L’ALGÉRIE ET LA TROISIÈME VOIE

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Intellectuels

Saïd Radjef

le Quotidien d’Algérie

Rédaction LQA

Est-ce que le monde arabe n’existe que pour servir les autres, assurer au bon prix l’approvisionnement énergétique des puissances occidentales et laisser l’Etat clandestin d’Israël se construire aux dépens des palestiniens?

Alger, le Caire, Baghdad, Damas… depuis le printemps arabe, tout le discours des élites arabes tourne de manière à faire penser qu’en dehors de l’armée et des islamistes, il n’y a point d’autre alternative aux peuples arabes.

Les peuples arabes sont-ils pour autant condamnés à cette bipolarité dont les modes d’articulation sont l’armée et l’islamisme?

Tout le monde arabe est réduit, conditionné par cette vision du militaire laïc, moderniste en train d’assurer la sécurité des biens et des personnes contre l’islamiste terroriste et djihadiste qui veut refonder la Califat.

Les dirigeants arabes sont chimériques. Outre qu’ils refusent de sortir de leurs visions passéistes, ils pensent sincèrement qu’ils sont des atouts incontournables dans le jeu international. Ils pensent que sans eux, l’univers va s’écrouler.

À les voir agir et gouverner leurs peuples avec ce paternalisme à la fois condescendant et rétrograde, on se demande si le Mur de Berlin est bien tombé. On se demande aussi si le printemps arabe a changé quoi que ce soit dans les habitudes des élites arabes, incapables d’envisager la moindre perspective et la moindre initiative sans l’aval des caporaux et des islamistes.

De ce fait, les peuples arabes pensent naïvement que seuls les militaires et les islamistes ont cette légitimité pour présider aux plus hautes destinées de leurs pays. Les autres n’existent pas. C’est ce que nous ont montré les scrutins qui ont suivi le printemps arabe, notamment en Tunisie, Egypte, Tripoli…

Si les élites algériennes ne changent pas de discours, ne renoncent pas à leur complaisance avec les généraux incultes et cupides, nous risquons de vivre la même expérience que celle de nos frères arabes de L’Egypte…

Les minorités laïco assimilationnistes, séparatistes et danseuses du ventre dont l’influence ne dépassent pas la caserne ou elles ont été conçues, doivent cesser de brouiller les pistes et d’induire en erreur les esprits crédules:

il existe en Algérie une troisième force qui représente la majorité écrasante du peuple; une troisième force qui n’est ni contre les valeurs de l’Islam ni pour la pendaison en masse des caporaux.

Et c’est cette troisième voie totalement affranchie des tutelles d’ici et d’ailleurs que nos élites doivent promouvoir.

Il n’y a point de salut dans les stratégies de la violence et dans les complicités avec les régimes caporalisés.

Outre les événements douloureux qui secouent l’Égypte en ce moment, il y a les enseignements de la guerre imposée par les militaires au peuple algérien.

Le salut est dans le savoir, la science, le dialogue et surtout dans la refondation de vraies institutions comptables devant les représentations légitimes du peuple…

C’est ce qu’auraient dit Hannibal et Ramsès aux tunisiens et aux égyptiens.

CHABIB KHELLIL ET SES FRÈRES

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par Abed Charef

Le Quotidien d’Oran

L’actualité Autrement Vue

le 21 août 2013

L’Algérie est vulnérable. À cause de son système politique, n’importe quel intrus peut y faire ce qu’il veut. Khalifa, Sawiris, Chakib Khelil, et les autres, ceux dont on ne parle pas aujourd’hui. Pas encore.

Avec le mandat d’arrêt lancé contre M. Chakib Khelil, l’affaire Sonatrach s’est transformée en un séisme moral et politique. Même s’il faut encore garder les réserves d’usage, et respecter les droits des uns et des autres à se défendre, tout indique avec l’ancien ministre de l’Energie, c’est le loup qui a été chargé de garder le troupeau de moutons.

Dans un pays qui a vécu le précédent Khalifa, qui a subi les affres du terrorisme, qui a assisté, impuissant, à la déliquescence de ses institutions et à la disparition de certaines valeurs, cette affaire marque un pas de plus dans la déchéance d’un système politique dont l’agonie se révèle particulièrement meurtrière. Une agonie qui, faut-il le rappeler, a vu des membres du gouvernement mentir sur l’état de santé du président, et d’éminents médecins publier de faux bilans de santé pour plaire au prince. Que reste-t-il à un pays qui ne peut plus faire confiance ni à ses médecins, ni à ses ministres?

Pour l’heure, le côté spectaculaire de cette affaire risque pourtant d’occulter quelques points essentiels, les plus destructeurs pour le pays. En premier lieu, la nature du système politique algérien qui permet au chef de désigner qui il veut, au poste qu’il veut, sans rendre de comptes à qui que ce soit. Ce système politique d’un autre temps, qui s’en remet complètement à un homme «providentiel», lui délégant des pouvoirs exorbitants, sans jamais le contrôler ni avoir la possibilité de le sanctionner, a conduit à des dérives d’une gravité inouïe.

Qu’un homme se remplisse les poches de manière illégale, c’est inacceptable à ce niveau de responsabilité, mais c’est humain. La corruption est l’un des phénomènes les répandus dans le monde. Mais là où c’est inacceptable, c’est quand un pays refuse délibérément de se moderniser et de mettre en place des mécanismes pour réduire la corruption. Là où c’est inacceptable, c’est quand un pays sait qu’il offre les conditions optimales pour que la corruption devienne la règle, et que les dirigeants ferment les yeux et laissent faire. Et qu’on le veuille ou non, M. Chakib Khelil a été ministre sous Abdelaziz Bouteflika, mais il a été ministre dans des gouvernements dirigés par MM. Ahmed Benbitour, Ahmed Ouyahia, Ali Benflis et Abdelaziz Belkhadem. C’est-à-dire les hommes considérés aujourd’hui comme des successeurs potentiels de M. Bouteflika.

Quand M. Khelil était au faîte de sa puissance, toutes les institutions étaient tétanisées devant lui. Personne ne pouvait le contredire. On attribue bien à l’ancien ministre de l’intérieur Yazid Zerhouni une attitude opposée à M. Khelil sur la loi sur les hydrocarbures, mais la question a été cantonnée au sérail. Pour le reste, tout le monde a gardé le silence. Les chefs de gouvernement successifs, supposés constituer la hiérarchie au-dessus de M. Khelil, n’avaient aucun pouvoir sur lui. La presse a même rapporté qu’un ancien premier ministre, M. Abdelaziz Belkhadem, est intervenu pour attribuer à une entreprise italienne un contrat remporté légalement par une autre compagnie. Des patrons d’entreprise ont accepté de signer des contrats tout en sachant qu’il y avait un acte de corruption.

Comment, en effet, acheter une centrale électrique pour moins d’un milliard de dollars, puis en acheter une autre de même puissance pour deux milliards, sans se poser de questions? À ce niveau de responsabilité, soit on est complice, soit on est stupide.

Tout ceci révèle que l’Algérie n’est pas immunisée. Et contrairement à ce qu’on pense, l’omniprésence des services de sécurité ne signifie pas que le pays est sécurisé. Bien au contraire. La preuve est là: il y a eu des détournements au ministère de l’énergie et à la tête de la plus grande compagnie algérienne, Sonatrach. Pourtant, si sécurité il doit y avoir, c’est là qu’elle doit se trouver, car Sonatrach, c’est à la fois les recettes du pays en devises, le financement de l’économie, l’achat de la paix sociale et la force de négociation du pays.

Abdelmoumène Khalifa était entré par effraction dans le monde de l’économie, il avait commis l’incroyable avant de prendre la fuite. Rien n’a été fait pour épargner au pays une mésaventure similaire. Chakib Khelil en a donné la preuve en faisant de même. Mais le plus grave est à venir. Car d’autres forces de l’argent ont acquis des positions telles qu’aujourd’hui, elles sont inattaquables.

Elles sont au-dessus de la loi. Et curieusement, on peut, aujourd’hui, critiquer le président de la république, le gouvernement, l’armée,voire le DRS, mais on ne peut publiquement critiquer certaines entreprises et certaines personnes. Elles sont devenues trop puissantes. Leur puissance économique et financière s’est transformée progressivement,pour les installer au-dessus de la loi. Ceux qui se délectent aujourd’hui avec l’affaire Chakib Khelil n’en parleront pas. Ils ne pourront pas parler des frères de Chakib Khelil, comme ils n’ont pas dit un mot de Naguib Sawiris, du temps où il faisait la pluie et le beau temps en Algérie.

ÉPÎTRE AUX ISRAÉLIENS DE PALESTINE

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Vos dirigeants vous trompent sciemment !

par SALAH GUEMRICHE

MEDIAPART

19 août 2013

« Maudit soit celui qui déplace les bornes de son prochain !

Et tout le peuple dira :
Amen…»

(Dt 27.17-19 : Discours de conclusion de Moïse).

Chers « colons de bonne volonté »,

Cela fait longtemps que je voulais vous écrire, à vous que l’on installe, chaque jour plus nombreux, sur les terres d’autrui. Vous arrivez avec vos certitudes et votre inébranlable conviction de la Promesse accomplie. Et pourtant, tôt ou tard, vous réaliserez que vos dirigeants, tous partis confondus, vous ont menti et continuent de vous mentir, et qu’en fait de «lait» et de «miel», cette terre ne promettra que plaies et fiel, tant que l’arbitraire et l’injustice y règneront.

Dans cette lettre, il ne sera pas plus question d’amour du prochain que de votre amour d’Israël (Ahavat Israël), mais de justice, oui. Or, s’il est vrai que «Justice est le terme que le judaïsme préfère à des termes évocateurs de sentiment» (E. Levinas, Difficile liberté), il faut alors croire que l’Etat d’Israël lui-même a tourné le dos au judaïsme…

Je me passerai donc de tout «terme évocateur de sentiment», pour vous dire crûment ma conviction, que m’inspire l’histoire de ceux qu’Albert Memmi appelait les «colons de bonne volonté». Oui, tôt ou tard, vous serez amenés à abandonner ces terres, rapatriés de gré ou de force, et la terrible injonction («la valise ou le cercueil») que connurent les plus démunis parmi les Français d’Algérie, vous l’entendrez non pas de la bouche d’un Palestinien ni de quelque parodique OAS, mais de la bouche même d’un Netanyahu ou de l’un de ses successeurs!

Rapatriés, oui. Vers cette parcelle de terre décrétée «sans peuple» et que la «Communauté internationale», rongée de culpabilité, avait octroyée au «peuple sans terre», comme pour «adapter l’Histoire au dogme» (A. Lods, Les prophètes d’Israël et les débuts du judaïsme) et se faire ainsi l’exécuteur universel de cet Ancien Testament que «nul, en-dehors des Hébreux, n’était obligé d’admettre» (B. Spinoza, Traité théologico-politique): «Vous ne suivrez pas les lois des nations que je chasse devant vous (…) car je les ai prises en dégoût. Vous prendrez possession de leur sol, je vous en donnerai moi-même la possession, une terre qui ruisselle de lait et de miel. C’est moi Yahvé votre Dieu qui vous ai mis à part de ces peuples» (Lv 20. 23-24).

Seulement, en acceptant de «déplacer les bornes de (votre) prochain», vous voilà vous-mêmes, et à votre insu, «mis à part», mais à part d’Israël même, puisque l’on vous installe hors de l’Etat, proprement dit, d’Israël, et donc en marge de votre propre peuple! Et vous ne vous rendez même pas compte que votre transplantation est faite pour servir avant tout les intérêts de cette caste de dirigeants véreux et machiavéliques, qui savent pourtant que leur temps d’impunité est historiquement compté, y compris de l’intérieur même d’Israël. Tout comme est compté, oui, votre «temps béni des colonies». Car vous avez beau chasser les Palestiniens de leurs terres, en suivant à la lettre vos saintes Ecritures: «Vous chasserez devant vous tous les habitants du pays car c’est à vous que je le donne (…) Si vous ne dépossédez pas à votre profit tous les habitants, ceux que vous aurez épargnés seront comme des épines dans vos yeux et vous harcèleront sur le territoire que vous occuperez» (Nb, 35. 53-55), les Palestiniens, spoliés, expatriés ou déportés depuis 1967 (pour ne pas remonter plus loin), finiront immanquablement par retrouver leurs terres – non pas comme des épines mais comme des branches: celles d’un autre Tronc d’olivier franc (saint Paul) – et renouer enfin avec leurs racines.

Alors, permettez à un Algérien, né et grandi «dans» la colonisation, de vous dire comment il voit la suite des «événements»: sur cette terre où devaient couler «le lait et de miel», vous vous retrouverez tôt ou tard, et du jour au lendemain, «Gros-Jean comme devant», telle la Laitière de la fable… Et de cela vos dirigeants sont parfaitement conscients, qui se servent de vous, et vous utilisent comme boucs… missionnaires. Car, sans le savoir, vous êtes en mission, et sur un front d’un autre type. Une mission devenue la «marque de fabrique» de vos gouvernants, et qui consiste à occuper chaque jour plus de terres, à déplacer chaque jour un peu plus les «bornes de son prochain», afin que toute négociation à venir ne porte que sur les récentes acquisitions et non plus sur les anciennes. Ce n’est ni plus ni moins qu’un expansionnisme pervers, fondé sur une politique perverse du fait accompli…Cela leur a très bien réussi. Du moins, jusque-là.

Mais vous, chers Israéliens de Palestine (comme on disait «Français d’Algérie», oui), qu’avez-vous donc fait du cri de Rabin vous rappelant, depuis Oslo, que «la Bible n’est ni un cadastre ni un titre de propriété! »? Vous êtes-vous seulement demandé pourquoi, chaque fois qu’une nouvelle négociation leur est imposée (par l’allié «états-unien»), vos dirigeants se remettent aussitôt à détruire et à coloniser à tour de bras, comme si la reprise d’une négociation se devait d’être accompagnée d’une reprise de la colonisation? Vieille stratégie, qui montre qu’au fond d’eux-mêmes vos stratèges-en-chef ne veulent pas vraiment de la paix, et travaillent non pas pour mais contre le mieux-être de leur propre peuple. En somme, avec de tels stratèges, et je le souligne pour la énième fois, le particularisme d’Israël n’est plus dans «l’élection», ni même dans l’impunité effarante et sans précédent dont il bénéficie (plus de 60 résolutions de l’Onu complètement ignorées!), mais avant tout dans l’adversité, dans le besoin d’adversité: on peut vouloir obstinément la paix, et au moment où elle menace de se réaliser, tout faire pour la saboter; quitte à reprendre aussitôt son rituel de négociations et de faux compromis, en attendant la prochaine colonisation, ou la prochaine provocation, que l’on suscitera au besoin, et ainsi de suite…

Ce n’est pas à vous, ô Enfants d’Israël, que je vais apprendre la logique martiale qui a fait de votre valeureuse «Armée de défense» une armée d’occupation, et qui guide ses «féroces soldats», chargés de pilonner des objectifs civils, au prétexte de faire taire les roquettes, afin de faire main basse sur de nouvelles terres! Oui, je persiste et signe (et au diable tout chantage à l’essentialisme!): la sécurisation, objectif avancé à chaque opération, n’est qu’un argument-écran d’une conduite fondatrice dont la logique est à chercher dans la conception vétérotestamentaire de l’ennemi. De l’ennemi par excellence, un ennemi sans âge: le nommé Amalek. C’est aussi ce pathologique besoin d’adversité qui pousse vos dirigeants à déplacer toujours plus loin les «bornes du prochain», avec, à l’esprit, le commandement suprême: «Tu effaceras la mémoire d’Amalek de dessous les cieux! Ne l’oublie pas! » (Dt 25. 19)!

Sauf que, chers Israéliens de Palestine, vos dirigeants ont trop tiré sur la corde, et que l’impunité, avec la complaisance de la «Communauté internationale», a des limites (les dernières décisions de l’UE, si timides soient-elles, vous le disent): entre la légitimité d’un «Foyer national juif» et la légitimation d’un Eretz Israël, trop d’injustices et de forfaits ont déjà jalonné les routes de cette terre «promise», promise aux uns et, pour une bonne part, prise aux autres… Oui, tôt ou tard, et à moins d’accepter une nouvelle citoyenneté dans le futur Etat palestinien, vous serez «invités» à rentrer chez vous, non pas en «Palestine Beituna»[[Beituna, «notre maison», «notre foyer», en hébreu comme arabe. Alors que «Beitucum», en arabe, pourrait désigner «votre maison».]], comme vous dites, mais en «Israël, Beitucum», dirai-je. Et il ne vous restera plus, en désespoir de cause, qu’à vous retourner contre ceux-là mêmes qui vous auront sciemment abusés, instrumentalisés, corrompus jusque dans vos us et coutumes: alors que votre généreuse loi du lèqet autorise l’étranger à glaner ce qui tombe des gerbes derrière vos moissonneurs, vous, vous déplacez les bornes du prochain pour aller carrément moissonner sur ses terres et sans même lui laisser les moyens de glaner, chez lui!

Pour toutes ces raisons, oui, vous finirez, de gré ou de force, par abandonner ces terres que vous occupez indûment, avec la bénédiction de vos stratèges – lesquels, le jour venu, se moqueront royalement de vos heurts et malheurs! Et je ne doute pas qu’il se trouvera parmi eux un De Gaulle fort inspiré pour vous lancer, du haut de quelque balcon de la Knesset, un «Je vous ai compris! » encore plus perfide que l’original…

Salah Guemriche [[Ecrivain algérien.

Parmi ses ouvrages :

  • Dictionnaire des mots français d’origine arabe (Seuil) ;
  • Le Christ s’est arrêté à Tizi-Ouzou (Denoël) ;
  • Abd er-Rahman contre Charles MartelHistoire de la bataille de Poitiers (Perrin).

En e-book :

  • Aujourd’hui, Meursault est mort (Amazon) ;
  • Feuilles de Ruth – Israël et son prochain, d’après l’Ancien Testament et autres textes juifs anciens et contemporains (Amazon).]]

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ÉCLAIRAGES SUR LE PROCESSUS EN COURS EN ÉGYPTE

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EGYPTE- L’EMPIRE A PERDU L’INITIATIVE STRATÉGIQUE

par Saoudi Abdelaziz

blog algerieinfos-saoudi

le 17 août 2013

En Egypte, après l’échec de la solution Soleimane en février 2011, après l’échec de la reprise en main par le Conseil des forces armées, après l’échec de la candidature Chafik en 2012, l’Empire a « collé » à la solution Frères musulmans.

La Maison blanche a lâché Morsi lorsque ce président démocratiquement élu, prenant en compte l’intérêt national, avait engagé une réorientation stratégique inacceptable pour la Maison blanche et la hiérarchie militaire.

Avec notamment l’amorce de l’alliance avec l’Iran et le soutien plus résolu aux Palestiniens, il avait franchi la ligne rouge. Les gages de Morsi sur le dossier syrien qui suivront ne serviront à rien, le mal était fait.

Une nouvelle phase était ainsi ouverte. Pour l’Empire, l’Etat égyptien ne doit absolument pas user de capacités autonomes de décision au services de des intérêts nationaux, capacités que le pouvoir égyptien avait abdiqués il y a quarante ans, avec l’Infitah.

Les consortiums financiers pro-occidentaux qui avaient prospéré sous Sadate puis sous Moubarak en dépeçant le secteur public, ont pu échappé à la Justice grâce à la complaisance de la Confrérie des Frères Musulmans.

Ils mettent toute leur puissance financière et médiatique au service de la préparation d’une opération de subversion qui aboutira au coup d’Etat mené par le « pieux » Sissi, le jeune et intelligent chef des services spéciaux de l’Armée qui avait remplacé à la tête de l’Etat-major, le vieux maréchal Tantaoui dépassé par les événements.

Par quel processus les « laïcs » égyptiens ont-ils été amené à soutenir cette opération?

Akram Belkaïd note: « Oui, l’armée égyptienne a su profiter de la dégradation du climat politique sous Morsi et il faudrait être naïf pour croire qu’elle n’a pas encouragé et entretenu les tensions. Le 3 juillet dernier, son intervention a comblé d’aise nombre d’Egyptiens, hostiles aux Frères musulmans ».[[http://akram-belkaid.blogspot.fr/2013/08/larmee-egyptienne-ce-medecin-boucher.html?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed:+LignesQuotidiennesParAkramBelkad+(Lignes+quotidiennes,+par+Akram+Belka%C3%AFd)]]

Les Révolutionnaires socialistes, une formation influente de la gauche égyptienne, viennent de condamner la politique d’Al Sissi. Cette prise de position, première échec de la bipolarisation idéologique, annonce la remise au devant de la scène des intérêts fondamentaux du peuple égyptien.

Kharroubi Habib pense que les puissances ont intentionnellement poussé les « deux camps égyptiens » à la confrontation « avec le calcul pour elles que quel que soit celui qui l’emportera elles pourront le moment venu se positionner avec bénéfice au profit du courant politique en faveur de qui se dessinera la victoire ». Le journaliste conclut: « Une telle tragédie s’inscrit dans la logique de la théorie du «chaos créateur» qu’ils ont conceptualisé pour le monde arabe et que les Egyptiens ont fini par croire qu’elle a été destinée uniquement aux autres peuples de la région ».[[http://www.lequotidien-oran.com/?news=5186643]]

Combien de temps va durer ce nouvel épisode du feuilleton égyptien? En tout cas, la principale victime du coup d’Etat d’Al Sissi sera sans doute l’argumentaire consistant à présenter les « Printemps » égyptien et tunisien comme le fruit d’une conspiration américano-islamiste.

Au début de l’année 2011, l’Empire a perdu l’initiative stratégique dans ces deux pays.

Depuis, ses efforts pour redresser la barre ne semble pas être parvenus à renverser durablement la tendance lourde de l’évolution qui veut que les peuples exigent dorénavant le droit d’exister, se faire respecter et celui de mieux vivre.

L’Empire et ses succursales locales ne l’acceptent pas, mais pourront-ils contenir durablement ces aspirations puissantes, alors que le système de domination craque sous l’effet d’une crise structurelle irrémédiable.

sources: blog algerieinfos-saoudi


ÉGYPTE, RÉVOLUTION ET CONTRE-RÉVOLUTION, suite.

INVESTIG’ACTION

Badia Benjelloun

le 17 août 2013

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Une foule compacte de civils est rassemblée et proteste contre un coup d’État militaire qui a destitué un gouvernement élu selon les critères de la démocratie représentative occidentale. Elle se fait encercler par l’armée. Quelques grenades lacrymogènes sont lancées puis le massacre commence.

Plusieurs centaines de morts et des milliers de blessés civils contre une poignée de soldats lynchés, d’aucuns ont tôt fait moyennant quelques vidéos sur internet publiés par un organe de presse hostile aux Frères Musulmans [[http://www.youtube.com/watch?v=OkXdoasAVik&amp&nbsp]] ou par l’armée elle-même [[http://www.youtube.com/watch?v=q-JRsUSyLh4]] de qualifier la tuerie programmée par les hauts gradés égyptiens de ‘guerre civile’.

L’Égypte va revenir à la situation du statu quo ante, un état d’exception avec à la clé des couvre-feux, une interdiction de manifester et pas même un semblant de truc avec les falbalas coûteux de députés impuissants et de Parlement qui ne légifère pas.

L’armée, du moins ses dignitaires, abondamment perfusés par les aides étasuniennes et irrigués par des biens publics privatisés, c’est 40% du PIB, dans les secteurs du tourisme, de la promotion immobilière et du textile en particulier, au point qu’elle est créancière de l’État égyptien.

Le mouvement Tamarrod (Rébellion) s’est nourri durant les mois qui ont précédé la grande manifestation du 30 juin des frustrations d’un peuple qui attendait du changement de régime bien plus que les maigres aménagements des Frères. La confrérie structurée comme une société de bienfaisance n’a rien entrepris ni annoncé en terme de politique sociale et économique qui eût été à la hauteur de l’insurrection populaire pour réparer le délabrement social et économique. Elle était limitée dans ses ambitions de réformes économiques. La composition des deux gouvernements formés en un an par Hicham Qandil, ingénieur agronome hydraulicien de 50 ans a fait appel essentiellement à des technocrates, même si la deuxième équipe nommée en janvier 2013 comportait 8 affiliés au Parti de la Liberté et de la Justice que la précédente.[[http://www.egyptindependent.com/news/update-details-emerge-new-ministers-cabinet-reshuffle]]

Elle était cantonnée dans un cadre institutionnel où l’Armée concédait au Président sorti des urnes juste une petite place au-devant de la scène.

Les événements de janvier 2011, ces millions de personnes qui convergeaient quotidiennement sur la place Tahrir, avaient sidéré les capacités de réaction du gendarme du monde.

L’armée avait perçu son absence de réactivité à une situation inédite et non prévue par les multiples agences de renseignements et de conseils en manipulations géostratégiques.

Elle avait le contrôle des affaires placées entre ses mains par le dictateur éconduit. Pendant plus d’un an, elle a traîné des bottes, retardant autant que faire se pouvait des élections et la passation du pouvoir à un gouvernement mené par des civils.

Le 30 juin 2013 a été l’occasion pour les larrons de se débarrasser d’acteurs encombrants qui ne maîtrisaient pas un processus d’insurrection permanente. Les FM se sont comportés comme de vrais bleus, incapables d’intégrer l’expérience politique subie par le Hamas lui aussi élu à la ‘régulière’ et très vite marginalisés par des procédés d’étouffement insidieux. La mise à l’écart polie du Maréchal Tantaoui ne réduisait pas la capacité de nuisance de l’oligarchie rompue aux coups à quintuple détente par la fréquentation assidue du Mossad.

Le commerce (l’hôtellerie surtout) en pâtissait. Un processus révolutionnaire réussi de plus risquait d’être contagieux dans la région et au-delà. Un sentiment très fort d’anti-américanisme et surtout d’anti-sionisme soude le peuple égyptien.[[http://www.egyptindependent.com/news/tamarrod-starts-petition-reject-us-aid-scrap-peace-treaty-israel]]

L’armée a adroitement dévoilé un plan qui aurait été élaboré par Morsi, probablement négocié entre le Qatar de l’émir père destitué au nom du fils et l’amie de toujours Tzipi Livni pour céder 40% du Sinaï à l’ennemi voisin pour y placer les Palestiniens en quête de pays. Le régime sioniste ne prend plus aucune précaution pour afficher son intention de judaïser toute la Palestine. Toutes les conjectures sont permises pour attribuer à cette information le statut d’un faux vrai, d’un vrai faux ou d’un faux vrai faux jusqu’à épuisement des signes plus et moins. Il se trouve qu’il a mobilisé les consciences dans le sens voulu par les généraux.

Barack Obama a sans doute raison quand il déclare que ce massacre-ci n’est pas imputable aux US(a). Lors de la récente visite de William Burns au Caire à la mi-juillet, Abd Elfattah Sissi s’est permis de lui affirmer que l’aide militaire américaine menace la relation entre les deux pays et a un effet néfaste sur la partie récipiendaire. Les généraux font sans doute bien leurs comptes, la Fed imprime du dollar à usage interne désormais pour racheter la dette publique.

Sissi et sa bande ne se sont pas concertés avec l’exécutif étasunien pour se garantir les coudées franches. Si les aides étasuniennes représentaient au lendemain de Camp David, la plus grande défaite arabe, plus de 70% des ressources de l’armée égyptienne, à ce jour, le 1,5 milliard de dollar US alloué annuellement ne sont plus que les 20% du budget militaire égyptien. Cette relative autonomie financière est l’un des facteurs qui a conforté les généraux dans leur choix de pratiquer d’abord un coup d’État puis de le prolonger par un massacre et la déclaration de l’état d’exception. Parmi les autres éléments qui ont pesé dans l’élimination des FM mais surtout de l’écrasement de la tension du peuple vers un idéal démocratique, l’appui des Saoud versus un Qatar mis hors jeu compte pour beaucoup, quelques milliards d’aide directe et de salaires des expatriés.

1 000 ou 2 000 morts de civils supplémentaires vont-elles terroriser un peuple qui n’a pas encore trouvé d’issue à sa révolution inachevée? 1 000 morts, c’est le résultat de la moisson du mois de Ramadan en Irak sans que nul démocrate et nul média du système ne s’en émeuve.

En revanche, les milliers de morts syriens devenus au fil des mois plusieurs centaines de mille ont rapidement été pris en charge et recyclés comme arme de propagande contre le gouvernement de Assad. Le reliquat du mouvement socialiste et laïc Baath syrien est disqualifié dès 2003 et remonté en tête de liste du prochain à abattre par les likudniks bushistes. Il soutient de plus le Hezbollah lui-même coupable de «terrorisme» pour vouloir faire respecter la frontière du Sud Liban des intrusions sionistes.

L’équation égyptienne et arabe n’est pas de celles qui puissent se transformer en quelques formes reconnaissables et aisées à résoudre.

La Libye se ressent déjà de l’instabilité telle qu’elle se présente au Caire et bientôt à Alexandrie. Le gouvernement installé par l’OTAN à Tripoli se révèle incapable de désarmer les milices et les tribus. La guérilla couve toujours, un attentat à la voiture piégée a failli coûter la vie au colonel de la ville de Benghazi ce 14 août. Les postes de police et les représentations étrangères sont la cible d’attaques régulières.

L’exploitation des ressources pétrolières est entravée. En un mois la Libye aurait perdu plus d’un milliard de dollars en raison d’actes de sabotage.

Les ondes de turbulence n’épargnent pas la Tunisie. Elles ont affecté les relations avec la Turquie, elle-aussi désormais dans une politique pleine d’ambiguïtés à l’égard de Tel Aviv, rompant un certain arc qui enserrait Israël et favorisait la réunification entre la terre palestinienne sise sur la rive occidentale du Jourdain et la prison de Gaza.

Les US(a), c’est-à-dire la pléthore de congressistes élus grâce à l’activisme ou simplement au laisser-faire non malveillant de l’AIPAC, est constitué par la sécurité de l’entité sioniste et donc par la situation au Sinaï.

De manière presque ostentatoire, le Conseil Militaire Suprême a autorisé l’armée d’occupation sioniste à frapper en territoire égyptien des citoyens égyptiens dans le Sinaï. Un drone israélien a tué vendredi 9 août cinq «terroristes» que les renseignements ont identifié à la forme de leur ombre en plein midi et un lance-roquette qui aurait menacé la sécurité des estivants qui parfont leur hâle sur la plage d’Eilat.

La coopération militaire renforcée avec Israël avait été annoncée à Hagel et constitue le gage suffisant pour que vaquent à leur mise en ordre les généraux égyptiens.

Aucune preuve consistante n’a été trouvée pour étayer l’existence d’une coordination militaire entre le Hamas et des Frères basée à Gaza. Des allégations fantaisistes citées par Debka en situent même le QG dans un hôtel Gaza Beach Hotel, sa direction serait assurée par Izzat Ibrahim n°4 dans la hiérarchie des FM et surnommé l’homme de fer. Une insurrection armée serait conduite depuis le Sinaï et viendrait jusqu’au Caire renverser le gouvernement transitoire.[[http://www.debka.com/article/23189/Egypt&rsquo&nbsp]]

Un acte d’accusation est en train d’être dressé par le régime des militaires, de quoi permettre l’application de la mode étasunienne elle-même copiée et collée des techniques d’intimation du peuple palestinien par Israël, une détention illimitée sans jugement des ‘suspectés de vouloir accomplir des actes de terrorisme’.

Il semble que s’amorce un mouvement de protestation d’officiers au sein de l’armée égyptienne qui contestent la destitution du président élu. [[http://www.israelnationalnews.com/News/News.aspx/170930#.Ug81NxxmCtA]] Ils considèrent que le devoir de l’armée est de défendre la patrie, la religion et les valeurs de la nation et non de disperser par des armes létales des rassemblements de civils.

Parmi les 500 000 soldats et la dizaine de divisions [[http://www.israelvalley.com/news/2011/02/12/30332/israelvalley-l-armee-egyptienne-500-000-soldats-et-une-dizaine-de-divisions-500-avions-dont-250-f-16-3-000-chars-et-3-000]], il doit exister assez d’éléments formés techniquement et éduqués politiquement pour constituer une force antagoniste à l’oligarchie militaire qui s’appuie sur les intérêts des Saoud pour mettre 85 millions d’Égyptiens au pas.

L’équation arabe est complexe, mais en aucun cas, au Yémen, au Bahrein, en Arabie, en Syrie, en Libye, en Tunisie la motivation du soulèvement ne peut être lue comme d’essence religieuse.

Pas plus que le problème de la Palestine ne peut se réduire à un conflit religieux entre Musulmans et Juifs alors qu’il s’agit d’un pur problème colonial.

La lutte contre l’oppression et pour la dignité est un devoir sacré, il incombe à chacun. Il ne peut aboutir que s’il prend une forme collective. Les Arabes s’efforcent de reconquérir leurs droits, leur victoire sera un gain pour toute l’humanité.

Source : Investig’Action – michelcollon.info


JACQUES TOURTAUX OU LE REFUS DE LA GUERRE D’ALGÉRIE

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« Souvenirs d’un appelé anticolonialiste»: Jacques Tourtaux ou le refus de la guerre d’Algérie»REPORTERS.dz – Note de lecture de Mohamed Bouhamidi – le 20 août 2013.


Courage et convictionUN SOLDAT FRANÇAIS DANS LA GUERRE D’ALGÉRIEBlog et publications de Jacques TOURTAUXcorrespondance – socialgerie janvier 2010.


GUERRE D’ALGÉRIESOUVENIRS D’UN APPELÉ ANTICOLONIALISTEAvant-Propos d’Henri ALLEG, l’auteur de La Question.


« Souvenirs d’un appelé anticolonialiste»:

Jacques Tourtaux ou le refus de la guerre d’Algérie

Note de lecture

REPORTERS.dz

Écrit par Mohamed Bouhamidi

le 20 août 2013

repris sur le blog de Jacques Tourtaux

http://jacques.tourtaux.over-blog.com.over-blog.com/article-mohamed-bouhamidi-souvenirs-d-un-appele-anticolonialiste-jacques-tourtaux-ou-le-refus-de-la-119554003.html

Des acteurs encore en vie de la guerre et des chercheurs et écrivains invités par l’association Med-Action pour la jeunesse et la citoyenneté pour commémorer, du 18 au 21 août 2013, à Akbou, le 57e anniversaire du congrès de la Soummam, apporteront leurs témoignage ou leurs éclairages.

Parmi les témoins, un ancien appelé anticolonialiste, Jacques Tourtaux, témoignera à partir d’un vécu à l’intérieur de l’armée française. Simple ouvrier, simple «bidasse» qui a su résister à toutes les pressions, Tourtaux a écrit un livre étonnant, instructif, humain et sans concession dans son contenu anti-guerre et anti-colonialiste. Son livre, Souvenirs d’un appelé anticolonialiste (non distribué en Algérie) méritait une note de lecture.

Originaire des Ardennes et issu d’un milieu très pauvre, ouvrier lesté d’un certificat d’études primaires, Jacques Tourtaux sort de l’adolescence en pleine guerre d’Algérie. Fait d’époque, son milieu ouvrier baigne dans l’identité communiste, devenue culture plus qu’appartenance organique, mélange de mémoire des luttes, d’identification sociale et d’humanisation de la misère par l’utopie d’un autre destin humain. Dans ce milieu, on adhère au parti communiste comme on accomplit sa condition sociale et comme on porte l’oriflamme.

Le témoignage de Tourtaux en est une nouvelle confirmation: il a adhéré au parti, comme on le disait, dans une sorte d’évidence qu’il ne pouvait s’agir que du parti communiste après cette seconde et terrible accoucheuse guerre mondiale. Il a adhéré comme on monte en première ligne, comme on se prend en charge, comme on devient adulte, comme on prend sa part du fardeau, comme on s’apprête au don de soi. Il écrit: «C’est tout naturellement que j’ai adhéré au Parti communiste français.» Tout naturellement et la suite vient tout naturellement aussi: «Avec des camarades de mon âge, en 1959, nous avons créé un cercle de l’Union des jeunesses communistes de France dont je fus le secrétaire.» D’où le lien direct avec sa réaction spontanée à son ordre de mobilisation: «À deux reprises, j’ai refusé de me présenter aux conseils de révision les 14 mars et 30 juin 1960.» Mais, justement, il baigne dans le milieu social du communisme, cela fait une sacrée différence avec l’organisation, avec l’appareil, avec le «parti». Il écrit à un proche, pas à la direction de la cellule ou de la «fédé»: «Ma lettre était prête pour De Gaulle. Je lui écrivais mon refus de participer à cette guerre. Je ne voulais pas combattre le peuple algérien. J’ai écrit à un de mes oncles pour lui en faire part. Mon oncle, qui était cheminot, militait au PCF. Il m’a de suite répondu et déconseillé d’écrire à De Gaulle.

Il disait que les sanctions étaient très fortes, que le travail des jeunes communistes était de militer au sein de leur unité contre la guerre.» C’est donc son oncle, pas le parti, qui le guide, et ce fait à lui seul présente un intérêt extraordinaire: les principes léninistes avaient largement débordé les frontières du parti, pour devenir une culture de masse. L’oncle ouvrier cheminot discute avec son neveu ouvrier de la ligne politique, comme s’ils portaient «naturellement», comme le dit Tourtaux, la légitimité de l’appareil. Cela corrige sensiblement les approches académiques, tout en indiquant quel potentiel ce même parti s’est évertué à perdre, puisqu’il va perdre en cours de route ce même Tourtaux qui lui disputera la légitimité de l’identité communiste. Quelle perception de la guerre développaient le milieu ouvrier, le milieu communiste et enfin le parti? La question doit déjà beaucoup à ce témoignage.

Briser la volonté, briser les hommes

Il viendra donc en Algérie, en février 1961, suivi par sa fiche qui indique ses engagements et ses choix. Première destination, la compagnie d’instruction, sorte de bataillon disciplinaire, mais plus proche de la prison et du bagne que de la mise au pas. Le récit est surprenant de ce monde clos qui livre des appelés aux pulsions perverses des «sous-offs» tortionnaires qui bastonnent les jeunes recrues à coups de manches de pioches, oblige des détenus à faire des réveils sportifs avec des chants nazis, leur font subir des sévices, tous plus vicieux les uns que les autres, sous la haute autorité d’un commandant qui les appelle à rejeter la propagande du PCF et du PCA.

Briser la volonté, briser les hommes, bien au-delà de la nécessité du redressement disciplinaire, ne pouvait se faire sans l’existence de ces malades de la torture et de la brutalité pathologique et de leurs fortes racines. La question reste posée de savoir comment l’armée française a pu livrer des conscrits français à des fascistes.

Le lecteur a l’impression d’un monde illégal, fonctionnant en dehors des lois ou même de la simple humanité, et d’une sorte de «regard tourné ailleurs» de la hiérarchie militaire et civile. Un monde de l’enfer qu’aucune bonne âme parmi ces responsables ne peut regarder sans y découvrir son côté sombre, ses propres ressorts soigneusement maquillés.

Du coup, s’éclairent pour un lecteur algérien quelques sources de la torture, des corvées de bois, du napalm sur les villages, des camps d’internement ou des camps de regroupement; bref, de l’extermination de masse de notre peuple.

Aussaresses et Massu étaient tout entiers dans les personnages décrits par Tourtaux, l’adjudant Birr et le commandant qui venait
«habiller» le sale boulot en mettant en garde les conscrits contre la propagande anticommuniste.

Pourtant, Tourtaux et les communistes n’étaient pas seuls. Au passage, il nous signale la présence de deux séminaristes qui refusaient comme lui de faire cette guerre absurde à notre peuple.

Comment et pourquoi tout ce potentiel anti-guerre a mis si longtemps à se manifester sans jamais vraiment se cristalliser et pourquoi une minorité fasciste a pu garder la haute main sur l’armée? Car, c’était une minorité.

La résistance au putsch, perpétré dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 avril, le prouve amplement.

La mémoire de Tourtaux nous permet d’avoir un panorama exceptionnel de la résistance multiforme qui s’organise au cœur de composantes techniques comme l’aviation ou parmi les bidasses avant même l’appel de De Gaulle.

Témoignage passionnant par sa précision, par lequel on découvre qu’en fait, les régiments et détachements parachutistes et les légionnaires sont les plus infectés par les mercenaires et par l’idéologie fasciste ou nazie.

C’est peut-être les chapitres à lire avec le plus grand soin dans ce livre. On mesure alors pleinement les contradictions qui traversent l’armée française et que seule la méthode du «bagne» d’Oued Smar pouvait contenir au profit du pôle fasciste.

On mesure tout aussi pleinement que les luttes politiques anti-guerre ont manqué de la profondeur anticoloniale de principe qui aurait aidé à isoler les factions fascistes et les factieux et empêché l’impulsion socialiste de la guerre, puis sa prolongation gaulliste.

On mesure enfin combien l’engagement colonialiste des socialistes et notamment celui de Mitterrand et de Guy Mollet ont pesé du côté des futurs putschistes, mais surtout combien ils ont retardé la cristallisation ou la coalescence d’une conscience française que la guerre d’Algérie était une guerre coloniale. On voit d’un autre œil le procès Jeanson, la lettre des 121 et celle de Sartre.

Réflexion

C’est absolument fascinant de découvrir comment l’armée française, délivrée par le putsch du contexte politique qui pesait sur ses contradictions, les laisse s’exprimer jusqu’au bout, jusqu’à la confrontation et parfois l’affrontement. Il est significatif de noter que les parachutistes et les légionnaires ont exercé un maximum de pressions et d’intimidations pour garder sous contrôle la masse des soldats de carrière, autant que les conscrits.

Notons, en outre, ce que le livre de Tourtaux nous pousse à réfléchir. Le manque de détermination de l’appareil du PCF à peser sur les contradictions de l’armée, en vue de les résoudre en faveur de ses courants non fascistes. La révolution léniniste, le communisme comme la Troisième internationale et cette culture léniniste qui baignaient Tourtaux étaient nés en rupture avec la gauche. Ce vote des pouvoirs spéciaux inaugurait la longue et souterraine rupture du PCF avec le léninisme et son retour dans cette gauche qui le ramènera dans le giron de la social-démocratie.

Ne serait-ce que pour l’échec de ce putsch, le travail de Tourtaux et des autres mérite une immense considération. Ils nous auront évité encore plus de souffrances et plus de difficultés. Ils auront en tout cas fait évoluer les contradictions au sein de l’armée française en défaveur des courants fascistes et en les poussant dehors vers leur sinistre OAS.

Sur cette fin de guerre, Tourtaux nous livrera des témoignages précieux sur le fonctionnement interne d’une armée surpuissante qui a enchaîné le travail de destruction sans vaincre notre peuple.

Les images qu’il ramène de Mouzaïa sont sans appel. Cette armée française victorieuse des maquis est obligée d’organiser le gardiennage de chaque ferme de colon. Au bout des destructrices opérations Challes, Jumelles, Pierres précieuses, aucun colon n’avait la paix ni l’arrogante assurance du maître.

Le maquis n’était pas que dans la montagne. Lisez attentivement. Vous découvrirez sous le simple énoncé des faits cette confirmation d’une fusion du peuple et de l’ALN, qui gardait à ces maquis exsangues et démunis la force d’agir encore et d’inquiéter en cette transition du printemps 1961 vers l’hiver 1962. En tout cas, le combat n’aura pas cessé dans cette zone de la Wilaya IV.

Atrocités inutiles, politique systématique de terreur, massacres, ratonnades, expéditions punitives continueront de marquer la fin de cette guerre, qui s’éternise dans sa pourriture.

Telaghma, le camp de regroupement

Tourtaux sera muté dans une base aérienne de sinistre réputation pour les Algériens, Telaghma. Il y sera soumis à toutes sortes de privations, de brimades inutiles, de menaces hors de saison, exposé à des risques sans les moyens pour se défendre.

La défaite des putschistes a isolé le courant le plus fasciste, mais a laissé de beaux restes. Tout cela va en «eau de boudin» derrière les barbelés de la base, des barbelés emprisonnant un peuple en haillons qu’on a regroupé dans un camp, loin de ses terres, de son agriculture, de ses maisons, un peuple que l’armée nourrit au compte-gouttes pour affamer le maquis. Un peuple qui dans cet au-delà de la douleur, qui dans son regard vitrifié sur la mort et le dénuement, partagera la moitié de sa faim avec ses enfants qui courent encore les montagnes.

Bien sûr, des êtres cèdent sous ce poids insupportable. Des petits garçons et des fillettes viendront se prostituer pour un sou et Tourtaux entendra la hâblerie graveleuse de ceux qui se sont offert, parfois sans payer, le petit ou la petite.

Tourtaux le répète. Il est un simple ouvrier autodidacte. Il est communiste, et pour le rester, quitte le Parti communiste français.

Il a écrit dans son langage d’ouvrier et de fils du peuple. Impossible de faire de son écriture une coquetterie esthétique pour «salonnards» et donc de le récupérer en en faisant une expérience littéraire dans le style: «Tiens, une bête qui parle ou un ouvrier qui écrit.»

Cette écriture ramassée sur les faits en dit beaucoup sur la France et sur l’armée. Tourtaux est fier de la préface que lui a écrit-Henri Alleg. Très fier. C’est la reconnaissance de sa lutte par un lutteur.

C’est surtout la reconnaissance d’une ligne de conduite. Il la perpétue en se battant pour faire reconnaître et réparer les traumatismes produits par la guerre et par les traitements inhumains que l’armée lui a fait subir et fait subir à bien d’autres. Il la perpétue en tenant un blog – le blog de Jacques Tourtaux – dédié à l’anticolonialisme.

Mohamed Bouhamidi

le 20 août 2013

sources: REPORTERS.dz:

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Courage et conviction

UN SOLDAT FRANÇAIS DANS LA GUERRE D’ALGÉRIE

Blog et publications de Jacques TOURTAUX

socialgerie janvier 2010

socialgerie signale volontiers le blog de Jacques TOURTAUX, tant il aide à connaître les problèmes et les épreuves morales et physiques qu’ont endurées tant de jeunes Français hostiles au colonialisme.

Issu d’un milieu très pauvre et de culture ouvrière, Jacques TOURTAUX écrivait en janvier 2010 à Sadek Hadjerès: Dès l’âge de 14 ans, comme la plupart des fils du peuple de l’époque, il a fallu aller travailler. Je suis un de ces ouvriers qui ont beaucoup donné au parti et à la CGT.

Entre deux, il y a eu cette maudite guerre que je ne voulais pas faire et contre laquelle j’ai fait le choix difficile de militer au sein de mon unité.

Tout en respectant l’originalité de mon blog qui est un blog de combat très référencé, je serais ravi de pouvoir, avec ton accord mettre des articles sur ton beau pays et sur l’action menée contre la guerre en solidarité avec le peuple et les camarades algériens.

En même temps que des indications sur son blog, nous donnons des extraits de la préface de Henri Alleg à son ouvrage « Souvenirs d’un appelé anticolonialiste »


Pour accéder au blog de Jacques TOURTAUX, cliquer ici …->http://jacques.tourtaux.over-blog.com.over-blog.com/categorie-10236463.html]


Pour accéder à l’article qui présentait son livre, aux photographies et au forum, dont une lettre de Pierre LERAY, cliquer ici….

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GUERRE D’ALGÉRIE

SOUVENIRS D’UN APPELÉ ANTICOLONIALISTE

Avant-Propos d’Henri ALLEG, l’auteur de La Question

C‘est en février 1961 que Jacques Tourtaux, comme des dizaines de milliers de jeunes Français avant lui , avec les mêmes réticences à participer à cette guerre «imbécile et sans issue», arrive en Algérie. Mais, entre lui et la majorité de ces bidasses mobilisés à qui pourtant il ressemble, une différence qui a son importance: il est communiste et il sait parfaitement pourquoi il refuse cette guerre et où sont la vérité et le droit. Non pas, comme le prétend la propagande officielle, du côté des gros colons exploiteurs, des gouvernants et de l’armée coloniale qui les servent et continuent de prétendre que l’ «Algérie c’est la France» mais du côté des Algériens qui luttent pour l’indépendance de leur pays et des Français qui les soutiennent.

Pas un moment donc, Jacques Tourtaux ne cédera, malgré tous les tentatives de «bourrage de crâne», malgré les pressions et chantages de toutes sortes, malgré les mises à l’écart, les brimades ouvertes ou camouflées des gradés, souvent «anciens d’Indochine», avides de prendre leur revanche sur un adversaire – pour eux, le même qu’au Vietnam – qui les avait victorieusement affrontés «là-bas» . Bien plus, dans ces dures conditions où il est noté comme une «forte tête» et en dépit du danger, il s’efforcera avec les pauvres moyens à sa disposition (parfois à l’aide de «papillons» fabriqués artisanalement) de faire entendre la voix des partisans de la paix, de la liberté, de l’entente fraternelle avec le peuple algérien.

Mais il y a aussi d’autres souffrances durement ressenties, celles particulièrement odieuses qu’impose la guerre coloniale aux hommes et aux femmes révoltés contre l’exploitation, l’injustice et le mépris dont Jacques Tourtaux est le témoin et qu’il ne pourra jamais oublier.

Les ratissages sanglants de douars, les gourbis incendiés, les exécutions sommaires de combattants et de civils, les tortures et les viols. Tout cela est encore présent dans sa mémoire et toujours aussi durement ressenti. Il le dit avec force et émotion :

«Depuis mon retour d’Algérie, j’ai toujours souffert, sans savoir que je souffrais de là-bas. Plus de 40 ans après, je me réveille régulièrement en sursaut . Difficile de remonter la pente: sautes d’humeur, phobies, rendent souvent la vie difficilement supportable à mon entourage; Depuis de nombreuses années, mon sommeil est agité, troublé par des insomnies, cauchemars et anxiétés. Les troubles graves endurés encore aujourd’hui sont la conséquence directe des mauvais traitements subis et qui m’ont été infligés volontairement du fait de l’institution militaire lors de la guerre d’Algérie. Les vives et graves souffrances que j’ai subies à l’époque ont laissé des traces indélébiles et des blessures qui m’ont affecté toute ma vie et, encore aujourd’hui, je subis un très important sentiment de culpabilité du fait d’avoir vu des horreurs que je réprouvais….».

Avec beaucoup de modestie, Jacques Tourtaux présente son livre comme un témoignage. Mais, c’est beaucoup plus que cela.

Dans sa volontaire simplicité et sa totale vérité, c’est aussi un vibrant hommage à ces soldats anticolonialistes qui, après avoir milité clandestinement dans leur unité contre la guerre et pour faire prendre conscience à ceux qui les entouraient de son contenu pervers et criminel, n’ont pas hésité, le moment venu, à se dresser, souvent au péril de leur vie, pour barrer la route aux généraux factieux prêts à donner l’assaut à la République.

Avec juste raison, il pose cette question que les dirigeants en place ont le plus souvent volontairement oubliée : Que serait-il advenu si, en avril 1961, le contingent mobilisé en Algérie, avait suivi les officiers félons et leurs chefs?

Une question qui mérite toujours réflexion, ne serait-ce que pour aider les générations d’aujourd’hui à tirer les leçons de l’histoire et à rester vigilantes car les forces mauvaises du passé n’ont pas renoncé.

Henri ALLEG

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LE NIVEAU A BAISSE, YA KHO !

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SAMEDI CULTUREL DE ZAKAD N°32

16 août 2013

Je me fais tout petit devant El Khawarizmi

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Timbre à l’effigie de Mohamed Al-Khawarizmi, émis par l’URSS le 6 septembre 1983 à l’occasion de son 1200e anniversaire.

El Khawarizmi (783-850) est le père de l’algèbre et des mathématiques modernes. (Source : Wikipedia).

Le scandale de la dernière cession du baccalauréat a braqué les projecteurs sur la tricherie aux examens.

Par la suite, il a été révélé que ces tricheries se faisaient depuis bien longtemps et pas seulement au baccalauréat.

Il a été révélé également que 30 % au moins des étudiants trichent aux examens.

C’est un chiffre effarant et l’on se demande quelles espèces d’avocats, d’architectes, d’ingénieurs ou de médecins notre pays possède ou possédera.

On le voit tous les jours dans les prétoires des tribunaux, dans la qualité des constructions ou dans les hôpitaux.

J’imagine cette scène dans 10 ans.

Un malade entre dans le cabinet d’un médecin.

Docteur, j’ai mal à la gorge.

Le médecin jette un coup d’œil furtif sur sa manche et lit: paralgan, gargarisme, repos.

Il feint d’ausculter le malade et lui dit:

Prenez du paralgan, faites des gargarismes et reposez-vous.

Ainsi seront nos scientifiques et les hommes de l’art si on n’y prend pas garde en laissant la morale aller à la dériv!

Et à propos de morale, je vous livre cette pensée d’El Khawarizmi, le père de l’algèbre:

  • un homme de morale = 1

    un homme qui est beau = 10

    un homme riche = 100

    un homme de pouvoir = 1000.

    Cependant, si on enlève le 1 au 10, cela donne 0, si on enlève le 1 au 100 et au 1000 ça donne toujours zéro.
  • Moralité: l’homme sans morale = 0.

    Ce qui montre que la morale est ce qu’a l’homme de plus précieux faute de quoi il perd son côté humain et devient une bête féroce sans foi ni loi ni règle de conduite.

Abderrahmane Zakad

Urbaniste-romancier.


AFFAIRE KHELLIL: UNE AGRESSION CONTRE L’ALGÉRIE

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Redouane Mimouni

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jeudi 15 août 2013

Le lancement, plus que tardif, du mandat d’arrêt international contre Chakib Khellil, ancien ministre de l’Energie et patron de Sonatrach, et quelques uns de ses complices, pour corruption, apparait comme une mauvaise scène d’une tragique comédie. C’est une nouvelle humiliation, une humiliation de trop pour le peuple algérien.

Khellil devrait être en prison en Algérie, depuis des années, pour trahison, vols et corruption.

Cet agent des USA, et pas seulement citoyen de ce pays, a même réussi à faire voter une loi portant dénationalisation des hydrocarbures, avec le soutien des plus hautes autorités du pays, l’approbation de l’Assemblée populaire nationale et du Sénat, des partis politiques de la coalition présidentielle, FLN, RND et HAMAS et même de la direction de l‘UGTA et le silence de la plupart des partis politiques et organes de presse dits indépendants. L’histoire retiendra le nom de chacun de ceux qui se sont couchés devant les intérêts étrangers, notamment américains.

Elle retiendra aussi le nom de chacun de ceux qui se sont dressés, debout, pour défendre les intérêts vitaux de l’Algérie et de son peuple et faire abroger la loi de la trahison.

La question n’est pas seulement de connaitre combien Khellil et ses complices ont mis dans leurs poches. Ce sont certes des sommes colossales, mais elles ne sont rien devant ce que notre pays a perdu et les préjudices causés à son économie.

La justice doit faire évaluer impérativement le prix du sabotage de l’économie nationale, car il ne s’agit pas, seulement, d’une simple affaire de droit commun.

Il faudra impérativement que la justice clarifie un point crucial;

pourquoi Khellil n’est pas derrière les barreaux?

Qui l’a protégé lui et ses complices?

Qui lui a permis de fuir ?

Le peuple réclame qu’on lui rende des comptes, tous les comptes.

Justement, puisque nous sommes à quelques mois de l’élection présidentielle, il serait intéressant de faire passer chaque candidat au scanner de la transparence: quels intérêts va-t-il défendre: ceux de la majorité du peuple ou ceux d’une minorité de nantis, ceux de l’Algérie ou des multinationales et des puissances étrangères?

Quelle a été l’attitude de chaque candidat, de son parti et ses soutiens, dans l’affaire Khellil, du début à la fin?

Peut-être pourrons-nous nous faire une idée des intérêts en jeu !

Redouane Mimouni

Alger, le 15 août 2013

21 AOÛT 2013: RENCONTRE A AKBOU (ALGÉRIE)

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première date de publication: 26 juillet 2013

Un groupe de militants de France-El Djazaïr comprenant René BARD, Bernard DESCHAMPS, Saïd MEZGHENA et Julien RODRIGUEZ, sera dans la Vallée de La Soummam du 19 au 22 août.

Ils se recueilleront dans plusieurs lieux de mémoire et participeront aux cérémonies de la Journée du Moudjahid.

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Le mercredi 21 août aura lieu à la Salle des délibérations de la Mairie d’Akbou une rencontre des anciens mineurs algériens des Cévennes, de leur famille et de leurs amis, organisée par l’association MED-ACTION.

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À cette occasion je présenterai ma conférence, illustrée de projections de photos:

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« LES MINEURS

ALGERIENS

DES CEVENNES

DANS LE COMBAT HÉROÏQUE

POUR L’INDEPENDANCE

DE L’ALGÉRIE. »

Dessin de André Balme

Peinture de Etienne Ecuvillon

LA TRILOGIE DE JACQUES GALLAND

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Un grand merci au visiteur de socialgerie pour avoir envoyé cette présentation et des extraits de Forum, qui nous remettent en mémoire les excellents ouvrages de Jean Galland.

Précédemment, socialgerie avait consacré plusieurs de ses articles à faire connaître ces témoignages de notre regretté camarade et de sa courageuse famille.


Le site de J. Jacques Galland – présentation;


«EN ALGÉRIE DU TEMPS DE LA FRANCE» 1950-1955;


LA TÊTE ICI, LE CŒUR LÀ-BAS – Guerre d’Algérie (1954-1962) – Préface de Sadeq HADJERES;


L’INDÉPENDANCE UN COMBAT QUI CONTINUE – Algérie 1962-1974 – Préface de Arezki METREF;


Préface de Sadeq HADJERES au livre “LA TÊTE ICI, LE CŒUR LÀ-BAS” – Guerre d’Algérie (1954-1962);


Références sur socialgerie



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En Algérie, du temps de la France

La tête ici, le cœur là-bas

L’indépendance, un combat qui continue


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LES INTENTIONS DE L’AUTEUR:

Mon grand-père maternel est mort de la guerre de 1914-1918. Mon oncle paternel est mort à la guerre 1914-1918.

J’ai voulu avec ces livres parler de l’engagement de ceux qui se sont opposés à la guerre coloniale d’Algérie,

  • Avant qu’elle n’éclate

    en luttant contre le régime colonial et en proposant que de nouveaux rapports «dignes de notre temps» s’établissent entre la France et l’Algérie,
  • Après le 1er Novembre 1954

    en faisant tout leur possible au gré des circonstances pour promouvoir l’idée de l’indépendance de l’Algérie et pour avancer vers la paix.

Depuis des années dans d’autres ouvrages c’est surtout la guerre que l’on raconte. Moi je dis le courage, l’abnégation, le cœur, la valeur de ceux qui patiemment, obstinément ont recherché la paix et la fin du colonialisme en Algérie.

Je raconte souvent ce que personne d’autre n’aurait pu raconter faute de l’avoir vécu comme ce fut mon cas; par exemple cette nuit chez moi à Akerrou, en Juin 1954 avec le futur colonel Ouamrane ou bien le 1er Novembre 1954 passé en compagnie de Bachir HADJ ALI, secrétaire du PCA, au pied du Djurdjura.


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Trois livres peuvent être commandés

ensemble ou séparément

à la famille de l’auteur:

Famille de Jean GALLAND

La Hardellière

37320 ESVRES

  • EN ALGÉRIE du temps de la France – 23,00 €*
  • LA TÊTE ICI, LE CŒUR LÀ-BAS – 24,50 €*
  • L’INDÉPENDANCE UN COMBAT QUI CONTINUE – 25,00 €*

(* frais de port compris

règlement à la commande, par chèque de préférence)
[[Tous les tomes sont disponibles et peuvent être commandés à l’adresse indiquée : excepté le tome 2 : « La tête ici le cœur là-bas » pour lequel il ne reste que 2 exemplaires – correspondance du 19 juillet 2013-]]

haut


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«EN ALGÉRIE DU TEMPS DE LA FRANCE» 1950-1955

Jean Galland

Tiresias – juillet 1998

ISBN : 2-908527-60-X

EAN : 9782908527605

Broché, 392 pages

Cet ouvrage a été qualifié par Henri ALLEG de «témoignage généreux, sérieux, lucide et rare». Comment dire mieux ?

Dans leur immense majorité, ses lecteurs ont confirmé ce jugement.

À cette époque en quittant le Berry pour aller enseigner en Algérie, on imagine qu’on trouvera outre-Méditerranée une autre province française comme l’Auvergne, la Bretagne, l’Aquitaine … Hélas, en arrivant tout est à revoir! Jean-Jacques, jeune instituteur, réalise durant six mois cette expérience à Messaad une oasis aux environs de Djelfa et Laghouat mais surtout durant trois ans, à Tabarourt, Akerrou et Tizi-Rached dans la région de Tizi-Ouzou.

À Messaad avec ses collègues André et Guy il est agressé par l’“Administration des Territoires militaires du Sud” pour avoir fondé ses comportements dans sa vie quotidienne sur Liberté, Egalité, Fraternité.

En Kabylie, il en sera de même sous des formes différentes du fait qu’il lutte avec la population en faveur de la scolarisation, pour les droits civiques et contre la répression policière et militaire à partir du 1er Novembre 1954.

Il sera le premier Français interdit de séjour en Algérie en Avril 1955.

400 pages. Des photos, des cartes, des documents. Des portraits dessinés par Jean TORTON.

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DES APPRÉCIATIONS DE LECTEURS

sur « EN ALGÉRIE DU TEMPS DE LA FRANCE»

• Lecteurs d’Algérie

• Lecteurs de France

->http://jjgalland.free.fr/appreciations_algerie.php?actflag=2]

LECTEURS D’ALGÉRIE

de « En Algérie du temps de la France »

A.M.Journal « LIBERTÉ »

Ce témoignage est essentiel pour la compréhension des « évènements d’Algérie » … Il en émane une sincérité très convaincante … Sans paternalisme, sans aucune concession à l’exotisme J.G. raconte simplement ce qu’il a vu, ce qu’il a fait, ce qu’il a ressenti.

C.A.Professeur de collège

À propos de ton livre j’entends parler d’émotion, de passages poignants. Il y a eu des larmes, des vraies, à la lecture de ce qu’ont subi un père ou un frère disparu dans cette tourmente.

D.B.Haut fonctionnaire de l’Ed. Nat.

Avec ce livre vous entrez de plain pied dans la littérature algérienne d’expression française. Certains passages ont leur place dans nos manuels scolaires.

H.S.Responsable du PCA clandestin durant la Révolution

Je te suis reconnaissant de faire revivre ces luttes méritoires. Voilà des enseignements utiles pour aujourd’hui et pour demain.

K. MA.Fils du chahid Si Areski el Ouattani

Soyez remercié d’avoir parlé de nos combats pour la liberté, pour que les hommes vivent fraternellement, dans la paix et la prospérité.

L. M.Avocat

Quelle fresque magnifique sur les années coloniales de 1950 à 1955. Qui d’autre a déjà fait cela?

M. S.Inspecteur de l’Ed. Nat.

Toute la famille l’a lu avec énormément de plaisir. J’en suis à 120 pages et je n’attends pas pour te dire que je me délecte.

O. B. Editeur

Je puise dans ce livre de nombreuses références et réflexions qui nous font tellement défaut actuellement.

S. S. H.Ex-préfet, ex-ministre

Tu as su raconter avec talent une période décisive de l’Algérie.

LECTEURS DE FRANCE

de « En Algérie du temps de la France »

C. G.Enseignant

Malgré la brièveté de votre séjour vous avez réussi à comprendre ce pays, mon pays depuis trois générations.

Ch. R.Ex-enseignant en Algérie

Je souhaite le succès à votre livre si utile pour comprendre le quotidien des enseignants à cette époque.

C. J.Insoumis

Ton récit dévoile ce que fut la colonisation, sa mystification des «départements français».

D. H.Ex-enseignant et militant en Algérie

Quelle émotion grand frère. Ta généreuse mémoire me confond. Tu as bien travaillé. Je t’embrasse.

F. N.Déserteur

Ton livre nous fait très bien comprendre pourquoi ce qui a suivi était inéluctable. Je suis d’accord sur tout.

F. J. – Ex-enseignant en Algérie

Tu sais nous montrer le vrai visage de la colonisation son mépris de la population algérienne sauf lorsqu’elle avait besoin de soldats et de main-d’œuvre à bon marché.

H. G.Directeur de revue littéraire

Beauté des lieux, des décors; justesse des expressions; musique et parfums des voix dont maintes se sont tues; élans d’idéalisme aux bras tendus; pleurs et cris mal contenus contre l’ignominie des injustices et des crimes impunis: on ne peut pas se libérer du constant envoûtement des récits.

L. J.Ex-enseignant en Algérie

Ce livre est pour moi le meilleur «portrait» d’une époque détestable.

M. M.Proviseur retraité

Vous nous faites connaître de l’intérieur le fonctionnement du PCA ce qui est extrêmement précieux.

H.D.Professeur de lycée

Il fallait avoir le courage de dire ce qui touche au plus profond de l’être.

P. L. – Ex-directeur de l’E. N. de Bouzaréa

J’ai apprécié votre livre si mesuré dans sa rédaction mais si riche de qualités humaines, si précis, si transparent …

P. A.Ex-instituteur à Akerrou dans les années 1940

J’ai passé avec ce livre des heures délicieuses.

R.M.Historienne

Votre livre rend maintenant compréhensible le rôle du PCA autour du 1er Janvier 1954

S.A. – Étudiant en Histoire

Quel préjudice si ce témoignage n’avait pas été écrit !

S. W. – Militant héritier du PCA

Ton livre est un apport précieux pour la connaissance de l’histoire de notre parti … Il m’a appris de nombreux faits sur les luttes de nos militants dans les régions où tu as enseigné … Il va transmettre aux jeunes générations de véritables explications sur les mobiles et les méfaits de la colonisation française en Algérie.

V. R.Ex-universitaire en Algérie

Vos citations de nos grands auteurs du XIXème concernant la colonisation m’étaient totalement inconnues.

V. D.Natif d’Algérie

Vous me révélez une Algérie que je ne connaissais pas ou très mal. C’est si vivant, si riche.

sur le Web:

  • Sur les années 1950 en terre algérienne qui alors était considérée comme territoire français, peu de choses furent écrites. Quand je dis peu, je devrais écrire, rien. Or, ici l’auteur, premier expulsé d’urgence en raison de la loi sur l’Etat d’urgence, nous donne une vision et un apport historique de première main sur cette période.

    Jean Galland, pour mieux nous faire entrer dans l’événement et pour mieux nous faire comprendre ou nous informer, devient Jean-Jacques, personnage clé de cette terrible époque, porteuse de la genèse de ce que deviendra la tragédie algérienne, dont nombre d’entre nous ne se sont toujours point remis d’en avoir été acteur ou spectateur.

    Cette histoire n’appartient pas aux calendes grecques, elle débute dans un hier très proche, dans ces années 1950 et de Toussaint rouge.

    Nous voyons au travers de ce parcours que se dessine la préfiguration d’un avenir noir; cette guerre d’Algérie.

    Cette infamie blessera toujours la mémoire et l’avenir de ce peuple, mais aussi de toute une génération d’appelés et de ceux, anonymes êtres sans grade, nés sur cette terre qu’ils chérissaient passionnément et qu’ils perdront. Camus parla de sa mère en définissant l’injustice ressentie.

    Jean-Jacques, lui, parle de l’injustice faite au peuple algérien et surtout nous apporte la lumière sur la façon d’agir de l’Administration française.

    L’auteur ne fait pas le tri entre le grain et l’ivraie. Il raconte humblement, avec simplicité, avec sincérité, dans une abondance de citations, de lieux, de détails et de situations: son histoire d’instituteur fraîchement débarqué avec sa famille, son engagement politique, sa vision du citoyen et sa volonté d’être actif dans la cité de l’homme.

    Ce témoignage, œuvre de mémoire, est essentiel pour la compréhension de ce que furent appelés ignominieusement les événements d’Algérie.

    À lire pour que le livre reste notre liberté et la vertu de notre démocratie.

    http://www.decitre.fr/livres/en-algerie-9782908527605.html
  • http://www.gibertjoseph.com/en-algerie-du-temps-de-la-france-1950-1955-650927.html
  • http://www.editionstiresias.com/index.php

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LA TÊTE ICI, LE CŒUR LÀ-BAS

Guerre d’Algérie (1954-1962)

Préface de Sadeq HADJERES

Auteur : Jean Galland

Editeur : Tiresias

Date de parution : 11/06/2002

EAN13 : 9782908527933

en français

372 pages

« …double chronique aux pages croisées mêlant le tragique algérien à des images savoureuses de l’ethnographie du peuple berrichon … le lien entre l’expérience personnelle de l’auteur et la lutte d’ensemble a une valeur pédagogique, une vertu d’éclairage historique… »

René Justrabo

ex-maire de Sidi-bel-Abbès

ex délégué PCA à l’Assemblée algérienne

C’est la guerre pour le maintien en Algérie du fait colonial. Chassé d’Algérie Jean-Jacques a obtenu d’être nommé dans son département : le Cher.

«Le cœur là-bas» il n’a pas cessé depuis son retour en France de militer pour la paix, corollaire de la reconnaissance du droit à l’indépendance du peuple algérien.

Les cercueils des jeunes tués dans les djebels arrivent toujours plus nombreux d’année en année. À partir des faits de sa vie quotidienne, de sa vie familiale, Jean-Jacques montre comment la sale guerre pèse de plus en plus sur les consciences.

Mais le conditionnement des esprits est profond. Cependant, même dans l’armée, des oppositions s’expriment jusqu’au refus du contingent de cautionner le putsch des généraux et les plans criminels de l’OAS.

Jour après jour, la volonté de paix et l’accord pour l’indépendance se manifestent, cela dans les milieux sociaux les plus divers; jusqu’à l’obligation pour le pouvoir de négocier à Evian.

Le livre est enrichi de poèmes de Boualem KHALFA et de Bachir HADJ ALI, entre autres.

370 pages. Des photos, des portraits dessinés par Jean TORTON.

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DES APPRÉCIATIONS DE LECTEURS

sur « La tête ici, le cœur là-bas »

Lecteurs de France

Lecteurs d’Algérie

->http://jjgalland.free.fr/appreciations_tete.php?actflag=3]

LECTEURS D’ALGÉRIE

de « La tête ici, le cœur là-bas »

H. S. : Préfacier du livre, responsable du PCA clandestin pendant la guerre

L’ouvrage tient à la fois de l’autobiographie et du grand reportage… Les récits se relaient en contrepoint d’une rive à l’autre de la Méditerranée…

L’auteur a eu le privilège assez rare de vivre ces épisodes intensément comme acteur-observateur… Je lui suis reconnaissant de n’avoir pas triché avec les réalités de mon pays… Ce livre arrive à point aujourd’hui pour élever la vigilance critique des deux pays.

K. Dj. – Opticien

Mon père est mort dans cette sale guerre et je vous suis reconnaissant pour ce que vous en dites, pour votre combat; ma yewghe Rebbi.

K. Mo. –

Merci d’avoir écrit ce livre à la mémoire de nos héros tombés pour l’indépendance.

M. E. – Militant nationaliste

Les authentiques combattants vous rendent hommage.

M. A. – Administrateur mutualiste

Bravo et encore bravo ! Quelle émotion d’entendre citer les noms de ceux avec qui nous avons milité et combattu.

S. Z. – Etudiante

J’ai été très heureuse que vous évoquiez la maison kabyle traditionnelle en terme de patrimoine culturel à préserver.

Z. M. S. – Journaliste retraité

En Kabylie on parle avec fierté et émotion des écrits que vous avez consacrés à notre région et à ses hommes.

LECTEURS DE FRANCE

de « La tête ici, le cœur là-bas »

A. H. – Journaliste

Autour de moi on ne dit que du bien de votre livre du fait qu’on y retrouve vraiment l’Algérie.

A. G. Ex-déporté en Allemagne

Tu accomplis le devoir de mémoire pour dire ce que tant d’autres s’acharnent à faire oublier.

B. M.Enseignant syndicaliste

Je diffuse ton livre, mais surtout ne me remercie pas !

B. J. – Ex-enseignante en Algérie

Ce livre est maintenant pour moi un compagnon extraordinaire.

D. J.Enseignante-poètesse

C’est un témoignage intègre et combien instructif.

D. F.Notaire

Ce livre m’a passionné dès les premières pages.

F. P.Conseiller régional

Comme militaire je me suis battu contre la guerre d’Algérie. Alors bravo pour tes témoignages.

H. B. – Conseiller général

C’est bien d’avoir eu le courage d’écrire cela. Il y en a tellement qui en souffrent encore aujourd’hui.

J. Am.Militante humanitaire

Vous savez très bien nous faire entrer dans le vif du sujet. Un grand merci!

L. J.Ex-Français d’Algérie

Je suis admiratif de la continuité, de la fidélité de vos observations… Vos écrits révèlent combien cette sale guerre a généré de malfaisances.

Cordiales gratitudes.

M. Ph.Ex-enseignant

Quel antidote contre la propagande officielle, le bourrage de crâne dont nous avons été victimes… On ne peut inventer cela; c’est irremplaçable.

N. O. Ex-enseignant

La pacification ! Quel mensonge ! Quelle hypocrisie.

P. P.Ex-Français d’Algérie

Quelle émotion à parcourir ces pages pleines d’humanité, de vérités que je ne connaissais pas!

R. J.Enseignante

L’humanisme, le respect de l’autre, l’amour de l’autre, sont des valeurs qui me portent également.

R. M. – Historienne

Votre récit centré sur le milieu enseignant et la société communiste des années algériennes est pertinent. Votre manière d’intercaler des épisodes français et algériens est très judicieuse.

sur le Web:

  • http://livre.fnac.com/a1335506/J-Galland-La-tete-ici-le-coeur-la-bas

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L’INDÉPENDANCE UN COMBAT QUI CONTINUE

Algérie 1962-1974

Préface de Arezki METREF

Jean Galland

Préface de Arezki Metref

EDITEUR : Tirésias

janvier 2008

ISBN : 978-2-915293-41-8

EAN : 9782915293418

Broché

367 pages

1962 – La guerre a pris fin avec les Accords d’Evian et le cessez-le-feu du 19 mars. Dans les mois qui ont suivi, l’OAS a tenté, sans succès mais non sans de nombreux crimes, de dresser l’une contre l’autre les deux communautés.

Durant le 4ème trimestre de l’année, Jean-Jacques et Jeannette ont décidé de répondre positivement aux appels des gouvernements français et algériens pour que des enseignants français viennent aider en Coopération la jeune République algérienne.

Après un réveillon de Noël mémorable en Berry, ils reprennent la route de l’Algérie avec leurs cinq enfants.

1963 – En dépit d’entraves multiples, Jean-Jacques s’installe avec sa famille en Kabylie d’où il avait été chassé en avril 1955. À peine a-t-il trouvé un emploi de formateur répondant à ses aspirations que le gouvernement français organise un complot en vue d’annuler les contrats des coopérants s’étant manifestés dans le passé en faveur de l’Indépendance. Grâce à la protestation des enseignants et des élus algériens soutenus par Alger-Républicain, le complot échoue!

Jean-Jacques poursuivra donc, non sans aléas, jusqu’en 1974, la période la plus exaltante de sa vie d’enseignant et de militant anticolonialiste …

367 pages. Des photos, des documents.

Liens sur le Web

  • En débarquant à Alger en 1830, les Français ont fait de l’Algérie (la Régence) un territoire de guerre (Dar-El-H’arb) où tout Musulman avait pour devoir de combattre l’étranger infidèle.

    Bugeaud a reconnu « l’ascendant surnaturel qu’Abd-El-Kader a su exercer sur ses concitoyens en prenant la tête de ce combat ».

    Le maréchal Soult a écrit du chef algérien « qu’il a donné à son pays et à sa population une sorte d’unité nationale, qu’il a créé entre les tribus un lien de solidarité administrative, qu’il les a habitués à une obéissance à l’autorité centrale et a inauguré la perception des impôts, la justice et l’enseignement ».

    Durant les dix-sept années qu’a duré, sous Abd-El-Kader, la résistance à la conquête, il est apparu que l’Algérie était en voie de devenir un Etat moderne que la colonisation a proscrit jusqu’en 1962.

    L’INDEPENDANCE, UN COMBAT QUI CONTINUE” raconte, à travers ce qu’en a connu l’auteur, les premiers pas du nouvel Etat algérien issu de l’insurrection déclenchée le 1er novembre 1954;

    premiers pas entravés par l’héritage frelaté de la colonisation, par les bouleversements subis par la société et les individus depuis 1830, par les obstacles semés par l’ex-colonisateur, par les pressions impérialistes à l’encontre du projet d’instaurer une République Algérienne Démocratique et Populaire!

    L’auteur, expulsé d’Algérie en avril 1955 pour son engagement contre la répression y est revenu en coopération de 1962 à 1974.


    http://www.decitre.fr/livres/l-independance-un-combat-qui-continue-9782915293418.html
  • L’ouvrage raconte, à travers ce qu’en a connu l’auteur, les premiers pas du nouvel Etat algérien issu de l’insurrection déclenchée le 1er novembre 1954; premiers pas entravés par l’héritage relaté de la colonisation, par les bouleversements subis par la société et les individus depuis 1830, par les obstacles semés par l’ex-colonisateur,par les pressions impérialistes à l’encontre du projet d’instaurer une République algérienne démocratique et populaire!

    Jean Galland est né en 1928 dans le Cher.

    En 1950, il part enseigner en Algérie, dans le Sud, puis en Kabylie. Il milite dans les rangs du PCA et subit la répression colonialiste.

    En 1955, il est le premier Français expulsé d’Algérie par Jacques Soustelle, après le vote de la loi sur l’Etat d’urgence.

    À Noël 1962, il retourne en Algérie exercer en coopération jusqu’en 1974.

    http://www.editionstiresias.com/

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Préface de Sadeq HADJERES

au livre “LA TÊTE ICI, LE CŒUR LÀ-BAS”

Guerre d’Algérie (1954-1962);

(deuxième tome de sa trilogie)

Lors du procès intenté au tortionnaire Aussaresses, l’un des témoins à décharge cités par sa défense a surpris l’assistance par une déclaration inattendue. Le témoin plus qu’octogénaire, n’avait probablement pas saisi ce qui était attendu de sa «mission». Il a livré ce qui méritait à ses yeux d’être retenu, après les perceptions chaotiques qui avaient marqué sa malheureuse guerre d’Algérie. «Moi, ce que j’en pense, a-t-il dit en substance, c’est que dès le début on aurait dû «leur donner» l’indépendance, au lieu d’attendre tout ce qui s’est passé pour le faire».

Pourquoi cette lueur de bon sens n’avait-elle pas prévalu à temps?

Telle est au premier abord la pensée lancinante qui envahit le lecteur, même déjà bien informé, de «La tête ici, le cœur là-bas».

Gâchis innommable que cette guerre d’Algérie, qui du côté français a attendu un demi-siècle pour trouver son nom, amputé néanmoins du qualificatif de « coloniale ». Mais y a-t-il des mots à la hauteur de ce qu’en furent les conséquences pour les deux peuples ? Durant sept ans ils ont payé, de façon asymétrique, les inconséquences et les calculs de décideurs agrippés à des illusions impériales aveugles ou intéressées.

Nous voilà à travers ces récits, sans anathèmes ni effets de langage, devant quelques aspects de ce qui a été vécu il y a plus de quatre décennies par les français et les Algériens, la guerre. Non pas la guerre des communiqués de presse ou d’états majors, ni celle des analyses politiques ou des proclamations s’y rapportant. Mais la vraie, non celle des seuls effectifs combattants, mais celle du plus grand nombre, trop souvent occultée par la description des affrontements sur le terrain et des exploits guerriers vrais ou faux. Guerre non moins hideuse dans ses effets massifs, baptisés collatéraux par euphémisme pervers. Celle dont on ne parle pas assez ou pas du tout, enfouie durablement ou pour toujours sous les remords et le sentiment de culpabilité des uns, la pudeur des souffrances silencieuses et indicibles des autres. Guerre dépouillée de l’argumentaire hypocrite des détenteurs de la plus grande puissance de feu au service des intérêts économiques usurpés, prolifique pourvoyeuse en deuils et tragédies dans les familles des deux bords. Guerre des angoisses collectives et individuelles, guerre du déni de la raison, des droits et des sentiments humains, guerre des logiques sordides et des ressorts inavoués. Tout cela s’imbrique au miroir rétrospectif tendu par l’auteur à la douloureuse période 54-62.

Structuré d’une façon originale, l’ouvrage aux facettes multiples tient à la fois de l’autobiographie et du grand reportage. Il alterne le vécu personnel avec les témoignages et les tableaux d’époque. Les récits se relaient en contrepoint entre les deux rives de la Méditerranée, dans une navette rythmée par les épisodes du conflit armé. L’auteur a eu le privilège, rare pour un acteur-observateur, de vivre ces épisodes intensément, de l’intérieur des deux peuples, comme instituteur français et militant communiste, d’abord en Algérie jusque dans les six premiers mois de l’insurrection (il y retournera pour quelques années après l’indépendance) puis en France durant le reste de la guerre.

Si la fresque trans-méditerranéenne est aussi dense et suggestive, si les récits donnent tant à réfléchir, souvent à travers des moments poignants, c’est que l’auteur a côtoyé et souvent partagé au quotidien les malheurs et les interrogations de divers milieux sociaux des deux pays projetés dans les affrontements destructeurs. De son double observatoire, il a eu à mesurer le gouffre sans fond des atteintes aux vies humaines; à la dignité des personnes et de leurs familles, l’érosion insidieuse ou l’affaissement brutal des valeurs respectables et des consciences.

La relation du drame avait été amorcée par l’auteur dans un précédent ouvrage (En Algérie au temps de la France). Il y relatait son itinéraire d’instituteur du bled algérien profond, arabophone puis berbérophone, jalonné par les déplacements forcés de poste qui venaient harceler et sanctionner un témoin gênant des mœurs de la colonisation. Sa seule présence était déjà insupportable aux yeux des gros colons et de la bureaucratie à leurs ordres, parce que «français de France», il faisait connaître aux «indigènes» trop de choses sur cette «civilisation» et ces valeurs universelles dont le système des «trois départements français» prétendait tirer sa justification. Son nom, comme celui de plusieurs autres de sa trempe, m’était connu car la presse de progrès (Alger républicain notamment) signalait fréquemment ses ennuis avec les hiérarchies administratives et policières coloniales.

C’est à cette époque, à mes 26 ans, médecin universitaire et praticien à El Harrach (Maison Carrée), que j’ai connu directement l’auteur et sa petite famille. Avec Bachir Hadj Ali, secrétaire du PCA, nous lui avions rendu visite à Tizi-Rached en Kabylie l’avant-dernier dimanche d’Octobre 54 (le week-end suivant, à la veille de la Toussaint, s’achèvera avec le déclenchement des actions insurrectionnelles). Nous avions alors apprécié son enracinement dans l’actualité nationale et locale. Lui-même et Si Rezqi, un de mes anciens compagnons du PPA (par l’intermédiaire de qui il avait eu quelques mois auparavant une discussion de fond avec Ouamrane, le futur colonel commandant la wilaya IV, qu’il a rapportée dans son précédent ouvrage) nous firent part du bouillonnement pré-insurrectionnel dans la région. Une semaine plus tard, Bachir était revenu aux nouvelles, et dans la nuit éclataient les premiers coups de feu.. Le tract du FLN du 1er Novembre appelant au soulèvement avait été imprimé au village d’Ighil Imoula, dans une zone voisine que sillonnaient habituellement nos camarades enseignants..

Dès lors, tandis que Bachir et moi-même étions au début de 1955 chargés par la direction du parti de constituer les CDL (formation armée qui rejoindra plus tard l’ALN), Galland et ses camarades de la région utiliseront les moindres possibilités d’une légalité réduite qui sera définitivement étouffée quelques mois plus tard. Ils vont sillonner les villages et les marchés pour soutenir le bien-fondé des aspirations nationales algériennes et dénoncer la répression massive à leur encontre..

En ce moment critique, les premières flammes d’un soulèvement géographiquement et politiquement limité étaient encore vacillantes et leur avenir incertain. Pour tenir, l’initiative du 1er Novembre sur laquelle de nombreux patriotes s’étaient d’abord interrogés dans le contexte d’une crise qui avait politiquement dérouté et divisé le MTLD, principale formation nationaliste, avait besoin dans tous les cas d’un soutien politique important.

Je me souviens des actions que l’instituteur a menées avec ses camarades enseignants ou traminots à la fin de l’hiver et au début du printemps 55 sur les marchés de Larbâa des Ouacifs et de Larbâa Nath Irathen (ex Fort National), militairement quadrillés par de forts contingents français. Elles lui valurent autant la sympathie et la complicité d’une population en quête d’indices d’espoir, que la fureur des autorités coloniales qui resserraient l’étau répressif. L’instituteur enveloppé de sa «qachabya» d’hiver y déployait déjà son style offensif habituel, ferme et sans arrogance ni esprit provocateur, aussi bien auprès de la population qu’envers les autorités, le même style qu’il déploiera plus tard en France dans sa lutte contre la guerre.

Ce style devait son efficacité à un secret qui en vérité n’en était pas un, mais demandait de sérieux efforts de compréhension et de l’abnégation. Il cherchait à agir au plus près des sentiments, des problèmes et des interrogations réelles et quotidiennes de ses concitoyens, tout en maintenant le cap sur un choix crucial: faire front à la logique de guerre, agir pour le respect des populations et avancer vers la seule paix possible fondée sur le droit des Algériens à leur indépendance

Plusieurs organes de la presse algérienne ont su gré à l’auteur de son précédent ouvrage. Je suis moi aussi reconnaissant à J.Galland de n’avoir pas, en tant que français et militant honnête, triché avec les réalités de mon pays. Appartenant à une génération active dans le mouvement national depuis 1943, j’ai apprécié le regard véridique qu’il transmet à nos jeunes sur ce que fut notre combat de tous les jours. Sa vision n’est pas réduite aux démarches des états-majors politiques ou à la logique globale de leurs mots d’ordre. Elle ne se traduit pas en images d’Epinal d’une Résistance à la James Bond, comme ont eu parfois tendance à le faire ceux qui n’ont pas vraiment saisi l’esprit de cette période, pourtant riche en valeureux exploits et coups d’éclat militaires. Il rend hommage au courage plus largement partagé et plus difficile des simples gens dont l’espace de vie et de travail est balayé par les feux croisés. Il cherche à amplifier l’héroïsme ordinaire, souvent plus lourd à porter, celui de la succession des luttes pénibles, complexes et non exemptes de contradictions, celui qui aide à supporter les humiliations, les revers et les sacrifices endurés sans contrepartie immédiate, qui soutient le moral quand le quotidien matériel des siens et de ses proches devient aléatoire sinon désespéré.

Ce fut le lot commun de la masse des gens; des élèves et parents d’élèves, citadins ou campagnards; tous ceux dont les instituteurs comme Galland et tant d’autres (si nombreux que je m’excuse de ne pouvoir citer tous ceux que j’ai connus) étaient quotidiennement proches, avec qui ils ont entretenu des rapports fraternels et ouvertement solidaires, qui ont honoré leur profession, le peuple français et leurs convictions militantes.

Les brûlantes années algériennes ont ainsi donné à Galland, expulsé des «trois départements français» dès 1955, une expérience de terrain et un sens plus aigu de l’humain. Ces qualités vont fructifier pour la même cause de la Paix, dans le terroir retrouvé de ses années de jeunesse.

L’enjeu global reste le même. Comme leurs autres concitoyens de France, mais avec leurs particularités, les habitants du département du Cher et de son Berry natal vont-ils percer le brouillard épais de la propagande officielle? Vont-ils mieux découvrir grâce à son action, à celle de ses camarades de parti et d’autres milieux progressistes diversifiés, cette Algérie rendue mystérieuse par les stéréotypes coloniaux, et ce pays de rebelles qui se renouvellent constamment alors qu’ils habitent, prétendait-on, un morceau de la France? Vers ce pays, sans fin, sont dirigés bon gré mal gré les appelés, contingent après contingent, fleur d’une jeunesse dont toujours plus nombreux au fil des ans reviendront dans des cercueils ou emmurés dans des silences et des comportements incompréhensibles à leurs proches.

Pour l’instituteur et ses camarades ouvriers, agriculteurs, militants syndicaux, commerçants, jeunes sportifs, croyants et non croyants, parents, mères, épouses et fiancées des soldats partis au loin, il devient capital de faire parler les gens de ce qui leur pèse, les écartèle et dont ils n’osent faire part. Il urge d’engager et imposer le débat sur une aventure coupable à grande échelle, que les responsables voudraient laisser se poursuivre derrière la tromperie des slogans d’une France pacificatrice et généreuse.

L’intérêt actuel de ce deuxième ouvrage réside dans ce qu’il apporte au delà du constat rétrospectif et de la dénonciation du désastre humain et matériel. On s’en rend mieux compte aujourd’hui, les dégâts n’ont pas été seulement ceux, humains et matériels considérables, de la guerre atroce proprement dite. Ils ont pesé comme une malédiction sur les décennies suivantes, imprégnant profondément les relations, les comportements, les mentalités.

Des deux côtés de la Méditerranée, à des degrés divers et même dans les esprits les plus disposés à comprendre ce qui, sous une forme ou une autre, ne sera jamais oublié, la guerre a laissé des rancœurs, des approches et des réflexes racistes ou irrationnels. Pour l’instant, chacun ne sait encore quand, comment et si même ces sentiments seront dépassés pour laisser une plus grande place aux évaluations d’intérêt commun, aux faits de solidarité, aux tentatives et aux élans constructifs, aux manifestations d’amitié émouvantes qu’a suscitées, à contre-courant, dans mon pays comme en France, la tragédie algérienne de cent trente deux ans.

L’ouvrage de J. J. Galland nous est livré précisément à un moment opportun et sensible d’un débat franco-algérien complexe, souvent biaisé par les passions et les intérêts occultes. Les échos de cette guerre, pourtant éloignée de près d’un demi-siècle, sont relancés et amplifiés par des données géopolitiques et des données socio-économiques à la fois anciennes et renouvelées, qui pèsent sur le présent des deux peuples.

Entre les deux nations, comme au sein de chacune d’elles, les inégalités économiques et sociales, les préoccupations d’une insécurité envahissante, les heurts sous couverture «identitaire» et culturelle, aiguisent au Nord comme au Sud les méfiances réciproques.

Cela touche aussi bien les générations qui ont vécu la guerre de sept ans que les plus jeunes qui se retrouvent face à des problèmes et des perspectives (ou absence de perspectives) inquiétantes. La tentation est grande pour les uns et les autres de céder encore une fois aux sirènes des «solutions» dans lesquelles la force des armes, le chantage et les pressions multiformes priment le Droit et la justice.

En quoi la rétrospective de «La tête ici, le cœur là-bas» peut-elle contribuer à exorciser les démons, malgré la différence des deux situations et des deux époques? Sans aucun doute en éveillant le besoin d’une connaissance plus vivante et convaincante des mécanismes qui, aujourd’hui comme hier, dans les conflits internationaux ou internes, peuvent faire glisser des collectivités et des bases sociales entières, des cercles politiques et des milieux gouvernants, vers des positions ou des actions qui se situent à l’opposé aussi bien de leurs meilleures intentions, réelles ou déclarées, que de leurs intérêts bien compris sur le proche et long terme.

La leçon de la guerre d’Algérie est que les contradictions d’intérêts et d’opinions sont certes inévitables, mais il n’est pas fatal de les laisser dégénérer en chocs ravageurs. Peut-on attendre de milieux politiques ou d’affaires et de gouvernements liés à des intérêts hégémonistes, d’être conséquents jusqu’au bout avec cet enseignement? Rien n’est moins sûr.

Aux peuples d’abord, aux acteurs honnêtes et de bonne volonté, d’apprendre à déjouer les dangers dont ils sont les premiers à faire les frais. À eux de connaître et mieux maîtriser les enchaînements sournois qui mènent aux pièges meurtriers. Faute de quoi, les bilans marqués au coin du bon sens le mieux partagé continueront à arriver trop tard.

D’où l’intérêt de l’expérience passée pour ceux qui souhaitent le rapprochement et l’amitié entre deux peuples dont les intérêts et les affinités ont été tissés par une Histoire conflictuelle.

L’entreprise de réconciliation historique ne s’accommode ni des anathèmes ni de l’angélisme feint ou sincère, propices à la confusion et nuisibles à l’objectif souhaité. Nous en avons eu quelques exemples dans l’après guerre, dont le plus lamentable dans les années 80, lorsque les cercles des Présidents Chadli Benjedid et Mitterand ont initié une campagne médiatique visant à ouvrir la voie à une visite «amicale» de Bigeard en Algérie. Quel ambassadeur! Moins grotesque, plus proche des sensibilités d’une partie de la population, la tentative de Bouteflika de faire venir Enrico Macias pour une tournée algérienne a fait long feu. Le point commun de tous ces projets avortés est que, montés avec des préoccupations politiciennes de court terme, ils font fi du mûrissement nécessaire des opinions dans un esprit de vérité historique et d’ouverture, autrement dit de justice et de pardon (et non d’oubli). Les appareils de pouvoir qui pour des raisons conjoncturelles improvisent ces opérations, qu’ont-ils fait jusque là pour faire mûrir les esprits et les cœurs à des coopérations réelles et mutuellement avantageuses? Il arrive même qu’ils encouragent ou suscitent en telle ou telle occasion des campagnes de découvertes de charniers ou de rappels d’atrocités, des courants qui prêchent l’intolérance et l’incompatibilité entre les cultures, etc

C’est dire à quel point est bienvenu dans les conditions d’aujourd’hui tout effort qui vise à élever la vigilance critique et massive de l’opinion des deux pays. C’est, me semble-t-il, ce que fait avec bonheur et honnêteté en direction de l’opinion française, ce récit d’un engagement partisan et unitaire. Il ouvre un peu plus le débat sur les souhaitables convergences entre les courants qui font de la solution pacifique et démocratique des problèmes leur préoccupation, au-delà des différences politiques et idéologiques.

Venant d’un démocrate français, cette démonstration d’ouverture et de solidarité ne peut qu’encourager les efforts similaires du côté algérien, en ces temps de nouveaux gâchis et de conflits envenimés par les préjugés identitaires volontairement exacerbés.. Les Algériens ont eux aussi tout à gagner à relever et analyser les orientations et les méthodes qui de notre côté ont porté tort aux deux peuples dans l’intérêt commun qu’ils avaient à la paix, à l’indépendance et à une coopération amicale. Ce vaste chantier du regard sur soi-même ne remet pas en cause le bien fondé et le caractère incontournable de la lutte de mon peuple pour son indépendance, y compris par la voie armée face à l’intransigeance coloniale. Il est de nature à mettre à nu les dérives à différentes étapes, notamment durant la guerre, qui ont fini par porter tort à l’Algérie indépendante, en développant dans plusieurs milieux un culte de la violence armée au détriment de la culture démocratique; de la culture politique et de la culture tout court.

Au Nord comme au Sud de la Méditerranée, il reste beaucoup à faire pour démystifier et désamorcer la «guerre des civilisations», que les artisans d’une cynique «real-politik» prônent comme la seule alternative face aux utopies pacifistes. On est tenté de dire à ces va-t-en guerre: voyez plutôt votre bilan et les fruits amers de vos politiques d’affrontement, qui n’ont pour avenir que l’escalade du pire.

Réhabilitons la coopération des valeurs et des cultures, Des «passeurs» comme l’auteur de l’ouvrage en préfigurent, par leur courageuse pratique, la possibilité et la fécondité.

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références sur socialgerie:


[HOMMAGE ALGÉRIEN AU CAMARADE FRANÇAIS DISPARU –
Il y a un an, Jean-Jacques GALLAND… le Berrichon kabyle!
évoqué par S.Y. – LIBERTÉ, – 1er Février 2010;->165]

« Liberté » du 1er Février a rendu compte de l’hommage émouvant rendu à Tizi-Ouzou à celui que ses proches camarades de combat appelaient en le plaisantant « le Berrichon kabyle ». Une façon de rappeler à quel point par son action dans les moments les plus difficiles, il incarnait en lui les vertus révolutionnaires des deux peuples, algérien et français. Que nos pensées aillent aussi en cet anniversaire à sa nombreuse et sympathique famille qui a partagé activement avec lui, dans l’honneur et la dignité, aussi bien les souffrances et les lourdes contraintes que les sentiments d’amitié profonde entre peuples et travailleurs algériens et français.

“Dans notre cœur et notre esprit, tu vis et vivras toujours Jean-Jacques, non pas seulement en ami de l’Algérie mais en frère de tous les Algériens, en héros des causes justes” , lui disent, comme hommage et reconnaissance, dans un document, un groupe de ses amis et camarades “de jadis et de toujours” dans la région de Tizi Ouzou, en “souvenir de celles et de ceux qui t’ont connu combattant, de saine idéologie et que ton départ a laissés orphelins!” soulignent-ils en conclusion.


Préface Sadek Hadjerès au livre de J. Galland: « La tête ici, le cœur là-bas » (RTF – 54.7 ko)


Socialgerie avait aussi évoqué J.J. Falland dans un article et documents extraits de son livre « En Algérie du temps de la France » :

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EN QUOI Henri ALLEG EST-IL PRÉCIEUX AUX NOUVELLES GÉNÉRATIONS?

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par Sadek Hadjerès

le 27 juillet 2013

Figure respectée du mouvement national et du journalisme algérien, personnalité de notoriété internationale, Henri ALLEG nous a quittés après une vie bien remplie de combattant tenace, exemplaire d’intelligence et de générosité. Comme ses enfants, sa famille, ses innombrables amis, nous ne serons plus sous le charme de sa silhouette souriante et bonhomme de « little big man », sincère et direct, au regard malicieux derrière ses lunettes cerclées ; plein d’allant et d’énergie, d’humour et du sens de la dérision, irradiant la sympathie autour de lui. Malgré l’inexorable fait accompli biologique, il est encore parmi nous, dans les esprits et les cœurs, par la qualité et l’envergure de son parcours.

Chacun l’a exprimé à sa façon. Une ancienne militante aux convictions laïques m’écrit en réprimant à peine un vœu irréaliste: « des gens comme lui ne devraient pas mourir ! ». Des citoyens en nombre le tiennent pour un des leurs et l’expriment sur le registre religieux: « Allah irahmou, que Dieu le tienne en sa miséricorde ». En France, son témoignage « La Question », avait en son temps et jusqu’à aujourd’hui suscité l’émotion et de fortes solidarités dans un éventail diversifié d’opinions. Chez tous, c’est l’admiration envers le courage physique et moral mais aussi et surtout politique.

L’homme qui a vaincu les tortionnaires

L’émotion admirative se retrouve chez toutes les générations, parce que le fléau de la torture érigée en système, est toujours prêt à rebondir, comme une hydre à plusieurs têtes. Huit ans après que Henri, victime des racistes colonialistes ait eu l’honneur de le démasquer par son vécu et sa plume, Bachir Hadj Ali a retracé dans «L’Arbitraire» comment à son tour il a dit « NON » aux sbires d’un pouvoir se réclamant du nationalisme tout en torturant au long des décennies ses propres nationaux. Une vingtaine d’années plus tard, des dizaines de jeunes, syndicalistes et militants étaient atrocement torturés après avoir été arrêtés «préventivement» à la veille des manifestations d’Octobre 88. Nombre de ceux qui dans les comités contre la torture ont dénoncé ces actes ont été mystérieusement assassinés dans les années suivantes. Les années 90 ont été celles des sévices d’une barbarie inouïe, perpétrés sous la responsabilité des clans hégémonistes rivaux et le déferlement de haines civiles à grande échelle, trahissant aussi bien les valeurs religieuses que républicaines dont les uns et les autres se réclamaient. Rien ne dit que les actes d’arbitraire qui jalonnent aujourd’hui le quotidien algérien, ne déboucheront pas à nouveau, faute d’issues politiques pacifiques et démocratiques, sur des paroxysmes de bestialité.

Dans un sens, les jeunes qui découvrent par les récits et les hommages le courage de Alleg et de tous les hommes et femmes qui ont affronté et défié les bourreaux, sont d’une certaine façon mieux armés contre les scepticismes et les découragements ambiants. Ils découvrent un personnage et un comportement qui les rassurent, leur rend confiance dans la générosité et la grandeur du genre humain, discrédité à leurs yeux par les trafiquants de la politique.

Il reste cependant pour tous à mieux comprendre que le courage ne se limite pas à la résistance physique et morale. Il est l’expression et le prolongement d’un socle de courage politique, édifié dans l’engagement civique et militant. Il est forgé par les lourdes exigences de la mobilisation pour isoler les tortionnaires et leurs commanditaires politiques avant qu’ils ne sévissent et qu’ils ne puissent imposer leur loi à une société terrorisée. C’est le mérite de Henri Alleg de s’y être employé toute sa vie, c’est le message principal qu’il laisse à la jeunesse du nouveau siècle.

Au cœur des performances

d’Alger-républicain de son époque

L’un des secrets du succès d’Alger-républicain dans les deux périodes où Alleg fut le pilier central de sa direction et de sa rédaction (1950-55 et 1962-65), tient dans une raison simple. Elle compensait l’insigne faiblesse des moyens matériels et financiers, par la solidarité populaire qui en a fait chaque fois le premier quotidien national par l’audience et la confiance de ses lecteurs, dont chaque enfant scolarisé faisait lecture à ses parents et son entourage peu lettrés.

Le secret résidait dans la conjonction souhaitable mais non évidente ou facile à réaliser, entre deux exigences simultanées chez le militant engagé dans les affrontements sans merci contre l’oppression et l’exploitation. D’un côté comme être humain, Alleg était d’une sensibilité aiguë aux souffrances, à la soif de dignité de ses congénères, qu’ils s’appellent Youssef ou Joseph, en Algérie ou ailleurs. Dans le même mouvement d’indignation et comme acteur politique, il comprenait et déjouait plus que quiconque les mécanismes du comportement diviseur des cercles colonialistes et impérialistes, ou de leurs émules « nationaux ». La division était la seule chance pour eux de pérenniser l’injustice du joug colonial ou des dictatures post coloniales.

Pour lui, la sensibilité sociale aiguë et l’attachement aux valeurs culturelles nationales qui nourrissaient son patriotisme algérien allaient de pair avec la rationalité universaliste et l’internationalisme sans concession. Dès qu’ils étaient mis en œuvre ensemble, l’un et l’autre de ces volets se renforçaient mutuellement.

Pour ces deux raisons, Henri « Hamritou », bien que né hors d’Algérie, faisait partie des élites algériennes les plus proches de leur peuple. Il en était plus proche, grâce à sa vision sociale et internationaliste, jusqu’au sacrifice, que ne prétendaient l’être ceux pour qui le nationalisme populiste était aussi ou surtout un placement, une opportunité à saisir pour faire de leur peuple en mouvement un marche-pied vers les prérogatives présentes et futures du pouvoir. Henri, quand il lisait pour le chauffeur que lui avait affecté le parti FLN, les panneaux de circulation en arabe qui venaient brusquement de remplacer les panneaux en français, était beaucoup plus proche de son peuple que les bureaucrates qui avaient commis cette mesure précipitée, sans travail de formation ni respect de leurs administrés.

Cette conception humaine et politique du rapport à son peuple, inspirait le responsable communiste résolu qu’était Alleg. Elle explique pourquoi il est parvenu le plus souvent avec les équipes rédactionnelles de son époque, à conjuguer sans « takkabour » (esprit de supériorité) la fermeté de l’engagement patriotique et de classe avec l’ouverture, l’empathie et l’écoute envers la société, les simples gens, les couches laborieuses, les citoyens et citoyennes aux aspirations saines et ordinaires, dans la diversité de leurs courants de progrès et de leurs sensibilités culturelles.

Pour lui, la fermeté et l’ouverture étaient deux qualités complémentaires, que souvent des patriotes et militants sincères ont opposées et caricaturées, en basculant à des degrés divers soit vers le dogmatisme autoritaire et sectaire, soit vers des alignements opportunistes sur les pouvoirs en place. Evitant et combattant ces deux écueils, Alger-républicain était devenu naturellement l’espace attractif vers lequel se tournaient les ouvriers, paysans, intellectuels et artistes en lutte ou les détenus nationalistes de l’OS qui comme Abane Ramdane remerciaient du fond de leur prison le journal pour ses appels à la solidarité active envers leur grève de la faim.

J’illustrerai plus tard le talent et les efforts persévérants de Henri, pour articuler ces deux orientations aussi précieuses que non contradictoires durant son parcours algérien. Il a de façon soutenue encouragé l’esprit d’initiative individuelle et collective, de rigueur morale, de respect de ses vis-à-vis quel que soit leur « rang ». Ce comportement est seul générateur de confiance et de dynamisme unitaire entre acteurs, qu’ils soient individuels ou partenaires sociaux et nationaux collectifs. Là est le secret principal de l’impact historique d’Alger-républicain dans ses deux époques les plus fastes, contrastant avec son déclin ultérieur, dans des conditions nouvelles, certes plus complexes.

Le contexte inédit à partir des années 90 méritait précisément la continuité dans les meilleures traditions, le déploiement d’une maîtrise dialectique encore plus grande aussi bien envers les contradictions internes et internationales qui avaient surgi, qu’envers les potentialités nouvelles en matière de mobilisation et d’alliances. Faute de quoi, ce quotidien est malgré lui apparu à une opinion désorientée, non comme le défenseur autonome, qu’il avait toujours été, des larges intérêts nationaux, démocratiques et sociaux d’une Algérie gravement frappée par les rivalités de pouvoir, mais comme le représentant d’une secte qui face aux pressions n’a pas su et pu préserver le rôle éclairant et rassembleur qui fit sa force et son prestige passés.

Ce n’est pas le lieu ici – ce sera fait plus tard, avec si possible la coopération souhaitable des acteurs encore présents – de décrire de façon précise, constructive et sereine, les mécanismes par lesquels le quotidien prestigieux a décliné contrairement aux attentes après la « libéralisation » enfin arrachée de la presse de 1989. Tout n’est pas imputable à l’acharnement diversifié des forces et services de sécurité pour qui un tel quotidien était un opposant redouté en raison de son audience populaire et sociale vérifiée dans le passé.

Lorsque le quotidien a reparu après une interdiction d’un quart de siècle, la relève dirigeante et rédactionnelle a échoué alors qu’elle avait pourtant fait déjà un large consensus et même un début d’application.

Le responsable de nouvelle génération mis en place avait, avec avec d’autres militants expérimentés, l’envergure et les qualités politiques et humaines similaires à celles déployées par Henri Alleg, -lui même devenu la cible de calomnies sournoises le taxant «d’archaïsme». Leur compétence, leur tact, leur esprit unitaire reconnus à travers les tâches délicates des années clandestines, leur rejet des flatteries, des intimidations et des intrigues s’ajoutaient à leur bonne maîtrise des problèmes sociaux et idéologiques émergents de la société et de la jeunesse algériennes.

Leur mise en place a été interrompue et torpillée dans les semaines qui, après les élections municipales de juin 90, ont suivi la campagne de dévoiement du PAGS pour le contraindre à s’aligner sur les secteurs du pouvoir qui travaillaient à aiguiser une grave fracture au sein de la société et de la nation. L’erreur dans la politique de promotion nécessaire des cadres du journal a été commise sous la pression d’un pouvoir hostile, puis aggravée par l’affaiblissement ou l’abandon de méthodes et comportements démocratiques qui avaient fait la force des équipes passées. Pour le journal, cela s’est traduit par une coupure sérieuse avec sa large base sociale potentielle dans un pays assoiffé de vérité, de clarté et de paix. Il se vérifie que l’avenir et la réussite d’un titre historique requièrent une continuité adaptée aux nouvelles conditions et la mise en œuvre des ressorts confirmés de ses succès passés.

ALLEG , une des figures symboliques

d’une tradition démocratique nationale

Alleg dans son parcours algérien fut conforté dans le sentiment de n’avoir pas été le seul à déployer son énergie vers des mobilisations unitaires à la hauteur des objectifs vitaux communs. D’autres, par delà leurs appartenances et structures politiques, par delà leurs horizons idéologiques respectifs, ont appelé comme lui à édifier les passerelles pour joindre les efforts, transcender sans se renier leurs sensibilités identitaires et idéologiques différentes. Afin que les tentations hégémonistes ne transforment pas leurs différences normales et légitimes en barrières trompeuses, en pièges néfastes pour l’action unie dont le pays avait besoin.

Alleg en marxiste convaincu, est dans notre histoire l’un des membres éminents d’une grande famille trans-partisane où se côtoient des figures emblématiques rassembleuses, étrangères aux tentations hégémonistes. Comme le cheikh Abdelhamid Benbadis, l’archevêque (puis cardinal) Etienne Duval (dit «Mohamed») ou le chrétien progressiste André Mandouze, ainsi que les prêtres ouvriers liés aux « théologies de la libération », ou encore le militant-élu MTLD Houari Souiyah d’Oranie ou l’UDMA Mohamed Bensalem, populaire correspondant d’Alger républicain à Djelfa-Laghouat, le leader syndical rassembleur Lakhdar Kaïdi, animateur de grèves historiques sous le régime colonial, l’intellectuel humaniste et chantre de l’amazighité culturelle Mouloud Mammeri, la femme de lettres et de culture judéo-berbéro-andalouse et moudjahida, Myriam Ben (Marilyse Benhaïm), tant d’autres ont tissé ensemble ou chacun de son côté, sans craindre la franche et loyale confrontation d’idées, la trame d’un élan unitaire aux différents niveaux de la scène politique.

Toutes et tous ont assumé dans la clarté leurs différences en valorisant les vertus de l’union à travers l’action, l’abnégation et les sacrifices partagés. Ils ont ressenti, alimenté et construit ensemble la conscience d’une identité humaine, sociale et progressiste commune qui transcende et rassemble en un faisceau offensif leurs idéaux respectifs, dans les voies patriotique, démocratique, sociale et internationaliste.

Le cheikh Larbi Tebessi avait résumé l’esprit de ce courant profond même dans ses aspects insuffisamment formalisés, quand en aout 1951 il avait présidé le meeting inaugural du FADRL (Front algérien pour la défense et le respect des Libertés) qui regroupait tous les partis et associations nationales. Il déclara, sous un torrent d’applaudissements unanimes: «Ce Front ne demande à personne s’il est musulman, chrétien ou juif. Il ne lui demande que ceci : es-tu décidé à lutter pour le droit et à combattre pour la liberté ?… Nous ne faisons pas de différence entre Algériens de naissance et de cœur. Nous ne faisons pas de différence entre Fatima et Marie. »

On comprend pourquoi les colonialistes ont assassiné en lui en 1956, comme ils l’auraient fait pour Henri s’ils l’avaient pu, le rêve d’une Algérie qui aurait été avant l’Afrique du Sud l’initiatrice d’une ère nouvelle de transition vers la liberté et la fraternité humaines.

S’agit-il aujourd’hui d’une problématique périmée, du seul fait qu’on ne peut pas refaire l’Histoire ? Je pense au contraire que pour l’Histoire à venir, elle est plus que jamais à l’ordre du jour, à une échelle plus vaste dans une planète agressée massivement par des dangers grandissants. Repérer ensemble les réels enjeux d’intérêts stratégiques et économiques occultés par les appels intégristes aux affrontements bellicistes, est devenu encore plus vital pour les habitants du monde, quelle que soit la couleur de leur peau, leur langue, la divinité, la confession ou la philosophie en lesquelles ils se reconnaissent.

Nous sommes malheureusement à l’heure où les ennemis de toujours suscitent avec succès des affrontements aussi sauvages qu’absurdes à l’échelle transcontinentale, non seulement entre musulmans et non musulmans, mais aussi et surtout entre acteurs se réclamant tous de l’islam. Survivre ou non à ces périls signifie avant tout rester ou non les jouets des aveuglements suicidaires.

Trois décennies de la montée en force du néolibéralisme mondialisé, mettent de plus en plus en lumière la vanité et le danger des approches métaphysiques. Elles tendent à opposer dans leur globalité les courants dits « laïques » aux courants qualifiés d’islamistes. Pour Henri comme pour tous les partisans d’une vision philosophique matérialiste de l’Histoire, le clivage réel et fondamental traverse les courants d’inspiration culturalistes sans exception. Ce clivage oppose de façon existentielle les partisans de l’indépendance, de l’égalité et de la justice sociale aux forces de la réaction néolibérale mondiale et à ses valets et émules sous- développés.

Les deux camps fondamentaux sont présents autant chez ceux qui se réclament du « laÏcisme » que de « l’islamisme » ou d’autres « ismes ». La position de principe des partisans de la démocratie souverainiste et sociale est de ne pas se tromper de cible, de peuple et de combat. Elle est de défendre leur autonomie de pensée et d’organisation contre les hégémonismes et fondamentalismes laïcs ou religieux, qui instrumentalisent la confusion. Il s’agit d’être corps et âme aux côtés et au sein de la société opprimée, exploitée, cherchant les voies de sa libération.

Le parcours de Henri Alleg, de ses camarades et amis dans le mouvement national illustre bien ce choix. Il a été celui de la lutte positive et unitaire contre aussi bien l’arbitraire sauvage des oppresseurs que contre les aveuglements chauvins et les replis sectaires des opprimés. C’est pourquoi son nom est si honoré dans le monde. C’est pourquoi aussi, en attendant de revenir plus tard sur la portée et les aléas des idéaux rassembleurs que nous a légués Henri, je soumets aux lecteurs quelques épisodes de son parcours algérien.

Ils figuraient dans la lettre que je lui adressai en 2005 à l’occasion de la présentation de son ouvrage « Mémoire algérienne » à la fête de l’Huma, à laquelle je ne pus malheureusement assister. Ce témoignage provisoire gagnera à être complété, il me semble déjà aujourd’hui significatif.

Sadek Hadjerès

27 juillet 2013

publié dans le Quotidien d’Oran

du 1er août 2013


Pour lire la “LETTRE DE S. HADJERES À HENRI ALLEG, SEPTEMBRE 2005” (site « socialgerie », cliquer sur le lien :

http://www.socialgerie.net/spip.php?breve399#2

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