POURQUOI LE 1er NOVEMBRE 1954?

pdf-3.jpg texte revu en septembre 2015

Thème de la table ronde organisée à Paris par l’IREMMO
[[ IREMMO SEMAINE SPÉCIALE ALGÉRIE

du 22 au 25 MAI 2012

  • http://www.socialgerie.net/spip.php?breve517
  • http://iremmo.webou.net/spip/spip.php?article185
  • http://www.youtube.com/watch?v=E3IYRjUb190#t=12]]

le Mardi 22 mai 2012:

“Pourquoi le 1er novembre 1954 ”

Pour accéder à l’enregistrement de cette conférence animée par Gilbert Meynier, Sadek Hadjerès et Sylvie Thenault,

cliquer ci-dessous

enregistrement accessible sur YouTube avec le lien suivant

intervention de Sadek Hadjerès: 24 : 54 à 54 :33


“Pourquoi le 1er novembre 1954 ”

table ronde- conférence à 3 voix

organisée à Paris par l’IREMMO

le mardi 22 mai 2012 :

Transcription de l’intervention de Sadek Hadjerès

de 24 :54 à 54 :33

Je vais essayer de respecter moi aussi le planning

Je crois que Gilbert a bien situé le cadre historique et politique de l’insurrection de 54

En ce qui me concerne, je vais plutôt aborder la facette sous l’angle subjectif : Qu’est-ce qui a amené à cette idée de lutte armée? Qui a donné à l’idée de lutte armée un tel poids?

Pourquoi les Algériens ont-ils rapidement fait masse autour d’une voie, qui au départ, en novembre 54, avait les apparences de la fragilité

Comme Gilbert l’a dit, on peut dire, pour paraphraser Jaurès… le ciel de l’Algérie était lourdement charge des nuées du colonialisme, et que l’orage de l’insurrection était inévitable ; ça c’est une explication juste mais générale,

En fait des questionnements surgissent, quels sont les spécificités historiques et psycho-culturelles qui ont rendu ce, le soulèvement de 54 concevable, et puis qui l’ont marqué de cette particularité?

Par exemple, Pourquoi le 1er novembre 54 n’a pas été, comme ces orages méditerranéens, très violents mais de courte durée, et suivis d’éclaircies?

Pourquoi à la différence des insurrections du siècle précédent, ces premiers coups de feu de 54, bien sûr ont été suivis d’une accalmie très passagère, mais, ils ont débouché sur une guerre qui a duré 7 ans, et qui a balayé finalement l’édifice colonial, qui était présenté comme éternel en 1930, à l’occasion du centenaire de …

Il y a une autre spécificité dans cette entrée dans une guerre asymétrique :

Pourquoi le peuple algérien a dû consentir tellement de sacrifices prolongés, alors que dans l’espace maghrébin et africain, beaucoup de pays étaient parvenus, presque sans coup férir, à la reconnaissance de leur droit à l’autodétermination, bien sûr il y avait l’influence du contexte du soulèvement algérien… ?

Donc, ce 1er novembre, ça a été un pari, celui d’une avant-garde nationaliste restreinte, avec une part d’improvisation, parce que, entre autres, pour sortir d’une crise de politique interne au PPA MTLD, mais pourquoi, a-t-il fini par déboucher sur une rupture entre deux époques historiques, pour l’Algérie et pour une grande partie du monde colonisé.

Cet événement, qu’on peut dire emblématique, est devenu une référence plus tard, pour les générations suivantes, il avait même suscité des répliques, des imitations, qui s’étaient avérées fondées pour un certain nombre de mouvements de libération, mais elles ont été aussi moins judicieuses et elles ont avorté dans d’autres pays, quand on en est resté à la théorie à la guerre des focos implantée de l’extérieur, comme cela a été le cas en Bolivie, pour créer plusieurs Vietnams, dont on connaît le résultat.

Encore aujourd’hui, ou même plus tard, souvent quand il y avait une tension de crise, une volonté de changements, on entendait des voix dire « vivement qu’il y ait un nouveau premier novembre ».

Et, pour l’anecdote, je crois que vous savez que même Bouteflika, récemment, a dit que les élections algériennes, législatives, allaient être aussi importantes que le 1er Novembre …

Tout cela repose la question de fond : si l’option de la résistance armée était devenue presque inévitable en 1954, pourquoi les conditions qui l’ont rendue possible et productive par l’Algérie du milieu du 20ème siècle, pourquoi elles ne peuvent pas être reproduites n’importe où, et n’importe quand ?

Là je mets évidemment les facteurs subjectifs au centre de l’explication, mais ce n’est pas du tout à l’encontre du socle objectif des facteurs géopolitiques, mais simplement pour dire que les conditions objectives – je crois que le cadre historique qu’a tracé Gilbert le montre bien- mais ces conditions objectives ont été relayées par des motivations d’ordre psychologiques et culturelles. C’était une greffe compatible, une adéquation entre l’objectif et le subjectif et cela était vraiment la condition du succès.

Quelles étaient ces motivations ?

L’insurrection du 1er novembre, comme je l’ai dit avait été un pari audacieux sur la suite des événements, mais en aucune façon cela n’a été un miracle. A propos de miracle, Gilbert sait aussi, que dans le monde arabe, on a souvent parlé de « الجزائر بلاد العجائب » «Algérie pays des miracles», on a beaucoup aimé les interprétations magiques.

Mais en fait le succès final n’a pas relevé du seul volontarisme, parce que, à lui seul, il n’aurait accouché que d’une tentative glorieuse, mais avortée.
La vérité c’est que, dans le cadre d’un rapport de forces objectif, national et international, qui était de plus en plus favorable, ce potentiel subjectif interne s’y prêtait.

Le 1er novembre, de ce point de vue, est le résultat d’une longue maturation dans les opinions algériennes. Et il y a deux facteurs complémentaires qui se sont forgés l’un et l’autre dans le cours du processus historique.

D’un côté il y avait les imaginaires, le psycho-culturel avec des représentations dominantes dans nos sociétés opprimées, et d’autre part il y a eu les prises de conscience politiques, qui ont été le résultat d’efforts difficiles, pas toujours à la hauteur, mais elles ont été suffisantes, pour féconder, pour soutenir la continuité d’une initiative audacieuse et risquée à la fois.

Comment s’est donc faite cette jonction? Ceux qui avaient initié l’insurrection, ou bien les courants politiques qui ensuite l’ont ralliée, comprenaient bien cette maturation, et je crois qu’ils s’étaient reconnus dans la tonalité de l’Appel du 1er Novembre.

Mais toute autre était la vision d’un certain nombre d’esprits français, naïfs, ou bien embrumés, comme les a priori de la domination coloniale.

Voila : quelques semaines avant l’insurrection, le quotidien français le Monde qui est une référence… pontifiait avec un gros titre, y affirmant que «l’Algérie restait une oasis de paix dans un Maghreb en flammes» , il faisait allusion au Maroc et surtout à la Tunisie, avec les actions croissantes des fellaghas.

À cette allégation, notre camarade Bachir Hadj-Ali, avait répliqué en substance sur deux pages de l’hebdomadaire communiste algérien «Liberté»: «Non, l’Algérie, corps central du grand oiseau qu’est le Maghreb, ne peut échapper à l’incendie qui a enflammé ses deux ailes».

Sur quoi reposait la certitude de notre camarade ? Et bien le rédacteur du Monde aurait été mieux inspiré, de méditer un avertissement qui avait été lancé en 1913, avant la première guerre mondiale, par le député français radical, Abel Ferry, le neveu de son oncle Jules Ferry, fondateur de l’école laïque, et lui aussi imprégné du virus colonialiste, il rappelait au nom des intérêts – à ce qu’il disait- «intérêts et grandeur de la France» que deux éléments constituaient un mélange hautement explosif quand ils se conjuguaient : la misère et l’humiliation sociale d’un côté, les sensibilités identitaires et religieuses de l’autre.

Ces données, géopolitiques de base, échappaient aux spécialistes de la communication et hautes sphères dirigeantes coloniales, qui pour diverses raison se complaisaient à prendre leurs désirs pour des réalités. Elles ignoraient que la passivité apparente des indigènes n’était qu’une posture qui les aidait à survivre. Or, n’importe quel algérien peut attester qu’à cette époque, le rêve de la délivrance massive par les armes, pour peu que l’occasion s’en présente, c’était une obsession qui habitait la majorité de mes compatriotes, de leur enfance jusqu’à l’âge le plus avancé… Encore gamin, je voyais couler les larmes sur le visage de ma grand-mère maternelle dès qu’elle évoquait comment après l’insurrection de 1871, toutes les terres de sa famille avaient été volées, occupées par les Alsaciens-Lorrains, qui fuyaient l’Allemagne de Bismarck. Peut-être c’était une anticipation du phénomène international qui a provoqué la Naqba plus tard en Palestine : c’est-à-dire que des Palestiniens ont payé ce qui s’était passé en Europe.

À l’évocation de ces désastres, ma mère renchérissait, comme pour apaiser sa colère, elle nous racontait dans une espèce de revanche verbale, les exploits «djihadistes», de Sidna Ali, un des compagnons du prophète, un épisode que nous rappelait aussi les contes en prose rimée des meddahs – c’étaient un peu les troubadours populaires sur les places des villages – , qui chaque mercredi -jour de marché à Berraghouia- exaltaient les exploits qui étaient représentés sur des estampes naïves déposées sur le sol, et ma mère ajoutait avec amertume: mais nous, les musulmans, nous ne savons pas comploter, elle le disait en kabyle «our nessi nara an-nafeq-» nous ne savons pas comploter.

Et c’était là le hic, parce que le seul obstacle au passage à l’acte, à la révolte – dans l’imaginaire évidemment – c’était le manque de confiance dans la concertation collective.

Encore enfant, nous exprimions entre nous cette préoccupation d’une façon simpliste et arithmétique : nous les musulmans nous sommes dix fois plus nombreux qu’eux. Si chacun de nous ne s’occupait que d’un seul français – nous disions kaffer ou gaouri – le problème serait facilement réglé. Je signale en passant que cette même recette géniale habitait les phantasmes de nombreux pieds-noirs et adeptes de l’OAS: «Y a qu’à les tuer tous», une recette qui a connu plusieurs débuts d’application.

Mais nous devions nous contenter de ruminer nos incapacités à engager des actions concertées, et apprendre seulement à garder le secret de nos états d’âme contre les mouchards.

Qu’est-ce qui a fait progresser ensuite les mentalités dans toute la société, qu’est-ce qui leur a donné plus d’assurance et d’espoir, leur a appris à jauger avec plus de réalisme le contenu, les orientations de l’action violente ou non violente, la combinaison des divers moyens d’action possibles, l’adhésion à des formes d’organisation nouvelles, greffées sur les traditionnelles structurations patriarcales.

Et bien cette évolution s’est réalisée à travers l’émergence progressive de noyaux associatifs et politiques, d’abord minoritaires – tout à l’heure Gilbert les a évoqués – ; puis cela s’est fait à un rythme plus rapide, plus massif, à partir de la fin des années 30, sous l’influence des événements internationaux de grande importance qui avaient pénétré la scène algérienne, à travers de multiples canaux, jusqu’aux bourgades et les douars les plus reculés, c’est-à-dire les douars ou les bourgades d’où étaient originaires les habitants des villes, ou bien les travailleurs immigrés en France, porteurs d’une culture syndicale et politique minimum.

La courte période du Front populaire en France, malgré le refus du gouvernement socialiste de faire droit à des revendications démocratiques les plus élémentaires, a montré aux organisations, encore minoritaires, qu’il était possible d’accéder aux activités associatives, syndicales, politiques, en dépit des barrages répressifs, de sorte que la combattivité sociale et politique est montée d’un nouveau cran.

Mais c’est surtout le séisme de la deuxième guerre mondiale et des résistances à l’occupation nazie, qui nous a éveillés à la dynamique des luttes pacifiques et non pacifiques.

Après sa défaite de 1940, l’armée française n’était plus considérée par nous comme invincible.

Après le débarquement anglo-américain de 1942, en Afrique du Nord, en Algérie, cette armée faisait piètre figure à côté du spectacle des troupes motorisées américaines.

Les Algériens, au même moment, sont devenus aussi partie prenante, plus consciente, de l’usage des armes, dans les campagnes de libération d’Italie et de France.

Et ensuite, face au repli temporaire de la grosse colonisation, qui avait collaboré avec Vichy, la revendication nationale s’est déployée à travers le regroupement des Amis du Manifeste et de la Liberté, et surtout – en même temps- un très large réseau associatif, culturel, religieux, de jeunesse soute ou sportive, s’exprimer, activer de façon imbriquée, et en parallèle, sur deux registres qui n’étaient pas forcément contradictoires en ce qui concerne l’objectif commun. L’un était pacifique et légaliste, l’autre para-légal, tourné vers des horizons d’actions plus radicales, impliquant le recours aux armes

Ainsi les chants patriotiques en arabe classique ou populaire, et en berbère, évoquaient sans ambages l’idée du sacrifice de la vie pour la patrie, et ils appelaient à ne pas craindre les balles, «ma trafouch men dharb erssas »

Les causeries et les prêches des cercles culturels et religieux exaltaient les victoires militaires de l’islam à sa naissance, en dépit de l’inégalité des forces, comme lors de la fameuse bataille de Badri.

Dans le mouvement scout musulman, dans l’esprit d’ailleurs de son fondateur anglais Baden Powell, l’engagement envers l’idéal scout c’était de mettre un savoir faire technique et paramilitaire au service de la patrie et de ses concitoyens. Et quand un avion militaire allié s’était écrasé sur la montagne voisine, ou bien dans nos contacts avec les troupes des USA, cantonnées près du village, la recherche d’armes, c’était une de nos préoccupations.

L’attrait pour la perspective de la lutte armée allait de paire avec la politisation croissante du mouvement nationaliste, même si cette politisation ne s’accompagnait pas d’une réflexion qui articulait mieux, dans les esprits, les luttes militaires et les luttes pacifiques syndicales, électorales, associatives. Cette insuffisance va être ressentie plus tard dans les sphères dirigeantes nationalistes, par l’improvisation à l’époque du 8 mai 1945, avec des ordres et des contre-ordres d’insurrection, ou bien la façon dont les couches de la paysannerie pauvre, à cette même époque, dans le
Constantinois, avaient réagi d’une façon spontanée à cette répression, faute d’orientations assez claires.

C’est la même carence dans l’évaluation des stratégies des rapports de forces politico militaire qui s’est révélée après la défaite arabe de la première guerre israélo-arabe de Palestine, qui a été une douche glacée, à côté des rodomontades nationalistes qui étaient polarisées sur la puissance supposée d’une Ligue arabe qui était idéalisée à outrance.

Le 8 Mai 45 a eu deux sortes d’effets. La division et le pessimisme avaient été assez rapidement surmontés dans la majeure partie de l’opinion, en particulier grâce à la campagne pour l’amnistie qui avait été initiée par les communistes, et qui a bénéficié d’un rapport de forces favorable sur la scène politique française. En même temps le 8 mai a consolidé l’opinion algérienne dans l’opinion que le colonialisme ne nous laissait plus d’autre issue que la violence armée pour se libérer. C’est à partir de ce moment-là vraiment que c’était devenu une conviction politique assez forte.

Certains courants nationalistes moins convaincus, ou bien sensibles aux séductions des colonialistes des fractions libérales – que l’on appelait libérales à l’époque – concevaient les voies politiques comme opposées à l’option armée et non pas complémentaires.

Mais cette option armée va marquer des succès chez les plus résolus, avec la décision du Congrès du PPA – MTLD de 1947, de créer l’Organisation Spéciale OS

Je ne sais pas si je suis dans les temps / Il te reste 4 minutes

Le démantèlement de l’OS en 1950 n’a pas interrompu l’élan et le débat entre les avantages et les inconvénients de chacune de ces options.

Il y a deux événements qui vont précipiter le projet de recours aux armes :

  • D’abord c’est l’échec du FADRL – le Front Algérien pour la Défense et le Respect des Libertés Démocratiques –. Il s’était constitué en l’été 1951, par l’ensemble des partis politiques, qui ont eu, ensuite, chacun leur part de responsabilité quand il s’est effiloché les mois suivants.

    L’échec de cet élan politique et populaire a renforcé le courant des partisans de l’activisme armé. Mais ce fut d’une façon assez perverse et dépolitisée, avec l’idée fausse, chez nombre de gens déçus, que c’était la lutte politique en elle-même, et non pas l’absence d’une saine politisation, qui était stérile et contre-productive.
  • L’autre facteur, ça a été sur la scène régionale et internationale une série encourageante de changements tel que l’arrivée au pouvoir de Nasser en Egypte, en 1952, il a mis fin à l’aura trompeuse d’une Ligue arabe impuissante et complaisante envers les puissances coloniales, cette évolution ascendante va trouver plus tard son apogée avec le grand rassemblement intercontinental de Bandoeng ; et l’option militaire en même temps va s’inviter davantage avec l’entrée en lisse des fellagas tunisiens, et surtout la grande victoire de Dien Bien Phu.

    Le 8 Mai 1954 a été ressenti chez nous comme une revanche éclatante sur la tragédie du 8 Mai 45. Les Algériens ce jour-là, je m’en souviens très bien, je me trouvais à Sidi bel Abbès, le berceau de la Légion étrangère, c’était le deuil dans la Légion, contrairement à l’habitude, ils ne sont plus sortis de leurs casernes, et les Algériens se répandaient en congratulations traditionnelles, et se souhaitaient un nouvel Aid, une grande fête de libération à venir.

À partir de ce moment l’évolution vers la préparation de l’insurrection ne pouvait pas surprendre même les observateurs les moins avertis.

Et, je voulais ajouter là une note particulière, comment croire dans ces conditions à des affabulations selon lesquelles les communistes ont été surpris, ou, même, auraient réagi de façon hostile à la survenue de l’insurrection. C’était bien mal connaître cette période, que de se fier à des allégations propagandistes, qui s’expliquaient par les enjeux politiciens du temps de guerre, avec les positions hégémonistes de certains cercles dirigeants du FLN, mais qui ont été reprises plus tard en boucle sans vérification, par des médias, ou même des historiens dont ce n’était pas le thème principal de recherche.

Fort heureusement, dans la dernière décennie, nombre d’historiens, anciens ou nouveaux, soucieux d’investigations ouvertes et responsables, se dégagent de plus en plus de ces raccourcis sommaires, et idéologisants vers où les poussait la désinformation ambiante.

Par exemple, lié au 1er novembre, déclenchement de l’insurrection, je signale un article très documenté d’un historien hongrois, Ladzslö Nagy, qui vient de me l’envoyer, qui détaille un épisode significatif et pourtant occulté: l’appel du 1er novembre fut presque aussitôt répercuté par une station radio, émettant en arabe dialectal depuis Budapest, … c’était une station qui émettait en direction du mouvement indépendantiste d’Afrique du Nord. Cette station était animée et dirigée par notre camarade William Sportisse, qui avait été envoyé pour cette mission, depuis le milieu de l’année 54, c’est-à-dire vers juin-juillet, par le Parti PCA et les autres partis communistes du Maghreb. Il avait diffusé le communiqué du 1er Novembre avant qu’il ne le lui soit envoyé par la délégation du FLN au Caire, qui en son temps, en la personne de Aït Ahmed, l’avait remercié et félicité pour cette initiative.

Pour mieux préciser les choses, la direction du PCA n’a pas été surprise par la survenue de l’insurrection qui était politiquement dans l’air et prévisible pour les mois ou l’année à venir.

Ce qui nous a surpris dans la semaine qui a précédé l’insurrection, et au cours de laquelle nous avons compris son imminence – là, je signale que une semaine avant je me trouvais avec Bachir Hadj-Ali et moi-même, avec la section locale du Parti communiste dans laquelle figurait Galland, Jean-Jacques Galland, qui l’a relaté dans un ouvrage, qui avait rencontré 6 mois auparavant Ouamrane, futur colonel de la wilaya IV , et ils en ont discuté toute une nuit, c’est-à-dire ce n’est pas quelque chose qui nous avait surpris – ce n’est pas le fait qu’il allait y avoir une insurrection, c’était l’accélération de son timing, alors que il y avait la crise du PPA MTLD qui s’aiguisait de plus en plus ; parce que nous avions prêté davantage de perspicacité politique aux initiateurs de l’insurrection, à qui Abane Ramdane avait reproché plus tard d’ailleurs en termes très durs la précipitation avec laquelle l’insurrection avait été déclenchée dans de telles conditions.

Par contre, là où j’estime que la direction du PCA aurait dû et aurait pu faire mieux, c’est que, après Diem Bien Phu, d’après ce qu’on m’a dit parce que je n’étais pas encore au bureau politique où il y avait eu des discussions sur l’éventualité d’une lutte armée, je pense, qu’à partir de ce moment-là il aurait fallu anticiper organiquement, préparer des structures parallèles du type de ce qui va être fait ensuite avec les Combattants de la Libération, avant que l’insurrection ne survienne, ce qui nous aurait facilité les dispositions organiques, et un certain nombre de développements politiques ultérieurs dans l’intérêt de tous.

Voila, alors le temps qui m’est imparti ne me permet pas d’aller plus loin.

Nous le regretterons…

Je vais conclure seulement en soulignant que cette question du 1er novembre est d’une grande actualité.

Pourquoi elle est d’une grande actualité ?

Elle dépasse de loin la question du timing et de son accomplissement pratique et militaire.

L’essentiel réside dans la finalité et le contenu politique des soulèvements.

Il y a deux remarques qui me paraissent d’actualité, à propos de cette symbolique du 1er novembre

  • Premièrement : un prétendu novembrisme passéiste, et qui se tient à l’apologie désincarnée de la lutte armée, a servi de couverture idéologique à des dérives anti démocratiques de la part de cercles nationalistes, officiels ou non. Ils se sont mis à invoquer pour eux seuls la légitimité révolutionnaire et le label de la famille révolutionnaire.

    Ça s’est traduit par la crise de l’été 1962 qui a vu s’instaurer par la violence le socle militaro policier du nouveau système de pouvoir.

    Et ensuite, les vertus qui ont été attribuées à la violence armée sans évaluation critique de son contenu, sont à l’origine de fautes politiques graves, désastreuses, tels que les affrontements armés en Kabylie en 1964, puis dans tout le pays pendant toute la décennie de 1990.

    Ce constat a une nouvelle résonnance aujourd’hui en cette saison pas de printemps mais de tempêtes arabes et africaines. Quelques cercles s’étonnent, en le déplorant, de ce qu’ils appellent l’exception algérienne, ils caressent par mimétisme envers le 1er novembre 54 le calcul dangereux d’allumer un feu par internet, ou tout autre scénario planifié.

    C’est ignorer que ce qui a donné du souffle à l’insurrection algérienne en 1954, ce fut avant tout une orientation politique qui était bien en phase avec les aspirations, avec le ressenti et la sagesse populaire, et non pas fondamentalement les instruments pratiques qui ont véhiculé ce contenu, depuis le bouche à oreille, le téléphone arabe ou radio trottoir ou café du quartier, jusqu’au poste radio transistor qui venait récemment d’arriver. Donc c’est le contenu politique qui était déterminant.
  • Deuxièmement, un deuxième enseignement est rendu éclairant par le, les malheurs dans lesquels ont été plongés le peuple de Libye, de Syrie, et du Mali, après les Irakiens.

    C’est le suivant : militariser artificiellement les conflits internes, recouvre souvent des tentatives suspectes d’embrigadement émotionnel de l’opinion, d’anesthésie de la conscience politique et du sens critique, pour des buts non avoués dont profitent des cercles réactionnaires internationaux qui encouragent et/ou suscitent ces dérives.

    Dans ces conflits internes encore plus que dans les luttes de libération nationale, la lutte armée ne devient légitime et porteuse d’avenir que si elle est engagée en dernier recours, quand les moyens et voies pacifiques ont réellement épuisé leurs effets.

    Alors seulement le recours aux armes, avec un large appui populaire, peut ouvrir la voie à des solutions pacifiques et démocratiques.

    Dénouer l’écheveau compliqué des situations où s’entremêlent les représentations identitaires et les enjeux économiques et stratégiques.

    C’est dans ce sens que novembre 54 a ouvert la voie aux Accords d’Evian.

    En sens inverse, l’épreuve des forces de l’été 62 a préparé les impasses et tragédies survenues un quart de siècle plus tard : massacre d’octobre 88, années noires de la décennie 90, la répression algéroise sanglante des jeunes marcheurs du 14 juin 2001, et le marasme et la fragilité nationale actuels.

À cinquante ans de distance il est à souhaiter que ces enseignements croisés préparent un vrai printemps démocratique et social tel que celui qui était souhaité par l’appel du 1er novembre 54.

C’est l’enjeu, encore en balance des luttes en cours.

Intervention de SH le 22 mai 2014

IREMMO

transcription socialgerie M&S R


1er NOVEMBRE 1954

AUTRES LIENS SUR SOCIALGERIE


ALGÉRIE : LE MILITAIRE ET LE POLITIQUE DANS LA GUERRE INDÉPENDANCE ET SES SUITES

par Sadek Hadjerès

HORS SÉRIE DE L’ « HUMANITÉ » – mars 2012

socialgerie – article 772 – mis en ligne le 15 mars 2012

http://www.socialgerie.net/spip.php?article772


[

PCA-CDL (Combattants de la libération)

et FLN-ALN

DANS LA GUERRE D’ INDÉPENDANCE :
LIENS UTILES SUR SOCIALGERIE »

->br435]

socialgerie – brève 435 – mise en ligne le 5 février 2012

http://www.socialgerie.net/spip.php?breve435


COMMENT LE MONDE DU 5 NOV 2005 VOIT L’HISTOIRE PAR LE BOUT D’UNE LORGNETTE IDÉOLOGIQUE – LES COMMUNISTES ET LE 1ER NOVEMBRE 54

socialgerie – article 75 – Date de rédaction antérieure: 6 novembre 2005 – mis en ligne le 27 août 2009

http://www.socialgerie.net/spip.php?article75

le 1er novembre 1954, chez les Benni Yenni

1er novembre 1954 – extraits du livre « En Algérie du temps de la France »;

ed. Tiresias, 1999

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1954_11_01_2005_01_31_deSH.Galland_1er_Nov_54_B_Yenni.extt_-_921.pdf


·

[

le 1er Novembre 1954
intervention de Sadek Hadjerès au siège du PCF – Colonel Fabien

le 28 octobre 2004

->http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/2004_10_28_de_SH_au_PCF_1_Nov_1954.pdf]

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/2004_10_28_de_SH_au_PCF_1_Nov_1954.pdf

lié à article 76 :

[

UN DEMI-SIÈCLE APRÈS LE CONGRÈS DE LA SOUMMAM

MI-AOÛT 2009

FORUM DU QUOTIDIEN D’ALGÉRIE

->76]

socialgerie – article 76 – mis en ligne le 27 août 2009

http://www.socialgerie.net/spip.php?article76


1954 – 1962 – PUBLICATIONS PENDANT LA GUERRE DE LIBÉRATION : QUELQUES UNES DES PUBLICATIONS DU PCA, ACCESSIBLES SUR LE SITE SOCIALGERIE

pdf-3.jpg


PROCLAMATION – Front de Libération Nationale – 1er Novembre 1954 – pour voir le texte, cliquez ici… –
http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Appel_au_peuple_algerien_3_Alleg_.pdf – date de mise en ligne : 3 novembre 2009;


APPEL – ALN – 1er Novembre 1954 – pour voir le texte, cliquez ici… http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Appel_au_peuple_algerien_3_Alleg_.pdf – date de mise en ligne : 3 novembre 2009;


Novembre 1954


NOVEMBRE 54 : LA DÉCLARATION DU PCA

LE PCA ET LA GUERRE DE LIBÉRATION – NOVEMBRE 54 : LA DECLARATION DU PCA – DÉCLARATION DU BUREAU POLITIQUE DU PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN – le 2 Novembre 1954

socialgerie – article 30 – mie en ligne le 19 juin 2009

http://www.socialgerie.net/spip.php?article30

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1954_11_02_PCA_declaration_Liberte_or.pdf


1956


Lettres du PCA au FLN – JUILLET – AOÛT 1956 – ACCORDS PCA – FLN

[

Lettres du PCA au FLN ; JUILLET – AOÛT 1956
LETTRES DU COMITÉ CENTRAL DU PCA AU FLN LE 12 JUILLET 1956 ET LE 16 AOÛT 1956

->32]

socialgerie, article 32 – mis en ligne le mercredi 1er juillet 2009

http://www.socialgerie.net/spip.php?article32

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Accord_PCA_FLN_lettres_juillet_et_aout_1956.pdf


1957


LE RÔLE DES PRESSONS IMPÉRIALISTES ET DES PRÉJUGÉS ANTICOMMUNISTES

1957 : POURQUOI RETARDER LE SOUTIEN ACTIF DES PAYS SOCIALISTES À L’ALGÉRIE EN GUERRE?

PRÉCISIONS D »AL HOURRYYA » (LIBERTÉ), DE SEPT – OCT 1957

socialgerie -article 14 – mis en ligne le 9 février 2010

AL – HOURIYA, septembre – octobre 1957

1er octobre 1957

Texte repris d’un recueil des publications du PCA pendant la guerre. Ce recueil, réalisé au lendemain de l’Indépendance était sur le point d’être imprimé à la veille du 19 juin 65. À la suite de la répression du régime instauré par le « clan d’Oujda », le recueil n’a jamais pu être édité.

Lire l’ article 34 « 1957 : POURQUOI RETARDER LE SOUTIEN ACTIF DES PAYS SOCIALISTES À L’ALGÉRIE EN GUERRE ? » …

http://www.socialgerie.net/spip.php?article34

Scan du document original

Lire le texte tel que publié dans AL HOURIYA du 20 septembre 1962:

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1957_09_10_PCA-FLN_soutien_com_au_FLN_g_libertn.pdf


1958


1958, Juillet :

ESSAI SUR LA NATION ALGÉRIENNE

PUBLIÉ DANS « RÉALITÉS ALGÉRIENNES ET MARXISME »-REVUE THÉORIQUE ÉDITÉE PAR LE PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN

socialgerie – article 264 – mis en ligne le 14 novembre 2011

L’UN des arguments favoris de l’impérialisme français et de ses historiens est que les Algériens ont une «inaptitude congénitale à l’indépendance» (E.F.Gauthier), la doctrine Eisenhower du «vide» a des précurseurs parmi les théoriciens français de la conquête. L’Algérie, en 1830, «c’était le néant, le vide», disent-ils. Et c’est, assurent-ils, pour le combler que le débarquement de Sidi-Ferruch eut lieu.

Cette argumentation, les spéculations sur les «siècles obscurs du Maghreb» visent plus loin: faire débuter l’histoire de l’Algérie en 1830, couper les algériens de leur passé, obscurcir leur conscience nationale, revêtir d’une écorce idéologique le refus de la France de reconnaître la réalité de la nation algérienne et sa souveraineté.

Voici que de Gaulle, malgré les démentis de l’histoire et les déboires de la France dans ses anciennes colonies d’Asie et d’Afrique, qualifie l’Algérie de «terre française» et décide par une phrase que les Algériens sont français. Notre peuple a repoussé et repousse catégoriquement toute politique d’intégration, quelle que soit la forme que les impérialistes français lui donneront.

Les Algériens ont secoué toute résignation. À l’échelle de l’histoire, le 1er novembre 1954 a une double et profonde signification : c’est le signal de la reprise par tout un peuple et sous des formes multiples de la contre-offensive amorcée au début de juillet 1830 par les troupes algériennes, contre-offensive qui faillit faire subir au corps expéditionnaire du général de Bourmont le sort de la flotte de Charles-Quint en 1546 ; c’est aussi un cri jailli des profondeurs de la terre algérienne, d’une nation proclamant son existence et sûre de sa prochaine délivrance.

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Liens pour accéder et circuler dans l’article entre les différents chapitres :

  • I. DES SOURCES ET DE L’ÉVOLUTION DU SENTIMENT NATIONAL ALGÉRIEN

    http://www.socialgerie.net/spip.php?article264#1
  • II. FORMATION ET RÉALITÉ DE LA NATION ALGÉRIENNE

    http://www.socialgerie.net/spip.php?article264#2

III. QUELQUES PROBLÈMES DE LA NATION ALGÉRIENNE

http://www.socialgerie.net/spip.php?article264#3

CONCLUSION

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Documents joints

  • ESSAI SUR LE NATION ALGÉRIENNE (PDF – 257.1 ko) – juillet 1958 – in RÉALITÉS ALGÉRIENNES ET MARXISME, – revue théorique éditée par le Parti communiste algérien, numéro spécial. – numérisé à partir de la parution dans un Supplément aux «Cahiers du Communisme» – N° 8 – Août 1958 – format pdf imprimable :

    http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1958_Essai_sur_la_Nation_Algerienne.pdf
  • ESSAI SUR LE NATION ALGÉRIENNE (PDF – 6.3 Mo) – juillet 1958 – RÉALITÉS ALGÉRIENNES ET MARXISME, revue théorique éditée par le Parti communiste algérien, numéro spécial. – texte original, scanné dans «Cahiers du Communisme» – N° 8 – Août 1958 – Supplément –

    http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/264_doc479_1958_08_et_cc_essai_sur_la_nation_algerienne_droit.pdf

Octobre 1958

L’ALGÉRIE APPARTIENT AUX ALGÉRIENS

texte de Larbi Bouhali, in La Nouvelle revue Internationale problèmes de la paix et du socialisme, revue mensuelle supplément n°2, 1 année octobre 1958

mise en ligne à venir sur socialgerie


1958 – 1959


[

LETTRES ADRESSÉES AU G.P.R.A. AU COURS DE LA GUERRE POUR L’INDÉPENDANCE AU NOM DU COMITÉ CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN

LE 15 NOVEMBRE 1958 & LE 15 JUILLET 1959

->92]

Sources: «AL HOURIYA”, LE 20 SEPTEMBRE 1962

socialgerie – article 92 – mis en ligne le 9 février 2010

http://www.socialgerie.net/spip.php?article92

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/92_1958_11_15_1959_07_15_Corresp.au_GPRA_1959_Al_Houriya_1962_.pdf


1960


QUATRE GENERATIONS, DEUX CULTURES

janvier 1960, par Sadek Hadjeres, paru dans la « Nouvelle Critique »

Lire l’article….

“QUATRE GENERATIONS, DEUX CULTURES”, article de Sadek Hadjerès, paru dans «La Nouvelle Critique» (revue du marxisme militant), en Janvier 1960

[Pour accéder à l’article 232, mis en ligne par Socialgerie le 7 juin 2009, cliquer ici…

http://www.socialgerie.net/spip.php?article15->15]

Pour accéder au document numérisé téléchargeable, cliquer ici …

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1960_SH_4_generations_2_cultures.pdf


1960


SIXÈME ANNÉE DE GUERRE, IL Y A UN DEMI-SIÈCLE

[

PCA, 18 novembre 1960:
« NOTRE PEUPLE VAINCRA »

UNE ANALYSE CRITIQUE ET MOBILISATRICE

->232]

socialgerie – article 232 – mis en ligne le 25 août 2010

http://www.socialgerie.net/spip.php?article232

C’est le cinquantième anniversaire d’une publication essentielle du PCA. Pour qui veut connaître de plus près la situation algérienne en cette période précise, les orientations des uns et des autres après six années d’une guerre de libération implacable, il est utile de consulter la brochure éditée à ce moment crucial par le PCA sur le sol national.

Dans une analyse vigilante des facteurs objectifs et subjectifs du combat, excluant le pessimisme et l’euphorie, la brochure illustre l’expérience de lutte acquise sur le terrain et sur une base de principe par les secteurs conséquents du mouvement patriotique. Elle souligne que « ni découragés par les échecs partiels momentanés ou par la longueur de la lutte, ni grisés par les succès, les Algériens peuvent à bon droit être certains que leur lutte se fraiera un chemin jusqu’à la victoire…

Mais comment devant chaque événement envisager l’avenir sans tomber d’illusions brûlantes en froides désillusions ? »

Ces mêmes orientations et préoccupations avaient été exprimées les deux années précédentes par les lettres adressées au GPRA, déjà publiées sur ce site.

Ultérieurement, SOCIALGERIE fera connaître les conditions concrètes dans lesquelles cette brochure a été préparée, discutée, rédigée et diffusée en direction des milieux où elle pouvait avoir le plus grand impact.
Nous n’imaginions pas à ce moment que les évènements allaient aussi rapidement confirmer la validité de ces analyses, à travers notamment le tournant des grandioses manifestations populaires de décembre 1960.
Une fois de plus, c’était la démonstration qu’une juste mobilisation politique est le facteur décisif pour la transformation positive du rapport des forces.

Documents joints

  • NOTRE PEUPLE VAINCRA (PDF – 3.2 Mo) – PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN – 18 novembre 1960
    document original scané : http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/232_doc_1960_11_18_notre_peuple_vaincra_droit_or.pdf
  • NOTRE PEUPLE VAINCRA (PDF – 391.7 ko) – PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN – 18 novembre 1960 – format numérisé, pdf, téléchargeable: http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/232_1960_11_18_Notre_peuple_vaincra_PCA_a_corr.pdf

18 février 1961


LA RÉSISTANCE FÉMININE DANS LA NATION ET LA SOCIÉTÉ

[

1961: HOMMAGE DU PCA AUX FEMMES DE L’ALGÉRIE EN GUERRE

SPÉCIAL « AL HOURRIYA » (LIBERTÉ) N° 38 DU 18 FEVRIER 1961

->203]

socialgerie – article 203 – mis en ligne la 28 février 2010

Lire article

Lire “LIBERTÉ” (“AL HOURIYA”) n° 38 du 18 février 1961, http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1961_11_18_LIBERTE_n38_Femmes_K9.pdf


1961 UN ARTICLE DEPUIS L’ALGÉRIE EN GUERRE

[

NOTRE FRÈRE
par Sadek H A D J E R E S
( Alger, 1961)

->123]

[QUI SONT NOS FRÈRES ET AMIS?

… OU COMMENT DES ARABES DÉTRUISENT L’ARABITÉ!->123]

texte de Sadek Hadjerès – 1961

socialgerie – article 123 – mis en ligne le 9 décembre 2009

http://www.socialgerie.net/spip.php?article123

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/notre_frere.pdf

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1961_Notre_frere_FN_K15_Hellou.pdf

Le texte de cet article, intitulé « Notre Frère », est paru en 1961. Je l’avais écrit puis envoyé à «France Nouvelle» (hebdomadaire du PCF).alors que j’étais depuis six ans clandestin et activement recherché dans la capitale de l’Algérie en guerre, quadrillée et soumise quotidiennement aux crimes des colonialistes français.

J’y exprimais notre douleur et notre indignation à l’annonce d’un nouveau et grave méfait du régime du Caire, perpétré contre les forces progressistes du monde arabe dans l’éphémère R.A.U  » (République Arabe Unie) englobant de façon hégémonique la Syrie et le Liban.

Cet épisode fut d’autant plus douloureux à nos cœurs de patriotes et communistes algériens, qu’avec l’ensemble de notre peuple, nous continuions à vibrer de sympathie et de solidarité envers les conquêtes anti-coloniales, économiques et sociales du peuple égyptien. Elles étaient malheureusement stérilisées, comme le confirmeront les décennies suivantes, par l’hégémonisme anti-démocratique et antisocial, qui portera progressivement un coup fatal au rêve légitime d’unité d’action des peuples et des Etats dans le monde dit « arabe ».

J’aurai l’occasion de revenir sur nombre de manifestations de cet hégémonisme aux visages multiples. Il a ravagé les espoirs de plusieurs peuples, et particulièrement chez nous où furent diabolisés tous ceux qui militaient pour une algérianité rassembleuse, révolutionnaire, démocratique, sociale, ouverte à toutes ses richesses culturelles et aux autres peuples de la région et du monde.
C’est pourquoi, à l’occasion de la flambée des passions chauvines actuelles, il convient non pas d’abolir le mot de « Frères » (tout comme ceux de camarades ou d’amis, porteurs de valeurs positives), ni de l’appliquer abusivement à ceux qui consciemment ou inconsciemment détruisent la fraternité des peuples, à ceux qui ont dévasté la cause de la libération arabe par les pratiques de la répression ou des complots prétendument scientifiques.

La vraie fraternité de lutte n’était pas un mirage, un faux semblant. Elle était vécue et intensément ressentie au niveau des peuples, elle avait accompli des miracles en de nombreux moments historiques. Mais elle ne se mesure pas aux slogans et formules hypocrites. Tout comme au sein des familles biologiques, elle se mesure dans les comportements, dans le vécu,à la façon dont sont réglés les litiges d’intérêt, les incompréhensions, à la façon dont sont affrontés ensemble et dans l’écoute mutuelle les dangers et les moments difficiles.


1961


[

SERKADJI, quartier des femmes

« “AL HOURIYA” (“LIBERTÉ”), ALGER – 1961

->38]

socialgerie – article 38 – mis en ligne le 8 juillet 2009

« Al Houriyya » (Liberté), organe central du Parti Communiste Algérien, présente à ses lecteurs et lectrices des extraits d’un récit qu’une de nos militantes emprisonnée pour son activité patriotique a rédigé jour après jour et a réussi à nous faire parvenir. Elle y relate les souffrances, les luttes, les espoirs de nos sœurs emprisonnées.

«à toutes mes sœurs qui ont souffert ou souffrent encore en prison et dans les camps pour l’Indépendance de notre pays.»
Bénis soient les matins sans guillotine (…)

SERKADJI , quartier des femmes, « AL HOURIYA » (LIBERTÉ), ALGER – 1961
Voir article 38, mis en ligne sur le site le 8 juillet 2009.
Pour accéder à l’article cliquer ici… http://www.socialgerie.net/spip.php?article38

Pour accéder à la présentationb originale du texte «Serkadji quartier de femmes – Al Houriya – 1960», document numérisé téléchargeable, fac-similé de l’original, cliquer ici … http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1960_Serkadji_Quartier_de_Femmes_Al_Houriyya_05-07-16_-3_-9.pdf


1961


LE CAMP
PRÉFACE DE SADEK HADJERES AU LIVRE DE ABDELHAMID BENZINE, PUBLIÉ EN 1961, POUR SA RÉ-ÉDITION EN 1986

socialgerie – article 1178 – mis en ligne le 7 mai 2013

http://www.socialgerie.net/spip.php?article1178

http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Le_camp_preface_SH.pdf


18 avril 1962


PROGRAMME DU PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN

le 18 avril 1962

[

PROGRAMME DU PARTI COMMUNISTE ALGÉRIEN,

POUR OUVRIR LA VOIE AU SOCIALISME,

POUR L’INDÉPENDANCE TOTALE,
LA TERRE ET LE PAIN,

LE TRAVAIL ET L’INSTRUCTION,

LA PAIX ET LA DÉMOCRATIE RÉELLE

->233]

socialgerie – article 233 – mis en ligne le 11 juin 2010

Pour accéder à l’article, cliquer ici… http://www.socialgerie.net/spip.php?article233

Pour accéder au document numérisé, fac-similé de l’original, pdf, téléchargeable (205.9 ko), cliquer ici … http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/233_1962_04_18_PCA_PROGRAMME_num_pdf.pdf


Mai 1962


[

ESSAI SUR LES PROBLÈMES DE LA DÉMOCRATIE
DANS L’ALGÉRIE INDÉPENDANTE

->306]

par Sadek Hadjerés Membre du BP du PCA

Ed: «Al Houryya», Alger (mai 1962)»

socialgerie – article 306 – mis en ligne le 28 novembre 2010

pour accéder au texte mis en ligne par , cliquer ici … http://www.socialgerie.net/spip.php?article306

pour accéder au document original cliquer ici … http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/306_1962_pb_democratie_2.pdf


Autres articles qui peuvent contenir des références utiles:


[

PCA-CDL (Combattants de la libération)

et

FLN-ALN DANS LA GUERRE INDÉPENDANCE:
LIENS UTILES SUR SOCIALGERIE

->br435]

http://www.socialgerie.net/spip.php?breve435


[

Sadek HADJERES :

REPERES BIOGRAPHIQUES ET POLITIQUES

(de 1928 à 1966)

->266]

socialgerie – article 266 – mis en ligne le 3 septembre 2010

http://www.socialgerie.net/spip.php?article266


[

« L’ALGÉRIE LIBRE VIVRA
1949 : VIVE L’ALGÉRIE,
par IDIR EL-WATTANI »

->74]

socialgerie – article 74 – mis en ligne sur le site le 20 novembre 2009

Pour accéder à l’article cliquer ici…
http://www.socialgerie.net/spip.php?article74

Pour accéder au document numérisé téléchargeable, cliquer ici …
http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/74_doc_pp_1949_ALGERIE_LIBRE_VIVRA_IDIR_EL_WATANI.pdf


L’ÉDIFICATION DES INSTRUMENTS POLITIQUES DE LA RÉVOLUTION À CUBA (1962-1963)

Notes de voyage de Sadek Hadjeres

Préface de Bachir Hadjali
brochure , publiée par le PAGS le 11 avril 1978

socialgerie – mis en ligne le le 27 février 2010

Retour d’un voyage à Cuba 1963: 4 articles de Sadek Hadjeres publiés par Alger Républicain les 4, 5, 6 et 7 juin 1963 :

  • AVANT-GARDE RÉVOLUTIONNAIRE ET FRONT DE MASSE À CUBA (Alger Républicain:du 4 Juin 1963 ;
  • LA DÉMOCRATIE : ARME INDISPENSABLE DU SOCIALISME (5 juin 1963)
  • LA MOBILISATION DÉMOCRATIQUE DU PEUPLE (6 juin 1963)
  • QUELQUES ENSEIGNEMENTS de la révolution cubaine (7 JUIN 1963)

pour accéder au scan de la brochure originale (5.3 Mo), cliquer ici… http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/1963_1978_6K_Cuba_1963.pdf

Pour accéder aux documents originaux scanés (pdf., 2.5 Mo), mis en ligne par Socialgerie le 27 février 2010, cliquer ici… http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Alger_Republicain_4-7_juin_1963_articles_de_S_Hadjeres_de_retour_de_Cuba.pdf


POUR FACILITER LA CIRCULATION SUR LE SITE

[

LISTE CHRONOLOGIQUE DES DOCUMENTS ET ARTICLES MIS EN LIGNE
(CLASSEMENT PAR DATE DE PREMIÈRE PUBLICATION / OU ÉCRITURE )

mardi 8 juin 2010->108]

http://www.socialgerie.net/spip.php?article108


QUELQUES INFORMATIONS ET RÉFLEXIONS AUTOUR DES RELATIONS PCA-FLN DURANT LA GUERRE DE LIBÉRATION

socialgerie – le 30 janvier 2010, texte de Sadek Hadjeres

Lire l’article : … http://www.socialgerie.net/spip.php?article167 – mis en ligne : le 2 février 2010


[

DONNER LA PAROLE AU PEUPLE,

ET LUI FAIRE CONNAÎTRE

LE PROGRAMME DE TRIPOLI

->237]

DÉCLARATION DU P.C.A – le 30 août 1962
Lire la déclaration … http://www.socialgerie.net/spip.php?article237


[

DÉCLARATION DE LARBI BOUHALI
CONTRE LE COUP DE FORCE ANTI-UGTA

SYNDICAT – UGTA – FLN, APRÈS L’INTERDICTION DU PCA

le 7 JANVIER 1963 (Alger Républicain)

->112]

socialgerie – article 112 – mis en ligne le 9 juin 2010


ALLEG, OU L’HUMANISME CHEZ UN «BOLCHO»


Un public très nombreux était présent ce samedi 25 octobre à la salle des fêtes Jean Jaurès à Malakoff, Hauts de Seine, pour rendre un hommage à Salem Henri Alleg.

Historien, écrivain, journaliste et surtout grand résistant anticolonialiste, (Moudjahid), durant la guerre d’Algérie, Henri nous a quittés il y a un an.

Expo photos, livres, tables rondes, projections vidéo, prise de parole étaient au programme.

Ont pris la parole entre autre:

  • Sadek Hadjeres , ancien dirigeant du PCA et premier ex-secrétaire du PAGS,
  • le représentant des «Éditions de Minuit» éditeur du livre d’Henri «La Question» dans lequel Henri dénonçait la torture pratiquée en Algérie durant la Guerre de Libération Nationale et qu’il a affreusement subie dans sa chair dans les prisons d’Alger.
  • Également ont pris la parole le philosophe Jean Salem , fils d’Henri, William Sportisse , auteur du livre: «Le Camp des Oliviers» et bien d’autres intervenants avant que le public n’intervienne pour témoigner et poser des questions.

Une rencontre émouvante où de très nombreux vétérans progressistes, militants anticolonialistes, amis de l’Algérie ont tenu à être présents et ce malgré leurs âges avancés.

Tous ont affirmé transmettre, en toute confiance, le flambeau à la jeunesse d’aujourd’hui pour poursuivre leur lutte, leur combat pour un monde meilleur, pour plus de justice sociale, de liberté, de paix et d’amitié entre tous les peuples. Un après-midi chaleureux qui s’est achevé le soir par un repas. Au menu du …..couscous bien sûr !

Louelh Khider

Précision : Alleg est le pseudo journalistique d’Henri. Son véritable nom est: Salem Henri.


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ALLEG, OU L’HUMANISME CHEZ UN « BOLCHO »

Intervention de Sadek Hadjerès à Malakoff

le 23 octobre 2014

Chers amis de notre regretté Henri,

J’ai évoqué à plusieurs reprises dans la presse nationale et internationale les facettes multiples du parcours personnel et politique de Henri, mon camarade de lutte et ami des soixante dernières années.
Aujourd’hui, au risque de paraître unilatéral, je concentrerai mon évocation sur un aspect particulier, la sensibilité humaine qui imprégnait la vie et l’action de Henri. .

Si j’ai choisi ainsi de faire ressortir davantage les qualités humaines du parcours de Henri, déjà sous-jacentes dans mes évocations précédentes, c’est parce que j’estime ce trait important dans le comportement d’un militant et d’un dirigeant.

Et en même temps, cette qualité m’est parue souvent méconnue ou masquée aux yeux du plus grand nombre par l’autre trait majeur qui l’accompagnait chez Henri. Je veux dire sa fermeté dans les épreuves, le courage physique et politique de ses engagements, sur lequel je n’ai pas besoin de m’étendre.

Leur effet d’exemple tonique et mobilisateur lui a valu l’estime et la réputation de «bolchevik». L’étiquette ne lui déplaisait pas, il accueillait cette allusion anachronique avec humour et une fière et malicieuse coquetterie. Prestigieuse pour les uns, haïe par les propagandes malveillantes, l’étiquette prend lorsqu’elle est comprise mécaniquement et hors contexte historique, l’allure d’une image d’Epinal. Celle du communiste «pur et dur» des années vingt, présenté caricaturalement comme un être insensible, imperméable à tout ce qui n’est pas sa pratique militante.

Il se trouve que l’image d’Epinal peut être partagée par des militants sincères à qui il peut arriver de confondre fermeté dans le combat avec autoritarisme et dureté injustifiée envers ses concitoyens ou ses camarades.

En parlant chez Henri d’un vrai humanisme en pensée et en actes, je sais combien ce terme comme celui de démocratie est galvaudé. Les interprétations moralisantes et ambiguës le réduisent à des sentiments de compassion et l’opposent à la combativité et la fermeté dans le combat.

Chez Henri et nombre de ses camarades, l’humanisme signifie lutter pour respecter et faire respecter tous les droits humains, individuels et collectifs contre les forces qui tendent à les écraser ou les amoindrir.

Pour Henri, un bolcho peut et doit porter haut les valeurs humanistes, y compris dans les conditions de plus en plus impitoyables et complexes des combats actuels.

Ma conviction est que prendre exemple sur Henri ne consiste pas à dresser de son parcours et de sa pensée un tableau simpliste. C’est souligner et promouvoir en actes la complémentarité de son engagement de classe avec sa fibre et sa finalité humaines.

Sans cette complémentarité, l’attachement intellectuel et activiste de Henri à la cause du communisme n’aurait pas gagné l’impact et la signification qu’ils ont eu dans la société et le champ politique algérien ou français.

Je dirai même plus: c’est grâce à son attachement aux aspirations humaines primordiales qu’il est parvenu en général à éviter dans ses combats les deux écueils politiques que sont l’autoritarisme sectaire et le laxisme opportuniste, l’un et l’autre significatifs, chacun à sa manière, d’un mépris ou d’une sous-estimation des couches sociales et populaires au nom desquelles et pour lesquelles on se bat.

Je voudrais l’illustrer sur plusieurs décennies de nos luttes communes.

La sensibilité de Henri au vécu de ses semblables, à l’opposé d’une conception doctrinale désincarnée, m’avait frappé chez lui depuis le début des années cinquante, à l’ école élémentaire du parti qu’il avait dirigée à Alger- Saint Eugène.

Moi-même, j’étais alors venu depuis peu d’une organisation nationaliste indépendantiste dont l’élan patriotique correspondait bien aux aspirations de la jeunesse et des couches populaires, mais dont certaines étroitesses et la faiblesse programmatique m’avaient déçu.

Dans cette école, le sens de la pédagogie et de l’humain de Henri m’ont convaincu que je venais de faire le bon choix politique, à savoir qu’il était possible de joindre la sensibilité patriotique et humaine avec la rigueur théorique dont j’étais assoiffé.

Lui et d’autres camarades m’ont ainsi mieux armé pour contribuer à corriger dans l’action, les faiblesses précédentes que le PCA était en train de surmonter.

Cette école fut une bonne cuvée pour la quinzaine de jeunes camarades parmi lesquels j’y rencontrai pour la première fois Henri Maillot, Fernand Iveton et plusieurs autres qui honoreront les luttes futures du PCA.

Nous avions retenu de Henri une sentence (je crois de Engels) qu’il nous avait traduit de l’anglais: c’est en le mangeant qu’on vérifie si le «pudding» est bon. Il nous mettait par là en garde contre la suffisance dogmatique, les longues incantations, références abstraites à une «bible» marxisante, tout en soulignant la vertu première du militant communiste, son lien et son empathie avec les humbles et les travailleurs opprimés.

Chers amis et camarades,

Henri est un de ceux à l’exemple de qui je dois le goût de l’effort pour conjuguer l’éclairage théorique avec l’écoute et l’attention aux problèmes des gens. Pour s’interroger, ne pas se draper dans de fausses assurances, ne pas se croire seuls et en tous domaines déjà détenteurs de toutes les vérités.

Il faisait confiance, avec vigilance et compréhension, à l’intelligence et à l’initiative sociale des opprimés et des exploités qui n’ont pas tous lu Marx loin s’en faut.

Quand Henri est arrivé en Algérie au début des années quarante, ils étaient très nombreux les camarades français ou algériens qui étaient imprégnés de la doctrine de Marx Engels ou des écrits de Staline sur la question nationale, ainsi que des positions de principe mémorables défendues auparavant par le PCF. Ce capital théorique était réfracté chez nous au prisme d’un éclairage international nécessaire mais lui-même tronqué par un francocentrisme en coupure avec une réalité algérienne bouillonnante.

C’est pourquoi ce capital théorique n’avait pu éviter à nombre de camarades pleins d’abnégation, (entre 1943 et 1946) de mener le parti aussi bien français qu’algérien «à côté de la plaque», c’est à dire l’élan national indépendantiste à un moment crucial de l’évolution algérienne.

Pourquoi à cette période chez Henri et d’autres camarades, la pensée de Marx a-t-elle mieux fleuri pour leur faire prendre conscience d’un désastre politique à réparer d‘urgence pour un redressement salutaire?

Parce que la graine du marxisme vivant est tombée en terrain fertile, sur une fibre humaine et sociale de militants sincères, sensibles au malheur et aux pensées des gens, évitant les pièges du seul savoir livresque ou d’un attachement routinier à des analyses dépassées par les évolutions concrètes et érigées en dogmes.

Quelques illustrations :

Henri a livré le secret de cette maîtrise du terrain politique, quand il s’est souvenu du choc douloureux qu’avait provoqué en lui, étranger fraîchement débarqué en Algérie, le spectacle des familles paysannes faméliques, logées en haillons dans une écurie exposée au vent glacial; leur seul souhait, la seule aide qu’ils souhaitaient dans l’immédiat était qu’on les place dans le coin réservé aux bêtes, beaucoup mieux abrité du froid.

La même réalité visuelle était accessible à nombre de militants dévoués et actifs de l’époque. Mais seuls pouvaient correctement faire la jonction entre cette détresse matérielle et l’analyse politique et idéologique, ceux dont le vécu personnel et collectif offrait le terrain propice à cette alchimie particulière du mouvement social, dans laquelle la fibre humaine a un effet catalyseur propice au mariage fécond de la théorie et de la pratique.

Chez les camarades de Henri à l’époque, comme les Maurice Laban, Paul Estorges, William Sportisse, Marylise Benhaim et des centaines d’autres, leur sensibilité et leur ouverture intellectuelle les rendaient plus attentifs à découvrir l’autre et à ne pas rester prisonniers du piège nombriliste.

C’était la qualité de Alleg quand il rencontrait à l’Auberge de la jeunesse d’Alger les jeunes patriotes dramaturges musulmans comme Mustapha Kateb, ou Abdallah Nekli, le futur auteur de la pièce El Kahina, ou d’autres jeunes nationalistes qui ouvraient à son internationalisme des horizons concrets qui dépassaient l’Hexagone.

L’empathie empreinte de modestie pour chaque nouvel environnement social et culturel découvert, évitait à Henri l’illusion de croire qu’un ancrage théorique suffisait pour tout savoir et tout pouvoir.

Il avait appris à lire et écrire l’arabe, aussi c’est Henri fréquemment invité dans les années 80 par les autorités algériennes, qui montrait la route au chauffeur mis à sa disposition par le FLN mais qui ne savait pas lire les panneaux indicateurs récemment et bureaucratiquement arabisés.

Connaître et respecter la langue et la culture de l’autre, cela transforme les relations.

Henri avait compris ce qu’un auteur comme le romancier algérien francophone Mohamed Dib, bien imprégné pourtant des réalités du terroir, n’avait pas saisi dans ses implications politiques. Quand il était dans le début des années 50 à la cellule étudiante Langevin que je venais d’intégrer, Mohammed Dib estimait inutile de s’adresser aux étudiants musulmans en arabe puisque, disait-il, tous comprenaient le français.

Heureusement que son avis ne fut pas écouté, de sorte qu’à partir de 1950 à l’Université se produisit un courant substantiel d’adhésion d’étudiants musulmans vers le parti, dont jusque-là les éloignaient entre autres des préjugés identitaires soigneusement entretenus par les milieux anticommunistes.

Henri avait compris que la lutte politique en Algérie avait besoin de s’ancrer non seulement sur la conscience des importants intérêts objectifs communs, mais aussi sur les passerelles culturelles et de civilisation à construire et renforcer à travers le vécu interactif et les luttes quotidiennes.

Henri et Alger républicain sous sa direction ont contribué dans le cadre des orientations du PCA à ce rôle de rassembleur et éveilleur de valeurs culturelles mutuellement bénéfiques.

Cela était l’un des devoirs et des mérites du mouvement communiste, mais n’était pas toujours évident pour certains, même des décennies plus tard.

Dans la première décennie de ce siècle, Henri et moi étions sortis profondément déçus de la façon dont s’était déroulé un hommage au camarade Abdelhamid Benzine récemment décédé. L’impréparation sur le fond de la commémoration avait livré les souvenirs des amis participants à des évocations purement anecdotiques, réduites au souvenir euphorique de leurs rencontres bien arrosées avec le camarade disparu. L’un des intervenants dont je ne dirai pas le nom mais que quelques- uns reconnaîtront, emporté par la verve d’islamophobie maladive qu’il développera plus tard, alla jusqu’à inventer ce qu’il considérait comme un acte social et politique glorieux, une supposée posture athéiste provocatrice de Hamid (il n’est pas sûr, affirmait-il avec jubilation, comme s’il y avait assisté, que Benzine face à la mort ait levé le doigt de la chahada, (profession de foi musulmane). J’observais avec stupeur que l’assemblée commémorative, dans la vague des épanchements sentimentaux anecdotiques, était passée à côté de l’essentiel, c’est à dire le souffle nouveau qui avait animé la rédaction du journal lorsque Hamid et d’autres y étaient arrivés.

À mon grand soulagement, Henri fut le seul à réveiller les esprits et donner consistance à l’hommage; il rappela qu’avec l’apport de Hamid et de Mohammed Ferhat notamment, Alger-rep avait réussi à se dégager d’une tonalité culturelle francocentriste dominante et à s’ouvrir davantage au large public imprégné de culture arabe et islamique, au bénéfice des mobilisations de masse et des idéaux sociaux et démocratiques défendus par le journal.

Ce n’était pas le seul apport de Henri, avec d’autres camarades, à une audacieuse politique de rassemblement national pour l’indépendance.

Ferme et vigilant sur les principes, Henri savait dans les formes être unitaire pour deux quand il s’agissait d’amener à l’union dans l’action les bases sociales et militantes dont les dirigeants nationalistes exploitaient les préjugés hostiles à l’action commune.

Il savait ne pas s’agripper aux formulations consacrées par l’orthodoxie ou la langue de bois quand elles servaient de prétexte aux fauteurs de division. Il désarmait ainsi les intransigeances verbales des partenaires du mouvement national qui avaient pour but de justifier les exclusives et les sectarismes anticommunistes.

William Sportisse a bien raconté comment dans les années quarante les représentants de l’UJDA dont Henri avait fait partie et ceux des formations de jeunes et étudiants nationalistes auxquels j’appartenais alors, ont donné ensemble une nouvelle impulsion à l’unité d’action patriotique. Ils avaient eu la bonne idée, sacrilège aux yeux des sectaires des deux bords, d’adopter simultanément les formulations de libération nationale et d’indépendance, qui jusque-là s’opposaient dans des querelles byzantines dont profitaient les courants sectaires des deux côtés.

Il avait quand même fallu aux jeunes camarades une certaine hardiesse, pour dépasser les rigidités et les routines d’une ligne politique retardataire. Leur courage politique risquait en effet d’être confondu avec un acte d’indiscipline, qui aurait pu leur valoir un rappel à l’ordre ou des sanctions pour avoir transgressé une expression rigide et consacrée de la ligne du parti. La sagesse des dirigeants plus anciens en place a fait que le signal des jeunes a été compris sous son vrai jour, une initiative novatrice, bénéfique à l’action unitaire et offensive du parti.

Il n’en a pas toujours été ainsi et les points de vue de Henri n’ont pas toujours rencontré la même écoute attentive. À l’inverse, d’autres camarades ont pu penser aussi qu’il n’a pas été assez attentif en certaines circonstances à leurs avis ou préoccupations, estimant que cela ne ressemblait pas à l’esprit d’écoute qu’ils lui connaissaient.

Là j’aborde un autre volet qui illustre à quel point le plus souvent il ne sert à rien d’accabler les uns et les autres de jugements tranchants. L’écoute mutuelle est toujours précieuse car souvent la responsabilité des malentendus est partagée ou résulte facteurs et pressions externes indépendantes des bonnes intentions.

Ainsi quand Henri a exprimé des opinions qui dérangeaient, le plus important n’était pas en la circonstance de savoir sur le champ jusqu’à quel point ces opinions étaient fondées ou non, cela seule l’expérience pouvait ultérieurement départager et rapprocher les opinions contradictoires.

L’important était surtout à mon avis que l’expression des points de vue différents permettait d’ouvrir des espaces de débats utiles quand il y avait encore une marge de temps suffisante avant de prendre des décisions de caractère stratégique. Dans certains cas, l’insuffisance de débat a occasionné des préjudices difficilement rattrapés plus tard.

Un exemple parmi d’autres concernant les opinions progressistes de France et d’Algérie. À part une dizaine d’années après l’indépendance, il y a eu plus qu’à redire sur les vingt dernières années suivantes à partir de 1973, avec la défaillance des traditions de solidarité du PCF envers le mouvement démocratique et social algérien. Pendant que s’exerçait contre nous la lourde chape antidémocratique, antisyndicale et anticommuniste des autorités algériennes au nom du parti unique FLN, Henri, alors devenu membre du PCF après 1974, n’a jamais approuvé et il l’a montré en actes, la caution donnée par la direction de son parti à ce régime qualifié prétendument de socialiste.

La caution plus que douteuse allait jusqu’à interdire à ses journalistes de l’Huma ou autres responsables présents ou invités en Algérie, de prendre contact avec leurs propres camarades et amis communistes algériens.

Henri disait par contre franchement aux responsables FLN, qui respectaient sa position, qu’il était décidé à rencontrer les camarades et familles algériennes qu’il connaissait. Il tenait parole et a même fait plus, il m’a rencontré alors que j’étais clandestin et recherché au moment où il préparait son ouvrage en trois tomes sur la guerre d’indépendance pour recueillir mon témoignage sur l’engagement des communistes algériens dans cette guerre.

Il faut dire que Henri, à cause de ses positions de principe, n’a pas été non plus toujours en odeur de sainteté auprès de quelques camarades algériens au moment où les convictions de classe de ces derniers subissaient la pression ou un assaut qui les rendait perméables aux orientations idéologiques anticommunistes.

Ainsi pour des raisons purement formalistes, Henri qui avait été une dizaine d’années environ membre algérien du PAGS puis n’a cessé de le soutenir de toutes ses forces ne fut pas invité, ne fut-ce qu’à titre symbolique et honoraire au Congrès du PAGS tenu en 1990 après 24 ans de clandestinité. Cet épisode a douloureusement et longtemps affecté Henri qui, en sa qualité officiellement reconnue de résistant, se sentait par l’action et le cœur aussi algérien sinon plus que de nombreux autochtones.

En fait, ce comportement inélégant envers Henri, témoignait beaucoup moins d’un prétexte nationaliste inavoué envers un camarade d’origine européenne, que d’une sourde hostilité des groupes interne et externe envers les convictions de Henri à un moment qui leur paraissait propice à fourvoyer les traditions d’action de classe autonome du PAGS dans l’impasse ultralibérale, à la faveur à la fois d’une grave menace intégriste réactionnaire et de la dislocation du système mondial d’Etats socialistes.

En fait, Henri a été victime en cette occasion des pressions de l’idéologie nationaliste sur des camarades devenus vulnérables parce qu’à ce moment difficile, ils ont sous-estimé et sacrifié l’approche de classe autonome qui était la base juste d‘une meilleure contribution à la résistance et la mobilisation des forces saines du pays.

Trente ans auparavant, durant la guerre, la même pression combinée de l’idéologie nationaliste et du révisionnisme social avait visé Henri et deux de ses camarades européens à deux reprises, d’abord en prison puis au début de l’indépendance. La manœuvre avait piteusement échoué grâce à la maturité de la direction du parti, des militants et de l’opinion progressiste.

Les deux ou trois camarades qui contestaient le rôle éminent de Henri (parce que «européen») à la direction d’Alger-répubicain (qu’il assumait avec Boualem Khalfa) étaient en retard sur la conscience des travailleurs et des larges masses. Celles-ci, instruites par l’expérience, jugeaient aux actes et estimaient hautement l’action unitaire et patriotique de Henri. Les quelques camarades égarés un moment par des complexes chauvins ou personnels n’avaient pas compris les évolutions positives chez les couches patriotiques sincères.

Ce qui , à un moment donné était à leurs yeux reproché au PCA, à savoir la composition du parti et la participation des européens à la lutte anticoloniale, était devenu durant la guerre et après l’indépendance un mérite historique de plus en plus largement reconnu.

J’ai évoqué quelques unes des qualités dont Henri avait enrichi ses camarades, tout en s’enrichissant lui-même des apports dont foisonnait le parti. J’espère que cela ne ressemble pas à ce genre de panégyriques officiels dont il avait lui-même horreur.

Henri estimait, comme beaucoup d‘entre nous, que chacun avait ses limites. Sans l’ assurance arrogante de ceux qui ne doutent de rien, il s’interrogeait, me demandait souvent après une intervention ou une de ses actions: «ai-je bien fait, comment trouves-tu cela?». Il reconnaissait de lui même, qu’il ne pouvait avec la meilleure bonne foi, notamment en tant qu’européen vivant d’autres problèmes, se substituer en donneur de leçons aux principaux concernés. Un jour, à ma surprise, il explosa en se plaignant lui-même avec un grain d’amertume, des difficultés et lenteurs incompréhensibles qu’il rencontrait à faire avancer des initiatives de nature selon lui à gagner de nouvelles forces et sensibilités à la cause. C’est pourquoi Il a été affecté par certaines appréciations à la fois peinées et constructives de jeunes camarades algériens dont je lui ai fait part. Ils continuent à l’adorer pour son parcours et son exemple, mais ils ne comprenaient pas pourquoi, du moins à leurs yeux, il leur semblait cautionner, par esprit de corps ou fatigue, des dérives et méthodes bureaucratiques d’anciens collègues qui ont entraîné le déclin progressif d’Alger républicain et sa coupure avec une grande partie de l’opinion, alors que les nouveaux contextes nécessitaient de faire vivre davantage encore l’esprit créateur et de confiance envers les jeunes qu’ Henri avait insufflé au journal jusqu’à 1965.

C’est pourquoi, en plus de la peine de perdre un ami intime des décennies inoubliables, plus grande a été encore ma peine de ne pouvoir poursuivre avec lui les échanges que depuis longtemps nous souhaitions voir déboucher sur un meilleur passage de relais vers les nouvelles générations.

Comme vieux retraités toujours en exercice, nous tenions régulièrement ce que nous appelions nos réunions de cellule à deux, dans la discrétion des cafés et petits restaurants de Malakoff. Nous retrouvions alors le noyau toujours vivace des efforts de pensée qui ont imprégné nos vies militantes. Cela réchauffait nos cœurs tout en maintenant notre vigilance critique. Nous nous laissions aller au plaisir des confidences non pas empreintes de nostalgie à l’évocation des épreuves passées, mais en confrontation avec les interrogations d’un présent et d’un avenir qui dans leur simplicité fondamentale, devenaient de plus en plus complexes.

Abordant entre nous ce qu’il nous était plus délicat d’énoncer publiquement, nous nous demandions comment nous pourrions sans langue de bois faire bénéficier les jeunes générations des expériences nationales et internationales heureuses ou malheureuses de leurs aînés.

Nous envisagions de le réaliser un jour à travers des entretiens croisés en présence de camarades historiens et journalistes, avec qui j’avais évoqué une telle initiative. Le projet mûrissait jusqu’au jour où il fut dépassé, d’abord avec le calvaire de la longue maladie de Gilberte, puis le mal qui l’a terrassé à son tour, à la veille d’une rencontre en Grèce qu’il m’avait annoncée au téléphone avec une voix lente et affaiblie qui m’avait terriblement inquiété.

Le grand danger dont il était conscient est celui que nous évoquions entre nous lors des obsèques de notre regretté camarade et ami Julot Molina, dont la collaboration me fut précieuse durant la clandestinité sous les règnes de Boumediène et Chadli. Nous étions impressionnés par l’océan de têtes blanches des camarades et amis présents aux obsèques, et nous cherchions à y repérer quelques îlots témoignant d’une relève de la jeunesse.

Le miracle d’une relève conséquente, il en convenait dans nos rencontres où il s’épanchait, ne se produirait à une étape historique nouvelle pour l’Algérie, la France et le monde, qu’avec des ingrédients sociaux et idéologiques aussi mobilisateurs que ceux qui avaient permis il y a soixante-dix ans à la jeune génération dont il faisait partie, de s’affirmer dans le torrent populaire vainqueur du nazisme et du colonialisme.

Il espérait la montée en clarté et dynamisme de cette jeunesse, avec qui il aimait multiplier les rencontres. Et en dépit des raisons du pessimisme de l’époque traversée, nous aimions nous répéter une phrase qu’un vétéran soviétique antifasciste m’avait adressée alors qu’il s’apprêtait à prendre des risques en solidarité avec le PAGS. Il m’assurait de son internationalisme avec chaleur dans son français boiteux: «Moi, n’importe quel, je, communiste!»

C’était devenu avec Henri et beaucoup d’autres une sorte de devise: notre attachement au communisme comme mouvement conscient et actif de la société au service de l’Homme.

Ce sera ma conclusion, qui sera partagée largement je l’espère à travers toutes les péripéties et autres ruses de l’Histoire

Sadek Hadjeres, 15 octobre 2014.


ELECTIONS BRESILIENNES. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE, ENJEU CENTRAL

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par Saoudi Abdelaziz

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le 25 Octobre 2014

« Douze ans après l’élection de Luiz Inacio Lula da Silva, plus personne ne remet en cause les politiques sociales introduites par l’ex-ouvrier de la métallurgie, du moins pas directement. C’est en revanche sur la politique étrangère que s’expriment des désaccords radicaux ».


LE MONDE VU DU BRÉSIL:

«EUROPE ET ETATS-UNIS N’ONT PAS COMPRIS

QUE LES ÉQUILIBRES ONT CHANGÉ»

Par Lamia Oualalou

le 24 octobre 2014

Mediapart

Lamia Oualalou est journaliste, spécialiste de l'Amérique du Sud

EXTRAITS

Douze ans après l’élection de Luiz Inacio Lula da Silva, plus personne ne remet en cause les politiques sociales introduites par l’ex-ouvrier de la métallurgie, du moins pas directement.

C’est en revanche sur la politique étrangère que s’expriment des désaccords radicaux entre la présidente sortante Dilma Rousseff, candidate du Parti des travailleurs (PT), et son adversaire Aécio Neves, qui représente le Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB), une formation aujourd’hui clairement ancrée à droite
.

Alors que le second tour de l’élection présidentielle se tient dimanche 26 octobre, et s’annonce extrêmement serré, nous avons interrogé Marco Aurélio Garcia. Il est depuis douze ans le conseiller spécial aux affaires internationales de la présidence, tout d’abord de Luiz Inacio Lula da Silva, puis de Dilma Rousseff. À ce titre, il a été et demeure un des acteurs clés de la politique internationale du Brésil, élaborée entre le palais présidentiel du Planalto et celui d’Itamaraty, qui abrite le ministère des affaires étrangères à Brasilia.

Dans ce long entretien, il revient, pour “Mediapart”, sur les principales options du gouvernement, ses relations avec les États-Unis, sa vision de l’Europe, son étonnement par rapport à la politique étrangère française et, plus généralement, sur le monde vu du Brésil.

Depuis 2002, comment a évolué l’insertion du Brésil dans le monde?

Elle a changé parce que le Brésil a changé. Un pays peut difficilement jouer un rôle important sur la scène mondiale s’il ne résout pas ses problèmes économiques, sociaux et politiques. Je n’aurais pas l’arrogance de dire que le Brésil a tout résolu, mais nous avons au moins compris que l’inégalité était le problème fondamental. J’insiste, ce n’est qu’un début.

En nous attaquant à l’inégalité sous son angle économique, nous avons réalisé que la question était beaucoup plus complexe, et la tâche plus ardue. Il y a aujourd’hui dans notre pays des revendications nouvelles sur la qualité des services, qu’on a vu surgir durant les manifestations de 2013.

Je prends l’exemple des aéroports: ils fonctionnaient correctement quand ils accueillaient 34 millions de passagers par an. En une décennie, avec la hausse du revenu de la population, il y a 140 millions de passagers et les équipements sont totalement dépassés.

Passer d’un pays pensé pour une petite élite à un pays pour tous n’est pas simple.

La présidente Dilma Rousseff a annulé l’an dernier la visite d’État prévue à Washington après avoir découvert qu’elle était directement mise sous écoutes par le gouvernement américain. Où en est depuis cette relation avec les États-Unis?

La qualité de notre relation avec les États-Unis est similaire à celle que nous maintenons avec la «Carpatie» ou avec la «République centre-asiatique», la seule différence, c’est que les États-Unis sont un grand pays… Plaisanterie mise à part, nous devons surmonter cet épisode, mais ce n’est pas simple.

Nous attendons qu’ils fassent un geste. Après tout, ce sont eux qui ont créé le problème.

Notre politique étrangère ne peut pas être guidée par un sentiment anti-américain, même si je comprends ce dernier et qu’il est parfois justifié en Amérique latine, et même au Brésil.

Nous devons passer outre même pour des épisodes aussi désagréables que celui de l’espionnage. Mais nous ne pouvons pas accepter une relation asymétrique.

Lors de son discours à la tribune de l’ONU, en septembre, la présidente Dilma Rousseff a critiqué les bombardements en Syrie destinés à attaquer l’État islamique. Quelle serait l’alternative?

Nous condamnons le terrorisme sans la moindre ambiguïté, c’est une horreur qui va à l’encontre de toutes nos valeurs républicaines, éthiques et morales.

Mais on ne peut pas éternellement nous imposer les erreurs des autres et nous demander de les légitimer.

Toute cette histoire a commencé quand on a décidé, contre l’avis de l’ONU, de bombarder l’Irak. Ce n’était pas un modèle de démocratie, loin de là, mais les communautés y cohabitaient de façon plus ou moins équilibrée.

Aujourd’hui, c’est le chaos, tout comme en Libye.

Et tout cela découle aussi de la non-résolution de la question palestinienne.

Il y a la conjonction de deux éléments: la grande difficulté de la région à s’auto-réformer, ce qui est apparu durant le «Printemps arabe», et la conduite totalement erratique des grandes puissances occidentales.

L’Europe est, depuis sept ans, plongée dans la crise économique. Cette situation vous préoccupe-t-elle?

Bien sûr, d’autant plus que le processus de formation de l’Union européenne a longtemps constitué un modèle pour les Latino-Américains.

Aujourd’hui, voir démonter l’État-providence, assister à l’effondrement de la gauche, à la montée en puissance de l’extrême droite et des discours xénophobes, tout cela donne l’impression que l’idée même d’Europe, ce grand projet de civilisation, est en danger. L’impact sur la politique étrangère de la région est très net.

Comme je vous le disais à propos du Brésil, il faut résoudre ses problèmes internes pour arriver à se projeter dans le monde, et l’Europe aujourd’hui est marquée par la fragilité.

La crise européenne souligne une autre question: je pense que le projet régional a péché par absence de politique étrangère commune et de politique de défense. L’Europe a continué à dépendre de l’OTAN, sans jamais construire sa place dans le monde.

Il y a bien eu une préoccupation souverainiste, manifestée par de Gaulle et d’autres, mais il me semble qu’elle a disparu.

Êtes-vous étonné, par exemple, par les prises de position de la France en termes de politique étrangère?

Franchement, oui. La France était le pays qui portait le mieux cette tradition souverainiste. Pour de Gaulle, l’Europe devait être un facteur d’équilibre dans le monde. À mon sens, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Cette tradition a même survécu au gouvernement atlantiste de Giscard, pour être reprise par Mitterrand et développée par Chirac. Elle a même gardé quelques forces pendant les années Sarkozy.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et je ne comprends pas la logique. Pour moi, la France et l’Allemagne font erreur. Il me semble d’ailleurs que les sociaux-démocrates allemands ont plus conscience que les socialistes français qu’ils font fausse route.

Quel est le principal axe de changement de la politique étrangère introduit par Lula?

C’est tout d’abord une option résolument sud-américaine. Nous pouvions choisir d’essayer d’exister seul dans le nouvel ordre mondial, ou de nous présenter comme une puissance entourée de ses voisins, comme nous l’avons fait.

Pour nous, l’Amérique latine est un atout. C’est un territoire immense, avec une biodiversité richissime, des ressources énergétiques, minières, hydrauliques, agricoles.

La dernière décennie a été marquée par des politiques sociales dans pratiquement toute la région, ce qui a transformé ses 400 millions d’habitants en consommateurs.

C’est enfin une zone de paix, sans conflit entre les pays, hormis quelques différends frontaliers.

Pensez-vous que la marginalisation de l’OEA, qui exclut Cuba de ses réunions depuis la révolution, aboutira à la réinsertion de l’île dans les institutions régionales?

C’est déjà le cas. Hormis le Mexique, toute la région avait rompu avec Cuba sous pression des États-Unis.

Aujourd’hui, tout le monde a renoué avec le régime. La Havane est en outre à l’origine d’une coopération sociale dans la région.

Sa diplomatie très active contribue à trouver des solutions de consensus à des questions internes complexes, comme par exemple entre les Farc et le gouvernement colombien.

Il est vrai que Cuba est exclu des Conférences des Amériques, et cela a provoqué un gros malaise au cours de la dernière, organisée à Cartagena, en Colombie. Il a été décidé que ce serait la dernière fois que La Havane n’est pas représentée.

Panama qui accueille la prochaine édition, l’année prochaine, a déjà invité Cuba. Au Président Obama de décider s’il ira ou non, la balle est dans son camp.

Texte intégral: Mediapart


À 80 ANS, LE SOCIOLOGUE SUISSE JEAN ZIEGLER N’A RENIÉ NI MARX NI LE COMMUNISME

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mis en ligne Assawra

le 15 octobre 2014

propos recueillis par Ian Hamel

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Durant l’été 2013, Olivier Bétourné, président des éditions du Seuil, de passage à Genève, dîne avec son ami Jean Ziegler. Contemplant les enseignes des grandes banques, des compagnies d’assurances, des bijouteries de luxe sur les bords du lac Léman, il provoque le sociologue suisse. « Tu as été député, professeur, écrivain, membre du bureau de l’Internationale socialiste, mais finalement, à quoi as-tu servi? »

De cette conversation vient de sortir “Retournez les fusils”, une réédition, totalement remaniée, d’un ouvrage paru trente-cinq ans plus tôt [[Jean Ziegler, “Retournez les fusils! Choisir son camp”, Seuil, 294 pages..]] À 80 ans (il est né en avril 1934 à Thoune, dans le canton de Berne), l’auteur de “La Suisse lave plus blanc” se déclare toujours marxiste, communiste et… croyant.


Pourquoi avoir repris comme autobiographie intellectuelle le titre de l’un de vos livres les moins connus?

« Retournez les fusils » était le slogan des socialistes pacifistes qui se sont réunis clandestinement en septembre 1915 à Zimmerwald, en Suisse, dans une bourgade du canton de Berne. Le manifeste avait été rédigé par Léon Trotski. Il dénonçait la guerre comme une barbarie produite par le capitalisme, les marchands de canons. Y participaient des Français, des Allemands, des Russes, des Suisses, des Polonais, des Britanniques. Le prolétariat devait retourner ses armes contre les capitalismes, pas contre le camarade étranger.

Si le monde change, vous, en revanche, vous refusez de changer. Vous utilisez toujours la langue de bois en évoquant dans votre livre « la dictature mondiale des oligarchies du capital financier globalisé »…

Et comment voulez-vous les appeler? En 2013, les cinq cents plus grandes sociétés transcontinentales du monde se sont approprié 52,8 % du produit mondial brut (c’est-à-dire de toutes des richesses produites en une année sur la planète). Ces multinationales échappent à tout contrôle, notamment à celui des États. La banque UBS a un chiffre d’affaires qui est cinq fois supérieur au PIB de la Suisse. Ces capitalistes font aujourd’hui un maximum de profits en spéculant sur les aliments de base comme le riz, le maïs, le blé. Les prix explosent, et toutes les cinq secondes, un enfant de moins de dix ans meurt de faim. Aujourd’hui plus que jamais, il faut retourner les fusils.

Que proposez-vous? D’aller flinguer son banquier?

Je ne suis pas un idéaliste irresponsable. Je dis que face à ce monde cannibale, les démocraties ne doivent pas rester indolentes.

Mon livre est un livre d’espoir: des citoyens ordinaires, des mères de famille, des collégiens sont allés manifester devant les magasins de vêtements, de chaussures de sport, pour imposer aux grandes marques comme Benetton, Nike, Adidas de moins maltraiter les malheureuses ouvrières du Bangladesh, après l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza à Dacca, qui a fait plus de 1 300 morts.

Leur requête : « Pas de sang sur mes vêtements. » Ces grands groupes, qui tiennent à leur réputation, ont partiellement cédé sur les salaires minimums, l’hygiène, le droit de se syndiquer. C’est cela que j’appelle Retournez les fusils!

N’êtes-vous pas le dernier communiste, malgré tous les crimes commis en son nom?

Je reste marxiste et communiste. L’idéal communiste n’a été incarné que dans la Commune de Paris. Le communisme est non encore advenu, c’est une utopie. C’est vrai, je me suis souvent lourdement trompé. Je le reconnais. Mais pour citer Jean Jaurès: « La route est bordée de cadavres, mais elle mène à la justice. »

Vous êtes marxiste et chrétien?

Je crois en Dieu, mais je suis pour la dissolution du Vatican, cette cour médiévale ridicule, vraie insulte aux Évangiles.

Vous avez été député socialiste au Conseil national (Assemblée nationale) en Suisse. Vous avez longtemps appartenu au bureau de l’Internationale socialiste. Quel regard portez-vous sur les socialistes, notamment français?

Je n’imaginais même pas que l’Internationale socialiste et le PS français pouvaient sombrer dans une telle déchéance!

Le grand projet du quinquennat de François Hollande, c’est le pacte de responsabilité, qui va permettre aux détenteurs du capital d’augmenter leurs dividendes et de licencier sans problème!

Parti et socialiste sont devenus des gros mots pour les classes travailleuses.

Quant à François Hollande, c’est un pâle rejeton de Guy Mollet… Il est comme le lapin devant le serpent, tétanisé face aux banquiers.

Allez-vous célébrer le centenaire de la conférence de Zimmerwald?

Bien évidemment. Je suis vice-président du comité préparatoire de cette commémoration.


Deux adresses pour vous inscrire à « Assawra »,

la liste de diffusion du Mouvement démocratique arabe:

1 – Assawra3-subscribe@yahoogroupes.fr

ou

2 – as-sawra+subscribe@googlegroups.com



LA BLEUITE GÉNÉRALE

par K. Selim

Le Quotidien d’Oran

le 16 octobre 2014

Inédit, sans précédent, incroyable, inimaginable… Les superlatifs ne manquent pas dans les médias nationaux et chez les politiques de l’opposition pour parler de la grogne des policiers, partie de Ghardaïa pour s’étendre à Alger, jusqu’aux abords de la présidence de la République.

La situation est effectivement «inédite», la police en Algérie a souvent réprimé les manifestations, elle n’a jamais fait de manifestation. On est dans une sorte d’octobre 1988 inversé. À l’époque, pour faire bouger les lignes dans un système bloqué, on a provoqué la société laquelle a poussé la contestation et les revendications bien au-delà de ce qui était souhaité.

C’est cela qui a rendu possible ce que Hocine Aït Ahmed a appelé des «réformes par effraction» menées par le groupe des réformateurs.

Aujourd’hui, les choses se passent totalement à «l’intérieur» du système et les Algériens observent avec circonspection ce mouvement de «manifs policières» qui s’étend.

Pourtant, malgré son caractère «inédit», ce mouvement est lisible. Il était presque annoncé avec cet abcès de fixation violent et désastreux qu’a été la non-gestion des problèmes politiques à Ghardaïa.

Le système est pris à son propre jeu. Il a réussi durant deux décennies à casser -ou à vider de leur sens- les cadres d’organisation de la société en s’appuyant sur l’appareil sécuritaire. Le pouvoir s’est auto-intoxiqué dans cette forme de «bleuite» qu’est la croyance que l’on peut indéfiniment réussir à gérer les problèmes politiques par des moyens sécuritaires.

Ghardaïa est, depuis au moins une année, l’illustration caricaturale de cette manière d’appréhender les questions politiques et les demandes des citoyens. Le ras-le-bol des policiers de Ghardaïa est d’abord politique. On leur demande plus de ce qu’ils ne peuvent donner. Leur rébellion est un signe qu’ils ont atteint les limites absolues.

À Ghardaïa, l’action de la police a cessé depuis des mois d’être efficiente. Les vieux modes de gestion ont été dépassés, les relais traditionnels discrédités. C’est une situation d’anomie, propice à toutes les manipulations possibles, qui s’est installée.

Ghardaïa n’est pas une spécificité, c’est juste une Algérie en avance, avec un résultat, précoce mais généralisable au reste du pays, de l’interdiction de la politique au profit des démarches clientélistes.

Une société qu’on empêche de s’organiser de manière libre et dans un cadre légal n’est pas et ne sera jamais un gage de stabilité. La gestion policière apporte une tranquillité trompeuse.

Et même si Tayeb Belaïz est allé à Ghardaïa, prêt à donner et à décaisser pour ramener le calme dans les rangs, cela ne changera rien. On peut même dire qu’à force de demander à des policiers de s’occuper de régler, par la matraque, les problèmes politiques, ils finissent par faire eux-mêmes de la politique.

Le «Irhal Hamel» n’est pas une demande sociale, c’est une revendication politique qui est soulevée de l’intérieur du système par les acteurs et les agents du système. Dans un système «normal», cela est un signe clinique d’un effondrement de la discipline légale qui appelle un traitement politique sérieux. Mais dans un système en état de paralysie, la médication politique n’est pas à l’ordre du jour.

Le système a réussi à neutraliser à un coût élevé les demandes de changement politique de la société. Mais au prix d’un immobilisme morbide qui est en train de fissurer la cohérence de l’appareil sécuritaire. Entre un DRS que certains disent en état de «grève silencieuse» et une police en état de grève ouverte, ce sont les principaux instruments du pouvoir, les seuls avec l’argent du pétrole, qui sont gagnés par la fièvre.

Inutile de dire que cette situation conforte ceux qui appellent à un consensus pour un changement ordonné et une remise en mouvement du pays. Mais ceux qui sont atteints de bleuite continueront à dire que l’Algérie a des institutions et n’a pas besoin de transition. Ni de consensus.

ORAN – 19 & 20 OCTOBRE 2014 – JOURNÉES D’ ÉTUDE: ÉCONOMIE DE DÉVELOPPEMENT

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Le dimanche 19 octobre 2014

Université d’Oran
Faculté des Sciences Economiques,

des Sciences de Gestion

et des Sciences Commerciales

Journée d’étude : Économie de Développement

en hommage au Feu Abderrahmane FARDEHEB

(Lieu : Salle des conférences – premier étage)

09h00 :

Allocution d’ouverture par Monsieur le Doyen et Monsieur le Recteur de l’Université d’Oran


Première Séance :

Les travaux de recherche et pédagogique de A. FARDEHEB

Président de Séance :

Abdelkader DERBAL,

Professeur, Ancien Recteur de l’Université d’Oran

09h30 :

« Un exposé sur les travaux de recherche »,

par Benabou SENOUCI, Professeur, Université d’Oran

et Noureddine METAHRI, Maître Assistant, Université d’Oran

10h00 :

« Un exposé sur les travaux pédagogiques »,

par Bouhafs HAKMI, Maître de Conférences, Université d’Oran

et Kaddour BENABAD, Maître Assistant, Université d’Oran

10h30 :

« Synthèse de l’activité universitaire »,

par Ahmed BOUYACOUB, Professeur, Université d’Oran.


11h00 : Pause-café


Deuxième séance :

L’état des lieux sur la question de l’économie développement

Président de Séance :

Mohamed ABBOU

Professeur, Ancien Recteur de l’Université d’Oran

11h30 :

« De l’économie du développement à l’économie de la transition : une lecture de l’économie algérienne »

par Lyazid KICHOU, Professeur, Doyen, UFR d’Economie et de Gestion, Université Picardie Jules Verne, Amiens, France.

12h00 :

« ……. »

par Abderrahmane MERAD BOUDIA, Professeur, Université de Grenoble, France.

12h30 :

«Développement, développement durable: concepts et indicateurs de mesure»

par Benabou SENOUCI, Professeur, Université d’Oran

13h00 :

Débat

14h00 :

clôture de la journée


Le Lundi 20 octobre 2014

Université d’Oran

Faculté des Sciences Economiques, des Sciences de Gestion et des Sciences Commerciales

Témoignages et Hommage au Feu Abderrahmane FARDEHEB

(Lieu : Salle des conférences – premier étage)

09h00 – 11h00 :

Allocution de bienvenue et témoignage du Doyen de la Faculté des Sciences Economiques

Président de Séance :

Benabou SENOUCI, Professeur, Université d’Oran, Directeur de l’Ecole Ecole préparatoire en Sciences Economiques, Commerciales et Sciences de Gestion

« Témoignage et Hommage »

par le Professeur Mohamed ABBOU,

Ancien Recteur de l’Université d’Oran

« Le parcours de Abderrahmane FERDEHEB et son idéal»

par Hassane REMAOUNE,

Professeur, Université d’Oran.

« Témoignage d’un ami et d’un militant »,

par Faouzi BELHABIB,

Professeur, Université de Cergy-Pantoise, France.

Témoignages et hommage des Collègues

et des étudiants du Défunt

  • Rachid MOHAMED BRAHIM,

    Enseignant, Université d’Oran
  • Dalila BERRAS,

    Enseignante, ancienne étudiante, Université d’Oran
  • Djamila BELAOUNI,

    Enseignante, ancienne étudiante, Université d’Oran
  • Kheira ARBAOUI,

    Enseignante, Université d’Oran

Témoignage et hommage de la famille du Défunt

11h15 :

Rencontre de l’ensemble des participants à l’Amphi 7

qui sera baptisé

« AMPHI DU PROFESSEUR ABDERRAHMANE FARDEHEB »

1944-1994

12h30 :

Dépôt de gerbe de fleurs sur la tombe du défunt

Cimetière Ain BEIDA, Oran


HONG KONG: UN VIRUS SOUS LE PARAPLUIE

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Ahmed Bensada

AHMEDBENSAADA.COM, le 12 octobre 2014

reporters dz, le 14 octobre 2014

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Le 3 février 2011, entre la chute de Ben Ali et l’imminence de celle de Moubarak, le sénateur américain John McCain fit une étonnante déclaration en pleine ébullition de la rue arabe: «Ce virus se répand à travers le Moyen-Orient»[Alex Seitz Wald, [«McCain Calls Middle East Pro-Democracy Movement A ‘Virus’», Think Progress, 3 février 2011, _ http://thinkprogress.org/politics/2011/02/03/142130/mccain-egypt-virus/]].

Il ne parlait pas du virus d’Ébola, ni d’une quelconque autre maladie hautement contagieuse, mais plutôt du fameux «printemps» arabe. Cette comparaison «épidémiologique» n’est, à vrai dire, aucunement fortuite de la part de ce spécialiste de l’«exportation» de la démocratie.

Le virus selon McCain

Son rôle dans les révolutions colorées[[Laura He, «Hong Kong protests, as seen by Chinese mainlanders», Market Watch, 2 octobre 2014,

http://www.marketwatch.com/story/hong-kong-protests-as-seen-by-chinese-mainlanders-2014-10-02]] et le printemps arabe[[Peter Beinart, «The Americans Who Inspired Hong Kong’s Protesters», The Atlantic, 3 octobre 2014,

http://www.theatlantic.com/international/archive/2014/10/the-americans-who-inspired-hong-kongs-protesters/381095/]] a été clairement établi. En effet, en plus de son poste au Sénat américain, McCain est le plus haut responsable de l’International Republican Institute (IRI) qui, avec le National Democratic Institute (NDI), est un des quatre organismes satellites de la National Endowment for Democracy (NED). Rappelons que la NED est financée par un budget voté par le Congrès et que ses fonds sont gérés par un conseil d’administration où sont représentés le Parti républicain, le Parti démocrate, la Chambre de commerce des États-Unis et le syndicat American Federation of Labor-Congress of Industrial Organization (AFL-CIO). La NED, via ses organismes (en particulier l’IRI et le NDI), forme, réseaute, supporte et finance les activistes pro-démocratie (et surtout pro-occidentaux) à travers le monde, dans des pays ciblés par l’administration américaine. Il en a été ainsi lors des révolutions colorées (Serbie, Géorgie, Ukraine et Kirghizstan), mais aussi lors de la révolution « verte » (Iran) [[Ahmed Bensaada, «Le rôle des États-Unis dans les révoltes de la rue arabe: le cas de l’Égypte», Le Quotidien d’Oran, 23 février 2011,

http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=112:le-role-des-etats-unis-dans-les-revoltes-de-la-rue-arabe-partie-1-le-cas-de-legypte&catid=46:qprintemps-arabeq&Itemid=119]] ou du «printemps» arabe[[Sébastien Falletti, «À Hongkong, la « révolution des parapluies » s’accroche», Le Figaro, 6 octobre 2014,

http://www.lefigaro.fr/international/2014/10/06/01003-20141006ARTFIG00302–hongkong-la-revolution-des-parapluies-s-accroche.php]]. La connexion entre la NED et le gouvernement américain a été mise en évidence, et ce depuis bien longtemps, par Allen Weinstein (un des fondateurs de cet organisme), qui a déclaré en 1991 que la NED faisait aujourd’hui ce que la CIA faisait secrètement il y a 25 ans[[Occupy Central with Love and Peace, «Manual of Disobedience»,

http://oclp.hk/index.php?route=occupy/eng_detail&eng_id=28]].

McCain Calls Middle East Pro-Democracy Movement A 'Virus'

McCain appelle le mouvement pro-démocrate au Moyen-Orient un «virus»

(vidéo en anglais non sous-titré)

Mais revenons à la notion de « virus» de la contestation «identifié» par McCain. Le sénateur, qui s’était contenté d’en circonscrire la zone «endémique» au Moyen-Orient, l’a rapidement élargi à d’autres pays de haute importance stratégique pour les États-Unis: la Russie et la Chine.

En effet, il déclara en novembre 2011: «Ce printemps arabe est un virus qui attaquera Moscou et Pékin»[[Srdja Popovic and Tori Porell, «The World’s Politest Protesters», Slate, 1er octobre 2014,]].

McCain: The Arab Spring should Spread to Iran, China and Russia (September 14, 2011)

Selon McCain, le printemps arabe devrait gagner l’Iran, la Chine et la Russie (14 septembre 2011 – vidéo en anglais non sous-titré)

Quelques jours plus tard, McCain précisa son point de vue envers la Russie en s’en prenant directement à Vladimir Poutine. Il twitta: «Cher Vlad, le printemps arabe s’en vient dans un quartier près de chez vous» [8][[Ravina Shamdasani, «We will bad-mouth Article 23 but not HK, says Martin Lee», South China Morning Post, 30 mai 2003,

http://www.scmp.com/article/417069/we-will-bad-mouth-article-23-not-hk-says-martin-lee]]. Il faut dire que McCain aurait pu dire la même chose quelques années auparavant en remplaçant l’expression «printemps arabe» par «révolution colorée». N’avait-il pas en vain tenté d’ «exporter» la démocratie en Russie postsoviétique avec son soutien au mouvement «Oborona»[[Shen Benqiu, «An Unwelcome Presence: U.S. Interference in Hong Kong Since 2007», China International Studies, Janvier-Fevrier 2012, p. 108,

http://www.dragon-report.com/Dragon_Report/HOME/HOME_files/US%20Interference%20in%20Hong%20Kong%20Since%202007.pdf]]?

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D’ailleurs, il faut se rendre à l’évidence que les évènements qui ont secoué il y a quelques mois l’Ukraine — communément appelés Euromaïdan — s’insèrent dans ce continuum d’actions visant à discréditer Poutine, déstabiliser la Russie et limiter son champ d’influence géopolitique. Ce qui n’a pas pu se faire directement en Russie, pourrait se réaliser en utilisant l’Ukraine comme Cheval de Troie.

C’est dans ce cadre que McCain s’est déplacé en personne à Kiev pour s’adresser directement aux révoltés du Maïdan le 14 décembre 2013. «Nous sommes ici pour soutenir votre juste cause, le droit souverain de l’Ukraine à choisir son propre destin librement et en toute indépendance. Et le destin que vous souhaitez se trouve en Europe», a-t-il claironné[[Philippe Grangerau, «Joshua Wong, le surdoué de la révolution», 1er octobre 2014, http://www.liberation.fr/monde/2014/10/01/joshua-wong-le-surdoue-de-la-revolution_1112812]].

Rappelons que le sénateur américain est en terrain connu lorsqu’il déambule dans la capitale ukrainienne. Effectivement, il s’était déjà rendu en Ukraine en février 2005[[Isabella Steger, «Pro-Beijing Media Accuses Hong Kong Student Leader of U.S. Government Ties», The Wall Street Journal, 25 septembre 2014,

http://blogs.wsj.com/chinarealtime/2014/09/25/pro-beijing-media-accuses-hong-kong-student-leader-of-u-s-government-ties/?mod=djemChinaRTR_h]] pour y rencontrer ses «poulains» de la révolution «orange» qu’il avait largement financés. Mais, cette fois-ci, la différence était de taille: il n’a pas été gêné de s’afficher avec le leader de Svoboda, un parti ukrainien ouvertement ultranationaliste, xénophobe et prônant des valeurs néo-nazies.

McCain sur la scène du Maïdan (14 décembre 2013 – vidéo en anglais non sous-titré)

La seconde contrée visée par le «virus» printanier de McCain est la Chine. Et tout comme la Russie, ce pays possède lui-aussi un Cheval de Troie : Hong Kong.

Comme l’explique si bien Xiao Chen, un journaliste chinois basé à Hong Kong, «Dans la rivalité entre les États-Unis et la Chine, Hong Kong est une importante pièce d’échec […]. Ce n’est pas facile pour les États-Unis de créer des troubles en Chine, mais c’est super facile de jouer les trouble-fêtes à Hong Kong» [12][[Tom Parfitt, «Russian state television says Britain and US provoked Hong Kong protests», 30 septembre 2014,

http://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/asia/hongkong/11131070/Russian-state-television-says-Britain-and-US-provoked-Hong-Kong-protests.html]].

Le virus à Hong Kong

Les manifestations qui ont secoué cette région administrative chinoise sont une campagne de désobéissance civile très bien orchestrée, destinée à faire pression sur le gouvernement chinois pour la mise en place d’un réel suffrage universel pour les prochaines élections. Ces évènements ont, à bien des égards, tous les attributs d’un mouvement de contestation du type «révolution colorée».

Quatre ingrédients sont nécessaires pour mettre en branle ce type de «révolution»: de jeunes activistes motivés et mobilisés, une idéologie non-violente d’opposition au pouvoir en place, de la formation adaptée à l’idéologie et du financement.

Dans le cas de cette ancienne colonie britannique, les principaux acteurs de ce mouvement de protestation initialement baptisé «Occupy Central with Love and Peace» (OCLP) sont essentiellement de jeunes étudiants hongkongais affiliés à la “Fédération des étudiants de Hong Kong” (HKFS) ainsi qu’un certain nombre de politiciens dissidents de la vieille garde hongkongaise. Le nom du mouvement fait référence au mouvement «Occupy Wall Street» avec une touche locale, «Central» étant le principal quartier des affaires de Hong Kong[[Tony Cartalucci, «Hong Kong’s “Occupy Central” is US-backed Sedition», New Eastern Outlook, 1er Octobre 2014,

http://journal-neo.org/2014/10/01/hong-kong-s-occupy-central-is-us-backed-sedition/]].

Logo de l'OCLP

Le modus operandi adopté lors des manifestations correspond fidèlement à celui déjà observé dans les pays touchés par les révolutions colorées (Serbie, Géorgie, Ukraine et Kirghizstan) et par le « printemps » arabe (en particulier la Tunisie et l’Égypte). Il est actuellement de notoriété publique que des activistes de ces différents pays ont été formés par le Centre d’action et de stratégies non-violentes appliquées (Center for Applied Non Violent Action and Strategies – CANVAS). Domicilié dans la capitale serbe, CANVAS est un centre de formation des activistes en herbe qui est dirigé par Srdja Popovic, lui-même ancien leader du mouvement Otpor qui a joué un rôle majeur dans la chute de Slobodan Milosevic en 2000. Ce centre est financé par l’IRI de McCain, mais aussi par d’autres organismes américains d’exportation de la démocratie comme Freedom House ou l’Open Society Institute (OSI) du milliardaire George Soros, illustre spéculateur financier américain[[Wang Haiyun, «Remain on alert for dangers of Western-backed ‘color revolutions’», Global Times, 21 juillet 2014,

http://www.globaltimes.cn/content/873666.shtml]].

CANVAS dispense des formations conformes à l’idéologie de résistance individuelle non-violente théorisée par le philosophe et politologue américain Gene Sharp. Le centre a publié un manuel intitulé «La lutte non-violente en 50 points» [15] dans lequel sont énumérées des méthodes d’action non-violente telles que l’utilisation de slogans et de symboles, la fraternisation avec l’ennemi, les actes de prière et cérémonie religieuse, les veillées et les chants, etc.

Srdja Popovic tenant la version serbe de « La lutte non-violente en 50 points »

Toutes ces techniques (et bien d’autres) ont été utilisées par les dissidents de différents pays formés par CANVAS. «La fraternisation avec l’ennemi» a été certainement la plus frappante. Par «ennemi», on entend les forces de l’ordre à qui sont confrontés les dissidents. Ainsi a-t-on vu à Kiev, Bichkek, Le Caire ou Tunis, des activistes distribuant des fleurs ou des victuailles aux policiers ou aux militaires tout en fraternisant avec eux. De la même manière, à Hong Kong, on a aperçu des étudiants tendre des fleurs ou des victuailles aux bureaucrates de la ville, dès le petit matin[[Reuters, «White House Shows Support For Aspirations Of Hong Kong People», The Huffington Post, 29 septembre 2014,

http://www.huffingtonpost.com/2014/09/29/white-house-hong-kong_n_5901782.html]].

Fraternisation avec

Serbie (2000) / Ukraine (2004) / Kirghizstan (2005) /

Tunisie (2011) / Égypte (2011) / Yémen (2011)

Plusieurs jours avant le début de leur mobilisation, les activistes de l’OCLP ont publié sur leur site un «manuel de la désobéissance», où ils expliquent, entre autres, la philosophie de la désobéissance civile et les règles de la protestation non-violente et émettent des recommandations en matière de nourriture et d’habillement ainsi que de judicieux conseils en cas d’arrestation[[Manon Loizeau, «États-Unis à la conquête de l’Est», 2005. Ce remarquable documentaire sur les révolutions colorées qui peut être visionné à l’adresse suivante :

http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=120:arabesque-americaine-chapitre-1&catid=46:qprintemps-arabeq&Itemid=119]].

Cette liste d’instructions du «parfait manifestant» est assez complète mais loin d’être originale. On se souvient que les activistes égyptiens du «Mouvement du 6 avril» (qui ont été des acteurs majeurs dans la chute de Moubarak) en avaient publié une similaire sur leur site. Elle était intitulée «Que vas-tu faire si tu es arrêté?»[[Ahmed Bensaada, «Arabesque américaine: Le rôle des États-Unis dans les révoltes de la rue arabe», Éditions Michel Brûlé, Montréal (2011), Éditions Synergie, Alger (2012)]]. Est-il nécessaire de rappeler que de nombreux militants du Mouvement du 6 avril ont été formés par CANVAS[[William J. Dobson, «The Dictator’s Learning Curve: Inside the Global Battle for Democracy», Random House Canada Limited, Toronto, 2012]]?

Logo d'Otpor (Serbie 2000)	 - Logo du Mouvement du 6 avril (Égypte 2011))  Le poing d'Otpor affiché à Hong Kong- (Photo prise à Hong Kong le 1er juillet 2014 par Mai Perkins)

Source: http://thenewcontext.milanoschool.org/hk-occupycentralprotests/

Chose rare dans un tel contexte: Srdja Popovic en personne a encensé le mouvement OCLP dans un article publié sur Slate, qualifiant ses membres de «manifestants les plus polis du monde»[[Ahmed Bensaada, «Arabesque américaine: Le rôle des États-Unis dans les révoltes de la rue arabe», Op. cit.]]. «Ce ne sont pas des jeunes idéalistes; ce sont des opérateurs politiques avertis qui comprennent les secrets de la réussite de la résistance non-violente» affirme-t-il. Avant d’ajouter: «Avec son adhésion fidèle à la non-violence «Occupy central» a montré de la préparation, de la formation et de la discipline, une combinaison qui est très rare chez beaucoup de mouvements».

Serait-il possible que Popovic soit impliqué dans cette formation? Cela semble très plausible à en en croire son soutien inconditionnel à l’OCLP et la très large couverture des activités de ce mouvement sur sa page Facebook[[F. William Engdahl, «Géopolitique et “révolutions des couleurs” contre la tyrannie», Horizons et débats, n° 33, octobre 2005,

http://www.horizonset-debats.ch/33/33_16.htm]] ou sur celle de CANVAS [[Steve Clemons, «The Arab Spring: ‘A Virus That Will Attack Moscow and Beijing’», The Atlantic, 19 novembre 2011,

http://www.theatlantic.com/international/archive/2011/11/the-arab-spring-a-virus-that-will-attack-moscow-and-beijing/248762/]].

Cela paraît encore plus évident si on en juge par la méticuleuse organisation des manifestations et leur mode opératoire. Même le changement du nom du mouvement de OCLP à une dénomination plus «canvassienne» comme «révolution des parapluies» n’est pas fortuite.

Logos de la

Le quatrième et primordial ingrédient dans ce type de «révolution» relève du volet financier. En effet, malgré leurs apparences, ces protestations de masse ne sont ni spontanées, ni intrinsèquement autochtones. Elles sont le fruit d’une longue et minutieuse préparation et bénéficient d’un généreux financement d’organisations spécialisées dans l’«exportation» de la démocratie ainsi que d’une dithyrambique couverture médiatique d’envergure planétaire. Nul ne peut être contre la vertu, n’est-ce pas? Des jeunes, pour la plupart étudiants, qui manifestent «pacifiquement» et «amoureusement» contre la «dictature» afin de réclamer de la justice et de la démocratie. Quoi de plus noble?

Mais, comme dit le proverbe, «la vertu, c’est comme les dents: plus c’est blanc, plus c’est faux».

Le financement du virus

Intéressons-nous donc au financement des différents organismes qui gravitent autour de la dissidence hongkongaise ainsi que de leurs leaders.

Lorsqu’un groupe contestataire pro-démocratie prônant de surcroît la non-violence est en confrontation directe avec un gouvernement autoritaire, il y a inévitablement apparition d’un organisme « droitdelhomiste » dans le décor. À Hong Kong, ce rôle incombe au « Hong Kong Human Rights Monitor » (HKHRM). Dirigé par Yuk-kai Law, le HKHRM est régulièrement subventionné par la NED. En effet, les rapports annuels de la NED montrent, qu’entre 2007 et 2013, cet organisme de défense des droits de l’Homme a reçu environ un million de dollars en financement direct[John McCain. (5 décembre 2011). Dear Vlad, The #[ArabSpring is coming to a neighborhood near you:

http://online.wsj.com/article/SB10001424052970204770404577077711550134028.html?mod=WSJ_World_LeadStory …[Tweet]. Adresse URL:

https://twitter.com/SenJohnMcCain/status/143689929975799809]].

Yuk-kai Law

En plus de son étroite relation avec la NED, le directeur du HKHRM est en contact avec Freedom House comme en témoigne son séjour aux États-Unis, tous frais payés par cet organisme[[Manon Loizeau, «États-Unis à la conquête de l’Est», 2005. Voir la dernière partie de ce documentaire. Op. cit.]]. La présence active de Freedom House à Hong Kong a aussi été observée par des spécialistes des relations sino-américaines[[Richard Balmforth et Gabriela Baczynska, «Nouvelle manifestation à Kiev, l’UE suspend les négociations», Le Point, 15 décembre 2013,

http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/nouvelle-manifestation-a-kiev-l-ue-suspend-les-negociations-15-12-2013-1769842_240.php]].

Les rapports de la NED dont il a été question précédemment mentionnent également des montants octroyés au NDI en 2009 et 2012 «pour favoriser la sensibilisation à l’égard des institutions politiques de Hong Kong et le processus de réforme constitutionnelle et de développer la capacité des citoyens – en particulier les étudiants universitaires – de participer plus efficacement dans le débat public sur les réformes politiques […]». Les montants cumulatifs pour ces deux années dépassent les 700 000$[[Archives du Gouvernement ukrainien, «Orange Revolution Democracy Emerging in Ukraine»,

http://www.archives.gov.ua/Sections/Ukraineomni/ukrelection030905a.htm]].

Sur le site du NDI, on peut lire à ce propos: «Entre 1997 et 2011, le NDI a organisé une série de missions à Hong Kong afin d’envisager l’élaboration du cadre des élections à Hong Kong, le statut d’autonomie, l’État de droit et les libertés civiles ainsi que les perspectives et les défis de la démocratisation»[[Ahmed Bensaada, « »Printemps » arabe: le rôle des États-Unis », in « La face cachée des révolutions arabes», Éditions Ellipses (Paris), 2012, p.359]].

Benny Tai est cofondateur du mouvement OCLP et un de ses leaders. Professeur agrégé de Droit à l’université de Hong Kong, il est aussi membre du Conseil de gestion du «Centre for Comparative and Public Law» (CCPL) de la même université. Selon le rapport d’activités 2011-2013, le CCPL est un centre qui a pour but de «faire progresser les connaissances sur le droit public et les questions des droits de l’homme»[[Mouvement de la jeunesse du 6 avril, « Que vas-tu faire si tu es arrêté? », http://shabab6april.wordpress.com/%D9%85%D9%86-%D9%86%D8%AD%D9%86-%D9%88-%D9%84%D9%85%D8%A7%D8%B0%D8%A7-%D9%86%D8%AD%D9%86-%D9%87%D9%86%D8%A7-%D9%88-%D9%83%D9%8A%D9%81%D8%9F%D8%9F/%D9%87%D8%A7%D8%AA%D8%B9%D9%85%D9%84-%D8%A7%D9%8A%D9%87-%D9%84%D9%88-%D8%A7%D8%AA%D9%82%D8%A8%D8%B6-%D8%B9%D9%84%D9%8A%D9%83/]].

La relation entre ce centre et le NDI est mentionnée dans le même rapport: «Le CCPL a reçu un financement de la National Democratic Institute (NDI) pour concevoir et mettre en œuvre un portail en ligne sur les modèles du suffrage universel où le grand public peut discuter et fournir des commentaires et des idées sur la méthode du suffrage universel qui est la plus appropriée pour Hong Kong».

Benny Tai: More actions leading up to Occupy Central | 31 AUG 2014 |

Cette information est corroborée sur le site du NDI: «Le CCPL de l’Université de Hong Kong, avec l’appui du NDI, travaille à amplifier la voix des citoyens dans ce processus de consultation en créant «Design Democracy Hong Kong» (www.designdemocracy.hk), un site unique et neutre qui donne aux citoyens un endroit pour discuter de l’avenir du système électoral de Hong Kong»[[Srdja Popovic, «Page Facebook»,

https://www.facebook.com/SrdjaPopovicPage]].

Présenté comme un «surdoué de la révolution»[[CANVAS, «Page Facebook»,

https://www.facebook.com/Power.to.the.People.CANVAS?fref=nf]], Joshua Wong, un étudiant de 17 ans, est sans conteste la figure la plus médiatisée du mouvement OLCP. Son activisme précoce a fait les choux gras des mainstream» qui rapportent son combat «épique» contre l’implantation dans les écoles de Hong Kong d’un nouveau programme scolaire visant à développer le sentiment patriotique chinois. Pour s’opposer à ce projet, il cofonde un mouvement étudiant nommé «Scholarism» et mobilise des milliers de manifestants. Le projet est finalement retiré en 2012: il n’avait que 15 ans.

Joshua Wong: Teen leader on next steps in HK protest | CNN |

Mais ce portrait a été récemment écorché dans un article publié par Wen Wei Po, un journal hongkongais qualifié (pour certainement le discréditer) de pro-chinois par les médias occidentaux. On pouvait y lire que «des forces étasuniennes ont identifié M. Wong trois ans auparavant et ont travaillé avec lui pour le transformer en superstar politique»[[Pour consulter les différents rapports de la NED:

http://www.ned.org/publications.

Celui relatif à l’année 2013 est publié à l’adresse URL:

http://www.ned.org/where-we-work/asia/china-hong-kong]].
Selon l’article, Joshua Wong aurait eu d’étroites relations avec le personnel du consulat américain à Hong Kong et reçu d’importants montants d’argent[[Voir référence 22]].

Il faut dire que tout ce que rapporte ce journal n’est pas du tout nouveau. Les ambassades américaines dans les différents pays touchés par les révolutions colorées ou par le « printemps » arabe ont toujours procédé de la sorte. D’abord ils identifient les activistes avec un leadership potentiel; ensuite ils établissent d’étroites relations avec eux et les financent: voyages tous frais payés, formations aux États-Unis ou à l’étranger, participations à des conférences ou symposiums, rencontres avec des personnalités américaines de haut rang, etc. C’est le cas de nombreux activistes comme, par exemple, le Serbe Srdja Popovic[[The National Democratic Institute, «Where we Work: Hong Kong»,

https://www.ndi.org/hong-kong?quicktabs_country_page_tabs=0#quicktabs-country_page_tabs]], la Yéménite (et Prix Nobel de la Paix) Tawakkol Karman[[Centre for Comparative and Public Law, «Annual Report: July 2011-June 2013», Faculty of Law, University of Hong Kong,

http://www.law.hku.hk/ccpl/Docs/Annual%20Report%202011%20-%202013.pdf]], les Égyptiens Adel Mohamed ou Bassem Samir[[The National Democratic Institute, «Designing Democracy in Hong Kong», 29 janvier 2014, https://www.ndi.org/hong-kong-designing%20democracy]], les Tunisiens Slim Amamou ou Emna Ben Jemaa[[William J. Dobson, «The Dictator’s Learning Curve: Inside the Global Battle for Democracy», Op. cit.]].

L’article du Wen Wei Po mentionne aussi la volonté de l’administration américaine d’infiltrer les écoles de Hong Kong. De prime abord, cette accusation semble relever de la théorie du complot. Néanmoins, cette assertion n’est pas si fausse que cela si on en croît le Dr. Shen Benqiu de l’université de Guangzhou (Chine). Dans un très intéressant article sur les relations entre les États-Unis et Hong Kong, publié en janvier 2012 (soit plus de deux ans et demi avant OCLP), il note que «Les États-Unis attache une grande importance à la jeune génération de Hong Kong car il espère profiter de leur identification affaiblie avec la Chine continentale» [[Ahmed Bensaada, «Mais qui est donc Tawakkol Karman, la première femme arabe nobélisée?». A. Bensaada, Le Quotidien d’Oran, 13 octobre 2011,

http://www.ahmedbensaada.com/index.php?option=com_content&view=article&id=141:mais-qui-est-donc-tawakkol-karman-la-premiere-femme-arabe-nobelisee&catid=46:qprintemps-arabeq&Itemid=119]]. Plus encore, il précise que «deux nouveaux développements ont eu lieu depuis 2007. D’abord, les ONG américaines ont élargi leurs partenaires de coopération à Hong Kong pour y inclure non seulement les factions politiques, mais aussi les établissements d’enseignement supérieur […]. La seconde nouveauté est que les objectifs des activités des ONG américaines ont été progressivement étendus pour inclure les jeunes, les femmes et le travail, en mettant l’accent sur ​​la jeunesse». Pour illustrer ses propos, Shen Benqiu cite plusieurs activités de la NDI et d’autres organismes satellites de la NED.

Contacté par CNN, le jeune Wong déclara: «Le peuple ne devrait pas craindre le gouvernement. C’est le gouvernement qui devrait craindre le peuple». dictator_to_democr.jpg
Une phrase inspirée par les idées contenues dans le best-seller de Gene Sharp «From Dictatorship to Democracy» (De la dictature à la démocratie) et un principe enseigné par CANVAS.

Les activités de Yuk-kai Law, Benny Tai et Joshua Wong, trois figures emblématiques de la dissidence Hongkongaise, illustrent de manière pédagogique l’ingérence des organisations américaines d’« exportation » de la démocratie. Les deux premiers représentent la vieille garde alors que le troisième est issu des mouvements de la jeunesse hongkongaise qui, selon le Dr. Shen Benqiu, est prioritairement ciblée par l’administration américaine.

Dans un article très détaillé, Tony Cartalucci cite d’autres activistes de l’OCLP en précisant leurs relations avec la NED, le NDI ou le département d’État américain[[Ahmed Bensaada, «Arabesque américaine : Le rôle des États-Unis dans les révoltes de la rue arabe», Op. cit.]]. Citons, à titre d’exemple, Martin Lee, le président fondateur du Parti démocratique de Hong Kong, Audrey Eu Yuet-mee, la présidente du Parti civique ou le cardinal Jospeh Zen.

Petite précision à propos de Martin Lee : le 4 avril 2014, il a été reçu à la Maison Blanche par le Vice-président américain Joe Biden et, la veille, par Nancy Pelosi, la chef de file du parti démocrate à la Chambre des représentants américaine.

Martin Lee et  Anson Chan reçus par Joe Biden à la Maison Blanche (le 4 avril 2014)

À propos d’Anson Chan:

En 1980, elle devient la première directrice d’origine chinoise au sein de l’administration coloniale, en charge des services de sécurité sociale. De 1987 à 1993, elle occupe le poste de Ministre de l’économie avant de devenir en 1993 Secrétaire en Chef de l’Administration, soit le numéro deux du gouvernement. Ce poste était jusque là occupé exclusivement par un britannique. Elle devient la 30ème et dernière Chief Secretary sous gouvernement anglais. Après la rétrocession, elle continue à exercer en tant que Chief Secretary jusqu’en 1998.

Anson Chan, Nancy Pelosi et Martin Lee (le 3 avril 2014)

Cette évidente ingérence américaine dans le dossier de Hong Kong via ses organisations d’«exportation» de la démocratie a fait dire à Wang Haiyun, vice-président de l’Institut chinois de recherche en histoire des relations sino-russes, que son pays devrait suivre l’exemple de la Russie qui oblige les ONG financées par l’étranger de s’inscrire comme «agents de l’étranger». «Nous pouvons apprendre de la Russie en introduisant une « loi d’agent étranger » de manière à bloquer la voie à l’infiltration de forces externes et d’éliminer les possibilités d’une révolution colorée», a-t-il conclu son article datant de juillet 2014[[Ahmed Bensaada, «Le printemps arabe: une saison aux couleurs américaine», Éditions Synergie (Alger), à paraître.]].

Comme on pouvait s’y attendre, les États-Unis ont apporté leur soutien aux manifestants: «Nous suivons de près la situation à Hong Kong. Partout dans le monde, les États-Unis soutiennent les libertés fondamentales, comme la liberté de réunion pacifique et la liberté d’expression reconnue internationalement. Nous exhortons les autorités de Hong Kong à faire preuve de retenue, et pour les manifestants d’exprimer leurs opinions pacifiquement. Les États-Unis soutiennent le suffrage universel à Hong Kong en conformité avec la Loi fondamentale, et nous appuyons les aspirations du peuple de Hong Kong»[[Shen Benqiu, «An Unwelcome Presence: U.S. Interference in Hong Kong since 2007», Op. cit.]].

La réponse à cette déclaration revient très certainement à John Ross, de l’université Renmin de Chine qui a écrit sur son compte Sina Weibo: «La couverture des médias occidentaux sur Hong Kong est tout simplement trop hypocrite. Pendant les 150 ans que les colons britanniques ont régné sur Hong Kong, la Grande-Bretagne n’a jamais permis à la population de Hong Kong d’élire son propre gouverneur. Et les États-Unis n’ont jamais eu de problème avec cela. La Chine a maintenant un système plus démocratique pour Hong Kong que la Grande-Bretagne, mais les États-Unis ont vivement protesté contre le gouvernement chinois»[[Shen Benqiu, « An Unwelcome Presence: U.S. Interference in Hong Kong since 2007 », Op. cit.]].

Le virus concocté par le sénateur McCain dans son laboratoire d’«exportation» de la démocratie réussira-t-il à «infecter» le « Port aux Parfums »[[Traduction littérale de « Hong Kong »]] pour, ensuite, contaminer la Chine?

Rien n’est moins sûr. Cela dépendra certes de la virulence de la souche virale, mais aussi de la disponibilité d’un vaccin efficace.


LA CONSTRUCTION MÉDIATIQUE DES « DJIHADISTES »

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Saïd Bouamama

investig’Action

le 13 octobre 2014

Un nouveau terme est entré dans le vocabulaire du français moyen ces derniers mois, celui de «djihadiste». Quotidiennement, les grands médias abordent le sujet et diffusent des grilles explicatives qui forgent les opinions publiques, orientent les réactions, suscitent des prises de positions. Des «experts» et des «spécialistes» aux noms savants sont appelés à la rescousse pour offrir une caution scientifique aux affirmations médiatiques.

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Au-delà de l’apparente diversité des points de vue se cache une unicité d’analyse.

En dépit du vernis d’objectivité des articles et des reportages, quatre récurrences idéologiques sont repérables:

  • l’essentialisation de l’islam,
  • l’injonction à la justification adressée à tous les musulmans,
  • la négation des causes internes aux pays occidentaux
  • et la justification de la guerre.

Ces quatre discours médiatiques diffusés sur fond de sensationnalisme ne sont pas anodins. Ils ont une fonction sociale et politique. Ils contribuent à produire une réalité sociale et politique lourde de conséquences.

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SENSATIONALISME

Le ton dominant des discours médiatiques est au sensationnalisme. Nous serions devant un phénomène sensationnel, non seulement inédit mais également imprévisible.

Des chiffres sont assénés et les progressions fulgurantes des départs vers la Syrie sont mises en exergue: «Jamais le nombre officiel de participants français au djihad n’a été aussi élevé. En juillet, le ministre de l’Intérieur évaluait à 800 le nombre de personnes engagées dans des opérations islamistes au Moyen-Orient. Un chiffre qui avait déjà augmenté de 56% en quelques mois: ils étaient 500 en avril. Un an plus tôt, en mars 2013, ils étaient seulement 50 Français à avoir choisi le djihad. Une augmentation constante du nombre de combattants volontaires qui souligne les difficultés à endiguer le flux des départs vers l’Irak ou la Syrie[[“Le Figaro.fr” du 14 septembre 2014.]].»

Des titres angoissants font la couverture de nos hebdomadaires et de nos quotidiens ou la présentation de documentaires d’actualité: «Djihadisme-La France mal protégée[[ “L’Express” N° 3300 du 1-10-2014.]]» pour l’Express, «l’Etat de la menace terroriste en France» pour I-télé[[I-télé du 15 septembre 2014.]], «Les Djihadistes s’entraînent dans les Ardennes Belges» pour L’Union l’Ardennais[[“L’Union l’Ardennais” du 3-10-2014.]], etc.

La fabrique de la peur fonctionne à plein régime avec ses deux conséquences logiques: le renoncement à l’explication rationnelle au profit de réactions émotionnelles d’une part et la production d’une demande de sécurité au prix même d’une atteinte aux libertés fondamentales d’autre part.

Au-delà des cibles actuelles, c’est la logique sécuritaire qui s’installe encore plus profondément dans notre société. Le mécanisme a été décrit de la manière suivante par Serge Quadrupanni: «L’antiterrorisme est la pointe avancée, l’avant-garde conceptuelle et pratique d’une politique de la peur qui tend à infiltrer tous les recoins de la société. Cette politique de production simultanée de peurs et de contrôles censés les juguler est condamnée à s’inventer sans cesse de nouveaux ennemis: après le terroriste, le jeune des quartiers populaires et le jeune tout court, l’enfant, l’internaute, le fou, l’immigré, l’étranger, le musulman, le rom…[[Serge Quadrupanni, La politique de la peur, Seuil, Paris, 2011, p. 24.]]».

Prévenons la critique d’être dans une « théorie du complot[[Pour une critique approfondie de l’invention de la théorie du complot et son instrumentalisation (En particulier par Taguief et Boudon) contre toute critique du système de domination capitaliste, voir: “L’invention de la théorie du complot ou les aveux de la sociologie libérale”, in “Terreur et Possession”, enquête sur la police des populations à l’ère technologique, éditions de l’échappée, Paris, 2008.]]» qui apparaît désormais à chaque remise en cause des mécanismes de domination.

Il n’y a nul besoin de croire en une quelconque «théorie du complot» pour constater l’existence de stratégies de la part des classes dominantes pour orienter l’opinion, pour masquer des réalités, pour imposer des choix en les présentant comme souhaitables et nécessaires.

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Essentialisation

Le premier leitmotiv des discours médiatiques dominants que permet l’imposition du sensationnalisme est une construction essentialiste de l’Islam. L’essentialisation est l’opération de pensée consistant à homogénéiser une réalité plurielle, à la dé-historiciser et à la présenter ainsi reconstruite comme l’explication invariante à l’ensemble des événements et/ou des comportements des personnes censées avoir un lien avec cette réalité.

Depuis de nombreuses années, cette construction essentialiste de l’Islam est diffusée par de multiples canaux avec comme conséquence un développement de l’islamophobie: l’Islam ainsi reconstruit est censé ne pas connaître de séparation entre le religieux et le politique avec en conséquence logique une allergie des musulmans à l’égard de la démocratie.

Il serait basé sur une inégalité entre les sexes avec, comme résultat logique, un sexisme exacerbé des hommes musulmans et une soumission tout aussi prégnante des femmes musulmanes, il serait contradictoire avec la rationalité et produirait de ce fait une tendance plus forte à la fanatisation, etc.

Une des conséquences du processus d’essentialisation est l’utilisation comme synonymes des termes «Islam» et «musulman». Tous les comportements des musulmans peuvent de cette manière s’expliquer par cet Islam essentialisé.

Le boxeur Mohammed Ali a répondu de manière lapidaire à ce type de raisonnement dans un échange célèbre avec un journaliste à propos des attentats du 11 septembre: «Comment vous sentez-vous à l’idée que vous partagez avec les suspects arrêtés par le FBI la même fo?- Et vous, rétorqua-t-il, comment vous sentez-vous à l’idée qu’Hitler partageait la vôtre?[[Propos rapportés par Sylvain Cypel in Le Monde, le 6 octobre 2001]]»

Injonction

La division binaire porte une logique de suspicion. Dans le même temps où il est célébré, le «musulman modéré» est sommé de s’expliquer, de prendre la parole, de condamner les «radicaux». Il est en quelque sorte responsable de tous les actes et propos qui sont tenus au nom de l’Islam par tous ceux qui sur la planète se revendiquent de cette religion. Ses silences sont diagnostiqués au mieux comme irresponsabilité et au pire comme complicité.

Le Figaro peut ainsi initier un sondage en ligne le 25 septembre dernier autour de la question éloquente suivante: «Les musulmans de France manifestent-ils suffisamment leur opposition à la menace terroriste?».

La Libre Belgique peut titrer un de ses articles le 28 septembre: «Les musulmans doivent-ils se dissocier des djihadistes?».
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La campagne «NotInMyName» (Pas en notre nom) fait non seulement la Une de tous les médias pendant plusieurs jours mais est reprise par le président Obama lui-même déclarant à l’assemblée générale des Nations Unies le 24 septembre: «Il temps pour le monde – et particulièrement pour les communautés musulmanes – de rejeter explicitement, énergiquement et systématiquement l’idéologie d’al Qaida et de l’Etat Islamique»

Alors que l’accusation de «communautarisme» est devenue fréquente lorsque sont abordées des questions liées à l’Islam, il est ici demandé aux musulmans de s’exprimer comme collectivité. En acceptant de se prêter au jeu de la condamnation comme en refusant l’injonction de justification, le résultat est le même: la reproduction du stéréotype présentant les «musulmans» comme totalité homogène non parcourue de contradictions.

L’injonction de justification fonctionne selon la même logique que celle des «peines collectives» de l’époque coloniale. Jadis, des groupes entiers pouvaient être condamnés pour des faits qu’ils n’avaient pas commis, désormais des groupes entiers doivent se justifier pour des actes dont ils ne sont pas responsables. Car bien sûr «gare au silence»: il est immédiatement perçu comme synonyme de complicité.

La logique n’est pas nouvelle et a été déployée de nombreuses fois dans le passé à propos de l’immigration et de ses enfants français.

Pour ne prendre qu’un exemple, rappelons les révoltes des quartiers populaires de novembre 2005. Une seule question était alors posée aux personnes issues de l’immigration invitées sur les plateaux: celle de la condamnation des révoltes.

Mais nous pourrions citer également l’injonction (lorsque l’on est issu de l’immigration) de prouver que l’on est intégré, que l’on n’est pas homophobe, pas sexiste, pas antisémite, etc.

La division binaire fréquente entre des musulmans «modérés» et des «musulmans radicaux» ne change rien de fondamental à l’essentialisation.

Le musulman modéré serait celui qui pratique l’Islam avec modération et le musulman radical celui qui pratique l’Islam sans modération.

En définitive, cette division binaire essentialiste attribue au dit «radical» un brevet d’islamité car si l’Islam a besoin d’être modéré c’est qu’il porte donc en lui, dans son essence des tendances dangereuses.

Comme le souligne Maurice Tarik Maschino: «le musulman modéré est une abstraction, un pseudo-concept ou un concept de guerre, dont la fonction est d’exciter dans l’imaginaire des lecteurs les stéréotypes habituels qui stigmatisent les musulmans[[Maurice Tarik Maschino, “Qu’est-ce qu’un musulman modéré?”, El Watan du 28 mars 2012.]].»

Négation

L’essentialisation et l’injonction de justification ont une fonction sociale et politique: celle de masquer les causes qui peuvent conduire des jeunes Français à se porter candidats pour partir en Syrie.

Dans tous les processus sociaux, l’interrogation de la seule «offre» (ici l’offre de «djihadisme») conduit à une réduction de la réalité.

Le silence sur la «demande» est une négation des véritables causes du processus étudié.

L’enjeu est de taille car la prise en compte de la demande conduit à s’intéresser aux conditions matérielles d’existence de la partie de notre population issue de l’immigration postcoloniale.

Or ces conditions révèlent une discrimination massive et systémique rendant pour de nombreux jeunes l’avenir impensable. Elles soulignent une précarité rendant la quotidienneté invivable. Elles mettent en exergue un rapport à la police rythmé de contrôles au faciès à forte régularité et producteur d’un sentiment diffus d’insécurité. Elles dévoilent une mise en suspicion permanente dans les médias avec pour ces dernières décennies une islamophobie en croissance exponentielle.

Ce sont tous ces facteurs qui peuvent se concentrer dans des trajectoires individuelles pour faire émerger une «demande», exactement comme des facteurs similaires peuvent conduire d’autres jeunes aux comportements suicidaires, à une demande de secte, à de la violence contre soi et contre les siens.

L’explication médiatique en termes «d’auto-radicalisation» devenue courante ne rompt pas avec cette négation des causes de la demande. Les offreurs seraient devenus des experts de l’endoctrinement informatique et cela suffirait à expliquer le processus.

Ici aussi l’interrogation sur les facteurs qui rendent certains plus perméables à cette offre est évacuée.

Le vernis psychologisant de nombreux reportages visent à couvrir d’un discours à prétention savante l’opération de négation des causes réelles.

La justification

L’essentialisation, l’injonction et la négation conduisent enfin à éluder tous les débats sur les réels buts de guerres.

Les enjeux pétro-gaziers et géostratégiques disparaissent entièrement du débat pour ne laisser place qu’à l’urgence d’un consensus «anti-barbare».

Il faut le dire, l’opération est pour l’instant une réussite: les interventions en Syrie, en Côte d’Ivoire et en Centre-Afrique ne suscitent pour l’instant pas de grandes réactions.

En mettant l’ensemble des acteurs sociaux susceptibles de s’opposer à la guerre dans un climat de crainte et dans des explications essentialistes, c’est le mouvement anti-impérialiste et anti-guerre qui est détruit.

Ce climat et ces explications permettent de ne pas interroger les tactiques et stratégies concrètes: soutien à des groupes que l’on prétend combattre ensuite, présentation de monarchies obscurantistes (Arabie Saoudite, Qatar, etc.) comme des alliés, etc.

La construction médiatique des djihadistes s’inscrit ainsi dans une stratégie guerrière. Peu importe que cela se réalise de manière consciente ou non par les acteurs des médias: le résultat est le même.

Source : Investig’Action


OCTOBRE 1988-TÉMOIGNAGES ET DOCUMENTS

le blog algerie-infos-saoudi rappelle plusieurs aspects des éventements d’octobre 1988, et de leur manipulation par les sphères antagonistes du pouvoir.

En fin d’article, les liens sont donnés de publications précédentes de socialgerie, qui mettaient particulièrement l’accent sur le caractère anti-ouvrier et antipopulaire de la répression préventive de la nuit du 4 au 5 octobre 1988.


5 OCTOBRE 1988.

ORIGINE, DÉROULEMENTS ET MANIPULATIONS

[

publié par Saoudi Abdelaziz

blog algerieinfos

le 5 Octobre 2014

->http://www.algerieinfos-saoudi.com/2014/10/5-octobre-1988-origine-deroulement-et-manipulations.html]

Rapports sur les faits, témoignages publics ou anonymes, analyses émanant de participants et de dirigeants des services secrets. Nous proposons un tour d’horizon sur un événement fondateur. L’occupation populaire de l’espace public en octobre 1988, par delà les calculs des uns et des autres, constitue un tournant majeur de l’histoire contemporaine de notre pays.


LES ÉVÉNEMENTS D’OCTOBRE


Le texte ci-après[publié par blog algerieinfos, repris en ligne par socialgerie, le 5 octobre 2011, sous le titre: [“LES ÉVÉNEMENTS D’ OCTOBRE 1988 EN DIRECT – 5 OCTOBRE 1988 – 5 OCTOBRE 2011” ]] est un document confidentiel intitulé «Complément d’informations», qui avait circulé parmi les cadres du Parti d’Avant-garde Socialiste (PAGS), au lendemain des émeutes d’octobre 1988. Nous le postons de nouveau à l’occasion de l’anniversaire des événements enclenchés le 5 octobre 1988.

« En général, partout où les manifestations firent de gros dégâts, on a remarqué la présence d’éléments « louches » étrangers aux lieux. Ces éléments étaient équipés pour casser, détruire et brûler, incitant les jeunes à la violence et au pillage, les orientant vers des édifices publics. Certains étaient véhiculés (surtout des « golfs »). Ils traversaient les quartiers et les villages en poussant les jeunes chômeurs à « bouger », « casser » et « manifester ».
Presque dans tous les témoignages, on a relevé l’absence quasi-générale des forces de l’ordre (police et gendarmerie) au début des évènements (Alger, Blida, Boufarik, …). Plus grave encore : à plusieurs endroits, la population leur a fait appel pour empêcher la « casse ». En vain. On dirait que des directives leur ont été données pour ne pas intervenir et de se tenir loin des lieux de rassemblement et de manifestations.

À noter la grande sympathie et même la complicité des adultes pour les jeunes en action. Souvent, tout en déplorant les destructions ils se montraient solidaires des manifestants qui scandaient des mots d’ordre contre l’injustice, les inégalités sociales, la corruption, le trafic, le chômage, la cherté de la vie…

Selon l’ancien ministre de l’Intérieur, il y aurait 159 morts. Mais certains chiffres, émanant, semble-t-il, de milieux hospitaliers, font état de 14300 blessés dont 5000 par balles et de 850 morts dont 670 par balles.

ALGER

Lors des fusillades, les portes s’ouvraient pour abriter l’inconnu. Toutes les entrées des terrasses des immeubles étaient ouvertes pour aider les gens à s’y refugier, à fuir. Dès l’entrée en vigueur du couvre-feu montait le chœur de sifflement venant des terrasses, des balcons, au pied d’entrées d’immeubles. De temps en temps des youyous fusaient.

À El-Biar, le 07 octobre, un car de CNS stationnait. Une voiture passe et tire, les CNS répliquent. Les habitants leur envient des pots de fleurs et des ordures par les balcons. Peu après, le car est remplacé par un char.

Le 08 octobre, à 17h, à Bab-el-oued, tout d’un coup, les militaires, affolés par des pétards des enfants se mettent à tirer en l’air et vers les balcons pendant près d’une minute. Les passants, terrifiés, se refugient où ils peuvent.

Le 10 octobre, à 17h, c’est la boucherie à Bab-el-oued. Après avoir tiré sur la foule, les policiers et les militaires poursuivent les manifestants dans les rues en leur tirant dans le dos. Le sol est jonché de cadavres. Partout, il ya du sang. Les morts sont parqués dans une pissoire, près du siège de la DGSN. Tous les échos s’accordent à dire que la fusillade a été provoquée par le tir d’un civil qui était parmi les manifestants.

Le mercredi de la casse (05 octobre), une voiture « R20 » a déposé deux jeunes armés de barres de fer, l’un au carrefour des GLEA et l’autre devant la salle « Harcha ».

À Fougeroux, ce sont les habitants qui ont défendu le garage de la RSTA et l’usine de la SNLB.

Dans un quartier d’El Harrach, l’action des jeunes progressistes est parvenue à ramener le calme (slogans politiques,…) quand tout à coup, une « Golf » peintes aux couleurs de la police a surgi. Deux policiers en civil tirent dans les jambes des manifestants et s’enfuient.

À Badjarah, un groupe de jeunes se couchent sur la chaussée pour empêcher les cars d’avancer.

Tous les jeunes arrêtés sont acheminés et parqués au niveau de la Coupole (salle omnisport) du 5 juillet. Sans nourriture, la bastonnade même avec des barres de fer. Ceux qui ont été relâchés se sont traînés jusqu’à leurs demeures. Certains d’entre-eux se sont suicidés pour échapper aux vexations, humiliations et tortures. D’autres ont été traumatisés. Dès leur arrivée au commissariat, on commençait à les matraquer. Tous les policiers présents y prenaient part, toute la panoplie de la torture a été utilisée.

Les médecins qui ont soignés les blessés ont affirmé que des balles explosives ont été utilisées. La plupart des blessés par ces balles ont dû être amputés.

BLIDA ET SES ENVIRONS

Blida : Cela a commencé le jeudi 6/10, à midi. Au moment de la sortie des lycées, des milliers de jeunes se sont rassemblés au centre-ville pour déferler sur les établissements publics. Dans la foule, on entendait des mots d’ordre : « brulez tout », « à bas Chadli », « vive l’Algérie ».

Pendant que la ville vivait ces évènements, et alors que des établissements brûlaient, aucun policier ne se trouvait sur place.

La plupart des établissements attaqués ont été détruits à 100%. Ce sont en ^majorité des édifices publics. Quelques villas ont été attaquées telles que celle de Séridi, ex wali de Blida, Ataïlia…

Des cars, des camions et des voitures ont été incendiés. Des dégâts considérables auraient été constatés à ENIE-UPAE (unité de construction des industries électriques). Ces actes de destruction sont l’œuvre de groupes étrangers à la ville, armés de barres de fer, etc. Les jeunes connus de la ville n’ont pas participé à la casse.

Ce n’est que le soir, vers 18h-19h que les premiers tirs ont été entendus. L’armée est sortie en force avec le général Ataïlia en tête. Fou furieux, il aurait tiré à plusieurs reprises et atteint les jeunes.

C’est à ce moment là que tout a basculé. Les jeunes de la ville se sont lancés dans la ville, se sont organisés dans les quartiers pour édifier des barricades, attaquer individuellement les djounouds et les désarmer, s’attaquer au porte-chars, faisant partie d’un convoi en route vers Alger. On raconte même qu’un porte-char a été brulé ainsi que le char qu’il transportait, qu’un second porte-char a été déplacé, puis brulé, qu’un troisième porte-char a été déplacé en vu de s’emparer du char et de le conduire au centre-ville ! Le char fut descendu et mis en route, mais bloqué plus loin dans une étroite ruelle, les jeunes y mirent le feu ! Les autres porte-chars du convoi auraient demi-tour.

Ces opérations auraient rendu le général Ataïlia fou de rage et de colère. Le vendredi matin, vers 6h, au quartier Ben-Boulaïd, il aurait tiré en l’air et insulté la population, demandant à ceux qui sont des « hommes » de sortir. Le même jour, il s’est rendu auquartier Aouiant où les chars ont été brulés et les armes volés, investissant la mosquée du quartier avec ces « troupes » (fait condamné par la population). Il menaça de réduire tout le quartier (Aouinat) en poussière si les armes volées ne lui étaient pas rendues. L’imam de la mosquée lui aurait alors répondu qu’il était assez fort avec ses soldats pour aller les chercher. Les services de sécurité, accompagnés d’un « bouchkara » ont arrêté les jeunes la nuit.

Boufarik : Les manifestations ont commencé jeudi 06 octobre (vers 11h), à la sortie des lycées. Les lycéens n’avaient pas l’intention, au départ, de saccager. D’ailleurs, beaucoup se sont vite dispersés. Mais selon certains témoignages, un nombre important de jeunes avaient débarqué du train qui venait d’Alger. Le chef de gare a aussitôt informé la police et la gendarmerie qui lui ont signifié de se retirer. D’autre part, des groupes de jeunes venus dans un bus privé ont incité les lycéens (lycée Ibn Toumert) à sortir (en les traitant de fils de harkis…).

Les manifestants se sont attaqués à de nombreux édifices publics (APC, Daïra, commissariat, SEF, …) et à un kiosque, lieu de rencontres de responsables et militaires, vomis par les citoyens. Certains domiciles (Dr de l’ENAFLA et Pt de l’APC) ont été pillés.

A notre que les manifestants ont trouvé des pneus, des vidéos et des matériaux de construction au domicile du chef de Daïra. Ce dernier a été d’ailleurs très actif dans la répression qui s’est abattue sur les jeunes et lors des perquisitions chez des citoyens pour « récupérer des objets qui lui ont été volés ». On rapporte à ce sujet qu’un citoyen a été sauvagement torturé sous prétexte que la machine à coudre trouvée chez lui aurait été volé au chef de la Daïra. Mais il s’est avéré, par la suite, que la machine à coudre volée a été retrouvé ailleurs. Le chef de la Daïra a demandé des excuses au supplicié !!!

D’autres témoignage des jeunes, relâchés, faisaient état de l’atrocité de la torture : remplissage de l’estomac avec de l’eau contenant des détergents, supplice de la chaise, membres brisés avec le fusil, pendaisons par les membres pendant plusieurs jours et plusieurs nuits, …

Douaouda : Suite à une rumeur selon laquelle un groupe de manifestants avaient l’intention de mettre à feu le SEF, le 06 octobre, les citoyens appellent la police et la gendarmerie. Ces dernières ne se montrent pas. L’armée (alertée par des gens) envoie une patrouille qui arrive sur les lieux avant l’heure prévue pour les manifestations et repart après avoir fait remarquer aux citoyens que le SEF est intact. A 13h, comme prévu, les manifestants arrivent mais ils sont impressionnés et dissuadés par des citoyens placés tout autre du SEF et décidés à le protéger. Ils rebroussent chemin. Le SEF est sauvé.

À Aïn Bénian et Sidi Fredj les SEF et magasins des galeries algériennes ont été entièrement détruits.

BERROUAGHIA

Les manifestations ont commencé le 5 octobre, dans l’après-midi. Les dommages matériels ont été limités, les travailleurs ont défendu leur outil de travail. Ceux de la Sonacome qui étaient pourtant en grève ont défendu leur usine. Les militaire sont venus ensuite renforcer la surveillance et ont voulu les obliger à reprendre le travail le samedi mais le directeur s’est interposé en disant que c’était un problème qui ne les regardait pas. Un vice-ministre est venu leur rendre visite, ils ont posé leurs revendications. Ils ont reprise le travail le samedi.

Le local du Fln a été attaqué. Des policiers et gendarmes ont été battus ; il gendarme a dit qu’il était pour les manifestants et que le fait d’avoir été battus avait amené les gendarme à se retourner contre les manifestants alors qu’eux-mêmes vivaient les mêmes problèmes.

BOUIRA

Une manifestation regroupant plus de 400 personnes avec barricade sur la RN 5 a eu lieu à Bechoul, dans la même période. Il n’y a pas eu d’affrontements avec les forces de répression. Les barricades ont été levées après les promesses d’un approvisionnement rapide et suffisant.

DJELFA

À Djelfa, les pertes humaines et les dégâts matériels sont énormes. On parle de 15 morts et de près d’une centaine de blessés. Les manifestants ont brûlé le Palais de Justice, le commissariat de police, les galeries algériennes, le souk et Fellah, l’OPGI, l’agence BNA, le service DRAL, la résidence du wali, des véhicules de la police et de la wilaya.

À Messaad, les manifestants ont brûlé le commissariat de police, les galeries algériennes, le SEF, l’agence CNEP, le bureau de la main-d’œuvre. Ce serait l’œuvre d’un groupe étranger à la ville, masqués. On dénombre au moins quatre blessés dont un par balles.

À Ain Oussera et Hassi Behbah, même scénario. Dans la première ville, cependant, des citoyens étaient armés et ont tenté d’utiliser leurs armes.

TIZI-OUZOU

Les berbéristes (FFS) et les gauchistes de l’ORT (Organisation révolutionnaire des travailleurs) se sont coalisés et ont tout fait pour empêcher que des mouvements de masse ne se déclenchent à Tizi-Ouzou et dans les environs.

On dit que certains éléments du FFS ont carrément marchandé avec les autorités leur promettant de maintenir le calme dans la région contre certains privilèges.

Durant les évènements, des représentants de certaines grandes familles bourgeoises de Tizi-Ouzou (ayant des liens de sympathie aussi bien dans le pouvoir que dans le FFS) ont milité activement pour maintenir le calme. Ils sont passés dans des villages, des écoles, des lycées,… et se sont adressés à la population dans ce sens.

A noter qu’un tract anonyme a circulé à Tizi-Ouzou et a même été affiché (le 25 octobre) à l’université, dénonçant quelques grand bourgeois de Tizi (les failles Hanachi, Bouzar, Khalef notamment) et les accusant d’avoir neutralisé l’action des masses non pas par patriotisme mais par souci de protéger leurs biens dans la région.

Dans les faits, il y a eu alliance de combat entre la droite berbériste du FFS et les droitiers du FLN. Tous les arguments ont été utilisé pour empêcher les mouvements de protestation populaire et de solidarité de prendre de l’extension en Kabylie (« En 1980, les autres régions ont laissé les Kabyles seuls face à la répression du pouvoir », « Si à Alger ils ont tué 500 personnes, cela veut dire qu’en Kabylie, ils en tueront des milliers »,…).

Ces arguments semblent avoir eu un certain impact, y compris ay sein de la classe ouvrière locale. C’est ainsi que la zone industrielle de Tizi-Ouzou n’a pratiquement pas suivi le mot d’ordre de grève générale pour les 10 et 11 octobre, lancé par la « Communauté universitaire » et assez largement suivi par les étudiants, les universitaires, les lycéens et les commerçants.

Par ailleurs, tout au début des manifestations d’Alger ? Certains groupes gauchistes (ORT et peut-être OST, organisation socialiste des travailleurs) ont désigné le PAGS comme l’instigateur des évènements. Sur cette base, ils ont appelé à « ne pas bouger » pour « laisser le Pags payer seul les conséquences de ses actes ». Ils ont tout fait pour décourager les premières initiatives de solidarité contre la répression.

Parmi les courants gauchistes, le GCR (groupe communiste révolutionnaire) a été isolé par les autres. Ses membres ont été empêchés de s’organiser, notamment à l’université. Il est vrai que le GCR ne fait pas preuve, depuis quelque temps déjà, d’une attitude anti-PAGS systématique comme les autres groupes.

Dès les premières arrestations à Alger et après le déclenchement des manifestations, il y a eu de nombreuses initiatives pour informer de ce qui se passait et appelé à une riposte de masse. C’est sous la pression de ce travail de masse et pour couper l’herbe sous les pieds des « pagsistes » que la coalition berbéro-gauchiste, dominante dans la cité universitaire de Hasnaoua, a pris l’initiative de convoquer une assemblée générale le 9 octobre qui a abouti à « l’appel à la population », signé au nom de la « communauté universitaire ». Cette AG a été convoquée de façon anti-démocratique par le comité de Hasnaoua alors qu’il était prévu d’abord une rencontre de tous les comités.

Dans la région, des manifestations ont eu lieu dans la plupart des villes et villages. Elles ont été souvent violentes (Ain-El-Hammam, Tazmait, Bordj-Menaël, Draa-Ben-Kheda, Lakhdaria, Boghni). Les manifestants ont détruit les sièges d’APC, de kasma, les souk el fellahs… Parfois ils ont libéré des prisonniers de droit commun. Mais dans d’autres localités, les citoyens ont manifesté dans le calme (Azzefoun, Beni-Yenni, Tighzirt-sur- mer). À Larbaa-Nath-Irathen, c’est l’intervention des forces de répression, qui ont tué une jeune, qui a transformé une marche pacifique en une émeute.

Dans plusieurs villes, les lycéens ont suivi l’appel à la grève (Azzefoun, Tighzirt-sur-mer, Larbaa-Nath-Irathen,…). À Azzefoun, le directeur du SEF arrive à convaincre les manifestants à ne pas brûler ce local mais plutôt de le protéger. A Si Mustapha, les citoyens défendent leur village contre les manifestants venus des Issers. De même, semble-t-il, à Beni-Yenni.

TLEMCEN

L’armée s’est déployée dès vendredi dans toute la ville et dans la zone industrielle. S’il n’y pas eu de manifestations dans le centre-ville, par contre, dans les quartiers populaire de Boudghène et de Sidi-Saïd elles ont été très importantes. Il n’y a eu ni mort ni blessé. L’armée aurait eu un bon comportement.

Des arrestations ont été effectuées dans les milieux intégristes et benbellistes.

À Hennaya, par contre, le mouvement a été violent. Le village a été saccagé. Le chef de daïra de Remchi qui habite ce village aurait utilisé son arme contre les jeunes : deux ont été tués.

SIDI-BEL-ABBES

Le mouvement populaire a éclaté samedi après-midi simultanément dans plusieurs quartiers populaires et dans le centre-ville. L’armée avait auparavant occupé les principaux points de la ville et de la zone industrielle.

On parle de 500 à 600 détenus dont une bonne partie a été libérée à partir du commissariat et au niveau du tribunal. Les autres ont bété présentés devant le juge le mardi. Ce jour là le tribunal était encerclé par les forces de l’ordre ce qui n’a pas empêché la population de se regrouper dans les alentours pour scander : »Police assassin », « libérer les détenus », « Bouragda assassin » (le chef de la sureté de la wilaya), « soldats, vous êtes des hommes ». Bouragda s’est présenté face aux manifestants et a demandé aux policiers de tirer, mais un capitaine de gendarmerie l’a insulté et a demandé à la police de partir. Par la suite la gendarmerie a dispersé les manifestants sans user de la force.

Un travailleur de l’ENIE ayant été arrêté sur sont lieu de travail, la riposte des travailleurs a été immédiate : délégation auprès des autorités, de l’administration et de l’Atu ; des produits alimentaires et de l’argent ont bété remis à la femme du travailleur ; des avocats ont été contactés…

Les travailleurs, apprenant au même moment que la ville entière commençait à bouger, ont pris des mesures pour prévenir toute provocation au sein du complexe. Ils ont constitué un système de garde et d’alerte.

À noter que le samedi matin, avant que les troubles n’éclatent en ville, la cellule FLN a établi une liste de progressistes du complexe considérés comme des « meneurs possibles ». Elle a remis cette liste à la mouhafadha. Le mouhafadh aurait répondu : vous vous trompez. Ces gens là sont des patriotes. Ce ne sont pas eux qui font faire des troubles.

SAÏDA

La ville n’a pas connu d’émeutes ni de destructions. Après un large mouvement de protestation organisé (grèves, marches pacifiques), un comité de citoyens a été constitué et chargé de soumettre les revendications des citoyens aux autorités locales. Le comité se compose de représentants des travailleurs de tous les secteurs, des chômeurs, des enfants de chouhada et des étudiants.

La liste des revendications est longue (une vingtaine de points) et aborde aussi bien les revendications démocratiques que des revendications sociales et professionnelles (…)

ANNABA

Depuis le mois d’aout, la tension sociale et politique s’était manifesté de différentes manières: slogans anti-Chadli, slogans dénonçant la corruption et le frère du président écrits sur les murs, luttes pour l’eau.

Des mouvements de masse ont eu lieu en été comme cette prise d’assaut par les jeunes du bureau d’affectation du Service national (ces jeunes demandaient que soit levée la condition d’avoir fait son SN pour aller travailler), mouvements contre les coupures d’eau,…

La population a suivi attentivement l’issue de la grève du CVI et les émeutes d’Alger. Les jeunes ont exprimé leur solidarité dès le 08 octobre, en abandonnant les lycées et en manifestant vers le centre. Cibles choisies: l’hôtel du frère de Chadli (obtenu parait-il pour un dinar symbolique) et le restaurant appartenant à un ex-commandant, affairiste notoire Karroumi (dit Soula), le FLN et les locaux commerciaux du chef de sureté de la Wilaya Embarek. Les services de sécurité étaient là pour défendre les lieux et tirèrent sur les manifestants en tuant 5 d’entre eux. L’adjoint du chef du secteur militaire circulait au volant d’une R20, mitraillette au poing.

Les galeries, le monoprix, des cars de la régie communale de transport, le souk el fellah ont été incendiés. Le soir, le calme est revenu. Le lendemain, les manifestations reprennent. Les forces de répression tirent : 3 morts, de nombreuses arrestations. La SM arrêt trois syndicalistes du complexe à « titre préventif », le 09 octobre. Ils ont été relâchés le 12, suite à une menace de grève de la part des travailleurs d’El-Hadjar.

Le 10 octobre, une marche regroupant plus de 5000 étudiants à laquelle ont participé des jeunes de la commune de Sidi-Amar, a eu lieu. Les manifestants ont fait le tour de Chaïba et de Sidi-Amar. Au cours de cette marche, les étudiants ont diffusé un appel à la population, réaffirmant la nécessité de rester unis et lutter ensemble pour la démocratie et la paix en Algérie. Le 11 octobre, assemblée générale à l’université que les FM essaieront de saboter. Le 12 octobre, les étudiants, au nombre d’un millier, décident de marcher sur la ville de Annaba mais ils ne pourront pas le faire : le train devant les amener en ville (environ 12 km) ayant été bloqué. Ils décident alors de marcher sur El-Hadjar qui est à 2 km de l’université. Et bien que de nombreux étudiants aient été découragés : ils n’étaient plus que 200 à 300, la majorité des mots d’ordre, le niveau d’organisation de la marche ont eu un grand impact sur la population.

À noter que tout le barreau de Annaba a refusé de cautionner la procédure expéditive imposée par les autorités judiciaires lors des premiers procès des détenus de la ville. Il s’organise pour manifester un rejet collectif de la procédure illégale. Mais Denden, représentant de la LADH, qui a participé au procès des inculpés a déclaré: «la justice a fait son travail; ça s’est bien passé»!

BEJAÏA

La manifestation a commencé chez les lycéens, elle a gagné les quartiers populaires. Les slogans lancés « halte à la vie chère », « non aux exclus de l’enseignement », « que vont devenir les 200 000 élèves qui ont échoué au bac ». Des affrontements violents ont eu lieu avec la police et la gendarmerie. Ils se sont soldés par 7 morts, 34 blessés et une trentaine d’arrestations parmi la population.

À Amizour, des centaines de jeunes ont participé à la manifestation contre la répression qui s’est abattue sur la population de Bejaïa. Sur les 7 banderoles, on pouvait lire : « contre la répression », « contre la vie chère », « pour le pain et l’emploi », « pour les libertés d’expression et la démocratie », « contre les exclus de l’enseignement », Cinq jeunes ont été arrêtés.

CONSTANTINE

La population n’a pas bougé, conséquence entre autres de la dure répression des mouvements passés. On a fait circuler la rumeur suivante : Il y a 6000 personnes fiché par la police. Présence massive mais relativement discrète des services de sécurité et de l’armée. Sur- approvisionnement des souk el fellah. Directives aux unités pour éviter tous problèmes et conflits.

SKIKDA

Il y a eu une vingtaine d’arrestations « préventives » le 09 octobre, notamment parmi les anciens responsables de l’UNJA. Ils ont été relâchés le 12 octobre.

GUELMA

Violentes émeutes. La mouhafadha et le palais de justice ont été saccagés.

JIJEL

Emeutes au cours desquelles il y aurait eu des victimes.

EL-EULMA

Fort mouvement dans cette localité.


LES SERVICES ONT ORCHESTRÉ LES ÉVÉNEMENTS D’OCTOBRE 88


Dans un article 2010 je notais: « Coïncidence? La sombre et répugnante manipulation politico-policière coordonnée par la Présidence de la République, qui a débouché sur l’immense dérapage d’octobre 1988 et l’avorton démocratique dont il a accouché, survint au moment où le mouvement social et syndical émergeait de nouveau sur une grande échelle, au devant de la scène ». (Lire “Octobre 1988 accouche d’un avorton démocratique”)

Octobre 1988 fut-il suscité et manipulé de manière occulte par des services de sécurité, s’inscrivant dans le cadre d’une opération de la présidence de la République? K. Selim, considérant les manifestations d’octobre comme «une respiration non autorisée de la société», écrit dans un “éditorial du Quotidien d’Oran:” «Certes, ceux qui faisaient de la politique dans la clandestinité n’étaient pas préparés à cette incursion sans autorisation de la jeunesse – et donc de la société – sur la scène politique. Les organisations légales totalement caporalisées ne pouvaient pas, comme a pu l’être l’UGTT en Tunisie plus de vingt ans plus tard, servir d’encadrement à cette irruption non autorisée et tumultueuse. Les groupes politiques clandestins étaient trop faibles pour le faire. Dans le cas des communistes du PAGS, les services de sécurité ont mené une vague d’arrestations «préventives» qui l’ont mis hors du coup.»

Dans un témoignage intitulé «À propos du rôle des «services» on lit: « En octobre, entre le 4 et le 6, en dehors de certains quartiers, les forces de police étaient absentes ou ont laissé faire les saccages et pillages. En octobre 1988, mais également en juin 1991, durant le mouvement insurrectionnel du FIS, sont apparues ces voitures dont les occupants tiraient indistinctement sur les manifestants et les forces de l’ordre. Et dans ces deux cas, dans la foule, ont été repérés de véritables professionnels. Des hommes jeunes, armés, blousons de cuir et trainings, sachant organiser les assauts et les remplis, éteindre dans des seaux d’eau les bombes lacrymogènes, tendre des embuscades… (…) Il est encore signalé, au niveau de l’hôpital de Douéra, deux pavillons complètement isolés par des hommes en uniforme de l’ANP mais qui, selon mon informateur, appartenaient aux «hammaloulou», ces groupes d’intervention mobiles qui ont relayé les Cns. Dans ces pavillons, il n’y avait ni malades ni blessés, mais des hommes jeunes au repos. Et la personne qui m’apportait ce témoignage a fait part de son impression d’avoir vu là, si ce n’est des étrangers, du moins des émigrés. Certes, ces éléments ne reposent que sur des témoignages, fiables peut-être, mais en tout cas invérifiés, invérifiables ».

Dans un témoignage paru dans “Chiricahua-overblog” sur octobre à Oran: on lit: Le 3 octobre, je reçus un coup de fil d’un camarade d’Alger qui m’informait que des syndicalistes étaient interpellés par la police à l’instant même. Cette infraction à nos règles de vigilance draconiennes de la part d’un camarade expérimenté, je la traduisis par: Aux abris! C’est que le contexte était préoccupant, surtout depuis le discours invraisemblable du Président de la république, le mois précédent. M’hamed et moi étions en réunion avec Abdelhamid Benzine chez un membre du parti. Nous avons écouté ce discours et nous nous attendions à ce que des faits graves aient lieu: un Président qui appelle carrément le peuple à se soulever, cela ne pouvait rien augurer de bon. Le lendemain, un camarade qui était revenu d’Alger la veille au soir, par le train de nuit, demanda qu’on se voie en urgence lui et moi. Il me rapporta le spectacle suivant: dans le train, des groupes de jeunes -blue-jean, blousons et baskets- se déplaçaient dans les voitures en hurlant qu’ils «descendaient» à Oran pour apprendre aux «houariates» à se battre comme des hommes. Le camarade apprit auprès d’un passager algérois d’un certain âge qu’il s’agissait «des casseurs de Khediri, Allah yestour! Que Dieu nous protège!». Des agents provocateurs de la DGSN étaient donc arrivés en nombre à Oran, le 4 au soir».

« Le dernier acte d’un scénario mal ficelé», c’est ainsi que, Lakhal Ayat, le chef de la sécurité militaire, écarté du pouvoir décrira dix ans plus tard «l’ouverture démocratique» menée par Chadli, dès le lendemain des journées d’octobre: «Là, je suis tenté de répondre comme le philosophe italien Lampedusa quand il dit «Il faut tout changer pour que rien ne change». Symbole de la période flamboyante, dispendieuse du chadlisme -lorsque le baril rapportait gros- Lakehal Ayat donne un témoignage- qui le dédouane bien sûr-, où, entre les lignes, se lisent les mécanismes de direction et d’influence occultes déjà bien rôdés et qui perdurent aujourd’hui. Jusqu’à quand?

La torture à grande échelle

Chaba Mohamed Lamine, maître-assistant à l’école polytechnique d’El Harrach, a été arrêté durant la nuit du 4 octobre et ne fut relâché que le 12 octobre au soir pour s’être solidarisé avec son collègue Kateb Kamel [cadre du Pags], arrêté par la police. «Le premier qui m’a interrogé s’est présenté de la DGSPS (…) ils m’ont mis tout nu et m’ont attaché les mains derrière le dos avec des menottes, sur un sommier métallique, ils me branchaient des pincettes aux oreilles, après à chaque fois au sein gauche et au sexe, versaient de l’eau sur mon corps, me mettaient de l’eau sur mon corps, me mettaient un chiffon des fois imbibé d’eau, des fois d’urine dans la bouche et le poussaient avec un bâton, tout en actionnant l’électricité», il y avait quelqu’un derrière moi qui donnait des coups de bâton au sommier. C’était une résonance atroce, laquelle résonance bourdonnera encore dans ma tête quelques jours après ma sortie…

Sur cette répression « préventive », notamment contre les militants du PAGS, lire le texte intégral en PDF du CAHIER NOIR D’OCTOBRE


Forum

Safiya 05/10/2014

Wouaw ! ça me laisse groggy… Je n’ai pas le courage de cliquer sur les liens, pas pour le moment, trop dur… C’est bien la première fois et ce, depuis 1988, que j’apprend de cette façon, minutieusement détaillée, les événements du 5 octobre et qui me fait prendre conscience de toute son horreur. Même certains de ceux qui l’avaient vécu personnellement et qui m’en avaient parlé, n’avaient pas cette clarté.

Je retiens qu’à Annaba, pour défendre l’hôtel du frère de Chadli, le restaurant appartenant à l’ex-commandant, affairiste notoire, Karroumi (dit Soula), les locaux du FLN et les locaux commerciaux du chef de sûreté de la Wilaya, Embarek, les services de sécurité étaient là et assassinèrent 5 de nos enfants, par contre, ils laissèrent brûler allègrement les galeries algériennes, le monoprix, des cars de la régie communale de transport et le souk el fellah, des biens qui touchent directement le peuple, « ça » en dit long…

Il me restera cette plaie, notre armée _ celle censée nous défendre _, l’Armée Nationale et Populaire, a tiré à balles réelles sur les nôtres et donc sur les siens, sur le peuple… Ma mémoire en restera tatouée à jamais.

Merci Monsieur Saoudi. Chapeau !

Sources: blog algerieinfos


ARTICLES PRÉCÉDEMMENT MIS EN LIGNE PAR SOCIALGERIE


[* “LES JOURNÉES D’OCTOBRE 1988, VUES D’HIER ET D’AUJOURD’HUI”, article de SADEK HADJERES, publié dans « LE SOIR D’ALGÉRIE » le 5 OCTOBRE 2008, mis en ligne par socialgerie article 88, le 7 octobre 2009 .

« L’intifadha » d’Octobre 1988 a été un sursaut populaire, l’explosion d’un mécontentement accumulé. Elle a résulté de la conjonction de problèmes de fond non résolus et de manipulations irresponsables du pouvoir.

Ces quelques journées vécues dans l’enthousiasme des jeunes, la colère et les espoirs de toutes les générations, ont ébranlé le régime autoritaire sur le moment et durant quelques mois.

Mais la grande vague de fond n’a pu transformer la nature et les logiques hégémonistes du système

L’édifice oligarchique, bâti sur une combinaison de pratiques super-étatistes et d’appétits libéraux de plus en plus sauvages, a été replâtré et repeint aux couleurs d’un pluralisme sans démocratie.

pour lire la suite, cliquer ici
… ->88]


* “LES ÉVÈNEMENTS D’OCTOBRE 1988: ANALYSE ET QUESTIONNEMENTS”, article de مصطفى هميسي, article 603 mis en ligne par socialgerie le 12 octobre 2011.

أحداث أكتوبر: هل تآمر النظام على نفسه أم تآمر على الجزائر ؟

Pour lire, cliquer ici …


LES ÉVÉNEMENTS D’ OCTOBRE 1988 EN DIRECT – 5 OCTOBRE 1988 – 5 OCTOBRE 2011blog algerieinfos;


“OCTOBRE 1988-TÉMOIGNAGES ET DOCUMENTS”


[

APPRENONS DE NOS LUTTES:

OCTOBRE 1988 et NOS AMIS D’AIN BENIAN

par Abdelkader SAADALLAH

mis en ligne le 19 février 2011

->387]

[

APRÈS LE TÉMOIGNAGE DE ABDELKADER SAADALLAH:

LE PAGS et L’INTIFADAHA DES JEUNES D’OCTOBRE 88

Une opinion de A. Noureddine

->390]


[

LES ÉVÉNEMENTS D’OCTOBRE 1988:

ANALYSE ET QUESTIONNEMENTS

->603]


OCTOBRE 1988, C’ÉTAIT AUSSI LA TORTURE