1er au 5 SEPTEMBRE 2012 – JOURNÉES THÉÂTRALES DE TIZI-OUZOU: «TIGAWT D WAWAL» DEG AT IRATEN

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«TIGAWT D WAWAL» DEG AT IRATEN

ACTION ET PAROLE À AIT IRATEN –TIZI OUZOU

Azul (Salut)

ALƔU!

Ilmend n wesnubget n tiddukla «Tigejdit»,

«Tigawt d wawal» deg At Iraten.

Ussan umezgun «Tigejdit» n At Iraten -Tizi-Wezzu

( Taẓrig tis-snat) seg 01 ar 05/09/2012.

Tamezgunt «TURART N SA (7) TWACULIN»

a d-tili ass n Waram (ttlata)

04/09/2012 ɣef 15 (t),00

deg tzeqqa «Afrik»-At Iraten

.

Ansuf yes-wen (kent).

_____

INFORMATION!

À l’invitation de l’association «Tigejdit»,
la troupe théâtrale «Tigawt d wawal (Action et parole)»

de l’association culturelle Numidya d’Oran

sera à Ait Iraten –Tizi ouzou.

Journées théâtrales «Tigejdit» d’Ait Iraten -Tizi ouzou

(2ème édition)

du 01 au 05/09/2012.

Le spectacle théâtral « JEUX DES SEPT FAMILLES »

aura lieu Mardi 04/09/12 à 15h00

à la salle «Afrique» Ait Iraten -Tizi ouzou.

Soyez les bien venu(e)s.

Tanemmirt (merci)

Awetniri seg Wehran (d’Oran)


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«Tigawt d wawal» deg Larebεa n At Iraten – Tizi-Wezzu, aseggas 2005.

Assen ay Azwaw, i k-id-mmektiγ, i s-nniγ : – Ay imεezzan n yiwwas γurwet ad tuγalem d ineḥyaf n kullas si tmusni d tmuγli taγezfant, d tullya n wul d leεqel.

Dda Lmulud At MƐEMMER “Tabrat i Muḥend Azwaw γef tmusni”.

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«Tigawt d wawal »zdat uẓekka n Dda Lmulud At Mɛemmer

deg Tewrirt-Mimun-At Yanni- Tizi-Wezzu, 10 Ɣuct 2012.

Aẓekka n Dda Lmulud At MƐEMMER* di tlemmast n rrsaḍ (zzbel): ahicur, tuga (asaɣur), tiqreɛtin n wuzzi (ccrab) d icabcaqen (iquṭiyen) n lbirra!..

D lɛar fell-aɣ waya!!!!!

Taluft-a, d tin tessaweḍ “Tigawt d wawal” i uselway n tɣiwant n At Yanni.

Si tama-s netta, ɣas yenna d akken timeqbert-a d ayla

imawlan-is, mačči n tɣiwant, maca, iṛeggem (iweɛɛed)-aɣ-d akken ad yazen iqeddacen ara tt-yessizedgen.

Ay at nnif, anda-t laṣal ?!

G.M: ula d isem n “Dda Lmulud” tettwazleg tira-s ɣef uẓekka, amedya kan “Muḥend” yettwaru Muḥed!

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“Tigawt d wawal” zdat n Tleṭṭaṭt deg irebbi n Ǧerǧer – 11/08/12.

“Ɣas ma akka d ameddaḥ

Xḍiɣ-as i ccḍeḥ

Mačči d ccɣel-iw”

Zdak Mulud.

Awetniri seg Wehran

LECTURES OPPORTUNES SUR ACTUALITÉ BRÛLANTE

DEUX THÈMES POUR LA RÉFLEXION ET L’ACTION

AVANT UNE RENTRÉE ALGÉRIENNE GROSSE DE
DANGERS


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UNE RENTRÉE SOUS LE SIGNE DE LA GRAVITÉ

par Saoudi Abdelaziz

le 26 août 2012

http://www.algerieinfos-saoudi.com/article-une-rentree-sous-le-signe-de-la-gravite-109432739.html


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UN SCENARIO ABSURDE ET COÛTEUX

par M. SAADOUN

le 26 août 2012

http://www.lequotidien-oran.com/?news=5172236


UNE AUTRE CIVILISATION S’IMPOSE

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Saïd Bouamama.

Front uni des immigrations et des quartiers populaires

El-Watan

le 25 août 2012

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«Mission civilisatrice», disaient-ils, et nous avons eu les enfumages en Algérie, le massacre à Sétif, au Cameroun, à Madagascar et au Kenya.

«Sortie de la barbarie par l’ évangélisation», clamaient-ils, et nous avons eu l’ esclavage et la traite négrière.

«Supériorité civilisationnelle», écrivaient-ils, et nous avons eu deux guerres mondiales et les bombes atomiques sur Nagasaki et Hiroshima.

«Fin de l’Histoire», affirmaient-ils, et nous avons eu l’Afghanistan, l’Irak, la Libye et la Syrie bientôt.

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Il nous faut comprendre ce qui relie ces différentes dimensions: lorsqu’ils nous parlent de civilisation, il faut d’abord saisir- si nous voulons l’évaluer- son acte de naissance.

Cette civilisation dominant aujourd’hui le monde est née par le mensonge, le pillage et la violence. Voilà son véritable acte de naissance.

Les conditions qui ont permis l’accumulation des richesses permettant l’industrialisation, n’auraient pas vu le jour au nord de la planète s’il n’y avait pas eu la destruction des civilisations amérindiennes. Elles n’auraient pas pu croître comme elles l’ont fait s’il n’y avait pas eu l’esclavage comme péché originel. Elles n’auraient pas pu perdurer s’il n’y avait pas eu la colonisation comme âge de maturité. Et aujourd’hui, nous avons l’impérialisme comme âge de sénilité.

Pour couvrir cela, depuis 4 siècles maintenant, nous avons de manière systématique les mêmes procédés de falsification de l’histoire.

Le premier procédé utilisé consiste à nier les interactions, c’est-à-dire le lien entre la naissance de leur civilisation ici et la destruction d’autres civilisations, la négation du lien entre le développement économique ici et l’imposition d’une misère et d’une paupérisation massives dans d’autres aires de la planète.

Le second procédé consiste à occulter les emprunts que l’Europe a faits au reste du monde, masquer l’apport philosophique de nombreux espaces de la planète qui ont été pillés et réintégrés dans une logique dominante ici.

De cette manière, se légitime une vision euro-centrique du monde et aujourd’hui une vision occidentalo-centrique posant les uns comme civilisés, ou plus civilisés, et les autres comme barbares, ou moins civilisés, construisant les uns comme dotés d’une dynamique historique et situant les autres en-dehors de l’histoire, inscrivant les uns comme dotés d’une rationalité scientifique et les autres caractérisés par une mentalité prélogique ou irrationnelle.

La condition de possibilité d’une telle opération de falsification est la production d’un espace mental particulier. Rien n’aurait pu perdurer aussi longtemps s’il n’y avait pas eu la production d’un espace mental colonial, c’est-à-dire une déshumanisation à la fois des colonisés et des peuples des pays colonisateurs. Cet espace mental colonial reste encore largement dominant: il imprègne toute la quotidienneté ici et dans les pays dominés. Cet espace mental colonial, diffusé par de multiples canaux hier et aujourd’hui, continue à marquer les rapports dans le monde, les réflexes, les grilles de perception, les manières de percevoir l’autre. Cet espace mental colonial, n’est rien d’autre, comme le disait Aimé Césaire, qu’une «décivilisation». Une fois qu’il a été intériorisé et intégré, inévitablement tous les regards sur les phénomènes mondiaux et sur les peuples sont déformés.

Cet espace mental colonial produit des verrous de la pensée qui empêchent de voir le réel. Ces verrous de la pensée doivent d’abord être déracinés de nos imaginaires si nous voulons comprendre le monde et le transformer.

La libération de l’espace mental colonial est une condition nécessaire (mais insuffisante) de l’émancipation collective.

Une fois pris en compte cet acte de naissance barbare de leur civilisation, nous pouvons regarder son fonctionnement. Le discours dominant aime à mettre en exergue la sphère économique de l’Occident, censée être la plus efficace que l’humanité ait connue. Or, jamais l’humanité, dans aucun endroit du monde, n’a connu un système social où l’économie devient une fin en soi, au lieu d’être un moyen.

L’humanité a connu de très nombreux systèmes économiques: il y a eu des évolutions dans l’ensemble des pays de la planète, dans lesquels on est passés d’un mode de production à un autre et tous les peuples se sont adaptés aux évolutions des contextes, mais jamais n’était apparue une civilisation qui mettait l’économie comme fin et non comme moyen au service d’autre fins, c’est-à-dire au service du bonheur de la communauté.

Bien sûr, d’autres systèmes inégalitaires ont existé, mais jamais l’économie n’a pris une place aussi exclusive.

La seconde dimension de cette économie «civilisée» est la marchandisation généralisée. Jamais l’humanité n’avait connu un système social dans lequel l’économie prétendait rendre marchandise l’ensemble des dimensions de l’être humain et de son environnement naturel: le sexe, les plantes, l’homme, la terre, l’air. Rien n’échappe potentiellement à la loi de la marchandisation dans un système où le profit est posé comme seul critère légitime.

Un autre aspect de cette économie «civilisée» est son fonctionnement irrationnel, dans la mesure où, dans la quotidienneté comme dans le durée, le fictif l’emporte sur le réel. Il suffit d’observer la place prise par la Bourse et le CAC 40 pour saisir la place prise par le fictif dans cette société. Eux, qui nous accusaient de venir de civilisations dans lesquelles il y avait du fétichisme, vivent dans des sociétés où l’argent est devenu fétiche, où la Bourse est devenue fétiche. La civilisation actuelle est la civilisation la plus fétichiste de toute l’histoire de l’humanité. Simplement, ces fétiches ne sont plus nos fétiches habituels qui nous reliaient aux générations passées. Ce ne sont plus les fétiches qui nous reliaient à la nature et aux générations futures.

Ce sont des fétiches qui sont uniquement centrés sur la production, sur le profit pour certains et la misère pour d’autres. Et puis, la dernière dimension de leur civilisation au niveau économique est qu’elle ne peut fonctionner sans crises. La normalité de cette économie est la crise, c’est l’absence de crise qui est exceptionnelle. S’ils mettent en avant leur supériorité économique, nous n’avons pas à être impressionnés: leur économie ne vaut rien.

C’est une économie qui détruit et qui tue, qui déshumanise et qui marchandise, qui détruit les liens humains et isole, qui nie l’homme et le producteur pour ne promouvoir que le consommateur et le propriétaire.

Un acte de naissance barbare et un fonctionnement destructeur sont les deux piliers de leur civilisation. Nous pouvons maintenant nous interroger sur les conséquences dans le rapport aux autres parties de la planète d’un tel soubassement. La réponse découle logiquement, pour peu que l’on observe la situation mondiale sur la durée et de manière lucide, c’est-à-dire en ne se laissant pas piéger par la parcellisation des faits qu’opèrent les médias. Ils n’ont qu’un moyen pour imposer leur domination: la violence et la guerre. Les guerres impérialistes d’aujourd’hui ont les mêmes causes que celles qui ont enclenché la destruction des civilisations amérindiennes et de peuples entiers avec l’esclavage et la colonisation.

Elargir la marchandisation, baisser le coût des matières premières, avoir une main-d’œuvre meilleur marché, contrecarrer les concurrents, avoir des investissements plus rentables : ce sont les mêmes causes qui produisent les mêmes effets. Tant que nous n’aurons pas touché au cœur de cette civilisation, cela se reproduira. Il en est de même des argumentaires de justifications. Bien sûr, il y a une actualisation des formes des arguments de justifications, mais, fondamentalement, ceux-ci restent les mêmes : on nous parle encore d’aller libérer les femmes de certains peuples qui seraient opprimées et pour cela il faudrait des guerres ; on nous parle encore de besoin d’intervenir pour les droits de l’homme ; on nous parle encore, comme il y a 400 ans, d’apporter un cadeau à ces sauvages en venant les violer, en venant détruire leur système-monde.

Et puis, la dernière dimension qui me semble essentiel d’avoir en tête, c’est lorsque l’on nous parle de civilisation, de nous interroger sur l’idéal du «moi». Quel idéal ces sociétés donnent-elles à leurs membres ? Disons-le honnêtement : la civilisation dominante aujourd’hui est une civilisation qui donne comme idéal à nos enfants la négation de leur hominisation, la négation de leur caractère d’êtres humains, la négation de leur caractère de personnes en lien avec leurs semblables. Voici donc une civilisation qui est basée sur un rapport philosophique, qui est l’individualisme, c’est-à-dire la négation de tous les regroupements communautaires. Or, ce qui caractérise les sociétés qui ont été violées et agressées, c’est justement le fait que l’homme est en lien avec ses communautés d’appartenance. C’est le fait que le collectif, le «nous», donne un sens à l’individu et non le contraire.

Où est la civilisation et où est la barbarie ? Les autres caractéristiques de l’idéal du «moi» de ladite civilisation dominante vont dans la même direction aliénante. C’est une civilisation basée sur l’oubli du temps passé, c’est-à-dire des héritages et l’oubli du temps futur, des responsabilités vis-à-vis de nos enfants. C’est une civilisation qui «chosifie» la femme et l’homme avec des émissions comme Star Academy dans lesquelles l’être humain devient une chose et cela est mis en scène et présenté comme étant une «émancipation». C’est une civilisation qui est basée sur une guerre du tous contre tous et non pas – comme la plupart des sociétés paysannes d’où nous venons – sur la solidarité comme valeur centrale.

C’est une civilisation qui oublie le lien de notre espèce avec la terre. Ce n’est pas par hasard ou par bêtise si les différentes cultures du monde, des rites berbères aux rites amérindiens, en passant par les rites du Cameroun et de Madagascar – ont célébré la terre. C’est parce qu’il y a conscience que notre passé et notre avenir ont un lien avec la terre, non pas comme simple objet matériel, mais comme l’ensemble des héritages de l’être humain.

Et puis, c’est une civilisation qui a confondu volontairement deux notions, la nécessaire unité politique qu’il nous faut construire avec une unicité culturelle. La confusion entre unité politique et unicité culturelle est le vecteur de justification de toutes les opérations d’assimilation et d’homogénéisation mondiale, c’est à dire de la négation de toute la richesse de l’humanité. Alors que dire pour conclure ? Disons avec Marx, que cette société n’est pas «l’histoire de l’humanité », que cette civilisation n’est que sa «préhistoire». Disons avec Césaire, que cette civilisation est chaque jour plus «décivilisée». En réalité, nous sommes dans une phase de décadence, non pas au sens moral mais au sens Khaldounien du terme, c’est-à-dire lorsque disparaît dans une civilisation le donneur de liaisons entre les parties. A son époque, c’était l’asabiyya.

Aujourd’hui, il faut nous interroger sur ce donneur de liens que nous voulons recréer pour demain. Nous dirons avec Frantz Fanon, «Allons, camarades, le jeu européen est définitivement terminé, il nous faut autre chose.» Avec lui, nous ajouterons que ce sont les «damnés de la terre» d’ici et de là-bas qui ont cette chose à accomplir, car ils sont les seuls à avoir tout à perdre au non-changement et tout à gagner au changement. Que certains «damnés de la terre» soient aveugles, c’est inévitable : par le complexe de supériorité pour les uns, et d’infériorité du colonisé pour d’autres. Ne les attendons pas ! Ils nous remercieront plus tard d’avoir été sévères avec eux. Nous n’assistons pas à la fin d’un monde, mais à la fin de «leur monde». Oui, une autre civilisation est nécessaire ! Oui, une autre civilisation est possible ! C’est une histoire de lutte : organisons-nous pour une nouvelle civilisation plus égale ! –

Saïd Bouamama.

Front uni des immigrations et des quartiers populaires

DE LA MALÉDICTION À LA BÉNÉDICTION DES RESSOURCES

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par Joseph E. Stiglitz *

La récente découverte de nouvelles ressources naturelles dans plusieurs pays africains – au Ghana, en Ouganda, en Tanzanie, et au Mozambique, entre autres – soulève une importante question: ces aubaines seront-elles une bénédiction porteuse de prospérité et d’espoir, ou une malédiction politique et économique, comme cela a été trop souvent le cas?

En moyenne, les pays riches en ressources naturelles ont moins bien réussi que les pays sans ressources. Ils ont progressé plus lentement, et avec une plus grande inégalité – tout le contraire de ce à quoi on pouvait s’attendre. Après tout, taxer fortement les ressources naturelles ne les fera pas disparaître, ce qui signifie que les pays dont les ressources naturelles sont la principale source de revenus peuvent les utiliser pour financer l’éducation, les soins de santé, le développement et la redistribution.

Il existe une abondante littérature en sciences économiques et politiques pour expliquer cette «malédiction des ressources» , et des groupes de la société civile (comme Revenue Watch et l’Extractive Industries Transparency Initiative) ont été mis en place pour tenter de l’enrayer.

Trois ingrédients économiques de cette malédiction sont bien connus:

  • Les pays riches en ressources ont généralement des monnaies fortes, ce qui freine les exportations d’autres secteurs;
  • Dans la mesure où l’extraction des ressources génère peu d’emplois, le chômage augmente;
  • La volatilité des prix de ces ressources entraîne une croissance instable, d’autant plus instable que les banques internationales se précipitent lorsque les prix des matières premières sont élevés et se retirent précipitamment lors des baisses (fidèles au principe selon lequel les banques ne prêtent qu’à ceux qui n’ont pas besoin d’argent.)

En outre, les pays riches en ressources n’adoptent souvent pas de stratégies de croissance durable. Ils ne parviennent pas à admettre que s’ils ne réinvestissent pas les fruits de leurs richesses souterraines dans des investissements productifs en surface, ils s’appauvrissent. Les disfonctionnements politiques exacerbent le problème avec les tensions associées à l’accès aux revenus de ces ressources qui créent des gouvernements corrompus et non démocratiques.

Il y a des antidotes bien connus pour chacun de ces problèmes : un taux de change bas, un fond de stabilisation, des revenus de richesses investis avec prudence (y compris dans la population du pays), une interdiction d’emprunter, et la transparence (pour au moins permettre aux citoyens de prendre connaissance de l’argent qui entre et qui sort). Mais tout le monde s’accorde à dire que ces mesures, même si nécessaires, sont insuffisantes.

Les pays nouvellement enrichis doivent prendre des mesures supplémentaires pour améliorer la probabilité d’une «bénédiction des ressources».

Tout d’abord, ces pays doivent faire plus pour permettre à leurs citoyens de bénéficier de la pleine valeur de ces ressources. Il y a un conflit inévitable d’intérêt entre les entreprises qui exploitent les ressources naturelles (généralement étrangères) et les pays hôtes: les premières veulent payer le moins possible, tandis que les derniers veulent beaucoup plus. Des enchères bien conçues, concurrentielles et transparentes peuvent générer des revenus nettement plus importants que des accords de complaisance. Les contrats aussi devraient être transparents, et devraient stipuler qu’en cas d’explosion des prix – comme cela se répète fréquemment – les retombées ne seront pas uniquement réservées à l’entreprise exploitante.

Malheureusement, de nombreux pays ont déjà signé de mauvais contrats qui concèdent une part disproportionnée de la valeur des ressources à des entreprises privées étrangères. Mais il y a une solution simple: renégocier; si cela n’est pas possible, imposer une taxe sur les bénéfices exceptionnels.

De nombreux pays font cela partout dans le monde. Les entreprises exploitantes s’y refuseront, bien sûr, mettant en avant l’inviolabilité des contrats et menaçant de partir. Mais il n’en est jamais ainsi. Une renégociation équitable peut être le fondement d’une meilleure relation à long terme.

Au Botswana, la renégociation de tels contrats a permis d’établir les bases de sa remarquable croissance depuis 40 ans. En outre, ce ne sont pas uniquement les pays en développement, comme la Bolivie et le Venezuela, qui renégocient; les pays développés comme Israël et l’Australie ont aussi fait de même. Même les Etats-Unis ont imposé une taxe sur les profits exceptionnels.

Il est tout aussi important que les revenus issus des ressources naturelles soient utilisés pour promouvoir le développement. Les anciennes puissances coloniales ne voyaient en l’Afrique qu’un lieu d’extraction de ressources. Certains des nouveaux concessionnaires ont une attitude similaire.

Les infrastructures (routières, ferroviaires, et portuaires) n’ont été construites que dans un seul objectif : sortir les ressources hors du pays au coût le plus bas, sans aucun effort pour valoriser ces ressources dans le pays, encore moins pour développer des industries locales à partir de ces matières.

Un réel développement nécessite d’explorer tous les rapprochements possibles: former les travailleurs locaux, développer des petites et moyennes entreprises en apport aux opérations minières et aux entreprises pétrolières et gazières, une valorisation sur place, et l’intégration des ressources naturelles à la structure économique du pays.

Bien sûr, aujourd’hui, ces pays n’ont peut-être pas d’avantage comparatif dans nombre de ces activités, et d’aucuns pourraient dire que les pays doivent se cantonner à tirer parti de leurs forces. De ce point de vue, l’avantage comparatif de ces pays est d’avoir d’autres pays qui exploitent leurs ressources. C’est faux. Ce qu’il faut est un avantage comparatif dynamique, ou un avantage comparatif sur le long terme, ce qui peut être fait. Il y a quarante ans, la Corée du Sud avait un avantage comparatif grâce à sa production de riz. Si elle ne s’était focalisée que sur cette force, elle ne serait pas le géant industriel qu’elle est devenue aujourd’hui. Elle serait peut-être devenue le plus efficace producteur de riz au monde, mais elle serait encore pauvre.

Les entreprises peuvent dire au Ghana, à l’Ouganda, à la Tanzanie et au Mozambique d’agir vite, mais elles ont de bonnes raisons d’agir délibérément. Les ressources ne disparaitront pas, et le prix des matières premières est en augmentation. Entre temps, ces pays peuvent mettre en place les institutions, les politiques et les lois nécessaires pour que ces ressources bénéficient à l’ensemble de leurs citoyens.

Les ressources devraient être une bénédiction, et non une malédiction. Elles peuvent l’être, mais cela n’arrivera pas tout seul. Et ce ne sera pas facile.

Traduit de l’anglais par Frédérique Destribats

* Prix Nobel d’économie, est professeur en sciences économiques à l’université Columbia.

1947 – 1949: LE PARTI COMMUNISTE EN TRANSITION


Couverture


Document complet (accès au scan du document original)


1947-1949 l’Algérie en ébullition, quelques extraits relatifs aux mouvements sociaux, pendant cette période: grèves des travailleurs agricoles, des mineurs… …


TABLE DES MATIÈRES


PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN

AVRIL 1947 – MAI 1949

Du Congrès de Maison-Carrée

au Congrès d’Oran

Deux Années de Lutte

POUR

LA LIBERTÉ ET LA PAIX

LA TERRE ET LE PAIN

_____

Rapport du Comité central

pour le Vème Congrès National

du Parti Communiste Algérien.

haut de page


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… extraits de la brochure

“Rapport du Comité central pour le Vème Congrès National du Parti Communiste Algérien”

relatifs aux mouvements sociaux en Algérie

1947 – 1949…

BILAN DE DEUX ANNÉES DE LUTTE

pour la LIBERTÉ et la PAIX, la TERRE et le PAIN


Le IVe Congrès National de notre Parti, qui se tint du 17 au 19 avril 1947, vota une courte résolution approuvant sans réserve l’appel lancé par le Comité Central le 21 juillet 1946 :

  • « Le Congrès considère que les raisons qui ont motivé cet appel restent d’actualité et que l’union de tous les partis et groupements démocratiques et progressistes est plus que jamais nécessaire ».

BASE FONDAMENTALE DE LA POLITIQUE

NATIONALE DU PARTI

Jusqu’en juillet 1946, le Parti n’avait pas une appréciation nette de la puissance du mouvement national. Partant, son orientation était erronée. Il se trouvait ainsi isolé du mouvement national. C’est ce que dégagea le Comité Central de juillet 1946 après une courageuse et saine autocritique. Et dans un appel, il fixait nettement nos objectifs :

  • Pour l’immédiat :

    Une Assemblée et un Gouvernement algériens gérant toutes les affaires algériennes.
  • Et dans la perspective :

    « Une révolution démocratique algérienne ayant sa Constitution, son Parlement, son Gouvernement.

« Cette République sera unie par des liens fédératifs librement décidés au peuple de France et aux autres peuples fédérés au sein de l’Union Française».

Les objectifs ainsi fixés , le moyen de les atteindre était résumé dans le mot d’ordre central du comité Central :

FRONT NATIONAL DÉMOCRATIQUE

ALGÉRIEN

Pour la Liberté, la Terre et le Pain

Le IVe Congrès reprit donc à son compte ce mot d’ordre… …

(page 3)


… extraits … (page 8)

LES GRANDES LUTTES OUVRIÈRES

DE NOVEMBRE – DÉCEMBRE 1947

La politique de préparation à la guerre des colonialistes accula les travailleurs à la misère. En août 1947, l’indice des prix était de 1.066. En novembre de la même année il atteignit 1.263 alors que les salaires horaires de base qui était de 30 fr. l’heure n’avait pas bougé au cours de la même période.

D’autre part les sociétés industrielles et agricoles réalisaient de gros bénéfices. Voici quelques chiffres :

  • Société de l’OUENZA : 76.367.374 en 1947.
  • Société des PHOSPHATES DE CONSTANTINE : 51.866.121 en 1947.
  • Société du CHAPEAU DU GENDARME (Borgeaud) : 10.359.103 en 1946, 14.799.124 en 1947.
  • Société des MINES DE M’ZAITA : 323.937 en 1946, 26.580.735 en 1947.
  • Société BASTOS : 16.500.000 en 1946, 26.000.000 en 1947.

Il ne restait plus aux travailleurs qu’une issue pour défendre leurs conditions d’existence : la lutte. Ils l’engagèrent avec ardeur.

Au cours des grèves de novembre-décembre 1947, 100.000 travailleurs Algériens de toutes origines et de toutes conditions participèrent vaillamment à la lutte.

Seuls, en tant que Parti, nous avons apporté notre appui le plus complet aux modestes et légitimes revendications des masses laborieuses. Les militants communistes étaient à la pointe du combat. Contre les mensonges et les calomnies dont la presse et la radio aux ordres du Gouvernement et de l’Administration accablaient la classe ouvrière. « Liberté » sortit le 7 décembre un numéro spécial tiré à 10.000 exemplaires. Nos élus démontraient la légitimité de cette lutte, s’élevaient contre la répression, dénonçaient les provocations.

(page 9)

L’union systématiquement repoussée par les dirigeants des Partis nationalistes fut réalisée dans la lutte des travailleurs. Cette expérience démontra la justesse de notre politique qui, sans sous-estimer les contacts au sommet, oriente principalement nos efforts vers l’union à la base.

Travailleurs Communistes, M.T.L.D., U.D.M.A., Socialistes, sans parti se serrèrent les coudes face au patronat de combat et à l’administration colonialiste à son service.

Au cours de cette période, la classe ouvrière algérienne fit montre d’un esprit de lutte très élevé. Elle se dressa courageusement face aux forces policières. Les travailleurs arabo-berbères – les plus exploités, les plus misérables – se montrèrent les plus combatifs.

Outre les avantages arrachés par la lutte, les travailleurs algériens sont sortis de cette bataille aguerris. Ils ont renforcé leurs rangs, plus que jamais convaincus que seule la lutte paye. Cela ne fut évidemment pas du goût du patronat, des gouvernants colonialistes français qui ordonnèrent la criminelle scission de la C.G.T. Cette opération heureusement ne répondit pas à leurs espoirs.

Cependant, bien qu’en Algérie Force Ouvrière n’ait pas réussi à constituer des bases solides, il est hors de doute qu’un certain nombre de travailleurs furent découragés par cette scission.

Nombreux sont ceux qui, depuis lors, ont repris leur place de combattants actifs au sein des syndicats algériens confédérés.

La lutte de la classe ouvrière algérienne a été aussi un stimulant pour l’ensemble du mouvement national. En marquant sa place au sein du mouvement national et en y jouant de plus en plus son rôle d’avant-garde, la classe ouvrière le renforce et l’oriente dans la voie juste.

LES ÉLECTIONS À L’ASSEMBLÉE ALGÉRIENNE

L’année 1948 débute sous le signe de la lutte du mouvement national sans cesse grandissant contre les forces d’oppression. L’événement le plus marquant du premier trimestre fut la grande bataille politique des élections à l’Assemblée Algérienne.

Notre Parti qui se rendait parfaitement compte de l’importance de cette bataille appelait les masses à l’union et à l’action pour imposer des élections démocratiques. Réuni le 12 janvier 1948, le Bureau Politique mandatait nos camarades députés

  • « pour déposer d’urgence une proposition de loi portant élection de l’Assemblée algérienne à la représentation proportionnelle et accordant effectivement le droit de vote aux Algériennes d’origine arabo-berbère ».

…/…


… extraits … (page 13)

LA LUTTE DES MINEURS DU KOUIF ET DES

OUVRIERS AGRICOLES

Cependant, la situation de la classe ouvrière devenait de plus en plus misérable. En février 1948 l’indice du coût de la vie était de 1.479. En mai 1948 il passa à 1.780 alors que le salaire de base qui était de 37 fr. de l’heure passa à 40 fr. de l’heure en janvier soit 3 fr. de plus qu’en décembre 1947.

Le 15 avril, les 2.000 mineurs du Kouif engageaient leur première grande et victorieuse grève qui dura 64 jours. De leur côté, les parias de la terre, les ouvriers agricoles qui gagnaient de 100 à 150 fr. par jour, déclenchèrent les plus importantes grèves que nous ayions connues jusque-là dans l’agriculture. Dès le 13 juin, plusieurs milliers de travailleurs de la terre, engagés dans l’action revendicative, notamment dans les régions d’Alger, de Blida et d’Oran, firent preuve d’un esprit de lutte et d’un sens des responsabilités remarquables.

En défendant leurs conditions d’existence, les mineurs d’un côté, les ouvriers agricoles de l’autre, s’attaquaient aux racines mêmes du colonialisme.

Mineurs et ouvriers agricoles se rendirent bien compte que le Parti Communiste Algérien était le seul à soutenir leurs luttes. C’est pourquoi ils rejoignirent nos rangs par centaines.


… extraits … (page 15)

LA LUTTE SUR LE SOL NATIONAL

À la même session, le Comité Central enregistra le début de profonds changements dans la situation politique en Algérie. Les masses arabo-berbères notamment qui, jusque là et, dans une certaine mesure, boudaient notre Parti par suite des répercussions de l’affaire palestinienne, commençaient à se rendre compte de la justesse de notre politique. Soulignant les immenses possibilités qui existaient pour « mettre fin au régime colonialiste ébranlé ». Le Comité Central insista sur ce mot d’ordre central :

« l’action et l’union sur le sol national ».

Effectivement le dernier trimestre de l’année 1948 fut marqué par le développement de l’union et de l’action des masses populaires et en premier lieu de la classe ouvrière algérienne.

L’indice du coût de la vie avait passé de 1.263 (novembre 1947) à 2.174 (novembre 1948) soit près de 100%, alors que le salaire de base avait augmenté de 22%.

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Assemblée des grévistes de l’Entreprise Tidjani où les femmes musulmanes

avaient pris une part très active.

(« Liberté » du 11 novembre 1948)

Contre la politique de misère, les travailleurs des principales corporations livrèrent de grandes batailles victorieuses. Dockers,

… extraits … (page 16)

mineurs, fonctionnaires, métallos, travailleurs du bâtiment, des tabacs ou des produits chimiques, hommes et femmes, et pour la première fois les femmes musulmanes manifestèrent une combattivité extraordinaire.

La grève victorieuse des mineurs de Kénadsa, Beni-Saf, l’Ouenza, Timezrit, M’Zaïta, lutte qui dura parfois jusqu’à deux et trois mois, prenait une importance nationale. Notre Parti décidait le 25 novembre de soutenir les mineurs en lutte et de transformer sa souscription nationale en souscription en faveur des mineurs en grève. Environ 600.000 fr. furent versés par le Comité Central du Parti au Syndicat des mineurs, sans compter les collectes faites localement par nos camarades et remises directement aux familles des mineurs.

Par son union dans l’action, la classe ouvrière montrait à l’ensemble des Algériens le chemin à suivre. Et, par ailleurs, comme l’a toujours déclaré notre Parti, la lutte pour le pain est inséparable de la lutte pour la liberté, la classe ouvrière prenait résolument la place prédominante qui doit être la sienne au sein du mouvement national.

L’ACTION A LA CAMPAGNE

Bien qu’insuffisante, l’action du Parti dans les campagnes aboutit à des résultats positifs. Le Parti prit la tête de l’action de nos paysans dans différentes régions pour le recasement des paysans sans terre, la répartition des terres domaniales et communales aux petits fellahs, une juste distribution de l’eau dans le Sud, l’octroi de prêts et de semences aux petits cultivateurs, etc…

La djemaâ communiste de DUPERRE arracha la distribution de 79 hectares de terrains communaux.

Grâce à l’action menée par la région du Parti à Tlemcen, à la tête des fellahs en septembre 1947, l’expulsion des paysans d’Aïn-Nabla (Ouled Mimoun) est suspendue. En février 1948, le Parti est à l’origine de la distribution des terres d’El Hamraïa aux fellahs d’El-Oued. A El-Mahdia, en avril 1948, les fellahs, grâce à une action dirigée par le Parti, obtiennent satisfaction ; octroi d’une parcelle de terre par plantation de palmiers, attribution aux paysans de 1.375 litres-minute d’eau pour irriguer leur palmeraie.

Parallèlement à ces résultats positifs, «Liberté» et «Algérie Nouvelle» dénonçaient l’expropriation des fellahs, des petits colons au profit des grandes compagnies et des gros colons. Nos kournaux dénoncèrent également les accords franco-italiens qui constituent un danger pour les cultivateurs algériens.

… (page 17)

Ainsi, les deux années qui nous séparent du IVe Congrès de Maison-Carrée furent deux années de lutte ininterrompue menée par les Algériens avec une ardeur toujours accrue.

Le Parti Communiste Algérien fut l’animateur infatigable de cette lutte et le guide clairvoyant des masses populaires. Le journal «Le Monde» du 27 octobre 1948 est obligé de reconnaître l’inflexible continuité de nos vues lointaines, notre foi, notre discipline, notre souplesse et notre persévérance.

Si le Parti défendit avec ardeur les ouvriers, il n’oublia pas les campagnes. Le programme défini au Comité Central de juillet 1946 continue à être la base fondamentale de notre politique à la campagne. Rappelons-le :

« l’acheminement de l’Algérie vers le progrès exige une réforme agraire profonde qui donne la terre à ceux qui la travaillent: aux ouvriers agricoles, aux khammès, aux fellahs, aux petits colons.

« Cela signifie dans l’immédiat :

1. « Distribution à ceux qui sont dépourvus de terre :

  • a) « des terres à confisquer aux collaborateurs avec l’ennemi fasciste, aux saboteurs de la production et du ravitaillement ;
  • b) « des grands domaines appartenant à la Colonie et à certaines communes ;
  • c) « des propriétés de plus de 100 hectares achetés depuis 1940 par des non-agriculteurs ;
  • d) « des domaines des grandes sociétés anonymes (Compagnie Algérienne, Société Génevoise, etc… ;
  • e) « des terres améliorées par l’irrigationà récupérer selon la loi Martin ;

2. « une politique hardie et juste de l’eau ;

3. « la répartition équitable des semences, engrais, charrues, fourrages ;

4. « l’octroi des crédits aux fellahs et aux petits colons nécessiteux».


… extraits … (page 25)

La classe ouvrière montre le chemin

Au cours de l’année 1948, nous avons vu les masses populaires constamment en bouillonnement. Partis politiques, syndicats, organisations démocratiques de femmes ou de jeunes, Comités populaires multiples ont traduit la volonté de lutte des Algériens pour la liberté et de meilleures conditions d’existence. L’accentuation de la lutte a eu comme résultat le renforcement indéniable des forces nationales et démocratiques.

On ne saurait trop souligner l’importance de la participation de la classe ouvrière à la lutte générale. C’est elle qui s’est montrée la plus combattive et le plus apte à poursuivre la lutte jusqu’à la victoire.

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Assemblée des mineurs au cours de leur magnifique lutte de novembre 1948

La lutte des mineurs en particulier a été non seulement un stimulant, mais aussi un facteur décisif qui a permis à de nombreuses corporations d’engager des combats victorieux.

En plus des revendications propres à leur corporation, les travailleurs des villes et des campagnes veulent arracher l’application à l’Algérie du projet de sécurité sociale déposé par nos camarades Pierre FAYET et Alice SPORTISSE et que l’Assemblée Algérienne a tenté de saboter.

… / …

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TABLE DES MATIÈRES

I. BILAN DE DEUX ANNÉES DE LUTTE POUR LA LIBERTÉ ET LA PAIX, LA TERRE ET LE PAIN ……………………………………………………….. Page 3

  • La campagne pour un statut démocratique … … … … … … … … 4
  • La Conférence des partis Communistes à Varsovie … … … … … … 6
  • Les élections municipales et de djemaâs … … … … … … … … … … … 7
  • Les grandes luttes ouvrières (nov. décembre 1947) … … … … … … 8
  • Les élections à l’Assemblée Algérienne … … … … … … … … … … … 9
  • Contre la répression… … … … … … … … … … … … … … … … … … 11
  • La ferme position du Parti sur la question palestinienne … … … …11
  • La lutte des mineurs du Kouif et des ouvriers agricoles… … … … 13
  • La résolution du Bureau d’Information sur la situation dans le Parti
    Communiste de Yougoslavie … … … … … … … … … … … … 14
  • Pour la Paix, contre les fauteurs de guerre …………………………… 14
  • La lutte sur le sol national ………………………………………………… 15
  • L’action à la campagne …………………………………………………….. 16

II. LE DÉVELOPPEMENT DES FORCES DÉMOCRATIQUES

  • La faiblesse du camp impérialiste ………………………………… 18
  • L’essor économique, culturel et politique de l’U.R.S.S. ………… 19
  • La marche des démocraties populaires vers le socialisme ……… 20
  • Lutte des peuples pour la Liberté et la Paix ……………………… 20
  • La classe ouvrière et le peuple de France au combat …………. 22
  • La situation en Algérie ……………………………………………23

III. LE PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN ESPOIR

DE TOUS LES ALGÉRIENS
………………………………………… 33

  • Une arme essentielle : l’autocritique …………………………… 33
  • L’organisation du Parti …………………………………………………35
  • La propagande ………………………………………………………………38
  • L’éducation et les cadres ……………………………………………40
  • La raison de nos succès ……………………………………………42

EN AVANT POUR LA LIBERTÉ ET LA PAIX, LA TERRE ET LE PAIN –

AU TRAVAIL POUR LE Ve CONGRES NATIONAL DU PARTI
47

  • Développer la lutte pour les objectifs immédiats …………………47
  • Plus que jamais : Union …………………………………………………….. 48
  • Renforcer le Parti ……………………………………………………………… 49

ANNEXE

  • Les élus communistes fidèles à leur mandat …………………… 51

    _______________

Imprimerie Kœchlin (S.I.E.A.R.)


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RÉSISTANCE LIVRE et SAHA AIDKOUM KOULKOUM!

pour célébrer l’Aid, fête du savoir, de l’ouverture et du courage


RESISTANCE LIVRE !

Un gamin entra dans la librairie et demanda

– «3ammou» tonton je veux un livre

– Oui mon fils lequel veux-tu? choisis sur le rayon

– Je veux un livre sur la formation de la terre “tekwin el ard” mais promets moi de ne pas le dire a mon père (sachant que je le connaissais), j’ai de quoi payer, avec l’argent que j’ai pu amasser dans la tirelire que voici!

– Ok! d’accord mais dis moi, pourquoi ne dois je pas dire cela a ton père, il n’ ya pas de mal!

-Non! stp «3ammou» tonton, ne lui dis pas il va me frapper, car il m’avait assuré déjà avant, qu’il ne me chercherait pas ce livre, car ce n’est pas bien, et de me contenter de savoir que Dieu a crée la terre et l’univers en sept jours; quand je lui ai demandé alors comment il l’a crée? Il m’a frappé me traitant de Satan!

J’ai tendu a l’enfant un livre illustré de géologie pour enfants sur la composition de la terre, ravi il m’avait dit que c’est ce qu’il voulait exactement!, me paya et s’apprêta à sortir quand le papa entra l’interpellant!

– Que fais-tu ici Nadjib*; je t’ai cherché partout! L’enfant n’esquissa geste, il était pétrifié!

– Fais voir ce que tu as dans la main??? Ah! C’est ça alors et pourtant je t’avais prévenu, tiens! Le père donna alors une gifle foudroyante a Nadjib qui le mit a terre.

J’intervenais alors pour calmer le père et protéger l’enfant, mais en vain le père déchira le livre le jeta dans les rayons, et emmena son fils en continuant de vociférer!

Le lendemain NADJIB se présenta à moi pour me demander de récupérer le livre déchiré ;
Je le lui ai remis, l’ayant recollé la veille, en lui disant

– Fais attention s’il le voit encore chez toi

– Non! Tonton cette fois, maman a promis de le me le cacher et hier elle a fait une grande
scène a mon père et l’a menacé de partir s’il ose me frapper encore pour cela!

J’ai vu alors sur son visage

Un sourire rayonnant

D’un combat gagné,

Une résistance rage

Avec sa maman

Pour tourner encore les pages

Pour continuer à lire !

À vivre et sourire

À questionner son temps

À lire l’avenir !

À baver les coups

À en donner

À aller jusqu’au bout

Dans ce monde de fous !

FATEH AGRANE le 17 août 2012

Copyright tous droits réservés

Nadjib habite une banlieue d’ALGER* l’histoire est réelle !
Il est l’ami d’une libraire de banlieue !

ÉVOLUTIONS AU PROCHE ORIENT

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* ÉGYPTE, UNE NOUVELLE ÉTAPE? par Alain GRESH12 août 2012 – Nouvelles d’orient


* LES TURCS S’INQUIÈTENT DU SOUTIEN APPORTÉ À L’ASLBurçin Gerçek, 12 août 2012. Le Figaro


* ALAIN CHOUET ET LA SYRIEdompaul2.unblog.


* DU PRINTEMPS ARABE ET DES INTÉRÊTS DE L’OCCIDENTAkram Belkaïd, “La chronique du blédard” – “Le Quotidien d’Oran” – jeudi 9 août 2012


ÉGYPTE, UNE NOUVELLE ÉTAPE?

par Alain GRESH

Lundi 13 août 2012

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La décision du président égyptien Mohamed Morsi de limoger le maréchal Hussein Tantaoui et de nommer un nouveau ministre de la défense et commandant en chef des forces armées en la personne de Abdel Fattah Al-Sissi est une étape importante dans l’histoire (encore brève, ne l’oublions pas) de la révolution égyptienne entamée le 25 janvier 2011. Le président a aussi démis les principaux chefs des armées, le chef de l’état-major (Sami Annan), ceux de l’armée de l’air et de la marine, celui de la défense aérienne – Tantaoui et Annan ont été décorés et nommés conseillers du président !

Morsi a aussi annulé la déclaration additionnelle à la Constitution qu’avait adoptée le Conseil supérieur des forces armées (CSFA) à la veille du second tour de la présidentielle et que j’avais qualifiée de tentative de coup d’Etat constitutionnel – rappelons que selon cette déclaration additionnelle, le président n’a pas les pouvoirs de révoquer les chefs de l’armée. Disponible ici en anglais, le nouveau texte constitutionnel décrété par le président lui donne l’ensemble des pouvoirs exécutifs et législatifs, ainsi que la capacité de désigner une nouvelle assemblée constituante si celle qui existe n’était pas en mesure d’accomplir sa tâche.

Enfin, Morsi a nommé un vice-président, le juge Mahmoud Mekki. Ce magistrat est connu pour son indépendance et pour sa participation en 2005 au mouvement des juges égyptiens contre les ingérences du pouvoir politique, ingérences qu’il a toujours dénoncées.

Un rapport d’Amnesty International rappelle que Sissi, alors chef du renseignement militaire, avait rencontré une délégation de l’organisation au début 2012 qui s’était inquiétée de l’usage des tests de virginité. Sissi avait répondu que ces tests avaient été faits pour que l’armée ne soit pas accusée de viol, mais avait aussi assuré qu’ils ne se reproduiraient plus.

Rappelons que Morsi, un membre des Frères musulmans, a été élu président en juin 2012 : c’est la première fois qu’un civil était élu à la tête de l’Etat égyptien depuis la prise du pouvoir, en juillet 1952, par les «officiers libres». Rappelons également que, en 1954, un bras de fer avait déjà opposé les militaires et les Frères musulmans.

Il est encore difficile de mesurer l’impact de cette décision, et de savoir si elle va se heurter à des oppositions, au sein des militaires ou au sein de l’appareil judiciaire, qui pourrait en contester la constitutionnalité. La presse égyptienne reprend des sources internes au CSFA selon lesquelles la décision était attendue et n’a pas surpris Tantaoui. Il n’est pas impossible qu’existe, parmi les officiers, un courant qui voulait en finir avec Tantaoui, un représentant de l’ancien régime et de sa corruption et qui cherche à trouver un nouvel équilibre entre l’armée et le pouvoir civil. La récente attaque contre des militaires égyptiens à Gaza, qui a fait seize morts, n’a sans doute pas renforcé le prestige de l’armée et Morsi en avait profité pour limoger le chef du renseignement.

Parmi les premières réactions, celle d’Abdel Moneim Aboul Foutouh, arrivé en quatrième position au premier tour de l’élection présidentielle, qui a annoncé son soutien à Morsi (rappelons les scores que les quatre principaux candidats ont obtenu au premier tour de la présidentielle : Morsi, 24,8 % des voix, Ahmed Chafik (candidat de l’ancien régime), 23,6 %, Hamdin Sabbahi (nassérien), 20,7 %, et Aboul Foutouh, 17,5 %.

Cette crise confirme l’affaiblissement du rôle de l’armée. Celle-ci, ou en tous les cas le CSFA, avait longuement hésité, après le second tour de la présidentielle, à en accepter le résultat : il fallut une semaine, alors même que les chiffres étaient connus depuis longtemps, pour que la commission proclame la victoire de Morsi (lire « L’Egypte entre révolution et contre-révolution »). Désormais, il semble assuré que le retour en arrière n’est plus possible.

Cela ne règle nullement les problèmes de l’avenir de l’Egypte. Deux défis intérieurs majeurs restent posés : celui de la consolidation d’un régime démocratique représentatif ; celui des transformations économiques et sociales. Pour relever le premier, les Frères musulmans doivent participer à la solution dans la mesure où il ne peut exister de démocratie dans ce pays sans leur participation aux affaires, au même titre que les autres forces politiques. Pour le second, les choses sont moins évidentes: les Frères, ou en tous les cas leur direction, prônent le libéralisme économique et l’économie de marché ; dans le même temps, ils ne sont pas liés au capitalisme prédateur qui a pillé l’Egypte depuis deux décennies et, tout en conservant leurs orientations, ils pourraient « moraliser la vie économique», ce qui ne serait pas une mince victoire.

Un article le rappelle, les Egyptiens entre 18 et 29 ans représentent un quart de la population et la moitié vit dans la pauvreté. C’est pour sortir de cette misère mais aussi pour retrouver leur liberté et leur dignité que ces jeunes ont renversé Moubarak, et ils ne sont pas près de l’oublier.

Alain Gresh, 12 août 2012. Nouvelles d’orient

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LES TURCS S’INQUIÈTENT DU SOUTIEN APPORTÉ À L’ASL

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par Burçin Gerçek

Le Figaro

Lundi 13 août 2012

Selon un récent sondage, près de 60 % de la population turque serait contre l‘aide d’Ankara aux opposants syriens.

Dans ce café fréquenté uniquement par les hommes, près de la place de Sirinevler, un quartier populaire en périphérie d’Istanbul, on suit de près les derniers développements en Syrie. Seyfettin, le patron, regarde le journal télévisé. Sont évoqués les 3 000 Syriens qui, de l’autre côté de la frontière, attendent de pouvoir passer en Turquie. «Assad fait vivre un vrai calvaire aux Syriens. Un dirigeant qui persécute ainsi son peuple ne peut plus rester au pouvoir», commente-t-il. Lorsqu’on lui rappelle qu’il reprend presque mot pour mot le discours du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, il sourit. Seyfettin a voté pour l’AKP au pouvoir et se déclare fier d’Erdogan, devenu, selon lui, le leader de l’ensemble du Moyen-Orient.

Mais le nombre de ceux qui partagent l’opinion de Seyfettin semble être en baisse: selon un récent sondage, près de 60% de la population turque serait contre le soutien apporté par Ankara aux opposants syriens. «Au début des affrontements, les opposants avaient la sympathie de la société turque parce que l’on considérait que, dans leur majorité, ils menaient une lutte pour la démocratie», explique Bereket Kar, chercheur spécialisé dans les relations turco-syriennes. «Mais depuis la diffusion des informations sur la présence possible des militants d’al-Qaida ou des Frères musulmans au sein de ces groupes, mais aussi sur le soutien financier de l’Arabie saoudite et du Qatar, les gens sont plus sceptiques.»

Heurts dans les camps

L’arrivée massive des réfugiés a aussi contribué à cette évolution. Près de 50 000 Syriens sont hébergés dans des camps de réfugiés proches de la frontière. Si, aux premiers jours du conflit, les médias turcs ont soigneusement véhiculé l’image de «la Turquie qui accueille ses frères syriens», le ton a changé. La presse met en avant les heurts dans les camps et sous-entend qu’ils pourraient être provoqués par les militants islamistes mêlés aux combattants de l’Armée libre syrienne. La tension est d’autant plus grande à Antakya, qui abrite quatre camps, que la population majoritairement alévie de la région se sent menacée par l’arrivée massive des réfugiés sunnites. «On raconte que des combattants armés se promènent en uniforme dans la ville et que ces groupes sont entraînés par des militaires turcs dans un camp secret. Ce qui augmente l’inquiétude des alévis», explique Bereket Kar.

Les Turcs craignent aussi la création d’une entité autonome kurde au nord de la Syrie. La prise du contrôle par la branche syrienne du PKK de plusieurs villes du nord de la Syrie et l’intensification des actions du PKK sur le territoire turc nourrissent les craintes. Vendeur de journaux sur la place de Sirinevler, Hasan ne comprend pas pourquoi la Turquie prend un tel risque. «Erdogan, qui demande tant le départ d’Assad, que va-t-il faire si le Kurdistan occidental est proclamé dans le nord de la Syrie?» Pour tenter de calmer l’opinion, le ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, avait affirmé, le 27 juillet dernier, que le nord de la Syrie n’était pas uniquement peuplé de Kurdes et que la zone contrôlée par la branche syrienne du PKK était très limitée.

Burçin Gerçek, 12 août 2012. Le Figaro.fr

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ALAIN CHOUET ET LA SYRIE

C’est Jean Guisnel qui, dans LE POINT, présente ainsi Alain Chouet :
« Qu’on ne s’y méprenne pas : spécialiste du monde arabo-musulman, arabisant émérite ayant passé trente ans à la DGSE qu’il a quittée en 2002 après avoir dirigé le Service de renseignement de sécurité chargé de la lutte antiterroriste, de la contre-criminalité et du contre-espionnage à l’étranger, l’auteur est tout le contraire d’un aigri.

« Il n’écrit ni pour régler des comptes, ni pour révéler des secrets. Ce qu’il veut, c’est faire comprendre pourquoi une démocratie comme la France a autant besoin de ses espions que des autres fonctionnaires.

« Non pour organiser une « saine émulation sportive » entre serviteurs de l’État, mais parce que ce dernier doit « pouvoir s’affranchir, à l’occasion et s’il en est besoin, de la légalité intérieure ou extérieure ou de [ses] engagements internationaux ».

« Eh oui ! « Le renseignement se recueille en violant ou en faisant violer la loi des autres. »

Qu’on se le dise, « c’est donc ne rien comprendre que d’accuser les services secrets de faire ‘dans l’illégalité’. Bien sûr qu’ils font ‘dans l’illégalité’. Ils ne font même que cela. C’est leur vocation et leur raison d’être ».
Bonne lecture,
Michel Peyret – 12 août 2012

PS : l’IHEDN est l’Institut des Hautes Etudes de Défense Nationale.

_____

ANALYSE DE LA SITUATION EN SYRIE:

ALAIN CHOUET, ANCIEN CHEF DE LA DGSE

jeudi le 26 juillet 2012

Invité de l’Association Régionale Nice Côte d’Azur de l’IHEDN (AR29), le 27 juin 2012, Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE, reconnu bien au delà de l’Hexagone pour son expertise du monde arabo-musulman, a livré aux auditeurs son sentiment au cours d’une conférence retranscrite ci-dessous.

Les pires conjectures formulées au premier semestre 2011 concernant les mouvements de révolte arabes deviennent aujourd’hui réalité. Je les avais largement exposées dans divers ouvrages et revues à contre courant d’une opinion occidentale généralement enthousiaste et surtout naïve. Car il fallait tout de même être naïf pour croire que, dans des pays soumis depuis un demi-siècle à des dictatures qui avaient éliminé toute forme d’opposition libérale et pluraliste, la démocratie et la liberté allaient jaillir comme le génie de la lampe par la seule vertu d’un Internet auquel n’a accès qu’une infime minorité de privilégiés de ces sociétés.

Une fois passé le bouillonnement libertaire et l’agitation des adeptes de Facebook, il a bien fallu se rendre à l’évidence. Le pouvoir est tombé dans les mains des seules forces politiques structurées qui avaient survécu aux dictatures nationalistes parce que soutenues financièrement par les pétromonarchies théocratiques dont elles partagent les valeurs et politiquement par les Occidentaux parce qu’elles constituaient un bouclier contre l’influence du bloc de l’Est : les forces religieuses fondamentalistes. Et le « printemps arabe » n’a mis que six mois à se transformer en « hiver islamiste ».

En Tunisie et en Égypte, les partis islamistes, Frères musulmans et extrémistes salafistes se partagent de confortables majorités dans les Parlements issus des révoltes populaires. Ils cogèrent la situation avec les commandements militaires dont ils sont bien contraints de respecter le rôle d’acteurs économiques dominants mais s’éloignent insidieusement des revendications populaires qui les ont amenés au pouvoir. Constants dans leur pratique du double langage, ils font exactement le contraire de ce qu’ils proclament. En, Égypte, après avoir affirmé sur la Place Tahrir au printemps 2011 qu’ils n’aspiraient nullement au pouvoir, ils revendiquent aujourd’hui la présidence de la République, la majorité parlementaire et l’intégralité du pouvoir politique.

En Tunisie, et après avoir officiellement renoncé à inclure la chari’a dans la constitution, ils organisent dans les provinces et les villes de moyenne importance, loin de l’attention des médias occidentaux, des comités de vigilance religieux pour faire appliquer des règlements inspirés de la chari’a. Ce mouvement gagne progressivement les villes de plus grande importance et même les capitales où se multiplient les mesures d’interdiction en tous genres, la censure des spectacles et de la presse, la mise sous le boisseau des libertés fondamentales et, bien sûr, des droits des femmes et des minorités non sunnites.

Et ces forces politiques réactionnaires n’ont rien à craindre des prochaines échéances électorales. Largement financées par l’Arabie et le Qatar pour lesquels elles constituent un gage de soumission dans le monde arabe, elles ont tous les moyens d’acheter les consciences et de se constituer la clientèle qui perpétuera leur domination face à un paysage politique démocratique morcelé, sans moyens, dont il sera facile de dénoncer l’inspiration étrangère et donc impie.

La Libye et le Yémen ont sombré dans la confusion. Après que les forces de l’OTAN, outrepassant largement le mandat qui leur avait été confié par l’ONU, ont détruit le régime du peu recommandable Colonel Kadhafi, le pays se retrouve livré aux appétits de bandes et tribus rivales bien décidées à défendre par les armes leur pré carré local et leur accès à la rente. L’éphémère « Conseil National de transition » porté aux nues par l’ineffable Bernard Henri Lévy est en train de se dissoudre sous les coups de boutoir de chefs de gangs islamistes, dont plusieurs anciens adeptes d’Al-Qaïda, soutenus et financés par le Qatar qui entend bien avoir son mot à dire dans tout règlement de la question et prendre sa part dans l’exploitation des ressources du pays en hydrocarbures.

Au Yémen, le départ sans gloire du Président Ali Abdallah Saleh rouvre la porte aux forces centrifuges qui n’ont pas cessé d’agiter ce pays dont l’unité proclamée en 1990 entre le nord et le sud n’a jamais été bien digérée, surtout par l’Arabie Séoudite qui s’inquiétait des foucades de ce turbulent voisin et n’a eu de cesse d’y alimenter la subversion fondamentaliste. Aujourd’hui, les chefs de tribus sunnites du sud et de l’est du pays, dont certains se réclament d’Al-Qaïda et tous du salafisme, entretiennent un désordre sans fin aux portes de la capitale, Sana’a, fief d’une classe politique traditionnelle zaydite – branche dissidente du chi’isme – insupportable pour la légitimité de la famille séoudienne.

Seul le régime syrien résiste à ce mouvement généralisé d’islamisation au prix d’une incompréhension généralisée et de l’opprobre internationale.
Avant de développer ce sujet, je crois devoir faire une mise au point puisque d’aucuns croient déceler dans mes propos et prises de positions des relents d’extrême droite et de complaisance pour les dictatures.
Je me rends régulièrement en Syrie depuis 1966 et y ai résidé pendant plusieurs années. Je ne prétends pas connaître intimement ce pays mais je pense quand même mieux le connaître que certains de ces journalistes qui en reviennent pleins de certitudes après un voyage de trois ou quatre jours.

Mes activités m’ont amené à devoir fréquenter à divers titres les responsables des services de sécurité civils et militaires syriens depuis la fin des années 70. J’ai pu constater qu’ils ne font ni dans la dentelle ni dans la poésie et se comportent avec une absolue sauvagerie. Ce n’est pas qu’ils ont une conception différente des droits de l’homme de la nôtre. C’est qu’ils n’ont aucune conception des droits de l’homme…

Leur histoire explique en grande partie cette absence. D’abord, ils puisent leur manière d’être dans quatre siècle d’occupation par les Turcs ottomans, grands experts du pal, de l’écorchage vif et du découpage raffiné. Ensuite, ils ont été créés sous la houlette des troupes coloniales françaises pendant le mandat de 1920 à 1943, et, dès l’indépendance du pays, conseillés techniquement par d’anciens nazis réfugiés, de 1945 jusqu’au milieu des années 50, et ensuite par des experts du KGB jusqu’en 1990. Tout ceci n’a guère contribué à développer chez eux le sens de la douceur, de la tolérance et du respect humain.

Quant au régime syrien lui-même, il ne fait aucun doute dans mon esprit que c’est un régime autoritaire, brutal et fermé. Mais le régime syrien n’est pas la dictature d’un homme seul, ni même d’une famille, comme l’étaient les régimes tunisien, égyptien, libyen ou irakien. Tout comme son père, Bashar el-Assad n’est que la partie visible d’un iceberg communautaire complexe et son éventuel départ ne changerait strictement rien à la réalité des rapports de pouvoir et de force dans le pays. Il y a derrière lui 2 millions d’Alaouites encore plus résolus que lui à se battre pour leur survie et plusieurs millions de minoritaires qui ont tout à perdre d’une mainmise islamiste sur le pouvoir, seule évolution politique que l’Occident semble encourager et promouvoir dans la région.

Quand je suis allé pour la première fois en Syrie en 1966, le pays était encore politiquement dominé par sa majorité musulmane sunnite qui en détenait tous les leviers économiques et sociaux. Et les bourgeois sunnites achetaient encore – parfois par contrat notarié – des jeunes gens et de jeunes filles de la communauté alaouite dont ils faisaient de véritables esclaves à vie, manouvriers agricoles ou du bâtiment pour les garçons, bonnes à tout faire pour les filles.

Les Alaouites sont une communauté sociale et religieuse persécutée depuis plus de mille ans. Je vous en donne ici une description rapide et schématique qui ferait sans doute hurler les experts mais le temps nous manque pour en faire un exposé exhaustif.

Issus au Xè siècle aux frontières de l’empire arabe et de l’empire byzantin d’une lointaine scission du chiisme, ils pratiquent une sorte de syncrétisme mystique compliqué entre des éléments du chiisme, des éléments de panthéisme hellénistique, de mazdéisme persan et de christianisme byzantin. Ils se désignent eux mêmes sous le nom d’Alaouites – c’est à dire de partisans d’Ali, le gendre du prophète – quand ils veulent qu’on les prenne pour des Musulmans et sous le nom de Nosaïris – du nom de Ibn Nosaïr, le mystique chiite qui a fondé leur courant – quand ils veulent se distinguer des Musulmans. Et – de fait – ils sont aussi éloignés de l’Islam que peuvent l’être les chamanistes de Sibérie.

Et cela ne leur a pas porté bonheur…. Pour toutes les religions monothéistes révélées, il n’y a pas pire crime que l’apostasie. Les Alaouites sont considérés par l’Islam sunnite comme les pires des apostats. Cela leur a valu au XIVè siècle une fatwa du jurisconsulte salafiste Ibn Taymiyya, l’ancêtre du wahhabisme actuel, prescrivant leur persécution systématique et leur génocide. Bien que Ibn Taymiyyah soit considéré comme un exégète non autorisé, sa fatwa n’a jamais été remise en cause et est toujours d’actualité, notamment chez les salafistes, les wahhabites et les Frères musulmans. Pourchassés et persécutés, les Alaouites ont dû se réfugier dans les montagnes côtières arides entre le Liban et l’actuelle Turquie tout en donnant à leurs croyances un côté hermétique et ésotérique, s’autorisant la dissimulation et le mensonge pour échapper à leur tortionnaires.

Il leur a fallu attendre le milieu du XXè siècle pour prendre leur revanche. Soumis aux occupations militaires étrangères depuis des siècles, les bourgeois musulmans sunnites de Syrie ont commis l’erreur classique des parvenus lors de l’indépendance de leur pays en 1943. Considérant que le métier des armes était peu rémunérateur et que l’institution militaire n’était qu’un médiocre instrument de promotion sociale, ils n’ont pas voulu y envoyer leurs fils. Résultat : ils ont laissé l’encadrement de l’armée de leur tout jeune pays aux pauvres, c’est à dire les minorités : Chrétiens, Ismaéliens, Druzes, Chiites et surtout Alaouites. Et quand vous donnez le contrôle des armes aux pauvres et aux persécutés, vous prenez le risque à peu près certain qu’ils s’en servent pour voler les riches et se venger d’eux.

C’est bien ce qui s’est produit en Syrie à partir des années 60.

Dans les années 70, Hafez el-Assad, issu d’une des plus modestes familles de la communauté alaouite, devenu chef de l’armée de l’air puis ministre de la défense, s’est emparé du pouvoir par la force pour assurer la revanche et la protection de la minorité à laquelle sa famille appartient et des minorités alliées – Chrétiens et Druzes – qui l’ont assisté dans sa marche au pouvoir. Ils s’est ensuite employé méthodiquement à assurer à ces minorités – et en particulier à la sienne – le contrôle de tous les leviers politiques, économiques et sociaux du pays selon des moyens et méthodes autoritaires dont vous pourrez trouver la description détaillée dans un article paru il y maintenant près de vingt ans.

Face à la montée du fondamentalisme qui progresse à la faveur de tous les bouleversements actuels du monde arabe, son successeur se retrouve comme les Juifs en Israël, le dos à la mer avec le seul choix de vaincre ou mourir. Les Alaouites ont été rejoints dans leur résistance par les autres minorités religieuses de Syrie, Druzes, Chi’ites, Ismaéliens et surtout par les Chrétiens de toutes obédiences instruits du sort de leurs frères d’Irak et des Coptes d’Égypte.

Car, contrairement à la litanie que colportent les bien-pensants qui affirment que « si l’on n’intervient pas en Syrie, le pays sombrera dans la guerre civile »…. eh bien non, le pays ne sombrera pas dans la guerre civile. La guerre civile, le pays est dedans depuis 1980 quand un commando de Frères musulmans s’est introduit dans l’école des cadets de l’armée de terre d’Alep, a soigneusement fait le tri des élèves officiers sunnites et des alaouites et a massacré 80 cadets alaouites au couteau et au fusil d’assaut en application de la fatwa d’Ibn Taymiyya. Les Frères l’ont payé cher en 1982 à Hama – fief de la confrérie – que l’oncle de l’actuel président a méthodiquement rasée en y faisant entre 10 et 20.000 morts. Mais les violences intercommunautaires n’ont jamais cessé depuis, même si le régime a tout fait pour les dissimuler.

Alors, proposer aux Alaouites et aux autres minorités non arabes ou non sunnites de Syrie d’accepter des réformes qui amèneraient les islamistes salafistes au pouvoir revient très exactement à proposer aux Afro-américains de revenir au statu quo antérieur à la guerre de sécession. Ils se battront, et avec sauvagerie, contre une telle perspective.
Peu habitué à la communication, le régime syrien en a laissé le monopole à l’opposition. Mais pas à n’importe quelle opposition. Car il existe en Syrie d’authentiques démocrates libéraux ouverts sur le monde, qui s’accommodent mal de l’autoritarisme du régime et qui espéraient de Bashar el-Assad une ouverture politique. Ils n’ont obtenu de lui que des espaces de liberté économique en échange d’un renoncement à des revendications de réformes libérales parfaitement justifiées. Mais ceux-là, sont trop dispersés, sans moyens et sans soutiens. Ils n’ont pas la parole et sont considérés comme inaudibles par les médias occidentaux car, en majorité, ils ne sont pas de ceux qui réclament le lynchage médiatisé du « dictateur » comme cela a été fait en Libye.

Si vous vous vous informez sur la Syrie par les médias écrits et audiovisuels, en particulier en France, vous n’aurez pas manqué de constater que toutes les informations concernant la situation sont sourcées « Observatoire syrien des droits de l’homme » (OSDH) ou plus laconiquement « ONG », ce qui revient au même, l’ONG en question étant toujours l’Observatoire syrien des droits de l’homme.

L’observatoire syrien des droits de l’homme, c’est une dénomination qui sonne bien aux oreilles occidentales dont il est devenu la source d’information privilégiée voire unique. Il n’a pourtant rien à voir avec la respectable Ligue internationale des droits de l’homme. C’est en fait une émanation de l’Association des Frères musulmans et il est dirigé par des militants islamistes dont certains ont été autrefois condamnés pour activisme violent, en particulier son fondateur et premier Président, Monsieur Ryadh el-Maleh. L’Osdh s’est installé à la fin des années 80 à Londres sous la houlette bienveillante des services anglo-saxons et fonctionne en quasi-totalité sur fonds séoudiens et maintenant qataris.
Je ne prétends nullement que les informations émanant de l’OSDH soient fausses, mais, compte tenu de la genèse et de l’orientation partisane de cet organisme, je suis tout de même surpris que les médias occidentaux et en particulier français l’utilisent comme source unique sans jamais chercher à recouper ce qui en émane.

Second favori des médias et des politiques occidentaux, le Conseil National Syrien, créé en 2011 à Istanbul sur le modèle du CNT libyen et à l’initiative non de l’État turc mais du parti islamiste AKP. Censé fédérer toutes les forces d’opposition au régime, le CNS a rapidement annoncé la couleur. Au sens propre du terme…. Le drapeau national syrien est composé de trois bandes horizontales. L’une de couleur noire qui était la couleur de la dynastie des Abbassides qui a régné sur le monde arabe du 9è au 13è siècle. L’autre de couleur blanche pour rappeler la dynastie des Omeyyades qui a régné au 7è et 8è siècle. Enfin, la troisième, de couleur rouge, censée représenter les aspirations socialisantes du régime. Dès sa création, le CNS a remplacé la bande rouge par la bande verte de l’islamisme comme vous pouvez le constater lors des manifestations anti-régime où l’on entend plutôt hurler « Allahou akbar ! » que des slogans démocratiques.

Cela dit, la place prédominante faite aux Frères musulmans au sein du CNS par l’AKP turc et le Département d’État américain a fini par exaspérer à peu près tout le monde. La Syrie n’est pas la Libye et les minorités qui représentent un bon quart de la population entendent avoir leur mot à dire, même au sein de l’opposition. Lors d’une visite d’une délégation d’opposants kurdes syriens à Washington en avril dernier, les choses se sont très mal passées. Les Kurdes sont musulmans sunnites mais pas Arabes. Et en tant que non-arabes, ils sont voués à un statut d’infériorité par les Frères. Venus se plaindre auprès du Département d’État de leur marginalisation au sein du CNS, ils se sont entendus répondre qu’ils devaient se soumettre à l’autorité des Frères ou se débrouiller tout seuls. Rentrés à Istanbul très fâchés, ils se sont joints à d’autres opposants minoritaires pour démettre le président du CNS, Bourhan Ghalioun, totalement inféodé aux Frères, et le remplacer par un Kurde, Abdelbassett Saïda qui fera ce qu’il pourra – c’est à dire pas grand chose – pour ne perdre ni l’hospitalité des islamistes turcs, ni l’appui politique des néo-conservateurs Américains, ni, surtout, l’appui financier des Séoudiens et des Qataris.

Tout cela fait désordre, bien sûr, mais est surtout révélateur de l’orientation que les États islamistes appuyés par les néo-conservateurs américains entendent donner aux mouvements de contestation dans le monde arabe.
Ce ne sont évidemment pas ces constatations qui vont rassurer les minorités de Syrie et les inciter à la conciliation ou à la retenue. Les minorités de Syrie – en particulier, les Alaouites qui sont en possession des appareils de contrainte de l’État – sont des minorités inquiètes pour leur survie qu’elles défendront par la violence. Faire sortir le président syrien du jeu peut à la rigueur avoir une portée symbolique mais ne changera rien au problème. Ce n’est pas lui qui est visé, ce n’est pas lui qui est en cause, c’est l’ensemble de sa communauté qui se montrera encore plus violente et agressive si elle perd ses repères et ses chefs. Plus le temps passe, plus la communauté internationale entendra exercer des pressions sur les minorités menacées, plus les choses empireront sur le modèle de la guerre civile libanaise qui a ensanglanté ce pays de 1975 à 1990.

Il aurait peut être été possible à la communauté internationale de changer la donne il y a un an en exigeant du pouvoir syrien des réformes libérales en échange d’une protection internationale assurée aux minorités menacées. Et puisque l’Arabie et la Qatar – deux monarchies théocratiques se réclamant du wahhabisme – sont théoriquement nos amies et nos alliées, nous aurions pu leur demander de déclarer la fatwa d’Ibn Taymiyyah obsolète, nulle et non avenue afin de calmer le jeu. Il n’en a rien été. À ces minorités syriennes menacées, l’Occident, France en tête, n’a opposé que la condamnation sans appel et l’anathème parfois hystérique tout en provoquant partout – politiquement et parfois militairement – l’accession des intégristes islamistes au pouvoir et la suprématie des États théocratiques soutenant le salafisme politique.

Débarrassés des ténors sans doute peu vertueux du nationalisme arabe, de Saddam Hussein, de Ben Ali, de Moubarak, de Kadhafi, à l’abri des critiques de l’Irak, de l’Algérie et de la Syrie englués dans leurs conflits internes, les théocraties pétrolières n’ont eu aucun mal à prendre avec leurs pétrodollars le contrôle de la Ligue Arabe et d’en faire un instrument de pression sur la communauté internationale et l’ONU en faveur des mouvements politiques fondamentalistes qui confortent leur légitimité et les mettent à l’abri de toute forme de contestation démocratique.

Que les monarchies réactionnaires défendent leurs intérêts et que les forces politiques fondamentalistes cherchent à s’emparer d’un pouvoir qu’elles guignent depuis près d’un siècle n’a rien de particulièrement surprenant. Plus étrange apparaît en revanche l’empressement des Occidentaux à favoriser partout les entreprises intégristes encore moins démocratiques que les dictatures auxquelles elles se substituent et à vouer aux gémonies ceux qui leur résistent.

Prompt à condamner l’islamisme chez lui, l’Occident se retrouve à en encourager les manœuvres dans le monde arabe et musulman. La France, qui n’a pas hésité à engager toute sa force militaire pour éliminer Kadhafi au profit des djihadistes et à appeler la communauté internationale à en faire autant avec Bashar el-Assad, assiste, l’arme au pied, au dépeçage du Mali par des hordes criminelles qui se disent islamistes parce que leurs rivaux politiques ne le sont pas.

De même les médias et les politiques occidentaux ont assisté sans broncher à la répression sanglante par les chars séoudiens et émiratis des contestataires du Bahraïn, pays à majorité chiite gouverné par un autocrate réactionnaire sunnite. De même les massacres répétés de Chrétiens nigérians par les milices du Boko Haram ne suscitent guère l’intérêt des médias et encore moins la condamnation par nos politiques. Quant à l’enlèvement et la séquestration durable de quatre membres de la Cour Pénale Internationale par des « révolutionnaires » libyens, elle est traitée en mode mineur et passe à peu près inaperçue dans nos médias dont on imagine l’indignation explosive si cet enlèvement avait été le fait des autorités syriennes, algériennes ou de tel autre pays non encore « rentré dans le rang » des« démocratures », ces dictatures islamistes sorties des urnes.

À défaut de logique, la morale et la raison nous invitent tout de même à nous interroger sur cette curieuse schizophrénie de nos politiques et nos médias. L’avenir dira si notre fascination infantile pour le néo-populisme véhiculé par Internet et si les investissements massifs du Qatar et de l’Arabie dans nos économies en crise valaient notre complaisance face à la montée d’une barbarie dont nous aurions tort de croire que nous sommes à l’abri.

Source : dompaul2.unblog.fr

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DU PRINTEMPS ARABE ET DES INTERETS DE L’OCCIDENT

Le Quotidien d’Oran

La chronique du blédard

jeudi 9 août 2012

Akram Belkaïd, Paris

L’Occident est-il en train de tirer les fils de la tragédie syrienne et, de façon plus générale, ceux des révolutions et révoltes arabes ? On le sait, cette question divise car, de sa réponse, dépend la position adoptée vis-à-vis d’un processus qui a débuté en décembre 2010 – avec les premières émeutes en Tunisie – et dont personne n’est capable à ce jour d’en prédire l’aboutissement. En tout état de cause, une idée revient en force y compris en Algérie : ce que l’on appelle «Printemps arabe» ne serait qu’un complot euro-américain. Autrement dit, la chute du régime de Ben Ali, la démission forcée de Moubarak, les victoires électorales des islamistes en Egypte et en Tunisie, la mort de Kadhafi ainsi que la dislocation actuelle de la Syrie, tout cela est donc vu comme ayant été programmé par quelques cabinets occultes occidentaux voire israéliens. On le sait, c’est l’intervention de l’Otan en Libye qui, la première, a modifié la perception générale et donné crédit à l’hypothèse d’un grand plan mis en œuvre pour redessiner les contours du Maghreb et du Machrek (en attendant, peut-être, le Golfe). Aujourd’hui, le drame syrien et le soutien accordé par les Etats-Unis et l’Europe à la rébellion – notamment via leurs auxiliaires et supplétifs des monarchies pétrolières – confortent cette idée. Mais faut-il pour autant crier au complot ?

Dans un récent éditorial du “Quotidien d’Oran”, M. Saadoune a remis les choses en perspective(*). Faisant référence à un article d’Abdelbari Atwan dans “Al-Quds Al-Arabi”, il rappelle qu’à la base il y a bel et bien une volonté populaire – et surtout légitime – de se défaire de dictatures implacables cela indépendamment du fait que, par la suite, les Occidentaux ont tout fait pour récupérer et orienter les révoltes. Ni Ben Ali, Ni Moubarak, Ni Kadhafi et encore moins Assad ne peuvent être défendus. Quitte à se répéter, il faut rappeler que ces dirigeants ont été ou sont encore la principale raison de la ruine de leurs pays. En divisant et en maltraitant leur peuple, en leur niant le droit aux droits , ils ont créé les germes de la division et ouvert la voie aux ingérences extérieures. Les gens qui ont pris les armes contre Kadhafi ou Assad l’ont d’abord fait pour eux-mêmes. Pour résumer les choses, ce n’est pas la CIA qui a poussé Bouazizi à s’asperger d’essence même si cette agence, comme ses partenaires européennes, savait que tôt ou tard que ce type d’événement déboucherait sur une révolte générale (et les plans pour agir en conséquence existaient certainement dans ses cartons).

Dans cette affaire, deux naïvetés s’opposent. La première consiste à croire que l’Occident n’a aucune idée derrière la tête vis-à-vis du monde arabe. La seconde pousse quant à elle à s’indigner du fait que, justement, il cherche à tirer profit de la situation. La vérité c’est qu’un Etat digne de ce nom fera toujours tout pour défendre ses intérêts qu’ils soient économiques, militaires ou politiques. À long terme, il déploiera de nombreuses stratégies basées notamment sur la prospective – via notamment l’étude de tous les scénarios possibles – et l’anticipation. À court terme, il cherchera toujours à profiter des circonstances pour, justement, être au plus près de ses objectifs de long terme. Pour autant, aucun Etat n’est infaillible. A lire les ouvrages spécialisés et les biographies des grands de ce monde, on voit bien que cela ne se passe pas toujours de manière idéale. L’idée que des mécaniques d’une grande précision sont à l’œuvre est très répandue chez les Arabes. Elle est pourtant exagérée, car l’Occident, c’est aussi de l’improvisation (on dira ce que l’on voudra mais ce fut le cas de l’intervention en Libye), des politiques à court terme qui débouchent sur des catastrophes, des intérêts internes divergents qui s’opposent et, pour finir, de grosses erreurs (cas de l’Iran en 1980, de l’Irak en 2003).

Cela étant précisé, personne ne peut nier que pour l’Occident, Etats-Unis en tête, ce qui se passe actuellement est une grosse opportunité. Passé un premier temps de flottement – ce fut le cas avec les révoltes tunisienne et égyptienne – de nombreux mécanismes de prise en charge des mouvements contestataires ont vu le jour. Qu’il s’agisse de «l’encadrement» de l’opposition syrienne en exil à la prise en charge plus ou moins directe de la période de transition post-Kadhafi en passant par la mise à disposition de «l’expertise démocratique et électorale» à la Tunisie d’après-Ben Ali, les Occidentaux sont très présents. Mais pourquoi faire ? Pour prendre le contrôle du monde arabe ? Pour l’asservir ? Pour garantir la sécurité et la domination régionale d’Israël ? Nombre d’Arabes sont persuadés que c’est cela qui est en jeu : plus d’un demi-siècle après les indépendances, les révolutions et révoltes en cours mèneraient ainsi à une nouvelle mise sous tutelle de leurs pays par l’Occident. Et c’est là où – conséquence des propagandes sur le thème de la souveraineté – intervient un incroyable déni de réalité. Car, dans les faits, le monde arabe est déjà sous contrôle depuis des décennies.

D’abord, les tyrans qui sont tombés étaient des tigres de papiers ayant tous fait allégeance à l’Occident d’une manière ou d’une autre. Même Assad, qui finira par perdre le pouvoir, a longtemps été le « meilleur ennemi » d’Israël, comprendre un adversaire qui sait regarder ailleurs quand l’aviation israélienne bombarde le Liban ou Gaza. Ensuite, il suffit de se reporter à l’économie. En 2012, le monde arabe importe 80% de ses besoins en ingénierie et produits industriels et 60% de ses besoins alimentaires. Vue de l’intérieur, cette dépendance et cette insécurité ne font même pas débat. C’est que les Arabes vivent dans l’illusion d’une résistance à l’impérialisme occidental et à la mondialisation libérale telle qu’elle a été conçue par les Chicago Boys et Wall Street. Or, exception faite des Palestiniens (quoique…) et, dans une autre mesure, du Hezbollah libanais, cela fait plus de vingt ans que leurs gouvernements – et leurs élites – ont abdiqué. De Casablanca à Dubaï, le monde arabe n’est plus qu’un immense bazar aux fondations fragiles et incapables de vivre de manière autonome. Au-delà des habituels gargarismes nationalistes, il est temps de reconnaître que les pays arabes sont tenus. Et que les efforts de l’Occident vis-à-vis des processus de changement en cours visent simplement à ce que cette domination perdure voire à ce qu’elle se renforce. Quant aux plans à long terme de l’Europe et des Etats-Unis vis-à-vis d’une région qui détient plus du tiers des réserves pétrolières et gazières de la planète, c’est là une question qui mériterait une véritable analyse stratégique des principaux concernés, autrement dit les gouvernements arabes eux-mêmes. Et il n’est même pas sûr que cette réflexion soit menée…

(*) “Un constat testamentaire”, dimanche 5 août 2012.

Publié aux Editions carnetsnord : “Etre arabe aujourd’hui”

Publié aux Editions du Cygne : “La France vue par un Blédard” (chroniques)

site : principaux articles

blog : “Lignes quotidiennes”

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AUX VISITEURS DE « SOCIALGERIE », pour CET ÉTÉ 2012

vendredi 13 juillet 2012

par Sadek Hadjerès

Comme annoncé par son communiqué publié en brève N° 542, du 11 juillet (reproduit ci-dessous), Socialgerie informe ses assidus visiteurs et correspondants du nouveau rythme ralenti adopté pour les mises en ligne de nouveaux documents au plus fort de l’été :

Les correspondances, contributions et suggestions restent bienvenues, enregistrées et recevront leur suite en temps utile.

En vous remerciant pour votre compréhension et votre soutien


WWW.SOCIALGERIE.NET

SOCIALGERIE S’ADAPTE À L’ÉTÉ :

SITES INTERESSANTS A CONSULTER

Communiqué

brève n° 542 du mercredi 11 juillet 2012

Pour les uns et les autres, grandes chaleurs, congés, ramadan, langueurs méditerranéennes, besoin de souffler après des semaines éprouvantes! Qu’attendre dans ces conditions de «Socialgerie» et ses assidus visiteurs?

En cette saison où se mijotent ou se réalisent parfois les coups dangereux contre les peuples, et cet été s’annonce plus gros de dangers que jamais pour les peuples et les Etats soucieux d’indépendance, ce sera néanmoins pour a documentation de Socialgérie un état de veille ou de mise en veilleuse, en attendant la «rentrée».

Quant aux plus mordus, jeunes ou vieux qui en toute circonstance ne désarment pas, la matière accumulée depuis trois ans, (car le site va entamer sa quatrième année d’existence) offre déjà des heures de découverte ou redécouverte d’évènements et d’opinions qui ont marqué depuis cinquante ans le mouvement national et social algérien, ses espoirs, ses questionnements, ses problèmes non résolus.

Occasion aussi de réfléchir à un bilan critique et constructif de ces trois années de « Socialgerie ». Contribution souhaitable pour combler par vos suggestions les nombreuses insuffisances du site, face à l’ambition affichée de rester au service d’un nouvel élan du mouvement social et démocratique algérien.

Et pour mettre à profit les progrès sensibles émergents ces dernières années dans la société civile et le champ politique vers un nouveau cycle historique, il est loisible à nos amis de consulter de nombreux sites progressistes que Socialgerie considère des plus intéressants.

Nous en proposons ci-dessous une liste non restrictive, pour avoir souvent puisé nous-mêmes dans leur diversité d’informations et d’opinions propres à favoriser l’échange, les débats et les initiatives unitaires :


SITES ALGÉRIENS:

http://www.algerieinfos-saoudi.com

http://chiricahua.over-blog.com

http://www.alger-republicain.com

http://forumdesdemocrates.over-blog.com

http://mobadara24fevrier.over-blog.com

http://www.raina-dz.net/

http://www.lanation.info

http://maghrebemergent.com

http://www.algeria-watch.org/franca…

http://lequotidienalgerie.org

الرئيسية | Acceuil

ET D’AUTRES ….


La presse algérienne quotidienne


SITES INTERNATIONAUX :

http://arabi.assafir.com/

http://www.assawra.info/

Assawra – Site du Mouvement démocratique arabe

http://www.monde-diplomatique.fr/

“Le Monde Diplomatique” et“ Manière de Voir”

et http://blog.mondediplo.net/-Nouvell…

blog de Alain Gresh

http://www.michelcollon.info/

“Investig’action – michel collon info – L’info décodée”

http://www.voltairenet.org/

“réseau voltaire”

http://www.frantzfanoninternational.org/

“Frantz Fanon International”

http://www.iremmo.org/spip/

“ iReMMO – Institut de Recherche et d’Etude sur la Méditerranée et le Moyen Orient”

http://maghrebdesfilms.fr/

“Le Maghreb des Films”

http://www.collectif-communiste-pol…

“Communisme, Internationalisme, Anti-Impérialisme, Luttes pour la Paix, Nouvelles des Résistances dans le Monde, Analyse des Stratégies”

Home



“Centre de Recherches sur la mondialisation”

http://www.cadtm.org/

“Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde”

http://www.marxau21.fr/

“Marx au XXJe siècle, L’esprit et la lettre”

0 Home



“Fondation Gabriel Péri”

http://www.espaces-marx.net/

“Espaces Marx”

http://www.transform-network.net/fr…

“revue européenne pour une pensée alternative et un dialogue politique”

http://www.humanite.fr/

“L’Humanité”

http://www.pcf.fr/7350

“La Lettre Relations Internationales (LRI), éditée par le secteur relations internationales du Parti communiste français”


ET D’AUTRES ….

Voir en ligne : http://www.socialgerie.net/spip.php…


LE RAI, tradition et modernité, à travers l’Histoire algérienne

YA RAYI, UNE ARCHEOLOGIE DU RAÏ

par MESSAOUD BEN YOUSSEF

La musique et la geste Hilalienne à travers les siècles, de l’Egypte médiévale à l’Oranie pré et post coloniale

Une fresque historico-sociale et culturelle sérieuse et passionnante, loin des clichés colonialistes et /ou communautaristes véhiculés à des fins suspectes.

Agréable et utile lecture estivale.

Peut être aussi consultée sur le site:
http://braniya.blogspot.fr/2012_08_01_archive.html


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YA RAYI !

UNE ARCHÉOLOGIE DU RAÏ

par MESSAOUD BEN YOUSSEF

braniya.blogspot

dimanche 5 août 2012

Hommage au douar Messaada (Rio-Salado), mon douar;

Hommage à Lahouari Blaoui

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Le Raï, ce genre musical popularisé par cheb Khaled à l’échelle mondiale, est né et s’est développé dans une région de l’ouest de l’Algérie que l’on peut aisément figurer par un triangle dont les trois sommets seraient les villes d’Oran, Sidi Bel-abbès et Tlemcen, le lieu géométrique en étant la ville de ‘Aïn-Témouchent. Il s’agit, malgré ses appellations plurielles, d’une grande plaine d’un seul tenant, 150 km qui vont de la Sebkha d’Oran aux portes de Tlemcen. Or ce territoire était exactement celui de la grande tribu arabe hilalienne des Béni-Amer.

Les confédérations de tribus arabes Béni-Hillal et Béni-Souleym [[Les développements sur les Béni-Amer sont documentés à partir de:

“Histoire des Berbères” d’Ibn-Khaldoun, la mère de toutes les références;

“Les Arabes en Berbérie” de Georges Marçais;

“Les siècles obscurs du Maghreb” de Emile-Félix Gautier;

le grand classique “Histoire de l’Afrique du Nord” de Charles-André Julien

et l’excellent article “Historique des Beni Amer d’Oranie, des origines au sénatus-consulte” de Pierre Boyer, in la Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée.]] étaient originaires du Nejd (Arabie saoudite) ; chassées par la sécheresse et la famine, elles s’étaient établies en Haute-Égypte où les califes fatimides chi’ites les avaient confinées sur la rive orientale du Nil. Leurs vassaux Zirides (dynastie de Berbères sanhajas fondée par Bologhine Ibn Ziri et régnant sur le Maghreb central) ayant abandonné le chi’isme, les Fatimides -en l’occurrence, le calife El Moustançar Billah- leur envoyèrent les tribus Béni-Hillal et Béni-Souleym pour les punir. En même temps, ils se débarrassaient d’hôtes encombrants et particulièrement turbulents. On rapporte que les Fatimides versèrent une confortable obole aux deux confédérations pour les convaincre de quitter l’Égypte et d’aller voir du côté de l’Ifriqiya. Mais ils exigèrent d’elles, en retour, le paiement d’un droit pour traverser le Nil : un dinar par personne ! Gageons que les califes fatimides y ont largement retrouvé leurs petits.

Entrés en Tripolitaine en 1050, les Arabes hillaliens rallièrent l’Ifriqiya (en gros, la Tunisie actuelle) en 1055 pour en découdre avec les Zirides. L’armée sanhaja fut écrasée par les redoutables guerriers hillaliens. Le royaume ziride avait vécu. Reprenant leur marche vers l’ouest, les Béni-Hillal n’atteindront le sud oranais que deux siècles plus tard. Là, ils côtoieront une importante tribu berbère, les ‘Abd-El-Wad, qui servait de makhzen (assurer l’ordre et lever l’impôt) aux Almohades dans l’Oranie. Lorsque l’empire almohade implosa, les Abd-El-Wad érigèrent le royaume de Tlemcen avec Yaghmoracen Ibn Ziane à sa tête. Menacé par ses cousins mérinides qui avaient fait appel aux Arabes Maqil (originaires du Yémen ceux-là, dont les Hadjoutes et les Thaaliba d’Alger sont les descendants) et qui lorgnaient lourdement du côté de Tlemcen, le fondateur du royaume zianide fit appel aux Béni-Amer qui deviendront son makhzen. La fortune de la tribu était, dès lors, faite.

Les Béni-Amer étaient une fraction des Arabes zoghbiens (Zoghba), nous dit Ibn-Khaldoun ; essentiellement guerrière, la tribu louait ses services aux États et aux souverains. En bonne tribu arabe, elle avait également une autre corde à son arc, celle de la poésie. Ses bardes popularisaient la geste hilalienne (Es-sira el hillalia), faite d’amours légendaires et de hauts faits d’armes. Les Béni-Amer s’installèrent graduellement dans la vaste et riche plaine qui s’étend de Tlemcen à Oran. Petit à petit, les intrépides et belliqueux guerriers vont se transformer en riches agriculteurs sédentaires. Léon l’Africain, au 15° siècle, disait d’eux : « Ce sont des hommes d’une grande bravoure et très riches. Ils sont dans les 6000 beaux cavaliers, bien équipés. » Les Espagnols les tiennent pour « nobles, seigneurs des Berbères et fiers », et Daumas, le consul de France auprès de l’émir Abdelkader, écrivait en 1839 : « Les Béni-Amer, possesseurs d’un pays immense et coupé de vallées fertiles se livrent beaucoup à l’agriculture et sont très riches en grains et troupeaux de toute espèce». [[Toutes les citation, in P. Boyer: “Historique des Béni-Amer”]]

L’arrivée des Ottomans et des Espagnols signa la fin de cet intermède. Entre ce qui leur apparaissait comme la peste et le choléra, les Béni-Amer tergiversèrent, ne souhaitant choisir ni l’un ni l’autre camp. Mais les Ottomans engagèrent les hostilités contre eux : ils les chassèrent de la grasse plaine de la Mlta (en gros d’Oran au Tessala) et y installèrent deux groupes faits de bric et de broc, c’est à dire d’éléments détribalisés qu’ils nommèrent Douaïrs et Zmalas. Plus grave : les Ottomans prétendirent faire des Béni-Amer, en les scindant en deux entités, des tribus ra’ïas (soumises à l’impôt). La haine inexpiable que vouèrent désormais les Béni-Amer aux Ottomans justifiera l’alliance avec les Espagnols, malgré les réserves sévères des fractions maraboutiques des Béni-Amer -qui étaient secrètement travaillées par la tariqa Derqaouiya. Un des deux frères Barberousse, les maîtres de la Régence d’Alger, Aroudj Boukefoussa -le manchot- fut ainsi tué lors d’un affrontement avec les Espagnols et les Arabes coalisés, près du Rio-Salado. Durant toute la durée de l’occupation ottomane, les Béni-Amer ne cessèrent de guerroyer et de défendre leurs terres.

Quand se produisit l’occupation française, les Zmalas et les Douaïrs se mirent immédiatement au service des nouveaux maîtres, alors que les Béni-Amer vont suivre l’émir Abdelkader dans sa longue résistance contre l’envahisseur français. L’émir reconstitua l’ancienne confédération sous le nom d’Aghalik des Béni-Amer qui comprenait les fractions suivantes : Ouled Slimane, Ouled Brahim, Ouled Sidi-Khaled, Ouled Sidi-Bouzid, Ouled Sidi-Ali Benyoub, Hazedj, Ouled Zaer, Ouled Sidi Maachou, (Bel-Abbès, Mékerra) ; Ouled ‘Ali (Tessala) ; Ouled Mimoun, Mahimat, Ouled Sidi-Abdelli, Ouled Sidi-Ahmed Youcef, Ouled Khalfa (tribu berbère assimilée), Douï Aïssa (entre ‘Aïn-Témouchent et Tlemcen) ; Ouled Djebara (Terga), Ouled Sidi-Messaoud, Ouled Bouamer (Hammam-Bouhadjar et Rio-Salado), Ouled ‘Abdallah ; Ouled Sidi Ghalem, Chorfa Guetarnia (tribu berbère assimilée), Maïda (Mlata).

1845 : survient la tragédie qui marquera la fin de l’épopée des Béni-Amer. Tout avait commencé par une action d’éclat de l’émir, pourtant réduit à la défensive par la guerre totale que lui faisaient les Bugeaud, Lamoricière, Pélissier, Cavaignac, brûlant tout sur leur passage, razziant les troupeaux, enfumant les humains. L’émir réussit à mystifier Cavaignac et Lamoricière en passant au milieu de leurs colonnes et à anéantir les régiments du colonel Montagnac à Sidi-Brahim (près de ‘Aïn-Témouchent). Galvanisés par cette victoire, les Béni-Amer consentirent à suivre l’émir dans sa marche vers le Maroc où il pensait obtenir l’aide du souverain. Alors «de la pointe du lac (Sebkha d’Oran) à Tlemcen, on ne rencontre personne. C’est le désert» disait Lamoricière [[Idem]]. Les Béni-Amer abandonnent leurs terres, créant un vide sidéral devant les colonnes infernales des généraux français -stratégie de guerre d’anéantissement qui avait déjà servi contre les Vendéens.

Mais le roi du Maroc, cédant aux menaces et aux promesses des Français, attaqua les arrières de l’émir, pendant que Lamoricière et le duc d’Aumale lui coupaient les voies de retraite vers l’Algérie. L’émir perdit le contact avec les fractions Béni-Amer. Certaines de celles-ci, encerclées par les troupes du roi, préférèrent passer au fil de l’épée leurs femmes et leurs enfants plutôt que de les laisser tomber entre des mains fourbes, puis se battirent jusqu’au dernier. L’émir, qui avait retrouvé leurs traces, arriva à bride abattue sur les lieux mais c’était pour constater la tragédie qui venait de se dérouler. Il réussit encore à briser l’encerclement et à rentrer dans son pays. Mais c’était pour déposer les armes trois mois après, profondément marqué par les atrocités d’une guerre inégale et par les trahisons et retournements de ses alliés.

Sur le territoire marocain, cependant, des fractions des Béni-Amer, qui étaient parvenues à échapper aux troupes royales, devaient passer sous les fourches caudines des Français pour espérer rentrer au pays. Les généraux -Bugeaud, Cavaignac, Lamoricière- s’y opposèrent catégoriquement ; Pélissier n’était pas en reste qui exultait : « Leur émigration nous a laissé un vaste et riche territoire. C’est la forteresse de la colonisation qui se prépare…» [[Idem]]. Il avait raison : le gouverneur général (GG) de l’Algérie n’allait pas laisser passer cette occasion inespérée de rafler les riches terres des Béni-Amer. Le 18 avril 1846, il prenait un arrêté frappant de séquestre les terres des « émigrés ». Il s’agissait, dès lors, de les empêcher de rentrer : le GG et le ministère de la Guerre donnèrent des instructions en ce sens. Mais il se trouva que le consul de France à Tanger, De Chasteau, n’était pas d’accord. Il allait affréter des bateaux pour ramener ce qui restait des Béni-Amer à Oran. Puis son gendre, Léon Roches, qui le remplaça un moment, poursuivit l’opération de rapatriement. Il raconte que les familles des Béni-Amer mouraient littéralement de faim, qu’il reçut une délégation qui lui dit : « Il vaut mieux nous tuer ici que nous renvoyer au milieu des Marocains qui déshonoreront nos femmes sous nos yeux, nous assassineront et vendront nos enfants car c’est ainsi qu’ils ont agi à l’égard de nos frères.»[[Lettre au ministre des AE, 19 janvier 1849 ; in P. Boyer, op. cité]] Devant les cris d’orfraie du GG et des généraux (le plus haineux à l’égard des Béni-Amer étant sans conteste Pélissier, qui commandait l’Oranie [[« Et voilà que nous sommes encombrés d’une population famélique qui ne pourra jamais voir dans d’autres mains les terres de ses pères sans que la rage et le désir de se venger ne lui dévorent le cœur… La protection du consulat de Tanger ne leur fera pas oublier que nous sommes les détenteurs de leur sol et qu’il y a du sang entre nous. » (Lettre du 28 octobre 1848). Idem.]]), Roches eut recours à des passeurs clandestins qui guidèrent les émigrés chez les Béni-Snassen et les Béni-Bouyahi, tribus rifaines en révolte contre le roi, qui leur firent passer la Moulouya.

« En tenant compte de ce qu’ils étaient, les Béni-Amer n’existent plus. » Ainsi pouvait s’exprimer Cavaignac après ce désastre. Combien les Béni-Amer perdirent-ils d’hommes au cours de cette expédition ? Difficile de le savoir avec précision, mais on peut s’en faire une idée en comparant le nombre de tentes (combien de personnes pouvait contenir une tente ? On s’accorde à le situer entre 7 et 10) avant et après la « nakba » -catastrophe : 4200 en 1844 ; 3800 en 1851 ; déficit 400. Sachant que le nombre de tentes émigrées était de 1200, c’est donc le tiers des émigrés qui a disparu.[[Idem.]]
Quant aux terres confisquées, il est difficile d’en avoir un compte précis, le cadastre n’existant pas ; de plus, les terres de parcours n’étaient pas toujours clairement différenciées des terres d’exploitation. D’après les premières estimations faites en 1851 par les Bureaux arabes, il est raisonnable d’avancer le chiffre de 100 000 ha de bonnes terres bien grasses qui tombèrent dans un premier temps dans l’escarcelle de la colonisation. Encore que la spoliation ne fît que commencer.

L’Oranie devint ainsi la « forteresse de la colonisation », ainsi que le souhaitait Pélissier. Le sénatus-consulte de 1863 officialisait les prélèvements fonciers déjà opérés au profit de la colonisation ; mais les tribus étaient reconnues « propriétaires des territoires », détenus à titre familial ou collectif. Il est vrai que Napoléon III, lors de son second voyage en Algérie (1865), avait dit, parlant des autochtones : « Nous ne permettrons pas que cette race fière et généreuse subisse le sort des Indiens d’Amérique… Ce sont les Européens qu’il faut cantonner, pas les Arabes ». Et il avait donné des instructions précises en ce sens. Mais les GG successifs -en particulier Pélissier, encore lui !, et Mac-Mahon- s’attachèrent à les saboter systématiquement. On estime qu’en vingt ans -de 1851 à 1871- les autochtones de l’Oranie perdirent encore les 2/5 de leurs terres. Puis la République vint qui donna un coup de fouet à la colonisation dans son sens le plus brutal. Des milliers de Français, d’Espagnols, de Maltais, d’Italiens, d’Allemands et de Suisses arrivèrent qui se partagèrent les dépouilles des Béni-Amer.

Profondément déstructurée, ruinée, spoliée, la prestigieuse tribu des Béni-Amer n’existait plus. Elle venait, sans le savoir, de faire l’expérience de l’implacable logique qui sert de propédeutique obligée au développement du Capital : la séparation violente du producteur d’avec ses moyens de production. Alors, de nombreux fils des fiers guerriers d’antan découvrirent qu’il ne leur restait plus d’autre richesse que celle de leurs bras, leur force de travail. Ils se résolurent, la mort dans l’âme, à la mettre à disposition d’autrui en échange de quelque menue monnaie. Prolétarisés, ils durent louer leurs bras à ceux-là mêmes qui occupaient à présent leurs terres, ces étrangers arrivés on ne sait d’où et qui les traitaient, eux les autochtones, en parias. Cruel destin.

Mais il est une autre face de cette spoliation historique qu’il convient de savoir regarder. En se dissolvant, la tribu a libéré ses membres des liens très étroits qui les unissaient fermement. La tribu a perdu sa ‘Açabiya pour parler comme d’Ibn-Khaldoun. Dans le groupe agnatique, en effet, les rôles sociaux sont distribués depuis toujours ; aucun membre ne peut faire autrement que d’occuper la place et le rôle qui lui sont assignés. La contrepartie de cet ordre d’airain est que chacun possède un statut qui lui épargne les doutes et l’angoisse. Mais que le groupe se défasse et les membres perdent leur statut. Alors, s’ouvre une faille vertigineuse, celle de l’interrogation sur soi, sur ce que l’on est, doublée de celle sur ce qu’il faut faire, comment agir.

Le philosophe Gilles Deleuze a parfaitement analysé ce phénomène de perte de statut social et de ce qu’il engendre chez celui qui est devenu, soudain, un individu. [[Gilles Deleuze: “Abécédaire” (DVD)]] Il prend pour illustration le cas des Noirs américains délivrés de l’esclavage après la guerre de Sécession (1865). L’esclavage, si inhumain fût-il, donnait au Noir un statut ; son rôle, sa place étaient bien définis. Les rapports esclavagistes étant abolis, comment le Noir va-t-il vivre sa nouvelle situation ? Deleuze nous dit qu’il la vivra sur le mode de la plainte dont la figure poétique est l’élégie. (L’élégie est un poème libre, écrit dans un style simple qui chante les plaintes et les douleurs de l’homme, les amours contrariés, la séparation, la mort.) La signification profonde de cette plainte est, ajoute le philosophe, l’incapacité de l’homme à faire face à ce qui lui arrive : « Ce qui m’arrive est trop grand pour moi. » L’élégie du Noir américain libre va éclater dans le Blues.

Les références au Blues pour caractériser le Raï sont courantes mais aucune n’atteignait à ce niveau de rationalité que nous ouvre l’analyse de G. Deleuze. Le Blues dérive des chants des ouvriers du coton, dans le delta du Mississipi. Le mot Blues vient de l’expression anglaise «blue devils» qui signifie « idées noires ». Il a une origine incontestablement rurale ; de plus, il est le produit de diverses influences : africaine, celtique (irlandaise et écossaise) et… asiatique ! Car on note de plus en plus l’influence de la culture amérindienne sur ce genre musical. Avec les mouvements de migration de Noirs du sud vers les villes du nord (particulièrement Chicago et Detroit), le Blues va troquer son instrumentation simpliste pour la guitare et la basse électriques, la batterie et l’harmonica, instrumentation « classique » que popularisera Muddy Waters, le grand maître du Blues électrique, dit de Chicago. La fortune du Blues était dès lors faite et son influence sera énorme : il sera à la base du Rock’n Roll et de la Pop Music anglo-saxonne qui envahiront le monde (les Rolling Stones ne cessent de rendre hommage à leur maître, Muddy Waters).

Qu’en est-il du Raï, maintenant ? D’abord, la signification du mot: raï veut dire en général opinion et rayi (que l’on retrouve de façon systématique et lancinante dans tous les opus de Raï) veut dire mon opinion. Il semble bien qu’à l’origine, aller écouter du Raï signifiait que l’on allait écouter la voix de la raison, celle de bon conseil qui vous guide dans le droit chemin. Mais c’est dire, par là, que l’on cherchait une voie, que l’on avait besoin d’une aide pour faire des choix dans la vie. C’est pour cela que le terme le plus approprié pour rendre le mot raï est sans conteste le mot choix. C’est ce qui apparaîtra de façon éclatante lorsque le Raï prendra son essor et que se multiplieront ses interprètes. Si l’on examine, d’autre part, le texte d’une chanson de Raï, on y retrouvera des invariants qui sont, systématiquement, une lamentation sur les conséquences d’un choix. Ce qui nous ramène au descendant des Béni-Amer prolétarisé, livré à lui-même et qui découvre ce qu’il faut bien appeler la liberté, c’est à dire une capacité de choix. Avec la décharge d’angoisse qu’elle génère, maintenant que les repères traditionnels ont été abolis.

Le Raï moderne avec son instrumentation électrique (guitare, synthétiseur) a suivi une voie homologue à celle du Blues. Comme ce dernier, il est d’origine rurale ; au départ, il y a des ouvriers agricoles qui triment dans les grandes propriétés coloniales de l’Oranie : moissons, vendanges, cueillette. Ces ouvriers sont des Béni-Amer ruinés et prolétarisés mais ce sont également des saisonniers venus d’un peu partout, et même du Maroc (surtout du Rif). Un brassage s’opère ainsi qui est aussi celui des genres : car, fait remarquable et même inouï, des femmes travaillent désormais aux côtés des hommes. Et les ouvriers -phénomène universel- chantent pour se donner du cœur au ventre. Que pouvaient-ils chanter ?

De même que les ouvriers Noirs ne pouvaient chanter du Gospel ou des Negro Spirituals, encore moins des ballades celtiques, les ouvriers agricoles des plaines de l’Oranie ne pouvaient chanter les longs poèmes de Chi’r melhoun -que l’on rend assez improprement par poésie populaire– qui étaient -sont encore- l’apanage de l’Oranie. Le Chi’r melhoun est certainement le produit de la dégradation de la poésie épique des Béni-Hillal ; on en retrouve les traces thématiques probantes -portrait de la bien-aimée, éloge du clan, de la vie bédouine…- dans les qacidates -longues pièces poétiques- de tous les maîtres de ce genre poétique. À partir de la deuxième moitié du XIX° siècle, le Melhoun commence à intégrer des thèmes nouveaux et adopte une métrique plus légère et moins convenue. Incontestablement, cette révolution est le fait du barde des Béni-Amer, Mostefa Benbrahim ; elle sera prolongée au XX° siècle par Abdelkader El Khaldi. Ces transformations vont ouvrir la voie à un changement capital : la mise en musique de cette poésie avec des instruments modernes marquera la naissance du genre dit Oranais moderne –Wahrani ‘asri.

Le maître de cette révolution est Lahouari Blaoui qui introduira le piano, la guitare, l’accordéon, l’orgue là où il n’y avait que deux flûtes en roseau et un tube fermé par une peau de lapin en guise de percussion. Influencé par les rythmes exotiques -flamenco, boléro, rumba, mambo- Blaoui va également y soumettre (à doses homéopathiques, certes) les textes du Malhoun. Si Blaoui chantait encore et toujours les vieilles qacidates du Melhoun, il n’en aura pas moins renversé un tabou de taille dans une société arabe dont le maître mot est l’imitation des anciens. Ce faisant, Blaoui allait ouvrir un boulevard aux «Mafrakh», ces «petits bâtard » (comme les appelaient les vénérables cheikhs, selon Saïm El Hadj), ouvriers pour la plupart, qui ne pouvaient exciper d’une naissance dans une famille de grande tente, qui n’avaient aucun respect des anciens cheikhs et des règles d’apprentissage de la « sanaa » -le métier d’artiste- et qui bricolaient des textes sans queue ni tête. Exactement comme les premiers bluesmen. Les textes des chansons raï n’ont, en effet, plus rien à voir avec la poésie courtoise et délicate du Melhoun. Ils sont violemment lubriques, sans concession à la bienséance pudibonde des Arabes; ils chantent les amours adultères, le vin, l’ivresse, la violence des rapports sociaux, la débauche des sens. «Celui qui ne s’est pas enivré et n’a pas connu le désir ferait mieux de crever» résume la chanteuse Rimitti («Elli ma sker wa tmahan el mout kheïrlah»).

Le Raï n’est donc pas la continuation du Melhoun, y compris dans sa forme moderne du Wahrani. Comme le Blues n’est pas la continuation du Gospel ou du Negro Spirituals. Certes, de l’un comme de l’autre, des influences multiples ont présidé à la naissance. Mais justement, c’est cette accumulation de facteurs qui a rendu possible le saut qualitatif qui a donné naissance à une chose nouvelle, originale, qui ne peut se rapporter à aucune autre. [[Pour de plus amples développements sur les aspects musicologiques et instrumentaux du Raï, on consultera avec profit les écrits de deux chercheurs témouchentois pur sucre:

Boumédiène Lechech, musicologue-chercheur dont on trouvera

  • un article sur la musique bédouine ici : http://www.socialgerie.net/spip.php?article708
  • et un article sur le Raï ici : http://www.socialgerie.net/spip.php?article529;

Mohamed Kali, inspecteur de l’enseignement dont on pourra trouver les écrits sur le Raï (je n’ai pas les liens) dans les archives du journal El Watan.]]

Publié par messaoud benyoucef – braniya.blogspot – 1er août 2012