la manière dont elle est appréhendée, ni dans son contenu. Cela est probablement normal tant les passions et intérêts contradictoires que véhicule cette histoire sont nombreux. Il est vrai, aussi, qu’élaborer une telle vision consensuelle est une œuvre gigantesque et périlleuse, voire inespérée, même si l’on mobilisait une armée de scientifiques, tant les «querelles de clocher» entre spécialistes sont récurrentes. Aussi faut-il rester humble et procéder avec sérénité, par touches successives et complémentaires, selon des méthodologies appropriées, y compris hors du champ des historiens, en mettant en exergue les convergences, sans toutefois masquer les divergences.

Dans tous les cas, au vu des guerres mémorielles occultant, sur fond d’amnésies sélectives, bien des souvenirs « brûlants», et des tentatives d’instrumentalisation de l’histoire qui agitent périodiquement les milieux médiatico-politiques des deux côtés de la Méditerranée, il apparaît évident que la question de l’écriture sereine d’une histoire objective de l’Algérie est au cœur d’enjeux essentiels pour l’avenir du pays et de son peuple. Malgré (ou à cause de) cela, toute démarche visant à éclairer avec objectivité l’écriture de cette histoire est souhaitable et bienvenue.

S’il est vrai, comme l’indique l’historien Gilbert Meynier, que «dans l’Antiquité, il n’y avait pas d’Algérie, a fortiori avant l’Antiquité, parce que les nations et les États modernes n’existaient pas», il n’en reste pas moins qu’il y avait à la fois un territoire et sa réalité géographique, et un peuple et sa réalité politique, économique et sociale. Ce qui, au demeurant, n’a rien de bien spécifique ou original. On pourrait en dire autant de la France (les premières traces de la nation n’y apparaissent qu’à partir du XVe siècle), des États-Unis d’Amérique (la Déclaration d’Indépendance du 4 juillet 1776 constitue l’acte inaugural de la nation américaine), et plus encore de l’Italie (dont la nation se constituera en 1870). En d’autres termes, au-delà de la nation proprement dite, il y avait en Algérie, comme ailleurs, une réalité historique très ancienne. Selon Malika Hachid, celle-ci remonte au moins à la période du « Paléolithique ancien, une période que l’on appelle aussi Civilisation du galet aménagé, car cet outil en est un objet typique… L’implantation humaine au Tassili pourrait être très ancienne puisque de tels outils peuvent remonter à environ 2,5 millions d’années». Aussi Gilbert Meynier n’hésite pas à faire de ce territoire, habité depuis plus de deux millions d’années, un des berceaux de l’humanité, ajoutant que «la révolution néolithique (âge de la pierre polie) y apparut 10 000 à 8 000 ans av. J.-C., soit probablement bien avant l’Europe».

Dès lors, plutôt que de s’échiner ou de s’étriper à propos de la qualification de ce territoire, il vaut mieux étudier l’évolution de cette réalité historique, à travers ce qui deviendra progressivement Thamourth Imazighen, la Berbérie, la Numidie, Dzaïer, El Djazaïr ou l’Algérie, selon la langue utilisée, et la manière dont les hommes l’ont vécue et en ont rendu compte. Avec le souci fondamental de bien différencier la réalité historique — dont il est illusoire et probablement inutile de fixer avec précision le point de départ — et sa connaissance scientifique, telle qu’elle est conceptualisée par les chercheurs, avec ses points de départs, ses périodes, ses événements et autres chronologies géographiques, démographiques, économiques, politiques, militaires…

C’est pourquoi l’auteur que je suis — qui n’est pas historien — a pris le risque de cet écrit sur l’histoire de l’Algérie sous un angle inhabituel: celui de l’héritage. Mes compétences en économie, et plus particulièrement en histoire de la pensée économique, tout autant que ma longue pratique de l’économie et de la politique en Algérie, suffisent-elles à crédibiliser ma démarche et à l’inscrire dans le discours scientifique? Pas sûr. Ces pratiques, qui font que je suis, comme tout un chacun, «le fils de mon temps» (Hegel), et les traces qu’elles ont laissées en moi, ne sont-elles pas autant de risques interférentiels pouvant m’empêcher de sortir de mes positionnements politiques, voire idéologiques, pour entrer à mon tour dans les fameuses «querelles de clocher» qui caractérisent toute réflexion historique, et au-delà toute réflexion théorique? À l’inverse, cette relative extériorité à la discipline peut-elle être porteuse d’avantages théoriques particuliers pour moi et pour les lecteurs? Tels que celui de n’avoir aucun a priori historique ou celui d’investir le champ historique par des voies et moyens moins «traditionnels» que ceux utilisés par les historiens. Celui, enfin, de participer par la réflexion, au côté des historiens, à la mise à nu des «manipulateurs» d’histoire agissant, avec une subjectivité négative pour le moins mensongère, dans le but de protéger ou servir bien des intérêts inavouables, le plus souvent occultes et contraires aux aspirations légitimes du peuple algérien.

Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, j’ai la conviction que l’approche pluridisciplinaire est incontournable pour qui veut comprendre la complexité des processus historiques. À ce titre, ma démarche s’affirme clairement comme une volonté d’explication par la raison et non par l’affect, et tout autant comme un message d’ouverture, de rencontre et de mobilisation collective. Pour ces motifs, les historiens le comprendront: cet ouvrage n’est pas, à proprement parler, un livre d’historien. Ce serait pure prétention pour moi de l’envisager comme tel. Il est un essai qui se veut une contribution à l’identification des éléments essentiels et des principales dynamiques qui ont façonné, selon moi, l’histoire de l’Algérie. Comme une pièce parmi tant d’autres à verser au dossier de «l’histoire de l’Algérie, comme héritage des Algériens».

Dans cette perspective, je m’interroge sur l’héritage historique, en tant que contenu, à un moment donné, de la dynamique de l’histoire de l’Algérie. Tout au long de cet essai, le déroulé historique que je présente, à travers la confrontation d’une multitude de faits historiques, tirés des travaux de nombreux historiens, a pour objectif d’illustrer et de mieux identifier les sources et mécanismes qui ont permis, au cours des siècles, la construction d’une histoire spécifique, dont le contenu représente l’héritage historique. Avec d’autant plus d’intérêt qu’aujourd’hui encore cet héritage, parce qu’il est plus ou moins tronqué et instrumentalisé, à l’intérieur du pays comme à l’extérieur, demeure inassumé, continuant de diviser les Algériens et de les dresser les uns contre les autres. Or, et c’est une autre de mes convictions, l’héritage historique possède une particularité essentielle: celle de constituer, dans son intégralité, le seul héritage commun qui peut, au contraire, rassembler les Algériens. Car l’histoire de l’Algérie, au fond, c’est l’histoire de chacun et l’histoire de tous. À ce titre, elle est, comme l’Algérie elle-même, une et diverse, indivisible et incessible. Aussi, il ne saurait y avoir, quoi qu’imaginent certains, de « supermarché» de l’histoire où chacun remplirait, plus ou moins gratuitement, son couffin de «sa part d’histoire», pour en priver d’autres, les culpabiliser, les humilier, les agresser ou les soumettre.

Encore faut-il convaincre les Algériens du contenu objectif de cette histoire, de ses éléments constitutifs et du fait qu’ils en sont les premiers dépositaires. Ce qui n’est pas une mince affaire, tant les versions de l’histoire de l’Algérie sont multiples. Pour une foule de raisons, et pas seulement méthodologiques, l’histoire de l’Algérie, dans les ouvrages scolaires comme dans les livres spécialisés, et de façon plus large dans la littérature historique et le discours politique, est «découpée en tranches», réduite, falsifiée, malmenée, instrumentalisée au gré des conjonctures internes et externes. Au point qu’il n’y a pas, à ce jour, une histoire de l’Algérie scientifiquement et démocratiquement «reconnue», mais des histoires partielles, parcellaires et partiales, plus ou moins «privatisées», «monopolisées», pour ne pas dire confisquées par des hommes, des groupes ou des institutions, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Algérie.

Dans ces conditions, les Algériens, du dedans et du dehors, pourraient-ils en avoir une même perception? À l’évidence non. Il n’est qu’à observer la diversité des héritages affichés ou revendiqués par les uns et les autres, par les uns contre les autres. Le plus souvent, les uns et les autres, consciemment ou inconsciemment, procèdent à une sorte de «tri sélectif historique», pour ne garder que ce qui les arrange, jetant par là même aux poubelles de l’histoire des pans entiers et essentiels de l’héritage historique de l’Algérie. D’où les héritages tronqués et trompeurs qu’exhibent les uns et les autres, voire les héritages fictifs ou artificiellement reconstitués au gré des intérêts politiques, économiques, juridiques ou idéologiques de chacun. Or, l’objectif de vérité de l’histoire ne peut être subordonné à ces logiques. D’autant que cet héritage historique n’est pas un héritage classique, c’est-à-dire un patrimoine qu’il faudrait répartir entre tous les héritiers «légitimes» ou «autoproclamés». L’héritage historique est un tout indivisible, dont le peuple algérien est le premier dépositaire, à charge pour chaque génération de l’assumer, de l’affiner davantage et de le faire «fructifier». En d’autres termes, au-delà de la connaissance de cette histoire et de sa mémorisation, il s’agit fondamentalement, pour les Algériens, de se l’approprier individuellement et collectivement de sorte à transmettre aux générations futures une vision globale de la réalité historique «enrichie» de leur présent.

Dès lors, quelle est cette histoire? Comment s’est-elle construite? L’histoire, en particulier celle de l’Algérie, est un processus complexe fait de continuités et de discontinuités. Ce processus complexe résulte d’une dynamique, plus ou moins spécifique, combinant, sur une structure sédimentaire plus ou moins active, subissant diverses transformations au cours du temps, des mouvements de résistances sur fonds de rivalités multiples. Dans cette dynamique, les sédiments actifs qui structurent durablement la société, les transformations affectant les ordres établis, les résistances contre les pouvoirs dominants et les rivalités internes et externes, jouent des rôles différents, opposés, parfois complémentaires, mais toujours décisifs dans la constitution du processus historique. Pour ces raisons, il est évident que cette histoire n’est pas linéaire. Elle est faite d’avancées et de reculs, de victoires et de défaites, de progrès et de régressions. Les Algériens héritent donc d’une histoire en mouvement et non d’une histoire figée, immobile, sclérosée.

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Dans sa première partie

en s’appuyant sur le point de vue de plusieurs historiens, cet essai tente d’abord de clarifier les rapports entre réalité historique, mémoire, histoire et héritage, avant d’identifier, à travers sa longue et contradictoire maturation, les éléments fondamentaux constitutifs de cet héritage.

L’analyse montre que la réalité historique est d’abord un vécu, perceptible à travers les vestiges ruraux et urbains, les archives (juridiques, économiques, politiques, militaires), les souvenirs, les mémoires et autres travaux artistiques qui en témoignent.

Mais elle apparaît aussi (et surtout?) à travers les recherches scientifiques (notamment celles des historiens) qui contribuent à donner une représentation rationnelle de ce vécu: l’Histoire, avec un grand H. De ce point de vue, il apparaît clairement que l’histoire, tout en intégrant les récits mémoriels, marqués du sceau de la subjectivité et de la passion, s’en distingue fondamentalement. En se situant au niveau scientifique elle donne une représentation objective de cette réalité. Mieux, comme l’affirme Pierre Nora, alors que «la mémoire divise, l’histoire unit». À ce titre, elle constitue le fondement de l’héritage historique. Elle lui confère sa légitimité.

L’analyse montre que dès l’origine, notamment à partir de Carthage et de Rome, le territoire, ses richesses et son peuple furent l’objet de convoitises permanentes. Face aux agressions, aux guerres et autres conquêtes suscitées par ces convoitises, l’analyse identifie quatre processus dynamiques structurant depuis l’origine l’histoire de l’Algérie: processus de sédimentations, de transformations, de résistances et de rivalités internes.

En ce sens, l’invasion et l’occupation romaines jouèrent le rôle de révélateur de la société berbère. Elles y révélèrent le processus de sédimentation-transformation principal fondé sur l’organisation tribale, un attachement viscéral au territoire et la sauvegarde à tout prix de sa langue, tout en restant ouverte aux apports et échanges extérieurs. Elles y révélèrent aussi une société jalouse de son indépendance et de sa liberté, prête à tout instant à résister contre toutes convoitises, mais profondément affaiblie par des rivalités intestines récurrentes. C’est dire que les formes d’opposition ou de soumission à ces convoitises s’inscrivent dans une double logique contradictoire. Celle des mouvements de sédimentation-transformation, qui ont donné corps à la réalité historique du pays, du point de vue de son territoire, de son peuple, de son organisation sociale, de ses langues, de son économie, de ses religions. Celle de la dialectique des résistances-rivalités qui caractérisent, à chaque époque, les luttes qui se déroulent sur le territoire, leurs causes, leurs objectifs, leurs résultats et leurs effets sur le processus de sédimentation-transformation. Au cours des différentes périodes historiques, on constate que ces processus s’imbriquent ou s’entrechoquent, nouant des relations singulières, complémentaires ou opposées, continues ou discontinues. Ce faisant, ces processus dynamiques, parfois pacifiques, mais souvent violents, tumultueux et tourmentés, contribuent à façonner la spécificité et le sens de l’histoire de l’Algérie. Ils en accélèrent le cours, le ralentissent ou le détournent de sa direction initiale. Bien entendu, cette histoire est aussi affaire d’hommes et de femmes, venus d’horizons divers, qui ont été ou sont acteurs de cette histoire. Ils sont les sujets porteurs de ces sédimentations et de ces transformations, de ces résistances et de ces rivalités. À ce titre, ils sont des éléments clés de cet héritage historique. Mieux, ils en sont la personnification, chacun à sa manière ayant, de façon plus ou moins responsable, contribué à la construction de cet héritage. À la lumière de ces processus contradictoires, l’analyse permet de saisir, dans les parcours individuels et collectifs, la singularité et la diversité des hommes et des femmes, leur véritable contribution à l’histoire de l’Algérie, et leur apport à l’héritage commun.

Dans la deuxième partie à partir de cette première identification de l’héritage historique de l’Algérie, l’analyse s’attache à montrer comment s’est constitué l’héritage berbéro-arabe et musulman de la Berbérie.

L’étude présente l’évolution de la société berbère, puis berbéro-arabe, à travers la manière dont la berbérité, l’islamité et l’arabité, se sont progressivement structurées depuis l’Antiquité jusqu’à la période ottomane. La configuration sociétale à laquelle conduit ce premier processus fondateur est significative. Elle met au jour une des couches sédimentaires principales de l’histoire de l’Algérie. À la fin du XIVe siècle, le peuple y est largement berbéro-arabisé et massivement passé au monothéisme musulman. Sur fond de rivalités exacerbées, autour d’une économie principalement rentière, donc improductive, la Berbérie, sous la forme d’empires ou de royaumes berbéro-arabes, y est rapidement en déclin avancé et son économie est à bout de souffle. Affaiblie et marginalisée sur tous les plans, ne pouvant faire face aux convoitises des pays chrétiens, particulièrement de l’Espagne, certaines tribus berbères font appel aux frères Barberousse. L’analyse montre que ce fut un choix stratégique lourd de conséquences. Pour éviter la domination espagnole, deux des royaumes (oriental et central) de la Berbérie tombent… sous la domination ottomane. Sur fond « d’économie de butin maritime », et de pression fiscale sur les tribus, celle-ci exacerbe les rivalités internes et attise davantage encore les convoitises chrétiennes. Face à un continent européen en plein essor, grâce à la découverte du Nouveau Monde et à deux révolutions industrielles, le royaume central de la Berbérie, devenu royaume musulman d’El Djazaïr se prépare donc un avenir des plus sombres.

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La troisième partie examine l’évolution de cet héritage historique à la lumière de la résistance au processus colonial engagé par la France à partir de 1830.

Pour l’essentiel, l’analyse met en évidence un processus, particulièrement violent, de destruction systématique du socle berbéro-arabe et musulman de l’Algérie.

Au-delà de la tentation génocidaire, le processus est marqué par une brutalité inouïe se traduisant par des massacres d’une ampleur extrême, et par une dépossession à grande échelle des terres, sapant à la fois l’organisation politique et sociale, notamment tribale, la structure démographique et l’organisation économique du pays.

Sur fond de résistances et de rivalités récurrentes, la colonisation de peuplement et son organisation politique et économique, le capitalisme agraire et financier, engendrent de graves injustices et inégalités provoquant des fractures économiques, sociales et politiques irrémédiables.

Dès lors, sur quelles parties du socle sédimentaire s’appuieront les dynamiques permanentes de résistances pour s’opposer au système colonial? Pourquoi les rivalités intestines empêcheront-elles l’unité et l’efficacité des processus de résistance? Pourquoi faudra-t-il attendre l’étincelle de novembre 1954 pour engager la dynamique menant à l’indépendance?

Pour l’essentiel, l’analyse met en évidence la permanence du socle sédimentaire représenté par la notion berbère de Thamourth (le territoire tribal) jusqu’à ce que l’irruption de la domination ottomane, dans un contexte d’islamisation achevée, impose au royaume d’El Djazaïr la nation au sens de la Oumma, ou maison commune, islamique.

La conquête française tentera de lui substituer la nation sous sa version coloniale avec ses citoyens français «de souche» ou naturalisés et ses sujets indigènes musulmans.

Face à cela, deux résistances majeures émergeront dès le début de la conquête, et s’opposeront sur la finalité de la résistance: le dey Ahmed de Constantine tentera un retour au royaume d’El Djazaïr et à la Oumma; l’émir Abdelkader tentera de mettre en place, par le Djihad, une nation musulmane rénovée, coupée à la fois de sa version coloniale française et de la Oumma islamique (dont le centre de décision était encore à Istanbul).

L’analyse montre qu’en parallèle cette évolution de la nation aura eu un impact essentiel sur la forme de l’État passant du califat à la monarchie et, inversement, pour aboutir à la république coloniale. Avant que celle-ci, minée par sa structure dichotomique (citoyens/sujets), conduise, malgré la persistance des rivalités entre «indigènes», à l’émergence du mouvement de résistance national.

Dès lors, sur quel socle national se fera la rupture d’avec la nation et l’État colonial français ?

La quatrième partie a trait à la Guerre de Libération nationale algérienne.

L’analyse montre que celle-ci se déroula à travers trois conflits simultanés.

Le premier, le plus essentiel, car celui visé par la déclaration du 1er Novembre 1954, opposa la résistance algérienne aux forces coloniales. Il fera des centaines de milliers de victimes, dont certaines après une torture à grande échelle et des liquidations physiques. Celles-ci toucheront, en particulier, plusieurs chefs de la résistance lors de la «Bataille d’Alger». Ce combat ira toutefois jusqu’au bout. La résistance imposera les négociations au général de Gaulle, chef de l’État français, qui déboucheront sur l’indépendance du pays en juillet 1962.

Le second conflit se déroula sur fonds de rivalités intestines entre le FLN-ALN et le MNA, le mouvement politique créé par Messali Hadj, le père du nationalisme algérien, après la crise du PPA-MTLD. Celui-ci refusa la lutte armée de 1954. D’autres organisations du mouvement national en firent autant mais elles rejoignirent le FLN après le déclenchement de la guerre, et avant 1956. Messali, lui, ne s’y résolut pas, surtout vexé que la guerre fût déclenchée en dehors de lui. Ce conflit entre Algériens fit des dizaines de milliers de morts, avant de se terminer par la défaite du MNA.

Le troisième conflit opposa, dès 1956, les «frères d’armes de la révolution» membres du FLN-ALN. Bafouant le principe de la primauté du politique sur le militaire, instauré lors du fameux congrès de la Soummam, ce combat fit des dizaines de victimes par assassinat politique. Le plus horrible d’entre eux fut l’assassinat, au Maroc, par strangulation d’Abane Ramdane l’organisateur de la révolution. Ce dernier combat influera de manière décisive sur l’Indépendance. Notamment au cours de l’été meurtrier de 1962. L’armée des frontières, sous le commandement de Houari Boumediène, prendra le pouvoir par la force et installera Ben Bella en tant que chef d’État et du Parti FLN. Confirmant la poursuite de la logique contradictoire de résistance-rivalités dans le déroulement de l’histoire de l’Algérie.

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La cinquième partie est consacrée à la période qui suit l’Indépendance de l’Algérie.



L’analyse montre que celle-ci, tout en s’appuyant sur les sédiments hérités des quatre précédentes phases historiques, procède à la fois d’une continuité plus ou moins longue et d’une rupture plus ou moins radicale avec chacun d’entre eux. Résultat, à l’indépendance, l’Algérie est considérée comme une nation arabo-musulmane, dont l’État républicain emprunte ses principales caractéristiques aussi bien au royaume d’El Djazaïr de la période ottomane et à la république jacobine française qu’au « système socialiste » soviétique. Ce qui, en matière économique, se traduit, sous couvert de l’étatisation, par un retour à un système rentier et de prédation, sur fonds de rivalités politiques attisées par le clanisme et le régionalisme.

À partir de la fin des années 1980, un vent de liberté souffle sur l’Algérie grâce à de vigoureuses réformes engagées par le gouvernement de Mouloud Hamrouche. Qui seront vite détournées, alors que le terrorisme islamiste fait irruption dans la société algérienne.

Parmi ses premières victimes, le président Mohamed Boudiaf, dont l’assassinat, en juin 1992, ouvre la période des années de sang. Dès lors, sur fond de violences extrêmes entre ce terrorisme islamiste et le pouvoir en place, les années 1990 se traduisent par des milliers de victimes et des milliers de disparus. Suite aux efforts du président Liamine Zeroual, ces années s’achèvent par un compromis avec l’AIS (Armée Islamique du Salut) conduisant à une phase de Concorde civile et de réconciliation nationale, sous la direction d’Abdelaziz Bouteflika le nouveau chef de l’État.

Malgré un retour partiel de la sécurité et de la paix, cette période ouvre une ère de révoltes, de scandales et d’émeutes qui montrent combien le pays est bloqué. Malgré des richesses financières importantes tirées, plus que jamais, de la rente pétrolière et gazière, la grande majorité de la population s’enfonce chaque jour davantage dans la misère, la mal-vie et le désespoir.

Mais, comment en est-on arrivé là? Comment les dynamiques de résistances et de rivalités ont-elles opéré? Sur quels sédiments, ou parties de sédiments, se sont-elles appuyées? Cela explique-t-il le constat de rupture inachevée auquel de nombreux chercheurs sur le mouvement de libération national ont abouti?

Que dire après l’exposé de cette évolution historique? Qu’en est-il aujourd’hui de l’Algérie? De quel héritage historique les Algériens sont-ils les dépositaires? En quoi cet héritage historique explique-t-il l’exacerbation des inégalités sociales et des rivalités intestines? Plus concrètement, les Algériens disposent-ils de toutes leurs libertés et les exercent-ils?

À l’évidence non.

Dès lors, au-delà d’un statu quo suicidaire, quelles sont les perspectives historiques qui s’ouvrent aux Algériens? Celles d’une nouvelle sédimentation-transformation. Berbéro-arabe et musulmane, l’Algérie se doit désormais de devenir aussi démocratique. De sorte à transformer la logique de résistance-rivalités intestines en une logique de résistance-rivalité démocratique, seule à même d’assurer une gestion pacifique des conflits, somme toute inhérents à toute société.

Comme le prévoyait l’engagement du 1er Novembre 1954. Une façon de valoriser l’héritage historique et de contribuer à l’émergence de l’histoire de l’Algérie de demain: celle d’Algériennes et d’Algériens libres dans un pays libre.

Smaïl GOUMEZIANE

mai 2011

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ALGÉRIE MOUVEMENT OUVRIER ET QUESTION NATIONALE 1919 – 1954

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Cet ouvrage remarquable de Nora Benallègue Chaouia, a été publié en Algérie il y a quelques années. Il est malheureusement introuvable actuellement car le premier tirage en a été épuisé et sa réédition se heurte à de nombreux obstacles qu’il n’est pas utile d’évoquer ici. Obstacles qu’il faut souhaiter provisoires.

Car l’ouvrage, fruit de longs travaux, est dans la lignée des recherches et publications des auteurs algériens tels que Mohamed Teguia, Taleb Bendiab ou Nacer Djabi qui ont replacé avec sérieux les luttes du mouvement ouvrier syndical algérien dans leur trajectoire nationale objective.

En véritable historienne, Nora Benallègue Chaouia s’écarte des a priori subjectifs et idéologiques pour fournir grâce aux données économiques, sociales et géopolitiques du contexte colonial algéro-français l’éclairage indispensable à la compréhension des évènements.

Une approche qui n’exclut pas l’empathie chaleureuse envers les hommes et les femmes, dans la société, le monde du travail et le monde politique « européen » et « musulman », qui ont fait découvrir avec courage et lucidité en Algérie la réalité de la lutte des classes et ses cheminements de lutte.

(On excusera la qualité des fac simile présentés, elle sera améliorée ultérieurement)

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ALGÉRIE MOUVEMENT OUVRIER ET QUESTION NATIONALE 1919 – 1954

25 juin 2011 14:18

juste pour dire que le remarquable ouvrage de Nora Benallègue-Chaouia est disponible en librairie (en tout cas à Alger). Il a été réimprimé par l’OPU en 2010. salutations

 » DÉFENDRE LES DROITS SYNDICAUX EST UN COMBAT ET JE SUIS PRÊT A EN PAYER LE PRIX « 

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Pour avoir pris, il y a huit ans, les commandes du premier syndicat autonome dans la région, il a été renvoyé. Aujourd’hui encore, M’hamed Hadji se bat pour ses droits et la liberté de se syndiquer. Il attend une décision du Conseil d’Etat qui le réintégrerait dans son poste.

LOIN D’ALGER, LE DIFFICILE COMBAT D’UN SYNDICALISTE À CHLEF.

Comment vous êtes-vous lancé dans le syndicalisme à Chlef?

En 2003, une section du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique a été créée à Chlef et j’en ai pris les commandes.

C’était révolutionnaire! On ne dépendait plus de l’UGTA.

Je travaillais à l’APC au service mécanique pour véhicules de service. La majorité de nos adhérents étaient des travailleurs du service municipal de nettoyage car ils souffraient d’asthme.

Nos premières revendications étaient donc d’ordre médical. Nous demandions à ce qu’ils bénéficient d’une visite médicale régulière et qu’ils puissent boire du lait le matin avant de commencer le travail. Mais en réponse à nos réclamations, nous n’avions qu’un silence assourdissant…

Qu’avez-vous fait ensuite?

C’était le début des mouvements de grève à Chlef, un long combat semé d’embûches. En 2005, nous avons mobilisé les travailleurs devant le siège de l’APC. Il y avait entre 300 et 500 grévistes, et sur nos banderoles, des mots d’ordre simples:

«Non au mépris, non aux entraves, non au silence de l’administration». Mais en face, nous n’avions toujours aucune réponse.

Votre stratégie ne fonctionnait pas, mais vous avez persisté…

Oui, et de plus belle! En 2006, nous avons décidé de faire grève tous les 17, 18 et 19 de chaque mois. On se rassemblait devant le parc de l’APC, on sortait nos banderoles et on faisait notre sit-in. Un service minimum était assuré pour les services d’urgence.

Bien évidemment, nous n’avions toujours pas de réponse de l’administration.

Alors nous sommes montés d’un cran dans la revendication. Trente personnes du Snapap ont entamé une grève de la faim pour alerter les autorités sur nos conditions de travail.

Après huit jours, le président de l’APC et le chef de daïra sont venus à notre rencontre pour que nous cessions la grève de la faim en échange d’un accord verbal sur nos revendications. Nous avons donc levé la grève.

Avez-vous obtenu tout ce que vous réclamiez ?

Ce serait mal connaître notre administration. Dès la fin de la grève, nous avons tous rejoint nos postes.

Seulement, à notre grande surprise, nous avons tous été destinataires d’une lettre de l’APC nous renvoyant.

Nous fûmes virés pour abandon de poste pendant la durée de notre grève de la faim!

Nous avons immédiatement écrit au président de l’APC pour lui dire qu’il nous avait trahis.

On est montés à Alger pour rencontrer le ministre de l’Intérieur. Un de ses conseillers nous a aimablement reçus. Il a appelé le wali en nous promettant la réintégration des trente grévistes de la faim, dont moi-même, ce qui fut chose faite.

Tout est bien qui finit bien…

Mais le président de l’APC avait la rancune tenace. Il nous a envoyé le gardien de la mairie. Celui-ci est venu nous provoquer avec des phrases du genre: «Vous n’êtes rien. Votre syndicat n’est pas un vrai syndicat.» J’ai laissé dire, sans réagir à la provocation.

Le 18 septembre 2006, j’ai été convoqué en commission disciplinaire. On m’accusait d’avoir frappé le gardien. Je n’en revenais pas! Surtout que j’avais des témoins, et que lui-même, le gardien, ne daignait même pas se présenter à cette commission disciplinaire. Mais la messe était dite, le président de l’APC s’est vengé.

Vous n’avez pas tenté une action en justice ?

Si, bien sûr. J’ai déposé un recours auprès de la cour administrative.

Deux ans plus tard, le jugement tombe: il annule ma révocation car la partie adverse n’a pas de preuves. L’APC fait appel du jugement, le dossier est renvoyé devant le Conseil d’Etat. J’attends toujours le jugement final…

Entre 2006, date de votre révocation et aujourd’hui, cinq ans se sont écoulés. Comment avez-vous fait pour vivre ?

À l’époque, j’étais payé 12 000 DA. Cinq ans après, si j’étais resté en poste, j’aurais perçu un salaire de 20 000 DA. Je suis marié, j’ai trois enfants à charge, et vous le voyez, je vis chez mes parents avec cinq frères dont trois sont mariés.

Après ma révocation, je me suis débrouillé. J’aide la famille, je travaille au marché de gros de Chlef. Rien à voir avec mes compétences, mais il faut bien faire vivre ma petite famille… Je sais que les autorités municipales veulent nous faire «baisser le drapeau», que je m’excuse auprès d’eux, mais je ne le ferai jamais, car justement, il n’y a aucune excuse à donner.

Le droit de grève et le droit syndical sont un droit reconnu par les conventions internationales.

À ce titre, il doit être respecté en Algérie. C’est un combat et je suis prêt à en payer le prix!

Bio express:

M’hamed Hadji, 39 ans, est marié et père de trois enfants.

En 2003, président de la section Snapap de Chlef, il organise sit-in et grèves pour réclamer une meilleure prise en charge sanitaire des travailleurs municipaux. Trois ans après, il est révoqué par la municipalité. Pour lui, aucun doute, on veut lui faire payer son syndicalisme.

Depuis, il travaille au marché de gros de Chlef où il donne un coup de main à sa famille en attendant de réintégrer son poste.

Il prône un syndicalisme autonome au plus proche des préoccupations des simples travailleurs.

Ahmed Tazir,

El Watan

le 17.06.11

LE PARTI COMMUNISTE SYRIEN SOUTIENT LES REVENDICATIONS LÉGITIMES DU PEUPLE SYRIEN POUR UNE DÉMOCRATISATION DU PAYS MAIS REFUSE TOUTE INGÉRENCE ET INSTRUMENTALISATION ÉTRANGÈRES

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Chers camarades des partis communistes et ouvriers du monde entier,

Des événements terribles continuent de se dérouler en Syrie depuis près de deux mois, à partir de l’émergence d’un mouvement de protestation soulevant de légitimes revendications locales et générales parmi la population du gouvernorat de Daraa. Ce mouvement a fait la lumière sur la présence de problèmes majeurs dans la vie politique Syrienne : le maintien de l’état d’urgence, l’absence de lois régissant l’activité politique, et ainsi de suite. En outre, il a attiré l’attention sur la colère populaire à propos de la dégradation des conditions ainsi que du niveau de vie des Syriens à la suite du virage de la Syrie vers une économie de marché – la diminution des aides d’Etat pour les pauvres, l’érosion des subventions pour les produits de première nécessité et la production agricole, et l’ouverture au libre-échange qui ne s’est pas accompagnée d’une modernisation de l’industrie Syrienne – qui a abouti à une hausse du taux de chômage, en particulier chez les jeunes. Cela a également mené à l’adoption de trois décrets : la fin de l’état d’urgence, la dissolution de la Haute cour de sûreté de l’État, et la légalisation des manifestations pacifiques. Des commissions spéciales ont également été mises sur pied et chargées de rédiger des lois entre autres sur les élections, les partis, les médias. D’autres lois traitant des questions économiques et sociales sont également en cours d’élaboration.

Néanmoins, les manifestations se sont répandues à d’autres villes, en raison de la réaction sécuritaire disproportionnée des autorités dans leur façon de traiter les manifestants dans les rues, ce qui a causé un certain nombre de victimes. A peine ce mouvement avait-il vu le jour qu’une formidable campagne médiatique de masse avait été lancée par plusieurs chaînes satellite Arabes et étrangères, profitant des dernières technologies. Cette campagne a eu recours à la falsification, à l’exagération et à l’incitation. A noter dans cette campagne, l’intérêt Américain, prétendant faussement avoir de la sympathie pour les citoyens Syriens, comme si nous étions supposés oublier la mort, la destruction, et les conflits ethniques et communautaires provoqués par les administrations américaines successives dans diverses régions du monde, en particulier en Irak.

La Syrie a joué un rôle clé en déjouant les plans des États-Unis au Proche-orient visant à redessiner la région dans les intérêts des peuples Arabes, à porter un coup à la résistance Palestinienne, et à servir l’expansionnisme d’Israël, violant le droit du peuple Palestinien au retour, son droit à l’auto-détermination, son droit à un État palestinien ayant Jérusalem-Est comme capitale, et le droit de la Syrie à récupérer les territoires Syriens occupés. Voilà pourquoi notre parti soutient la fermeté de la Syrie contre de tels projets, et voilà pourquoi la position nationale de la Syrie a bénéficié du soutien des peuples Arabes, du mouvement communiste international et des mouvements de libération nationale dans le monde.

Comme nous le savons tous, la politique nationale de la Syrie a été plus forte que les intrigues étrangères, aussi imposantes puissent-elles être. Mais nous avons toujours mis en garde contre le fait qu’un complot pouvait naître de l’intérieur, et nous avons insisté sur le fait que la politique étrangère de résistance de la Syrie devait s’accompagner de sa contre-partie sur le plan de sa politique intérieure, et que le négliger serait ouvrir la voie aux grandes puissances résolues à la domination du monde qui manipuleraient la situation intérieure du pays en s’y immisçant, tentant de faire dérailler le cours des événements afin qu’ils servent leurs intérêts.

Notre parti a dit publiquement, depuis le tout début, que les manifestations ont été initialement lancées par les masses dont les orientations politiques s’inscrivent en opposition avec le colonialisme et toute forme d’ingérence étrangère dans les affaires Syriennes. Le peuple a le droit de protester contre les injustices commises par les responsables administratifs et les forces de sécurités locales dans les gouvernorats, et contre les injustices subies par de vastes couches de la société Syrienne. Notre parti a demandé entre autres à ce que la violence cesse, que les revendications légitimes des masses soient entendues, que l’on traite sans violence les manifestations pacifiques. Dans le même temps, nous avons mis en garde contre les tentatives d’exploitation des manifestations populaires, d’exacerbation des tensions communautaires et de destruction de l’unité nationale du peuple Syrien avec comme objectif de répandre le chaos, par des conspirateurs financés et incités par des forces étrangères opposées à la politique nationale de la Syrie. Ainsi, à plusieurs reprises, nous avons exhorté le gouvernement à promulguer des lois de réforme et à les mettre en œuvre aussi vite que possible. Nous avons indiqué clairement que de telles mesures nécessitent la restauration du calme et d’une vie normale dans les villes Syriennes, ce qui en échange exige la fin de la spirale de la violence, des arrestations et des représailles, de la part de toutes les parties.

Mais le cours des événements a changé récemment. Des bandes armées visant les forces de l’armée et de la police, mettant à sac les propriétés privées et publiques, ont fait jour, faisant de nombreuses victimes, à la fois parmi les civils et les membres des forces de sécurité. Plusieurs villes du pays sont désormais paralysées. L’attitude agressive de ces bandes armées a éclipsé le mouvement de protestation pacifique. Les médias Syriens ont diffusé des vidéos montrant des groupes fondamentalistes terroristes qui admettaient avoir reçu de l’argent et des armes de la part de l’étranger pour lancer des attaques contre le personnel de sécurité ainsi que leurs familles.

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Le Parti communiste syrien a publié une déclaration – qui a remporté une large adhésion parmi les forces nationales – exigeant la tenue d’une conférence nationale réunissant tous les partis politiques, y compris l’opposition nationale à l’intérieur du territoire Syrien, des représentants des syndicats et des associations professionnelles, des leaders intellectuels, culturels, économiques et religieux, pour le dialogue et la réconciliation. La mission de la conférence nationale est de parvenir à un consensus sur un programme nationale pour mettre le pays sur la voie d’une réforme d’ensemble politique, économique et sociale qui contribuerait à créer une nouvelle Syrie démocratique, un État de droit qui garantisse les libertés publiques pour tous les citoyens et toutes les composantes de la société civile telles que les partis politiques, les syndicats et les associations civils, un État qui reconnaisse le pluralisme politique et les libertés de réunion et d’expression, un État où la vie publique serait libre de toute censure, un État qui permette aux citoyens d’exprimer leurs besoins et leurs aspirations politiques, économiques et sociales dans un cadre communément admis d’une compétition pacifique, un État dans les institutions duquel tous les citoyens participent au progrès de la Syrie, un État qui promeuve la dignité de son peuple, réalisant un développement social et économique harmonieux, défendant les intérêts de toutes les couches sociales, mettant les pauvres avant les riches, renforçant la fermeté de notre pays face aux projets de capitulation, et renforçant la lutte pour libérer le Golan.

Notre parti a dit que les Syriens étaient conscients des insuffisances de notre situation interne. Ils peuvent également faire la distinction entre ceux qui demandent des réformes politiques et le développement économique et social afin de renforcer le front intérieur et ceux qui tentent de tirer profit de la situation pour attiser des conflits qui ne servent que les ennemis de la Syrie.

Il est devenu assez clair que les interventions impérialistes dans les affaires internes de la Syrie sous le prétexte de la « démocratie », menées par les gouvernements Français et Américains, en chœur avec les gouvernements Britanniques et Allemands, se trouvent derrière la campagne médiatique de masse contre la Syrie, la campagne employant un certain nombre de dissidents Syriens en exil qui se sont associés au projet Américano-Israélien dans la région.

Notre peuple prend les menaces pesant sur notre pays très au sérieux et se rassemble pour y faire face. Les intrigues étrangères ne réussiront pas à changer la politique nationale de notre pays : l’opposition de la Syrie au projet Américano-Israélien ; la lutte de la Syrie pour libérer le Golan ; le soutien de la Syrie à la lutte du peuple Palestinien pour libérer leur terre, pour créer un Etat palestinien ayant Jérusalem-Est comme capital, ainsi que les luttes pour libérer l’Irak de l’occupation Américaine et le Sud-Liban de l’occupation Israélienne.

Nous apprécions beaucoup les positions fermes et positives de la Russie ainsi que de la Chine exposant les dangers pesant sur la Syrie et apportant un soutien total à la Syrie dans cette crise.

Désormais, notre pays travaille avec d’autres partis Syriens, avec les forces d’opposition nationales, et divers courants de la société civile afin de mettre en place notre proposition d’une conférence pour le dialogue national.

Avec nos meilleurs vœux fraternels,

Hunein Nemer,

Premier secrétaire du Parti communiste syrien

Sources: Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/