ATTENTION ! CHANGEMENT DE LIEU ! NOUVELLE ADRESSE:30 JANVIER- CONFÉRENCE-DÉBAT AVEC FRANÇOIS BURGAT ET ABBAS AROUA

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|30 JANVIER:
CONFÉRENCE-DÉBAT AVEC
FRANÇOIS BURGAT ET ABBAS AROUA |

Vendredi 30 janvier 2015 de 18h30 à 20H30

ATTENTION! NOUVEAU LIEU:

5, rue Basse des Carmes
75005 PARIS

M° Maubert Mutualité (ligne 10)
(Bus 63 -86- 87)
google maps

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L’Unité d’Études Politiques du Mouvement Rachad à l’honneur de vous inviter à participer à la conférence-débat

avec François Burgat et Abbas Aroua.

Vendredi 30 janvier 2015 de 18h30 à 20H30

Introduction: Nazim Taleb, Président Rachad-Paris.


François Burgat, politologue, directeur de recherche à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (IREMAM) à Aix-en-Provence.

« Des crimes du 7 janvier aux fausses réponses du onze : leçons, défis et menaces »


Abbas Aroua, Directeur de la Fondation Cordoue de Genève.

« Aux racines de l’extrémisme violent »

Nous vous remercions de bien vouloir vous inscrire ici: event@rachad.org

(inscription obligatoire, dans la limite des places disponibles)
En espérant que cette conférence suscitera votre intérêt, nous vous prions d’agréer nos cordiales salutations.

Lieu : Centre d’Affaire – La Tour Gallieni 2
36, avenue du Général de Gaulle
93170 Bagnolet

M° Gallieni (terminus ligne 3)

L’équipe d’Event


Rachad est un mouvement politique algérien créé dans le but de contribuer à opérer un changement fondamental en Algérie, de rompre avec les pratiques politiques en cours depuis l’indépendance et de redonner espoir au Peuple algérien.
Rachad entend œuvrer pour l’instauration d’un Etat de droit régi par les principes démocratiques et de bonne gouvernance.Rachad est ouvert à tous les Algériens dans le respect de leurs différences, bannit toute forme d’extrémisme, d’exclusion ou de discrimination et prône la non-violence pour amener le changement.

Le mouvement Rachad est un mouvement algérien fondé et dirigé par un groupe d’algériens, connus pour leur opposition au régime en place et ayant émergé du coup d’Etat du 11 Janvier 1992, que ce soit comme indépendants ou membres d’autres organisations. Après de nombreuses années d’opposition, il est devenu clair pour eux qu’il y avait nécessité de se rassembler, dans le cadre d’un mouvement qui aurait pour effet d’organiser et d’encourager les Algériens qui croient au changement radical dont a besoin l’Algérie, sur la base d’un consensus national et au-delà des clivages idéologiques.
Pour plus d’informations, veuillez consulter le site Internet du Mouvement Rachad : http://rachad.org/fr/faqs

INTERVIEW DE ALIKI PAPADOMICHELAKI -CADRE DE SYRIZA – PAR L’HUMANITÉ

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ENTRETIEN AVEC Αliki PAPADOMICHELAKI [[Αliki PAPADOMICHELAKI
Économiste (spécialisation en géopolitique)
Cadre de SYRIZA, ex responsable du Département de politique extérieure
Correspondante du journal Avgi en France.
]]
R.M. L’HUMANITÉ
en partie publiée le 20 janvier 2015
sous le titre:
« Le travail doit se faire en profondeur, avec l’adhésion et la mobilisation permanente du peuple »

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Votre histoire est celle d’une enfant déportée de la dictature. Comment vous êtes-vous retrouvée dans un camp? Où étiez-vous déportée? Comment cela a-t-il forgé votre conscience politique?

L’exemple de mes parents
Je suis fille unique de deux cadres historiques communistes, antifascistes et partisans. Mon père- Stelios Papadomichelakis- adhère au PCG EN 1926. Ma mère Dionysia Costadoulou en 1930.

Arrêtés en 1937 par la dictature grecque de Ioannis Metaxas (Aout 1937-1940), ils se marient en prison et par la suite furent déportes.

Ma mère est un des cinq membres fondateurs de l’organisation antifasciste Solidarité Nationale (Ethniki Allileggii), donc l’objectif premier fut de sauver la population d’Athènes de la famine atroce, sous le nez des occupants Nazis.

Cette organisation comptait à la fin de la guerre 3 millions de membres.

Sous l’égide du Front National l’évasion des 200 prisonniers politiques antifascistes et communistes du camp de concentration d’Agios Efstratios est organisée en 1943.

Plus tard durant la guerre civile -1947- mes parents, ainsi que leurs familles réciproques sont à nouveau arrêtés. Cette fois-ci, à mes deux ans et demi, j’accompagnai ma mère et ma tante au plus affreux camp de concentration, qu’a connu l’histoire grecque, celui de Makronissos.

Makronissos. Une ile déserte, rocailleuse, fortement fouettée par les vents et les vagues. De la même façon furent violemment brutalisés les prisonniers politiques femmes et hommes.

Des souvenirs restent encore vivaces, ainsi que des chefs d’œuvres de notre culture, les poèmes de Yannis Ritsos (traduits par Aragon), la musique de Mikis Theodorakis, le théâtre de Manos Katrakis (tous les trois – avec tant d’autres – prisonniers sur la même île).

L’héritage du combat pour une humanité digne des meilleures créations des humains

Il ne s’agit pas d’une histoire exceptionnelle. Des milliers de militants antifascistes ont subi ce sort après la guerre civile, qui a suivi la libération nationale, pour l’avènement de laquelle ils se sont battus.

Moi aussi, comme de nombreux autres jeunes, j’ai grandi et pris conscience dans ce terreau fertile de la gauche radicale et combative de mon pays.

La dictature des colonels renversa en1967, durant 7 ans, les minces acquis démocratiques.

Me trouvant à Prague, pour la poursuite de mes études universitaires, je participe au congrès de toutes les unions des étudiants grecs à l’étranger, tenu à Paris en Mai 1967, avec l’aide de l’UNEF. Je suis élue membre du bureau de coordination extérieure de l’Union Nationale des Etudiants Grecs.

La poursuite de mes activités antidictatoriales et la grève de la faim, initiée devant l’ambassade de Grèce à Prague, pour la libération des nouveaux prisonniers politiques, m’a valu la perte de ma nationalité.

Je l’ai récupérée, juste après la chute de la dictature avec décret juridique immédiat. Parmi les 30 premières personnes, nous étions 4 femmes. Melina Merkouri, Amalia Fleming, Eleni Vlachou et moi. Deux militantes de PASOK, une de la droite traditionnelle et moi du mouvement de la Gauche Radicale (ce que la 5ème République et les médias appellent chez vous extrême gauche).


Comme ancienne dirigeante de Syriza comment expliquez-vous la place prise par ce parti sur la scène politique?

À partir des années 2008 la Grèce est devenue le cobaye du néolibéralisme national et européen. Les élites politiques ont choisi de faire supporter par la population les méfaits de la crise économique structurelle que traverse, à divers degrés, le continent européen.

Les gouvernements du PASOK et de la Nouvelle Démocratie ont démantelé le secteur d’Etat, ont détruit les services sociaux publiques (sécurité sociale, santé, enseignement), ils ont privatisé une partie importante de la richesse nationale (ports, aéroports, routes, électricité, côtes, forêts).

Le chômage a atteint des niveaux jamais vu depuis 50 ans, 30% du total de la population active, plus de 60% chez les jeunes de moins de 25 ans.

Depuis deux ans, les retraites au-dessus de 1200 euros ont connu des diminutions considérables et le SMIG n’existe actuellement que dans les statistiques.

Cette situation plus qu’alarmante, que vous aurez l’occasion de rencontrer auprès d’un grand nombre de ceux que vous aborderez durant votre séjour, a abasourdi et enragé une grande partie de la population surtout citadine.

SYRIZA a joué un rôle multiple. Il a éclairé les causes de la crise néolibérale, il s’est battu aux cotés de la population -sans prétentions hégémonistes (exemples les luttes des indignés, des travailleurs, des chômeurs), il a proposé des solutions alternatives à l’impasse.

Ceci n’a pas été ni facile ni immédiat. Il a fallu un travail persévérant, à tous les niveaux du parti. Travail conceptuel et sur le terrain de luttes.

SYRIZA est arrivé, à mon avis, à convaincre une partie des citoyens, la plus consciente, de la faisabilité de cette alternative, sous condition d’un combat ciblé, suivi activement par une masse critique de la population.

Toutes ces conditions ensemble expliquent la place prise par la Gauche radicale de notre pays sur la scène politique nationale, mais aussi internationale.

Mon séjour en France, mon récent voyage en Algérie, mes contacts en Europe et en Amérique Latine me le confirment.


Une stratégie de rupture avec l’austérité peut-elle vraiment aller au bout, avec toutes les pressions de Bruxelles, des autres gouvernements et des marchés?

C’est une question posée par la vie et chaque jour. Mais n’oublions pas que la vie est fonction du mouvement du rapport de forces. Nos impressions et opinions peuvent malheureusement être par moment figées. La vie réelle ne le reste jamais.

Bruxelles, la troïka, les autres gouvernements et les marchés, sont aussi fonction et résultat de ce rapport. Le capital financier devient de plus en plus spéculatif. N’est-t-il pas nécessaire de faire front, tous les peuples ensemble pour lui barrer la route ?

La devise communiste était « prolétaires de tous les pays unissez-vous ». Cette exigence me paraît d’une grande actualité. Elle devient plausible avec l’intensification de la mondialisation et le niveau intellectuel élargi et haussé dans le monde et en particulier en Europe.

Pourquoi SYRIZA ne pourrait-il exiger une révision de la dette, une révision des conditions et des préalables au paiement ? Tout économiste vous dira que la dette d’un pays n’est pas une simple somme d’argent. Elle a sa structure, ces délais, les particularités de ses intérêts. Peu de monde en Allemagne et en France sait que les intérêts d’emprunt auprès de la BCE ne sont pas partout du même niveau. À la Grèce est appliqué un taux de 8%, alors que pour l’Allemagne – et pour la France si je ne me trompe pas- ne dépasse pas le 1%. Pourquoi cette différence ? Les «marchés » financiers vous diront que s’est fonction du risque. Les économistes de la véritable gauche vous répondront qu’il s’agit d’une forme déguisée de néocolonialisme économique.

Certes il ne sera pas facile de renégocier la dette. Il sera encore plus long de faire face à l’austérité.

Les faucons de la finance et leurs serviteurs aux medias crient l’impossibilité de réalisation du programme électoral du parti. Les électeurs portent une oreille attentive. Il s’agit de leur avenir, de celui de leurs enfants et de leur pays.

Le programme de SYRIZA est élaboré en détail. Ici je cite les quatre axes essentiels.

  1. prise en charge de la crise humanitaire, par l’utilisation judicieuse d’un montant de 2 mds d’euro.
  2. renégociation de la dette sous préalable d’un index de développement
  3. redémarrage de l’économie réelle
  4. restructuration effective du cadre institutionnel

Il s’agit donc d’un travail en profondeur et par étapes, qui demandera en permanence l’adhésion et la mobilisation du peuple.

Il demandera aussi la solidarité européenne et internationale.

À toutes les forces démocratiques, humanistes écologistes dans l’Europe, à toutes les forces du PGE, d’y contribuer positivement. Notre lutte vous concerne. Votre solidarité est pour nous d’une importance majeure.


Que changerait une victoire de Syriza pour les autres peuples de l’Union européenne ?

C’est une question difficile. Malgré les orientations néolibérales, appliquées aux simples citoyens dans l’ensemble de l’UE, il existe des particularités majeures en matière de niveau de développement, des acquis établis précédemment. Les représentations chez chaque peuple sont forgées par des spécificités historiques, par l’aiguisement de la conscience collective, par les traditions de luttes syndicales ou/et spontanées.

Le modèle unique, n’as pas encore perverti le cheminement historique des nations. Et la Grèce, par son vécu pénible, a été en partie vaccinée contre le virus de ce modèle unique. L’avenir prouvera nos capacités de résistance.

Je suis de l’avis que la victoire probable de SYRIZA aux élections de cette semaine pourra avoir un retentissement positif aux peuples européens et en particulier aux forces éprises de réelle démocratie (y compris sociale et de participation).

Il dépendra aussi des forces locales dans chaque pays d’en faire l’écho objectif. Parce que les déformations du miroir médiatique néolibéral n’en manqueront certes pas.

Permettez-moi d’être un peu plus retenue en matière de boule de neige politique éventuelle à d’autres pays européens. Certes, la lutte et les succès d’un peuple peuvent servir d’exemple. Cependant ils ne s’exportent pas. Ils sont surtout le fruit mûr des conditions intrinsèques du processus historique à chaque coin du monde.

L’emblème du sacrifice internationaliste de Chez Guevara reste un acte individuel de bravoure, mais la transformation sociétale de Bolivie a pu être avancée par un fils de l’Antiplano bolivien, le Président Evo Morales.

Αliki PAPADOMICHELAKI


JACQUELINE GUERROUDJ NOUS A QUITTÉ

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Obsèques de Jacqueline Gueroudj

L’enterrement de notre défunte camarade et Moudjahida
Jaqueline Geuroudj
décédée le dimanche 18 Janvier à l’hôpital LAMINE DEBAGHINE « Maillot » Bab El Oued Alger,
aura lieu le mardi 2O janvier 2015

au carré des martyrs

du cimetière d’El Alia Alger

La levée du corps se fera à partir de son domicile situé entre la rue Trolard et le boulevard Krim Belkacem ,Telemly Alger centre à 13h

Nous tiendrons nos lecteurs au courant d’éventuelles nouvelles informations

Raina.dz, le 19 janvier 2015


Message de condoléances de Sadek Hadjerès
adressé à toute la famille Guerroudj

Cher Tewfik

La disparition de notre chère et grande Jacqueline m’attriste, d’autant plus que je gardais encore l’espoir de la revoir après que son état de santé ne me l’ait pas permis en octobre dernier..

Je garde toujours en moi les nombreux souvenirs de Ouchba ainsi que celui de votre bref séjour à Ain Taya avant l’engagement dans les CDL

Jacqueline est toujours vivante dans nos coeurs et nos esprits, elle continuera à inspirer les nouvelles générations pour sa ferme et courageuse abnégation, la constance de son engagement et de ses convictions, sa modestie et sa sensibilité humaine

Aliki et moi nous nous associons à votre peine et vous embrassons tous

Sadek Hadjerès


JACQUELINE GUERROUDJ REPOSERA DEMAIN À EL-ALIA
publié par Saoudi Abdelaziz

le 19 Janvier 2015

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En attendant la mort, la sereine assurance

de Jacqueline Guerroudj face à la presse coloniale

Jacqueline Guerroudj est décédée hier à l’hôpital Maillot de Bab El Oued. La doyenne des condamnés à mort sera enterrée demain mardi au cimetière d’ El Alia.

Elle était âgée de 96 ans, mère de 5 enfants et plusieurs fois grand-mère. Elle a toujours vécu en Algerie, depuis cette année 1948 où, venant de France, elle fut à la fin de ses études affectée comme institutrice, à Négrier (Chtouane) près de Tlemcen. Dans cette localité qui portait bien son nom, les paysans pauvres et sans terre étaient écrasés sous le joug colonial.

Elle raconte : « Mon entourage était essentiellement communiste, ce n’était pas le hasard, mais le jeu des affinités. J’étais d’accord avec l’analyse faite par mes futurs camarades qui, contrairement à ce qu’on dit souvent, posaient l’indépendance de l’Algérie comme condition préalable à toute amélioration de la situation.J’étais d’accord aussi avec l’attention qu’ils portaient aux conditions de vie des plus défavorisés et j’appréciais la lutte constante et efficace qu’ils menaient à leur côté. Au contact des paysans, j’ai beaucoup appris de la vie à Tlemcen, c’était la période la plus féconde de mon existence ».

Dès le déclenchement de la lutte armée, elle réjoint -avec son mari Abdelkader et sa fille Djamila- les Combattants de la libération (CDL) groupes armés créés par le Parti communiste algérien. Puis elle poursuivra son combat dans l’ALN, après les accords PCA-FLN conclu en 1956 entre Abane ramdane et la direction du PCA. Arrêtée en 1957 en pleine bataille d’Alger, elle sera condamnée à mort en même temps que Fernand Yveton, qui sera exécuté.

La levée du corps se fera à 13 heures à partir de son domicile d’Alger-centre, situé entre la rue Trolard et le boulevard Krim Belkacem (Telemly).

blog algerieinfos


AIN FEZZA: LES ANCIENS PLEURENT JACQUELINE GUERROUDJ
par Khaled Boumediene

C’est avec émotion que les habitants de la ville d’Ain Fezza (daïra de Chetouane) ont appris le décès de la valeureuse moudjahida Jacqueline Guerroudj, le 18 janvier dernier.

Née en France où elle a vécu jusqu’en 1948, Jacqueline Guerroudj a enseigné le français dans les écoles à Négrier (actuellement Chétouane ) et Ain Fezza entre 1948 et 1955.

Âgée de 95 ans, la mort de la doyenne des ex-condamnés à mort, a suscité de nombreuses réactions dans toute la région. Ses anciens élèves par la voix de l’actuel président de l’APC d’AïnFezza, Mekkaoui Hamza, lui rendent un vibrant hommage.

«C’est avec une très vive émotion que je viens d’apprendre la mort de celle qui m’a enseigné le français quand j’étais petit. J’ai eu le bonheur d’être son élève de 1952 jusqu’à 1955 à l’école d’Ain Fezza. Son départ me cause une douleur insupportable. C’était une institutrice d’une grande qualité intellectuelle, d’une très large culture
et une femme d’une qualité morale exceptionnelle. Elle était très présente aux côtés des élèves. La distance m’empêche de suivre son dernier voyage. J’y serai présent par l’esprit pour vivre l’émotion avec sa famille. Du fond du cœur, je voudrais transmettre à toute sa famille mes condoléances les plus attristées. On baptisera de son nom l’une des artères principales de la ville d’AïnFezza»
, raconte ainsi le président de l’APC d’Ain Fezza, Mekkaoui Hamza, tout ému.

Et d’ajouter: «beaucoup de ses élèves sont encore en vie : Mohammedi Mohamed, ex-garde républicain d’Ouchba, Mohammedi Miloud dit Yazid, moudjahid de Chetouane, Abdelhak Omar, ancien cheminot, ChikhiKada ex-cadre des mines, Ghomrikaddour, ex-cheminot, Ourad Mohamed, ex-cadre des ponts et chaussées.
En 1992, nous l’avions invité à visiter Ain Fezza. Elle y est restée pendant une semaine pour rencontrer ses anciens élèves et voisins. D’ailleurs, c’est ici à Ain
Fezza, qu’elle a commencé à écrire son livre intitulé les douars et les prisons dans lequel, elle explique les conditions des ouvriers agricoles et de leur famille qui relevaient de l’époque féodale, l’épidémie de rougeole qui atteignit les enfants de Chouly, qui moururent comme des mouches, car ils n’y avait pas de docteur, ni de route pour les amener dans un dispensaire, ainsi que l’histoire des chiens lâchés contre elle par Dollfuss, lorsqu’elle s’opposa à celui-ci, pour que le fils doué d’un espagnol, continue à 14 ans les études. Age auquel un enfant peut avoir un rendement d’adulte»
.

D’un air abattu, son ex-élève ChikhiAissa (Moudjahid) souligne lui aussi : »il ne faut pas oublier, que Jacqueline Guerroudj, qui activait dans la zone autonome et qui fut arrêtée en 1957 puis condamnée à Mort, a pris part à la bataille d’Alger en compagnie de Djamila Bouhired, J. Boupacha, J.Bouazza , Zohra Drif, de la chahida raymondepeschard,
Fadhila etc… Jacqueline a aussi participé avec le chahid Fernand Iveton au projet d’attentat de l’usine à gaz du Hammaà Alger. Iveton fut le 11 février 1957, à l’âge de 31 ans, le premier Français guillotiné. Sa fille, Danielle, poseuse de bombes à Alger, est aussi une grande moudjahida. Au nom des anciens élèves de la Ville d’Ain Fezza, j’adresse mes sincères condoléances à sa famille et à ses proches ».

 »beaucoup de ses élèves sont encore en vie :
En avril 1955, Jacqueline et son mari sont expulsés du département d’Oran vers la France en raison de leurs opinions politiques. Djilali revient clandestinement en Algérie, mais seulement en décembre 1955 que toute la famille obtient de s’installer légalement dans l’Algérois. Jacqueline milite avec son mari qui est responsable des combattants de la liberté (organisation militaire qui dépend à l’origine du PCA et qui est ensuite intégrée au FLN). Tous deux sont arrêtés en
janvier 1957. Condamnés à mort, ils seront graciés après une intense campagne faite en France contre leur exécution.

Après l’indépendance, Jacqueline, mère de cinq enfants, retrouve sa famille et reprend des activités professionnelles. Elle est restée au FLN jusqu’en 1965.

Repose en paix Jacqueline Guerroudj.

Le Quotidien d’Oran


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1948 – 1954 : LES LUTTES PAYSANNES DANS LA RÉGION DE TLEMCEN – LE TÉMOIGNAGE DE JACQUELINE GUERROUDJ
socialgerie, article 1215 – mis en ligne le 5 juillet 2013
repris sur raina.dz, le 19 janvier 2015

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Jacqueline Guerroudj, moudjahida, doyenne des ex-condamnés à mort
L’INSTITUTRICE QUI PRÔNAIT LA LUTTE DES CLASSES
El Watan, le 14 mai 2009

«Quand on suit quelqu’un de bon, on apprend à devenir bon : quand on suit un tigre, on apprend à mordre» Proverbe chinois

Je ne regrette rien, tout ce que j’ai fait était réfléchi. Jacqueline avait déjà connu les privations lors de la Seconde Guerre mondiale. Les «sœurs» en prison, c’était une famille soudée.

C’est en bonne voisine, que Mimi Maziz, la doyenne des journalistes, rencontrée par hasard sur les lieux, nous indiqua la demeure de Jacqueline. Noble geste de Mimi qui fera encore mieux en participant à une partie de l’entretien malgré «une cocotte laissée sur le feu». La maison d’un beau style est située à l’embouchure d’un chemin tortueux qui monte pas très loin de la Faculté d’Alger où Jacqueline a tant servi en tant que bibliothécaire. C’est dans cet environnement familier que la vieille et grande dame digne a vécu et vit toujours.
À 90 ans, la silhouette frêle, la mémoire parfois oublieuse, mais toujours les mêmes convictions et les mêmes idéaux «qu’elle défend becs et ongles quoi qu’il en coûte jusqu’au dernier souffle.»

«C’est un être exceptionnel que j’ai eu la chance de connaître il y a plus d’un demi-siècle, se souvient son amie Annie Steiner. Elle est dotée d’une forte personnalité et a horreur des injustices. Tout en elle est sublimé dans la simplicité.»

Ainsi est Jacqueline Guerroudj qui avoue avoir deux habitudes indécrottables. Rigoler de tout et dire tout ce qu’elle pense sans prendre de gants. En fait, Jacqueline, moudjahida, doyenne des condamnées à mort, toujours égale à elle-même s’est jurée de refuser l’inacceptable et de faire reculer les murs. Ces slogans, le regretté Abdelhamid Benzine appelait à les conjuguer à tous les temps par tous ceux qui aiment les fleurs et le chant des cigales. Jacqueline n’aime pas parler de sa petite personne. «Je n’ai pas de prétention, je n’ai pas de mérite, car je n’ai rien d’extraordinaire», lance-t-elle en guise de préambule à des discussions qu’elle a acceptées presque malgré elle.

Jacqueline a un point commun avec Steiner : deux femmes résolument de gauche qui ont le triomphe modeste et qui préfèrent l’ombre aux feux de la rampe. C’est leur choix, elles sont comme ça et nul ne peut les dévier de leur trajectoire, nous confie leur amie tout aussi discrète, Khadidja, qui a subi les mêmes affres qu’elles pendant la guerre.

Les chemins de la liberté

Les chemins de la liberté des femmes algériennes sont sinueux et appellent parfois des décisions ambiguës que Fanon a l’honnêteté de remarquer. Le rôle des femmes algériennes dans la résistance est peu connu. Et pourtant, nul ne peut nier leur apport remarquable à la révolution. Fanon indique la conscience que les responsables du FLN ont toujours eue du rôle important de la femme dans la libération nationale. Ainsi, le même problème s’est posé aux femmes et aux individus colonisés, héritant les uns et les autres d’un lourd passé de domination. Il s’agit pour eux de forger un avenir nouveau pour une révolution libératrice. Les femmes et les peuples colonisés partagent l’expérience à la fois intime et collective de l’oppression et ont en commun d’avoir été privés de leur humanité. Fanon soutient la thèse de la nécessité et de la valeur de la violence, puisque c’est en elle que l’opprimé puise son humanité. «Côte à côte avec nous, nos sœurs bousculent un peu plus le dispositif ennemi et liquident définitivement les vieilles mystifications.»

Parlant des femmes condamnées à mort et de leurs cellules à Serkadji, Jacqueline avait écrit : «Quand nous étions dans la cour, toutes les cinq, nous dansions et nous chantions, parfaites cigales, moitié par défi, moitié pour nous défouler. «Ah ce qu’elles étaient belles», s’écriait Annie dans l’émouvant film “Barberousse” mes “«sœurs”, de Bouabdallah.

Plus tard, Jacqueline écrira en témoignage des liens affectifs avec ses codétenues : «J’étais fille unique, mais j’ai trouvé en Algérie les frères et sœurs qui m’avaient manqué…»

Une vie de combat

Lorsque Jacqueline se met à raconter sa vie, il faut rester tout ouïe, car elle a la hantise de perdre le fil conducteur. Elle est née en France à Rouen dans une famille modeste entourée de l’affection de ses parents auxquels elle n’a jamais cessé de rendre un hommage appuyé. «Ce sont eux qui m’ont ouvert les yeux sur le monde. Mon père Louis était respectueux des gens. Il aimait converser avec les hommes de condition modeste et il comprenait parfaitement leur difficulté à s’accrocher à la vie avec toutes ses vicissitudes. Je le voyais souvent bavarder avec le balayeur devant le pas de porte de notre domicile. Il ne faisait pas de distinction et lorsqu’il était question de prodiguer des conseils, il ne s’en privait pas. Même moi je n’ai pas été épargnée, lorsque je lui ai fait part de mon intention de passer le bac philo ; il m’a répondu, ce n’est pas avec ça que tu vas gagner ta vie, fais du droit comme ça tu pourras trouver un débouché. En vérité, je n’y ai jamais pensé !» Mais grosso modo, mes parents ne se sont jamais mis en travers de mes projets. J’ai fait la philo et le droit et je m’en suis bien sortie !

Jacqueline aime à dire que les voyages instruisent la jeunesse. Elle en a fait beaucoup, mais celui qui l’a marquée c’est son séjour au Sénégal où elle a été affectée en tant qu’institutrice. «J’étais à Saint Louis au Sénégal, et là j’ai fait la connaissance de Senghor et Alioune Diop qui allaient devenir d’illustres personnages par la suite. J’avais déjà compris ce que c’était la colonie.»

Marquée par la Seconde Guerre mondiale, elle en parle non sans stigmatiser le comportement barbare des Allemands. C’est à cette période qu’elle a su ce que le vocable résistance veut dire.

Jacqueline arrive en Algérie en 1948 et est nommée institutrice à Négrier (Chetouane) près de Tlemcen. «J’avais une classe unique de 50 élèves.» Dans cette région, elle s’imprègne des dures conditions vécues par les paysans pauvres et sans terre soumis au joug des colons et qui sont traités presque comme des esclaves. «Mon entourage était essentiellement communiste, ce n’était pas le hasard, mais le jeu des affinités. J’étais d’accord avec l’analyse faite par mes futurs camarades qui, contrairement à ce qu’on dit souvent, posaient l’indépendance de l’Algérie comme condition préalable à toute amélioration de la situation. J’étais d’accord aussi avec l’attention qu’ils portaient aux conditions de vie des plus défavorisés et j’appréciais la lutte constante et efficace qu’ils menaient à leur côté. Au contact des paysans, j’ai beaucoup appris de la vie à Tlemcen, c’était la période la plus féconde de mon existence. Je dois préciser que je n’avais pas adhéré au Parti communiste français quand je vivais en France. Je ne me sentais sans doute pas assez impliquée pour ressentir le besoin de militer.»

En Algérie, son adhésion au communisme coulait de source. «Elle était le fruit de mes premiers contacts avec la réalité coloniale qui m’obligeait à prendre position pour ne pas être complice.» Jacqueline milite au milieu de noyaux de fellahs communistes dans la région de Tlemcen, mais leur nombre n’était pas suffisant pour qu’ils exercent une influence notable sur le cours des événements.

En mai 1955, Jacqueline, son mari Djillali et leurs cinq enfants sont expulsés d’Algérie. Ils vivront quelques mois à Rouen, chez la famille de Jacqueline.

Au début de l’année 1956, la famille Guerroudj obtient l’annulation de la détention de bannissement, en lui interdisant toutefois de s’établir dans l’Oranie. «J’avais quitté la France, à une époque où il faisait si froid que le linge gelait sur les cordes où je l’étendais pour sécher et devenait raide comme de la tôle. L’arrivée à Alger a été un éblouissement, la baie d’Alger, d’abord puis la plage de Aïn Taya sous le soleil, le ciel bleu pur, le temps doux et ce premier bain délicieux, revigorant.» Djillali, le mari était responsable pour Alger des «combattants de la libération, organisation armée du PCA et Jacqueline était son agent de liaison. Communiste engagée Les activités de Jacqueline se sont multipliées au fil du temps.

L’accord FLN/PCA a été accueilli avec enthousiasme malgré tous les problèmes qu’il posait. Nos groupes étaient rattachés au responsable FLN de la zone autonome Yacef Saâdi.

Étroitement impliquée dans les opérations, Jacqueline a participé avec Fernand Iveton, militant communiste, au projet d’attentat à l’usine à gaz du Hamma. C’était le 11 février 1957. Iveton 31 ans avait été guillotiné. Sa grâce avait été refusée par le gouvernement de Guy Mollet. «Je vais mourir, mais l’Algérie sera indépendante», furent les derniers mots prononcés par Iveton avant d’être guillotiné juste après Mohamed Ounouri et Ahmed Lakhnache.

Ce matin, ils ont osé

Ils ont osé vous assassiner

C’était un matin clair

Aussi doux que les autres, où vous aviez envie de vivre et de chanter

déclamait dans un poème écrit après son exécution Annie Steiner dans le quartier des femmes de la prison de Barberousse d’Alger.

Avec le développement de la bataille d’Alger, les rafles, l’utilisation intensive de la torture et les arrestations se multiplient. Jacqueline et Djillali sont arrêtés en 1957. M’ayant reconnue pour sœur, les détenues, les Djamila, Zhor, Ghania, Djouher, Fadéla, Houria, Malika et les autres se sont précipitées sur moi, m’ont fait une fête. Un accueil que je n’oublierai pas. C’était fabuleux de se retrouver aussi bien au chaud, dans une vraie famille, alors que je ne pensais atterrir dans quelque geôle sombre et solitaire.

Transférées à El Harrach, les prisonnières seront de nouveau amenées à Marseille puis à Paris, enfin à Toulon, Toulouse et Pau.

À sa libération en 1961, Jacqueline et sa fille rejoignent Tunis.

Ces dernières années à l’instar de ses sœurs, Jacqueline s’est largement mobilisée autour des objectifs de code de la famille, de démocratie, contre la torture et plus généralement pour les bonnes causes de par le monde.

Dans son livre «Des douars et des prisons», paru il y a quelques années, Jacqueline, désabusée quelque part, s’interrogeait sur le destin de cette Algérie, dont les dirigeants en 1962 n’ont pas su, ou pas pu, «surfer» assez loin sur cette grande vague porteuse qu’était l’indépendance.

Maintenant, avait-elle écrit, on se retrouve dans le creux de la vague et les jeunes se demandent où est leur place et quelles sont leurs possibilités. «Je n’ai pas de réponse, mais chacun doit mener sa propre réflexion basée sur la connaissance du passé.»

Parcours

Jacqueline Guerroudj est née en 1919 à Rouen. Elle fait des études de philo et de droit et vient en Algérie en 1948 où elle est affectée en qualité d’institutrice près de Tlemcen. Dès le déclenchement de la lutte armée, elle prend fait et cause pour l’indépendance de l’Algérie. Avec son mari Djillali, militant communiste et sa fille Minne Djamila, elle intègre le FLN. Elle est arrêtée en 1957 en pleine bataille d’Alger et condamnée à mort. Au lendemain de l’indépendance, elle entreprend une longue carrière à la Faculté d’Alger en tant que bibliothécaire. A 90 ans, Jacqueline qui a toujours vécu à Alger se consacre à la lecture et à la rédaction de ses mémoires. Jacqueline est mère de 5 enfants et plusieurs fois grand-mère.|

Hamid Tahri


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sur socialgerie, voir aussi

[HOMMAGE AUX MOUDJAHIDATE ALGÉRIENNES D’ORIGINE EUROPÉENNE
PAR LA FONDATION « OMAR OURTILANE » INTERNATIONALE
JACQUELINE GUERROUDJ, DAME DE L’ANNÉE 2010

->214]

MOUDJAHIDATE – El Khabar – le 9 mars 2010, page 15


DISPARITION
JACQUELINE INDÉPENDANTISTE ENTRE DEUX RIVES
L’Humanité, le 20 janvier 2015

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La militante Jacqueline Guerroudj, qui a œuvré pour l’indépendance de l’Algérie, vient de nous quitter. Ses obsèques se tiendront aujourd’hui, 20 janvier, à 13heures, au cimetière El Alia à Alger.

La doyenne des moudjahidate est partie. Âgée de quatre-vingt-quinze ans, la moudjahida – littéralement femme combattante- Jacqueline Guerroudj est décédée dimanche dernier à Alger, des suites d’une longue maladie, a-t-on appris par ses proches. Cette femme aux engagements exceptionnels a éprouvé les plaies du XXe siècle. Parmi ses nombreux combats, l’histoire retiendra la manière dont elle s’est illustrée en faveur de l’indépendance de l’Algérie. « Née en 1919 à Rouen, de famille française et de confession israélite, elle fit des études de philosophie et de droit. Internée à Tours au début de 1942 par les nazis, elle échappa à la déportation et à la chambre à gaz en réussissant à gagner la zone sud. Nommée institutrice en Algérie, elle y épouse en 1951 Abdelkader Guerroudj, instituteur lui aussi, membre du Parti communiste algérien », résume en 1957 Pierre Durand, journaliste à l’Humanité.
Dans cette période la militante intègre le réseau du Comité de défense des libertés (CDL), et s’engage, en 1956, au Front de libération nationale (FLN) comme agent de liaison dans les commandes de l’Armée de libération nationale (ALN). Ces faits lui vaudront d’être arrêtée et condamnée à mort en 1957. Si elle échappe à la l’application de cette peine, son compagnon de lutte, l’ouvrier syndicaliste Fernand Iveton, est lui, exécuté, en dépit d’un recours en grâce et des efforts répétés de Jacqueline pour le sauver. « Je vais mourir, mais l’Algérie sera indépendante», furent les dernières paroles entonnées par le militant communiste avant d’être guillotiné. Éclair de lucidité dans le ciel de la mort.

L’indépendance établie, Jacqueline poursuit une carrière de bibliothécaire à la faculté d’Alger, tout en élevant ses cinq enfants.

Pour mesurer l’intégrité de cette femme qui a fait l’histoire entre deux rives, il est utile de relire la Guerre d’Algérie (Temps actuels, sous la direction d’Henri Alleg). Dans un passage qui relate le procès retentissant des « combattants de la libération » de décembre 1957, devant le tribunal permanent des forces armées d’Alger, Jacqueline revient fièrement sur la nature de ses convictions, qui évoquent la couleur de l’époque : « J’ai réalisé qu’il y a des circonstances où il était impossible de ne pas prendre position et que j’avais contracté une dette que je me suis promis de payer. Toutes mes sympathies allaient au communisme, mais je n’ai commencé à militer que lorsque je me suis installée en Algérie, pour pouvoir lutter efficacement contre les injustices que j’avais constamment sous les yeux et qui me révoltaient.»

Nicolas Dutent.
L’Humanité
le 20 janvier 2015
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DÉCÈS DU CAMARADE AISSA BAIOD

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Nous venons d’apprendre le décès du camarade Aissa Baiod survenu le vendredi 16 JANVIER 2014 à l’âge de 94 ANS, l’enterrement a eu lieu ce samedi au cimetière de Kouba à Alger.

Le défunt est l’un des vétérans du PCA (parti communiste Algérien), il était aussi militant du PAGS (parti de l’avant garde socialiste) durant la clandestinité et aprés, et éducateur hors pair ayant formé plusieurs générations de cadres Algériens .

Directeur d’un collège d’enseignement à KOUBA , militant infatigable de sa classe, celles des laborieux et des travailleurs de notre pays ; il n’a cessé de mener le combat jusqu’à son dernier souffle.

La Moubadara du 24 FEVRIER présente en cette pénible circonstance ses condoléances à la famille du défunt camarade, et a sa grande famille progressiste et communiste d’Algérie et d’ailleurs .

LA MOUBADARA DU 24 FEVRIER


Le journal Raina très peiné d’apprendre la nouvelle du décès du militant communiste Aissa Baiod présente
à la famille du défunt et a celle progressiste de notre pays ses condoléances les plus attristés
La rédaction de Raina.dz

http://www.raina-dz.net/spip.php?article720


AISSA BAIOD NOUS A QUITTÉS

publié par Saoudi Abdelaziz, le 18 Janvier 2015
blog algerieinfos-saoudi

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Photo DR

Aissa Baiod avait 94 ans.
Je l’ai connu dans les années 60 -70 quand les embûches de l’action syndicale, en ces temps de parti unique et d’anti-communisme, ne réussissaient pas à altérer sa bonhommie souriante.
Son métier d’enseignant, il l’a vécu comme une tâche militante, comme son activité au syndicat enseignant puis à l’Union locale d’Hussein-Dey, au PCA puis au PAGS. Et à la mutuelle enseignante, la retraite venue.

http://www.algerieinfos-saoudi.com/2015/01/aissa-baiod-nous-a-quittes.html


Il y a sept ans, dans le quotidien El Watan, Hamid Tahri avait dressé son portrait et retracé son parcours.

Aïssa Baïod-Enseignant, éducateur, syndicaliste, journaliste

MARCHAND D’ALPHABET, MARCHAND DE BONHEUR

Par Hamid Tahri,
El Watan; 12 juin 2008

Si Aïssa a été de ceux qui ont fait adopter l’enseignement de la langue arabe dans les années 1950 dans les programmes, malgré l’hostilité de l’occupant.

Candidat au titre du PCA, aux élections à l’Assemblée algérienne, Aïssa fut empêché d’assister au déroulement du scrutin. Invité par Baza Hocine à visiter Medjdel, village perdu à 70 km de Bou Saâda, Lacheraf dut faire 45 km de nuit et à pied pour joindre la cité du Bonheur après la panne du car le transportant. Il fit montre d’une volonté à ne pas manquer à ses devoirs pour être à son poste le lundi à 8 h.

Sous ses sourcils broussailleux, des yeux malicieux et un regard profond, le sentiment ancré dans une enfance laborieuse auprès d’une famille de lettrés religieux de Bou Saâda, Aïssa vivra son parcours comme un sacerdoce : son destin sera intimement lié aux classes avec leur estrade et leur tableau noir, mais aussi avec les luttes qui vont avec ! Syndicaliste, enseignant, éducateur, journaliste, Aïssa, à bientôt 90 ans, garde toujours sa verve juvénile. Pour preuve, il active toujours au sein de la Mutuelle des enseignants qu’il a créée en 1969. Il se revendique homme de gauche. Il n’a pas varié d’un iota et ses convictions sont toujours intactes. On peut raconter son itinéraire comme il vient, sans fioritures, mais il n’est pas sûr qu’on rende justice à son riche palmarès. Cet enseignant très comme il faut, très libre, nous invite à suivre les mille péripéties et leurs enchaînements qui ont jalonné son impressionnant cheminement. Il est né en 1919 à Bou Saâda que les colons avaient baptisé cité du Bonheur. Plutôt cliché de carte postale pour ces milliers de laissés-pour-compte qui crevaient la dalle !

Prénommé Aïssa, en souvenir d’un grand-père attentionné et lettré, il perdra son père, Mostefa, alors qu’il n’avait pas bouclé ses deux ans. Son paternel, prêtant secours aux malades atteints de typhus, y laissa lui-même sa vie. C’est son oncle Abderahmane qui succédera à son père en prenant le flambeau de l’imamat. «J’ai suivi le cours élémentaire mixte de l’école Lucien Chablon qu’avait fréquentée Mostefa Lacheraf, très peu avant d’être admis au lycée de Ben Aknoun. Ce cours, équivalant à un CEM actuellement, a été fréquenté également par de nombreux élèves durant les années 1930, comme les futurs instituteurs Bisker Aïssa, El Bouti Mohamed, Abdellatif Tameur, Abdellatif Messaoud et moi-même. Les futurs médersiens Khaled Kahloula, Kadri Abderahmane, Benraâd Abdelkader, Boudiaf Brahim et Boudiaf Mohamed. Ce dernier, camarade de classe, partageait avec moi la même table-banc. Nous sommes en 1939 à Sidi Aïssa, je venais d’être nommé instituteur auxiliaire, au lieu d’aller à l’école normale de Bouzaréah, fermée pour cause de guerre.» L’école normale ? «C’était une vocation et une nécessité. Face à la misère qui sévissait, il fallait soit s’engager dans les tirailleurs ou les spahis et devenir mercenaire, à son corps défendant, ou opter pour l’enseignement, seule filière tolérée pour les indigènes. A l’époque, les épidémies étaient légion et les exodes nombreux. Bref, c’était invivable ! Quand les choses s’apaisaient tout le monde était heureux.»

Un militant infatigable

Au début des années 1930, le mouvement El Islah voyait le jour avec l’avènement de l’association des Oulémas. Il avait ses émules dans cette contrée. A Bou Saâda, comme le note Lacheraf dans son livre Des noms et des lieux : «Ce milieu traditionaliste dans le bon sens, à l’époque où je l’ai fréquenté était riche en hommes de forte personnalité, nourris d’un patrimoine arabe respectable plus ou moins classique et de haute époque, détendus, croyants sans excès de zèle ou de bigoterie, ouverts à la fois sur des valeurs anciennes et des acquis nouveaux, ayant leur franc-parler et portés à des plaisanteries intelligentes.» Jeune, Aïssa se souvient de cette période où la rivalité farouche entre les oulémas et la zaouïa d’El Hamel, au service de l’administration, allait grandissante. «Chez les oulémas, il y avait tout de même des progressistes comme Mohamed Bisker, poète, Amara Abdelkader, Lograda Hadj Zerrouk, Ahmed Djeddou de la lignée des instituteurs, comme Bisker Aïssa, Lograda Aïssa et bien d’autres qui seront à l’avant-garde et à l’origine de la création du Nadi El Islah vers 1934/1935 qui s’étaient évertués à lancer le mouvement culturel axé sur le modernisme. La zaouïa, qui avait joué au départ un rôle positif en animant la révolte des hommes du Hodna Ouled Naïl, Ouled Sidi Brahim, Ouled Madhi, avec la venue aux portes de Bou Saâda d’El Mokrani en 1863, s’est par la suite ralliée à l’administration coloniale.» A 17 ans, Aïssa prend conscience de la situation des siens. «Ce que je constatais ? L’opulence d’un côté, la misère de l’autre. J’ai vite pris mon parti étant ouvert sur le progrès et contre toutes les injustices. Et puis, il y a eu le Front populaire, vainqueur des élections en 1936 qui nous a ouvert les yeux.»

Mutation à Agouni Gueghrane

Les affres de la guerre, déclenchée en 1939, il les connaîtra par la suite. «L’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle, je l’entendis à la radio, chez Mme Sarra, directrice de l’école de Sidi Aïssa, le matin du 19 juin. Je quittais ainsi Sidi Aïssa pour Bou Saâda, sans directives ni informations. En septembre, reprise des études à Bouzaréah, où l’école était rouverte.» Deux années après, à la fin des études, Aïssa est nommé directeur d’école à Agouni Gueghrane près des Ouadhias, en Kabylie. Le service militaire l’appela en février 1943. «Je fis la guerre en partie en Algérie (El Biar, Dély Ibrahim), au Maroc (Casablanca). Le départ pour l’Europe s’est fait à Mers El Kebir et l’arrivée à Marseille, après trois jours en mer. En Alsace, nous avons séjourné en pleine nature, par moins 27 degrés qui firent geler mes pieds. Evacué sanitaire, je n’ai pas dormi pendant 12 jours, malgré les somnifères. Soigné à Besançon, j’ai évité par une volonté et un acharnement personnels l’amputation des orteils gangrenés. De retour à Alger après la convalescence, je fus démobilisé à El Harrach, le 15 août 1945.» Aïssa reprend son poste à Agouni Gueghrane, où un différend l’oppose à la commune mixte de Fort National au sujet des travaux urgents de réparation des locaux scolaires dégradés par un fort coup de vent. «Comme l’administration ne voulait rien entendre, j’ai organisé une touiza au village et on a réglé le problème.» Le 30 juin, Aïssa quitte la Kabylie pour Bou Saâda, où il assume la fonction d’instituteur. Son aventure syndicale commence avec la CGT, en représentant les instituteurs et en conseillant les fellahs. Il adhère au Parti communiste algérien en 1947, avec à l’époque Amar Ouzegane, Larbi Bouhali, Bachir Hadj Ali… Il est correspondant d’Alger Républicain et de Liberté, organe du PCA. Il a dénoncé la torture pratiquée par les gendarmes de Bou Saâda dans l’édition du 23 janvier 1948 avec comme titre à la une «Ligoté à un poteau, arrosé de 30 bidons d’eau glacée, un élu de Aïn Rich est torturé à mort.» Le mois d’après lors de sa visite officielle à Bou Saâda, «je demandais audience au préfet d’Alger, exigeant une enquête approfondie et des sanctions, moi ancien combattant blessé de guerre contre le nazisme.» Le 1er novembre 1954 le surprend à Alger, où il venait d’assister à un conseil syndical. «Henri Alleg, directeur d’Alger Républicain me demanda d’accompagner Abdelhamid Benzine et Zanehaci, journalistes, en Kabylie. Ce que j’ai fait. Arrivés sur place, on a appris la mise sous couvre-feu de toute la Kabylie.» Après la grève de l’hiver 1957, il est expulsé de Bou Saâda et interdit de séjour dans toute la région. «J’ai atterri à Alger. La commission municipale et policière avait exigé ma révocation, mais l’Académie n’a pas marché dans la combine car il n’y avait aucun argument contre moi.» Aïssa est nommé à Ben Aknoun de 1958 à 1961 en qualité d’instituteur. Il est ensuite muté à Hussein Dey en 1961. Il y restera jusqu’en 1971 en tant que directeur du collège de la cité Amirouche. En 1971, et en reconnaissance à l’Emir Khaled qui séjourna à Bou Saâda en 1924, il baptisera le collège qu’il dirigera à Kouba, jusqu’en 1986, du nom de l’illustre résistant. A Kouba, il poursuivra sa mission avec la même vigueur aux côtés d’autres anciens routiers de la profession qui formeront des générations comme les Attar, Tahri, Sayad, Mme Djaffar, etc. Il gardera le contact avec son ami Lacheraf, avec lequel il aura beaucoup de discussions. Il est d’accord avec son ancien camarade à propos de Dinet, figure emblématique de Bou Saâda «qui eut le mérite, grâce à ses démarches et relations, de faire changer le régime d’administration dans cette ville. L’homme Dinet était plus grand que le peintre Dinet, qui fut cet esprit passionné de justice et de vérité. De la religion musulmane, il avait une très haute idée à cause de sa dimension universelle».

Les anciens élèves reconnaissants

Ses anciens élèves ne tarissent pas d’éloges sur les qualités humaines et professionnelles de Baïod. Kadri Aïssa, professeur de sociologie à Paris, y voit «un être exceptionnel», alors que Cherif Kheiredine, ancien wali, ne trouve pas les mots assez forts pour qualifier cet homme. «M. Baïod a été et reste pour moi un modèle de rectitude morale, de profonde conviction tant sa vie d’éducateur, ayant formé plusieurs générations dans des conditions difficiles, reste jusqu’à aujourd’hui active, désintéressée et vouée à l’intérêt général. Il inspire le respect de ceux qui l’ont connu. Inutile de revenir sur la grandeur de l’être, motivé et fidèle aux nobles valeurs humaines qui n’ont pas été érodées par les vicissitudes du temps.» Lorsqu’on l’interroge sur son bilan, Aïssa le trouve très satisfaisant. «Pour la bonne raison que j’ai participé à l’éveil et à la formation d’une bonne partie de la jeunesse autour de moi, qui s’est affranchie de certaines habitudes de suivisme.» M. Baïod a son mot à dire sur les réformes de l’éducation. «Nous n’avons pas encore la liberté totale d’expression pour pouvoir parler de la place de l’enseignant dans la société, celle qu’il mérite et celle dans laquelle il se débat.» Et de citer des exemples concrets. «Dans l’ordonnance d’avril 1964 relative à la réforme, il était question d’école fondamentale polytechnique. Dans l’application, on a enlevé polytechnique. Plus près de nous quid de la réforme Benzaghou ? On ne l’a même pas testée. On n’a pas fait d’évaluation. De même qu’on ne demande pas de comptes à ceux qui décident et qui échouent.» Il dira sa colère à l’encontre «de ceux qui ne veulent pas avancer». On les appelait les réactionnaires. Aïssa était militant de l’UGTA jusqu’en 1969. Il s’est même séparé de la Munatec qu’il a créée et dirigée, parce que des gens malintentionnés l’ont prise d’assaut avec tous les scandales qui s’en sont suivis. L’école sinistrée ? Il en a longuement discuté aux côtés de Benzine avec son ami Mohamed Boudiaf. «Nous avions un projet. Nous devions le revoir après sa visite à Annaba, mais la réunion n’eut pas lieu et pour cause !» Plus terre à terre, il nous fera comprendre que parfois ce sont les esprits qui sont sinistrés. «Vous voyez cet établissement, c’est moi qui l’ai ouvert en 1971. Nous avions des espaces pour des stades afin que les élèves puissent y faire du sport. Ils ont été squattés par la municipalité RND de l’époque pour des constructions individuelles. Et après on vient se lamenter quand notre sport bat de l’aile. Notez bien qu’à l’époque, malgré nos protestations, personne n’a levé le petit doigt.» «L’école sinistrée, c’est aussi ça», regrette-t-il, amer.

Parcours

Aïssa Baïod est né en 1919 à Bou Saâda. Il a perdu son père, alors qu’il n’avait que 23 mois. Ecole coranique et complémentaire dans sa ville natale, puis l’école normale. Instituteur, nommé à Sidi Aïssa puis dans les Ouadhias en Kabylie. Syndicaliste, il a été l’un des premiers à être élu au congrès d’Oran dans les années 1960. En 1947, il adhère au PCA et devient correspondant de Liberté, l’organe du Parti. Ses amis : Mostefa Lacheraf et surtout Mohamed Boudiaf qui a fait les mêmes classes que lui à Bou Saâda. Homme de convictions et de cœur, Aïssa a toujours défendu les faibles et les sans-grades. Toute sa vie a été consacrée aux luttes contre les oppressions et les injustices. Il a fondé la Maatec et la Munatec en 1964. D’ailleurs, il continue toujours d’activer au sein de la première, à près de 90 ans. Aïssa a pris sa retraite de l’enseignement en 1986.


ALLER AU FOND DES VRAIS PROBLÈMES, POUR ROMPRE LE CYCLE DES LOGIQUES DE TERREUR

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Sadek Hadjerès

le 13 janvier 2015

L’Algérie indépendante avait connu dans les années 90 le malheur de l’enfermement dans un cercle infernal de terreur et de massacres. Le cycle a duré une décennie, à une échelle infiniment plus massive (par dizaines de milliers de victimes) que ce qu’a vécu le France après la vingtaine d’assassinats liés ou consécutifs à l’attentat contre les journalistes de Charlie Hebdo.

La différence entre les deux situations, porteuse ou non d’évolutions moins dramatiques selon que les vraies leçons en seront ou non tirées, c‘est qu’en France presque aussitôt et pour de multiples raisons, une immense clameur populaire s’est élevée au grand jour. Sa signification principale à mon avis, a été qu’à différents niveaux d’expressions et de contenus, s’est exprimée une façon d’exorciser en groupe les sentiments de peur, d’indignation et d’incompréhension. Sentiments humainement compréhensibles, liés à l’aspiration largement partagée à un « vivre ensemble » dans la paix et le respect mutuel, mais aussi sentiments sourdement contrecarrés par les méfiances, les a priori idéologiques, les réels conflits d’intérêt avec leur cortège de manipulations et de récupérations politiciennes.

En fait, un nombre considérable de citoyens français se sont découverts brusquement face à un risque énorme dont ils sous-estimaient jusque-là en général la proximité et l’ampleur dangereuse possible. D’autant plus que la signification et les racines de ces dangers leur étaient grandement masquées par les émissions télévisées concernant des pays plus lointains. Bien installés devant leurs postes à grand spectacle, ils étaient en majorité peu conscients des considérables problèmes sous-jacents à l’émergence et à l’essaimage des actes terroristes. Comme si ces derniers ne concernaient que les autres peuples écrasés sous les bombes, les missiles, les drones et les attentats ! Comme si « l’exportation » de la démocratie à l’occidentale par les armes ne pourrait jamais être sans conséquence sur le confort et la sécurité des citoyens paisibles d’Europe.

Cette libération des sentiments et des aspirations à l’échelle de millions de manifestants diversement motivés, aura-t-elle à terme des effets bénéfiques à la hauteur des souhaits légitimes ? Concrètement, suffira-t-elle à modifier positivement les mentalités, les comportements et les décisions des gouvernants, des sociétés et des acteurs politiques ?

La question est cruciale, car depuis trente ans, le fléau des terrorismes, qu’ils soient d’Etat ou d‘organisations et de groupes non étatiques, n’a fait que s’amplifier, essaimer et s’aggraver. Parce que l’ensemble des acteurs, volontairement ou involontairement, n’en ont pu ou voulu maîtriser toutes les racines, croyant dans le meilleur des cas en atténuer les effets au lieu de s’attaquer simultanément et radicalement à leurs causes économiques, sociales et géopolitiques. Illusion aussi grossière et meurtrière que celle qui prétendrait guérir une maladie grave en atténuant la fièvre et les douleurs par doses massives d’aspirine.

À ceux qui par intérêt financier ou de pouvoir cherchent à entretenir cette illusion et cette impasse, nombre de dirigeants, d’intellectuels, de mouvements sociaux et politiques, ont opposé courageusement les voies de la raison, du réalisme, de la communauté d’intérêts, pour faire triompher les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité dont il ne suffit pas de se gargariser à coups de décibels et de panneaux d’affichage.

Même certains experts ou des hauts responsables de « l’establishment » capitaliste comme Villepin ont dressé un constat sévère envers ceux qui, prétendant combattre les terrorismes, leur ont ouvert un boulevard de plus en plus large. La défaillance principale dans la lutte contre les effets ravageurs des terrorismes au cours des décennies écoulées, ne réside ni dans les insuffisances du renseignement ni dans celles des interventions sur le terrain : les unes et les autres ont bénéficié de moyens considérables, avec les résultats que l’on connait. Entre les deux, il y a une faille béante, celle de l’évaluation politique pertinente, avec l’irremplaçable instrument que sont pour tous les protagonistes les instructifs « retours d’expérience » et les jugements sur résultats.

Ce n’est pas un hasard si cette exigence élémentaire a été bafouée par nombre de décideurs, emprisonnés dans leurs stratégies et calculs étroits de profits immédiats, de classe et de clans prédateurs, d’hégémonie militaire, économique et de pouvoir sur les sociétés et les nations. Leur obsession du « tout sécuritaire » tue ou affaiblit les capacités politiques et le potentiel démocratique de résistance anti-terroriste. Pour paraphraser Einstein, la plus grande folie serait de compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre.

C’est donc au prix d’efforts difficiles et de long terme dans le cours des luttes de libération nationale et sociale globales (la lutte anti-terroriste n’étant qu’un des éléments), que reculeront les incitations sinistres à l’islamophobie et à toutes les formes d’intolérances, de racismes, d’intégrismes et de diktats de quelque nature qu’ils soient, qu’ils émanent d’injonctions néolibérales ou de fetwas takfiristes !.
Le RESPECT des justes droits et aspirations des peuples, de leurs sensibilités culturelles, religieuses et philosophiques, c’est le maître-mot, la clef des luttes communes souhaitables vers un avenir de paix et de mieux-être pour tous.

C’est le thème du débat et des réflexions que le site Socialgérie, après une pause technique de quelques semaines (heureusement comblée par plusieurs sites et blogs amis), souhaite voir s’instaurer en mettant en ligne quelques- unes des contributions qui lui sont parvenues, toutes aussi riches et encourageantes les unes que les autres. Il n’est pas sans intérêt aussi de consulter les nombreux articles sur ce thème, mis en ligne par le site durant ces six dernières années.

Sadek Hadjerès, socialgerie le 13 janvier 2015

Publié aussi sur

algerieinfos-saoudi, le 14 janvier 2015.

raina-dz.net le 15 janvier 2015

huffpostmaghreb.com le 14 janvier 2015


LOUNIS AIT MANGUELAT: NOUS SOMMES POUR LA VIE;


SYMBOLES ET PARADOXES Le Quotidien d’Algérie en ligne – le 15 janvier 2015;


L’ATTENTAT CONTRE CHARLIE HEBDO : L’OCCULTATION POLITIQUE ET MÉDIATIQUE DES CAUSES, DES CONSÉQUENCES ET DES ENJEUX -Said Bouamama – Investig’Action – le 11 janvier 2015;


VONT-ILS S’ARRÊTER DE JOUER AVEC LE TERRORISME? Publié par blog algerieinfos – Saoudi Abdelaziz – le 11 Janvier 2015.


ALGÉRIE. LE DANGEREUX REFUS DE « LA PAIX SOCIALE »par Mohamed Bouhamidi – le 12 janvier 2015publié par raina dz, le 12 janvier 2015Repris sur le blog algerieinfos-saoudi, le 13 Janvier 2015;


« JE NE SUIS PAS CHARLIE»par Shlomo Sand – le 13 janvier 2015 – http://www.ujfp.org/;


RÉSISTONS À L’ESPRIT DE GUERRELe Monde – le 08 janvier 2015 – par Dominique de Villepin;


ATTENTATS DE PARIS. – Une enquête de Mediapart le 10 Janvier 2015 ;


[braniya blogue – Messaoud Benyoucef

  • JE NE SUIS PAS CHARLIE ! braniya chiricahua blog – Messaoud Benyoucef – samedi 10 janvier 2015->#6]

Michel Onfray : « LES RÉGIMES ISLAMIQUES NE MENACENT L’OCCIDENT QUE DEPUIS QUE L’OCCIDENT LES MENACE »Assawra, le 10 janvier 2015 ;


LES DÉGÂTS INVISIBILISÉS DES INÉGALITÉS SOCIALES ET DES DISCRIMINATIONS RACISTES ET SEXISTES Saïd Bouamama – le 7 janvier 2015 – invextig’action – michel collon info ;


NOAM CHOMSKY, COMPRENDRE LES ÉVÉNEMENTS DU 11 SEPTEMBRE 2001 AUX ETATS-UNIS –adressé par Michel Peyret le 10 janvier 2015TERRORISME, L’ARME DES PUISSANTSpar Noam Chomsky – décembre 2001 – traduction Le Monde Diplomatique


CONCERT AIT MANGUELAT

Entrée sur scène
Zenith
le 11 Janvier 2015

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Concert de Lounis Ait Menguellet au Zenith de Paris (11 Janvier 2015) à l’occasion de Yennayer 2965

Entrée sur scène de Lounis Ait Menguellet, il rend hommage aux victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo, sans oublier toutes les victimes du terrorisme en Algérie

https://www.youtube.com/watch?v=ocFlLlogisY#t=279

je suis charlie
nous sommes charlie
mais nous sommes et je suis aussi Tahar Djaout, Lounès Matoub, Cheb Hasni, Abdelkader Alloula,..

…nous sommes tous ceux la, ceux que nous avons perdus, ceux la qui sont tombés pour que nous restions debout
et malgré tout cela on ne célèbre pas la mort, on célèbre la vie, avec tout ce qu’elle nous apporte de meilleur
la vie continue et je vous demande d’observer une minute de silence…

haut


SYMBOLES ET PARADOXES

Rédaction LQA

le 15 janvier 2015

Je me suis réveillée en sueur. Je ne savais pas trop si je venais de faire un rêve ou un cauchemar. J’étais à Gaza marchant main dans la main avec des citoyens du monde entier. Une manifestation monstre qui s’étale le long des 40 km de cette ville martyre. En tête de cortège, les dirigeants du monde entier, menés par Mahmoud Abbas, venus soutenir le peuple palestinien et exiger l’arrêt du terrorisme de l’Etat d’Israël. C’est que les autorités de ce pays viennent une fois de plus de bombarder ce qui reste de la Palestine historique. Rien qu’à Gaza, le nombre de victimes s’est élevé en quelques petits jours, à des milliers de morts dont la moitié sont des enfants, des nourrissons et même des bébés dans le ventre de leurs mères. Les autorités israéliennes ne perdent pas de temps. Il leur faut à chaque fois éliminer des Palestiniens avec l’espoir secret de finir par les « génocider » un jour. Ainsi ils auront toute le Palestine historique pour eux. Comme à chaque fois, ils se moquent du monde et des résolutions de l’ONU. Ils ont le monde pour eux. Qui va les arrêter ? Mais cette fois-ci, leurs calculs se sont avérés faux. Le monde entier s’est révolté et s’est retrouvé symboliquement à Gaza pour crier « Halte au terrorisme d’Etat ».

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Quand le réveil a sonné ce matin, il m’a fallu du temps pour sortir du brouillard de la nuit. Non, je ne suis pas à Gaza, mais à Paris. L’atmosphère est pesante et la journée d’hier en particulier, celle du dimanche 11 janvier, a été déstabilisante. J’ai un grand problème de sens et de symboles. La manifestation, outre l’unité du peuple français, son soutien à Charlie Hebdo et à toutes les victimes des abominables tueries, est aussi une condamnation unanime du terrorisme. Mais que voit-on ? Je croyais halluciner. En tête du cortège, Benyamin Netanyahou flanqué de son ministre extrémiste Avidgor Lieberman (qui veut jeter les Palestiniens hors de chez eux). Cet homme n’a-t-il pas tué cet été deux mille Palestiniens dont beaucoup de femmes et d’enfants ? Les victimes étaient-elles des civils ou non ? Comment François Hollande peut-il nous expliquer qu’il y a un terrorisme acceptable et un autre qui ne l’est pas ? Ou bien le sang des cinq cent enfants victimes des bombes de Netanyahou ne vaut pas celui des dix-sept victimes des attentats terroristes de Paris ? Quels signaux sont-ils envoyés aux citoyens du monde ?

Dans tous les cas, la place de Netanyahou est au TPI et non à la tête d’un cortège contre le terrorisme. J’avoue que je me serais sentie coupable de complicité de crimes ou de partialité cinglante si j’avais marché derrière cet assassin. Et que dire de Mahmoud Abbas marchant juste à quelques pas de son bourreau et de celui de son peuple ? L’image était vraiment pathétique. Imaginez la scène ! Les victimes des attentats manifestant côte à côte avec les effroyables terroristes !! Insoutenable !! Et pouvons-nous imaginer que demain les chefs d’Etat du monde entier se bousculeront à Gaza pour demander l’arrêt définitif du terrorisme d’Etat israélien ?
Ce n’est pas le moindre des symboles qui a été foulé ni le moindre des paradoxes qu’on vit en France en ce moment. Les pseudo-appels à ne pas tout amalgamer, ceux émanant des hommes politiques comme ceux émanant des médias. Dès que les attentats ont été perpétrés et que les tueurs ont été identifiés, la phrase qui revient souvent « il ne faut pas faire l’amalgame entre ces extrémistes et les musulmans de France ». Cette phrase en elle-même induit et nourrit l’amalgame. Elle désigne à la vindicte populaire la communauté coupable. Est-ce que les responsabilités et les culpabilités de tels crimes sont individuelles ou collectives ? Incombent-elles à ceux qui les commettent ou à leurs entourages ? Lorsqu’un individu est reconnu coupable de crimes ou d’actes très graves, est-ce qu’on incrimine toute sa famille ou lui tout seul ? Il me semble qu’en droit seul l’individu coupable paiera pour sa faute. Pourquoi alors cette déformation dès qu’il s’agit de personnes dont la religion supposée serait l’Islam ? Pourquoi fait-on porter la responsabilité à toute la communauté musulmane d’après le vocabulaire galvaudé en ce moment ?

Et on n’a pas encore fini avec les paradoxes. Jusqu’avant ces attentats terroristes, la France ne promeut surtout pas le communautarisme. Les signes religieux ne sont pas les bienvenus dans les lieux publics. Aussi anecdotique que cela puisse paraître, il y a longtemps que je garde sous mes vêtements la main de Fatma pour éviter toute ambigüité. Mais ce principe de neutralité religieuse dans les lieux publics a été balayé d’un revers main. On a enjoint aux musulmans de venir nombreux manifester en tant que tels et non en tant que citoyens tout court. Et de préférence en disant « Je suis Charlie ». Et pourtant, il ne faut pas être Charlie pour condamner fermement et sans équivoque ces attentats terroristes. La pensée unique de ces derniers jours a induit une logique bizarre. Si « je ne suis pas Charlie », alors « je suis pour les attentats ». Où allons-nous s’il nous faut être nécessairement Charlie pour condamner la violence terroriste ? Est-ce alors ce qui explique les raisons des autorités françaises, lors des tueries à ciel ouvert des enfants palestiniens par Benyamin Netanyahou, d’interdire les manifestations pour demander l’arrêt des bombardements contre Gaza ? Puisque le ministre de l’intérieur n’est pas palestinien, il ne condamne donc pas le terrorisme de Netanyahou ???

Dans ce climat délétère, des collégiens (ils ont entre 11 et 14 ans) ont été signalés à la police par leurs professeurs parce qu’ils ont proclamé ne pas être Charlie. Le temps de l’Inquisition a-t-il commencé ?

Sabrina

Paris le 12 janvier 2015

Sources: lequotidienalgerie.org:

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L’ATTENTAT CONTRE CHARLIE HEBDO : L’OCCULTATION POLITIQUE ET MEDIATIQUE DES CAUSES, DES CONSEQUENCES ET DES ENJEUX

Saïd Bouamama
Investig’Action
le 11 janvier 2015

L’attentat contre l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo marquera notre histoire contemporaine. Il reste à savoir dans quel sens et avec quelles conséquences. Dans le contexte actuel de « guerre contre le terrorisme » (guerre extérieure) et de racisme et d’islamophobie d’Etat, les artisans de cet acte ont, consciemment ou non[[ Il est d’une part trop tôt pour le dire et, d’autre part, le résultat est le même.]] accéléré un processus de stigmatisation et d’isolement de la composante musulmane, réelle ou supposée, des classes populaires.

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« Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde. » Bertolt Brecht

Les conséquences politiques de l’attentat sont déjà désastreuses pour les classes populaires et cela va se renforcer si aucune alternative politique à la fameuse « Union Nationale » n’est proposée.

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En effet, la manière dont les médias français et une écrasante majorité de la classe politique réagissent est criminelle. Ce sont ces réactions qui sont dangereuses pour l’avenir et qui portent en elles de nombreux « dégâts collatéraux » et de futurs 7 et 9 janviers toujours plus meurtriers. Comprendre et analyser pour agir est la seule posture qui peut permettre aujourd’hui d’éviter les instrumentalisations et dévoiements d’une émotion, d’une colère et d’une révolte légitime.

L’occultation totale des causes

Ne pas prendre en compte les causalités profondes et immédiates, isoler les conséquences du contexte qui les fait émerger et ne pas inscrire un événement aussi violent dans la généalogie des facteurs qui l’ont rendu possible condamne, au mieux, à la tétanie, au pire, à une logique de guerre civile. Aujourd’hui, personne dans les médias n’aborde les causes réelles ou potentielles. Pourquoi est-il possible qu’un tel attentat se produise à Paris aujourd’hui ?

Comme le souligne Sophie Wahnich, il existe « un usage fasciste des émotions politiques de la foule » dont le seul antidote est le « nouage possible des émotions et de la raison »[[Sophie Wahnich, La révolution française, un événement de la raison sensible 1787-1799, Hachette, Paris, 2012, p. 19.]]. Ce que nous vivons aujourd’hui est ce cantonnement des discours médiatiques et politiques dominants à la seule émotion, en occultant totalement l’analyse réelle et concrète. Toute tentative d’analyse réelle de la situation, telle qu’elle est, ou toute analyse tentant de proposer une autre explication que celle fournie par les médias et la classe politique, devient une apologie de l’attentat.

Regard sur le ventre fécond de la bête immonde

Regardons donc du côté des causes et d’abord de celles qui relèvent désormais de la longue durée et de la dimension internationale. La France est une des puissances les plus en guerre sur la planète. De l’Irak à la Syrie, en passant par la Libye et l’Afghanistan pour le pétrole, du Mali à la Centrafrique, en passant par le Congo pour les minerais stratégiques, les soldats français contribuent à semer la mort et le désastre aux quatre coins de la planète.

La fin des équilibres mondiaux issus de la seconde guerre mondiale avec la disparition de l’URSS, couplée à une mondialisation capitaliste centrée sur la baisse des coûts pour maximiser les profits et à la nouvelle concurrence des pays émergents, font de la maîtrise des matières premières la cause principale des ingérences, interventions et guerres contemporaines. Voici comment le sociologue Thierry Brugvin résume la place des guerres dans le monde contemporain :

« La conclusion de la guerre froide a précipité la fin d’une régulation des conflits au niveau mondial. Entre 1990 et 2001 le nombre de conflits interétatiques a explosé : 57 conflits majeurs sur 45 territoires distincts. […] Officiellement, le départ pour la guerre contre une nation adverse est toujours légitimé par des mobiles vertueux : défense de la liberté, démocratie, justice… Dans les faits, les guerres permettent de contrôler économiquement un pays, mais aussi de faire en sorte que les entrepreneurs privés d’une nation puissent accaparer les matières premières (pétrole, uranium, minerais, etc.) ou les ressources humaines d’un pays. »[[Thierry Brugvin, Le pouvoir illégal des élites, Max Milo, Paris, 2014.]]

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, le discours de légitimation des guerres s’est construit essentiellement sur le « danger islamiste » contribuant au développement d’une islamophobie à grande échelle au sein des principales puissances occidentales, que les rapports officiels eux-mêmes sont contraints de constater.[[Djacoba Liva Tehindrazanarivelo, Le racisme à l’égard des migrants en Europe, éditions du Conseil de l’Europe, Strasbourg, 2009, p. 171.]] Dans le même temps, ces guerres produisent une solide « haine de l’occident » dans les peuples victimes de ces agressions militaires.[[Jean Ziegler, La haine de l’Occident, Albin Michel, Paris, 2008.]] Les guerres menées par l’occident sont une des principales matrices de la bête immonde.

Dans la volonté de contrôle des richesses pétro-gazières, le Proche et le Moyen-Orient sont un enjeu géostratégique central. Les stratégies des puissances occidentales en général et françaises en particulier, se déploient sur deux axes : le renforcement d’Israël comme base et pivot du contrôle de la région, et le soutien aux pétromonarchies réactionnaires du golfe.

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Le soutien indéfectible à l’Etat d’Israël est ainsi une constante de la politique française ne connaissant pas d’alternance, de Sarkozy à Hollande. L’État sioniste peut assassiner en toute impunité sur une grande échelle. Quels que soient l’ampleur et les moyens des massacres, le gérant local des intérêts occidentaux n’est jamais véritablement et durablement inquiété. François Hollande déclare ainsi lors de son voyage officiel en Israël en 2013 : « je resterai toujours un ami d’Israël ».[[Le Monde, Hollande « ami d’Israël » reste ferme face à l’Iran, 17-11-2013.]]

Et, là aussi, le discours médiatique et politique de légitimation d’un tel soutien se construit sur la base d’une présentation du Hamas palestinien mais également (à travers des imprécisions verbales récurrentes) de la résistance palestinienne dans son ensemble, de la population palestinienne dans son ensemble et de ses soutiens politiques internationaux, comme porteurs d’un danger « islamiste ». La logique « du deux poids, deux mesures » s’impose une nouvelle fois à partir d’une approche islamophobe portée par les plus hauts sommets de l’État et relayée par la grande majorité des médias et des acteurs politiques. Tel est le second profil du ventre de la bête immonde.

Ces facteurs internationaux se conjuguent à des facteurs internes à la société française. Nous avons déjà souligné, plus haut, l’islamophobie d’État, propulsée par la loi sur le foulard en 2004 et entretenue depuis régulièrement (discours sur les révoltes des quartiers populaires en 2005, loi sur le niqab, « débat » sur l’identité nationale, circulaire Chatel et exclusion des mères voilées des sorties scolaires, harcèlement des lycéennes en jupes longues, interdiction des manifestations de soutien au peuple palestinien, etc.).

Il faut maintenant souligner que ce climat islamophobe n’a été confronté à aucune réponse par les forces politiques se réclamant des classes populaires. Plus grave, un consensus très large s’est fait jour à plusieurs reprises, au prétexte de défendre la « laïcité » ou de ne pas frayer avec « ceux qui défendent le Hamas ». De l’extrême-droite à une partie importante de l’extrême gauche, les mêmes arguments ont été avancés, les mêmes clivages ont été construits, les mêmes conséquences ont été produites.

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Le résultat n’est rien d’autre que l’enracinement encore plus profond des islamalgames, l’approfondissement d’un clivage au sein des classes populaires, la fragilisation encore plus grande des digues antiracistes déjà fragilisées, et des violences concrètes ou symboliques exercées contre les musulmans et les musulmanes. Ce résultat peut se décrire, comme le propose Raphaël Liogier, comme la diffusion, dans une partie importante de la société, du « mythe de l’islamisation » débouchant sur la tendance à constituer une « obsession collective ».[[Raphaël Liogier, Le mythe de l’islamisation, essai sur une obsession collective, Le Seuil, Paris, 2012.]]

La tendance à la production d’une « obsession collective » s’est de surcroît encore approfondie avec le traitement médiatique récent des cas Zemmour et Houellebecq.

Après lui avoir offert de multiples tribunes, Eric Zemmour est renvoyé d’I-télé pour avoir proposé la « déportation des musulmans français ». Dans le contexte d’obsession collective que nous avons évoquée, cela lui permet de se poser en victime. Quant à l’écrivain, il est défendu par de nombreux journalistes au prétexte de ne pas confondre fiction et réalité.

Dans les deux cas cependant, il reste un approfondissement de « l’obsession collective » d’une part, et le sentiment d’être insulté en permanence une nouvelle fois, d’autre part. Tel est le troisième profil du ventre de la bête immonde.

Ce facteur interne d’une islamophobie banalisée a des effets décuplés dans le contexte de fragilisation économique, sociale et politique générale des classes populaires aujourd’hui. La paupérisation et la précarisation massive sont devenues insoutenables dans les quartiers populaires. Il en découle des rapports sociaux marqués par une violence grandissante contre soi et contre les proches.

À cela, se combinent le déclassement d’une part importante des classes moyennes, ainsi que la peur du déclassement pour ceux chez qui tout va encore bien mais qui ne sont pas « bien nés ». Ceux-là, se sentant en danger, disposent alors d’une cible consensuelle déjà toute désignée médiatiquement et politiquement comme légitime : le musulman ou la musulmane.

La fragilisation touche encore plus fortement la composante issue de l’immigration des classes populaires, qui est confrontée aux discriminations racistes systémiques (angle absolument mort des discours des organisations politiques se réclamant des classes populaires), celles-ci produisant des trajectoires de marginalisation (dans la formation, dans l’emploi, dans la recherche du logement, dans le rapport à la police et aux contrôles au faciès, etc.).[[Voir sur cet aspect mon dernier article sur mon blog, Les dégâts invisibilisés des discriminations inégalité sociales et des discriminations racistes et sexistes, https://bouamamas.wordpress.com/]]

L’approfondissement du clivage entre deux composantes des classes populaires dans une logique de « diviser ceux qui devraient être unis (les différentes composantes des classes populaires) et d’unir ceux qui devraient être divisés (les classes sociales aux intérêts divergents) » est le quatrième profil du ventre de la bête immonde.

De quoi accouche un tel ventre ?

Une telle matrice est à l’évidence propice à l’émergence de trajectoires nihilistes se traduisant par la tuerie à Charlie Hebdo. Extrêmement minoritaires, ces trajectoires sont une production de notre système social et des inégalités et discriminations massives qui le caractérisent.

Mais ce qu’ont révélé les réactions à l’attentat est tout autant important et, quantitativement, bien plus répandu que l’option nihiliste (pour le moment ?). Sans pouvoir être exhaustifs, rappelons quelques éléments de ces derniers jours. Du côté des discours, nous avons eu Marine Le Pen exigeant un débat national contre le « fondamentalisme islamique », le bloc identitaire déclarant la nécessité de « remettre en cause l’immigration massive et l’islamisation » pour lutter contre le « djihadisme », le journaliste Yvan Rioufol du Figaro sommant Rokhaya Diallo de se désolidariser sur RTL, Jeannette Bougrab accusant « ceux qui ont traité Charlie Hebdo d’islamophobe » d’être les coupables de l’attentat, sans compter toutes les déclarations parlant « de guerre déclarée ».

À ces propos, se joignent des passages à l’acte de ces derniers jours : une Femen se filme en train de brûler et de piétiner le Coran, des coups de feu sont tirés contre la mosquée d’Albi, des tags racistes sont peints sur les mosquée de Bayonne et Poitiers, des grenades sont lancées contre une autre au Mans, des coups de feu sont tirés contre une salle de prière à Port la Nouvelle, une autre salle de prière est incendiée à Aix les Bains, une tête de sanglier et des viscères sont accrochés devant une salle de prière à Corte en Corse, un restaurant-snack-kebab est l’objet d’une explosion à Villefranche sur Saône, un automobiliste est la cible de coups de feu dans le Vaucluse, un lycéen d’origine maghrébine de 17 ans est molesté lors d’une minute de silence à Bourgoin-Jallieu en Isère, etc. Ces propos et actes montrent l’ampleur des dégâts d’ores et déjà causés par les dernières décennies de banalisation islamophobe. Ils font aussi partie de la bête immonde.

La bête immonde se trouve également dans l’absence criante d’indignation face aux victimes innombrables des guerres impérialistes de ces dernières décennies. Réagissant à propos du 11 septembre, la philosophe Judith Butler s’interroge sur l’indignation inégale. Elle souligne que l’indignation justifiée pour les victimes du 11 septembre s’accompagne d’une indifférence pour les victimes des guerres menées par les USA : « Comment se fait-il qu’on ne nous donne pas les noms des morts de cette guerre, y compris ceux que les USA ont tués, ceux dont on n’aura jamais une image, un nom, une histoire, jamais le moindre fragment de témoignage sur leur vie, quelque chose à voir, à toucher, à savoir ? ».[[Judith Butler, cité dans, Mathias Delori, Ces morts que nous n’allons pas pleurer, http://blogs.mediapart.fr/blog/math…, consulté le 9 janvier 2015 à 18 h.]]

Cette indignation inégale est à la base du processus de production d’un clivage bien réel au sein des classes populaires. Et c’est ce clivage qui est porteur de tous les dangers, notamment en période de construction de « l’union nationale », comme aujourd’hui.

L’union nationale qu’ils rêvent de construire, c’est « toutes et tous ensemble contre ceux qui ne sont pas des nôtres, contre celles et ceux qui ne montrent pas patte blanche ».

Une formidable instrumentalisation politique

Mais le scandale que nous vivons aujourd’hui ne s’arrête pas là. C’est avec un cynisme consommé que des instrumentalisations de la situation, et de la panique qu’elle suscite, se déploient à longueur de journée.

  • Renforcement sécuritaire et atteintes aux libertés démocratiques

Certains, comme Dupont Aignan, réclament « plus de souplesse aux forces de l’ordre » alors qu’une nouvelle « loi antiterroriste » a déjà été votée l’automne dernier. Et, en écho, Thierry Mariani fait référence au Patriot Act états-unien (dont la conséquence a été de graves atteintes aux libertés individuelles sous prétexte de lutte contre le terrorisme) : « Les Etats-Unis ont su réagir après le 11 Septembre. On a dénoncé le Patriot Act, mais, depuis, ils n’ont pas eu d’attentat à part Boston ».[[Le Parisien du 8-01-2015]]

Instrumentaliser la peur et l’émotion pour renforcer des lois et mesures liberticides, telle est la première manipulation qui est aujourd’hui testée pour mesurer le champ des possibles en matière de régression démocratique. D’ores et déjà, certaines revendications légitimes et urgentes sont rendues inaudibles par la surenchère sécuritaire qui tente de profiter de la situation : il sera par exemple beaucoup plus difficile de mener le combat contre le contrôle au faciès, et les humiliations quotidiennes qu’il produit continueront à s’exercer dans l’indifférence générale.

  • L’unité nationale

La construction active et déterminée de l’unité nationale est la seconde instrumentalisation majeure en cours. Elle permet de mettre en sourdine l’ensemble des revendications qui entravent le processus de dérégulation généralisé. La ficelle a beau être grosse, elle est efficace dans un climat de peur généralisé, que l’ensemble des médias produisent quotidiennement. Dans certaines villes, l’unité nationale est déjà étendue au Front National qui a participé aux rassemblements de soutien à Charlie Hebdo. Dati et Fillon s’indignent déjà de « l’exclusion » de Marine Le Pen de l’unité nationale. C’est cette « unité nationale » qui fait le plus de dégâts politiquement aussi, car elle détruit les rares repères positifs qui pouvaient exister auparavant en termes d’alliances possibles et d’identités politiques.

  • L’injonction à se justifier

Une autre instrumentalisation se trouve dans l’injonction permanente des musulmans réels ou supposés à se justifier pour des actes qu’ils n’ont pas commis, et/ou à se démarquer des auteurs de l’attentat.

Cette mise en accusation permanente est humiliante. Il n’est venu à l’idée de personne d’exiger de tous les chrétiens réels ou supposés une condamnation lorsque le Norvégien Anders Behring Breivik a assassiné 77 personnes en juillet 2011 en se revendiquant de l’islamophobie et du nationalisme blanc.

Derrière cette injonction, se trouve la logique posant l’islam comme étant par essence incompatible avec la République. De cette logique découle l’idée de mettre les musulmans, réels ou supposés, sous surveillance non seulement des policiers, mais également des médias, des profs, des voisins, etc.

  • Être Charlie ? Qui peut être Charlie ? Qui veut être Charlie ?

Le slogan « nous sommes tous Charlie » est enfin la dernière instrumentalisation en déploiement ces jours-ci. Si l’attentat contre Charlie Hebdo est condamnable, il est hors de question cependant d’oublier le rôle qu’a joué cet hebdomadaire dans la constitution du climat islamophobe d’aujourd’hui.

Il est également hors de question d’oublier les odes à Bush que ses pages accueillaient alors que celui-ci impulsait cette fameuse « guerre contre le terrorisme » en Afghanistan puis en Irak. Ces prises de positions écrites ou dessinées ne sont pas des détails ou de simples amusements sans conséquences : elles sont à l’origine de multiples agressions de femmes voilées et de nombreux actes contre des lieux de cultes musulmans.

Surtout, ce journal a fortement contribué à cliver les classes populaires au moment où elles avaient besoin plus que jamais d’unité et de solidarité. Nous ne sommes PAS PLUS Charlie hier qu’aujourd’hui.

Les temps qui s’annoncent vont être difficiles et coûteux. Pour stopper l’escalade, nous devons mettre fin à la violence des dominants : nous devons nous battre pour stopper les guerres impérialistes en cours et abroger les lois racistes.

Pour stopper l’escalade, nous devons développer tous les cadres et événements de solidarité destinés à empêcher la déferlante des propos ou actes racistes et notamment islamophobes. Pour stopper l’escalade, nous devons construire tous les espaces de solidarité économique et sociale possibles dans nos quartiers populaires, en toute autonomie vis-à-vis de tous ceux qui prônent l’union nationale comme perspective.

Plus que jamais, nous avons besoin de nous organiser, de serrer les rangs, de refuser la logique « divisant ceux qui devraient être unis et unissant ceux qui devraient être divisés ».

Plus que jamais, nous devons désigner l’ennemi pour nous construire ensemble : l’ennemi c’est tout ce qui nous divise.

Source : Investig’Action

Said Bouamama est l’auteur de nombreux ouvrages dont « Figures de la libération africaine. De Kenyatta à Sankara », 2014 ; Femmes des quartiers populaires, en résistance contre les discriminations, des femmes de Blanc-Mesnil, Le Temps des Cerises, 2013 ; Dictionnaire des dominations de sexe, de race, de classe, Édition Syllepse, 2012 ; Les discriminations racistes : une arme de division massive,L’Harmattan, 2010 ; Les classes et quartiers populaires. Paupérisation, ethnicisation et discrimination, Éditions du Cygne, 2009 ; L’affaire du foulard islamique : production d’un racisme respectable, Le Geai bleu, 2004 ; Dix ans de marche des beurs, chronique d’un mouvement avorté, Desclée de Brouwer, 1994.

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VONT-ILS’ARRÊTER DE JOUER AVEC LE TERRORISME?

Publié par blog algerieinfos – Saoudi Abdelaziz

le 11 Janvier 2015

Autour de François Hollande, les dirigeants du monde occidental flanqués de leurs invités s’efforcent de prendre la tête aujourd’hui à Paris du vaste mouvement populaire de protestation contre la monstruosité terroriste .
« Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi, le terrorisme. Elle veut, en effet, être jugée sur ses ennemis plutôt que sur ses résultats.

L’histoire du terrorisme est écrite par l’État ; elle est donc éducative.

Les populations spectatrices ne peuvent certes pas tout savoir du terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique »
. Guy Debord. Commentaires sur la société du spectacle. 1988. Texte intégral

Quelques faits illustrant l’intuition du penseur français

Mars 2012.

François Molins, le procureur de Paris, lors d’une conférence de presse, à Toulouse, le 21 mars 2012 déclarait à propos de Mohamed Merah que son profil d’autoradicalisation salafiste atypiqu en faisait un individu indépendant de toute organisation structurée connue ». L’enquête de Yves Bordenave et Jacques Follorou, publié le lendemain dans le journal Le Monde.Fr, démentait cette explication. Les investigations des deux journalistes sur les activités antérieures du tueur leur font écrire: Ces connexions avec des structures terroristes reconnues remettent en cause le statut de « personnage solitaire » de Mohamed Merah. Il est par ailleurs surprenant qu’il ait échappé au contrôle de la CIA ou de son homologue française, la DGSE, qui prêtent une attention toute particulière aux combattants djihadistes étrangers venus dans la région et qui constituent une menace terroriste majeure pour leur pays d’origine ». Commentant les révélations du Monde sur l’itinéraire de Mohamed Merah, Maamar Farah écrira le 27 mars 2012 dans son billet du Soir d’Algérie : « Ce touriste pas comme les autres a visité l’Afghanistan, le Pakistan, l’Iran, l’Égypte, la Syrie, le Liban, la Turquie, la Jordanie et… Israël ! Vous en connaissez beaucoup, vous, des Français d’«origine algérienne», un peu djihadistes, un peu talibans, qui entrent facilement à Jérusalem ? Troublant… »

Février 2012

Le Marocain Amine El Khalifi, un fragile jeune homme en situation irrégulière, était suivi « depuis un an », par le FBI. Les experts psychiatres ont analysé la faisabilité de l’opération et donné le feu vert à la manipulation. Le FBI a retenu comme cible le Capitole, siège du pouvoir législatif. Les agents secrets chargés de l’opération sur le terrain ont donné au jeune Amine El Khalifi une arme et une veste contenant des explosifs. Commentant l’opération, le journal américain Washington Post écrivait : «Qu’un service chargé de la protection d’un pays avoue aujourd’hui sa capacité de monter des opérations terroristes laisse perplexe. Est-on donc si assuré que l’opinion ne va pas imputer aux services secrets, rétrospectivement, d’autres opérations ciblées qui, elles, ont fait des morts et des dégâts réels ? » Un rapport de Human Rights Watch (HRW) étayé de nombreux exemples où l’organisation dénonce nommément le FBI. Dans nombre des plus de 500 affaires de terrorisme conduites par les tribunaux américains depuis le 11 septembre 2001, “le ministère américain de la Justice et le FBI ont ciblé des musulmans américains dans des opérations clandestines de contre-terrorisme abusives, fondées sur l’appartenance religieuse et ethnique”. dénonce ce rapport. L’organisation, aidée de l’Institut des droits de l’Homme de l’École de droit de l’université de Columbia, a en particulier étudié 27 affaires, de l’enquête au procès, en passant par l’inculpation et les conditions de détention, et interviewé 215 personnes, qu’il s’agisse des inculpés ou condamnés eux-mêmes ou de leurs proches, d’avocats, juges ou procureurs. “Dans certains cas, le FBI pourrait avoir créé des terroristes chez des individus respectueux de la loi en leur suggérant l’idée de commettre un acte terroriste”, résume un communiqué, estimant que la moitié des condamnations résultent de coups montés ou guet-apens. (à suivre)

Sources : algerieinfos-saoudi

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ALGÉRIE. LE DANGEREUX REFUS DE « LA PAIX SOCIALE »

Par Mohamed Bouhamidi

le 12 janvier 2015

Publié par raina dz, le 12 janvier 2015

Repris sur le blog algerieinfos-saoudi, le 13 Janvier 2015

« Comme d’habitude, les plus faibles vont payer les pots cassés, écrit [ Aït Benali Boubeker dans une chronique du Huffington-post-Algérie. Et surtout, il ne faut pas s’attendre à ce que le régime réduise les privilèges de sa clientèle, car c’est elle qui lui assure la pérennité. Faut-il déduire, dans ces conditions, que si la crise persiste, les Algériens ne seront pas logés à la même enseigne ».

Mohamed Bouhamidi refuse cette fatalité. Le philosophe indigné révèle, dans raïna-dz, ce qui se cache derrière le slogan médiatique lancé par les néo-libéraux pour interdire à l’Etat d' »acheter la paix sociale »

Mohamed Bouhamidi. Photo DR
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Pour les Algériens qui ont de la mémoire, la chute du prix du pétrole réveille le souvenir du processus qui a mené à la grande fracture d’octobre 1988 puis à la lutte sanglante qui en a résulté et qui devait démembrer l’Algérie
.
Nous retrouvons des similitudes frappantes avec la conduite générale de l’État et des acteurs politiques d’aujourd’hui. Les années 80 ont vu une partie importante des revenus pétroliers détournée de leurs destinations d’investissement productif [[ « Economie algérienne – Le développement national contrarié » de Abdelatif Rebah- Editions INAS – Alger – 2012 – est une mine d’informations en plus d’être un ouvrage décisif pour tout débat sur les options et questions économiques de nos cinquante ans d’indépendance.] vers l’importation de produits de consommation éphémère.

Les nouvelles forces qui avaient investi le sommet de l’Etat, à la mort de Boumediene, cherchaient à convaincre le peuple du bien-fondé du retour à une économie de marché et à son consumérisme à la place de l’austère politique de développement. Elles brandirent le slogan: «Pour une vie meilleure».

En moins d’une décennie elles démembrèrent des entreprises publiques parvenues au seuil de concentration et d’optimisation des ressources humaines nécessaires à leurs missions de développement. La corruption socialement marginale à l’époque commença à gangréner l’Etat avec la naissance du clientélisme.

La forte présence dans l’Etat de partisans d’une politique indépendante de développement économique appuyé sur de grandes entreprises d’Etat, avait contrarié cette conquête de la totalité de l’Etat par les partisans de l’économie de marché et de l’abandon du pacte de Novembre qui appelait clairement à un «Etat social».

La chute du baril de 27,01 à 13,53 dollars et la division par deux des rentrées pétrolières en 1986 a modifié profondément les conditions de confrontation entre les deux camps. Le pouvoir neuf des libéraux risquait de sombrer avec la fin peu glorieuse de l’importation de fruits exotiques alors que nous avions un besoin pressant d’usines et d’universités.

Pour défendre leur pouvoir et ce modèle, ses partisans ont déclenché une campagne de presse d’une grande violence reportant sur les partisans d’une voie nationale pour le développement, les raisons de leur échec. Ils allèrent droit au but derrière l’affirmation péremptoire que « L’Etat n’est pas la vache à traire » en remplacement de leur promesse « pour une vie meilleure ».

C’était un retournement contre le peuple accusé de nourrir des prétentions ruineuses en espérant l’Etat social et l’équité promis par la proclamation du 1er novembre 1954 et le peuple l’a ressenti comme une trahison et un holdup. C’est par cette rupture que s’est engouffrée la violence des années 90 au cours de laquelle furent expulsés de l’Etat tous les représentants notoires du socialisme.

Aujourd’hui, les réformes ont produit les oligarques algériens aux puissants réseaux à l’intérieur de l’Etat et à l’influence sans partage sur les médias. Les partisans d’une politique de développement se battent dans des conditions difficiles et défavorables.
Les dirigeants honnêtes ont touché du doigt à quel point l’accord d’association avec l’Europe nous a rendus impuissants. La ligne de confrontation s’est déplacée du choix de la voie économique à la simple survie de l’Etat algérien dont on sait qu’il ne pourra tenir sans l’attachement à la guerre de libération et à la mémoire des Didouche[[« Si nous venions à mourir, défendez nos mémoires » : recommandation de Didouche Mourad, l’un des dirigeants du Comité qui a préparé l’insurrection du 1er novembre 1954.]] et sans équité dont les Algériens, anthropologiquement, n’accepteront jamais le déni.

Dans cette configuration hautement dangereuse dans les circonstances des menaces terroristes, des tensions dans le sud du pays, des poussées des idées autonomistes, les oligarques et leurs représentants à l’intérieur de l’Etat, du pouvoir, de l’opposition et des médias impatients de faire main basse définitive sur l’Algérie ont déclenché une violente campagne contre les mesures d‘urgence palliatives aux effets de la dégringolade du prix du baril et accuse le pouvoir qui est essentiellement entre leurs mains de vouloir « acheter la paix sociale » et se débarrasser par ce subterfuge des derniers obstacles à leur soif d’hégémonie.
Comme à l’époque des « l’État n’est pas une vache à traire » les adeptes de la transition sont prêts à en découdre avec le peuple pour régler la question de la propriété du pays. De la mort de Boumediene à 1990, cette politique aventurière nous a amené à la décennie infernale. Aujourd’hui, cet appel à la guerre sociale entrainera la dislocation de l’Algérie pour laquelle, 45 ans d’illusions libérales ont réunie suffisamment de conditions pour la fin de son État national.
raina.dz

[algerieinfos-saoudi-http://www.algerieinfos-saoudi.com/2015/01/algerie-le-dangereux-refus-de-la-paix-sociale.html]

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« JE NE SUIS PAS CHARLIE»

par Shlomo Sand

le 13 janvier 2015

http://www.ujfp.org/

Rien ne peut justifier un assassinat, a fortiori le meurtre de masse commis de sang-froid. Ce qui s’est passé à Paris, en ce début du mois de janvier constitue un crime absolument inexcusable. Dire cela n’a rien d’original : des millions de personnes pensent et le ressentent ainsi, à juste titre. Cependant, au vu de cette épouvantable tragédie, l’une des premières questions qui m’est venue à l’esprit est la suivante : le profond dégoût éprouvé face au meurtre doit-il obligatoirement conduire à s’identifier avec l’action des victimes ? Dois-je être Charlie parce que les victimes étaient l’incarnation suprême de la liberté d’expression, comme l’a déclaré le Président de la République ? Suis-je Charlie, non seulement parce que je suis un laïc athée, mais aussi du fait de mon antipathie fondamentale envers les bases oppressives des trois grandes religions monothéistes occidentales ?

Certaines caricatures publiées dans Charlie Hebdo, que j’avais vues bien antérieurement, m’étaient apparues de mauvais goût ; seule une minorité d’entre elles me faisaient rire. Mais, là n’est pas le problème ! Dans la majorité des caricatures sur l’islam publiées par l’hebdomadaire, au cours de la dernière décennie, j’ai relevé une haine manipulatrice destinée à séduire davantage de lecteurs, évidemment non-musulmans. La reproduction par Charlie des caricatures publiées dans le journal danois m’a semblé abominable. Déjà, en 2006, j’avais perçu comme une pure provocation, le dessin de Mahomet coiffé d’un turban flanqué d’une grenade. Ce n’était pas tant une caricature contre les islamistes qu’une assimilation stupide de l’islam à la terreur ; c’est comme si l’on identifiait le judaïsme avec l’argent !

On fait valoir que Charlie s’en prend, indistinctement, à toutes les religions, mais c’est un mensonge. Certes, il s’est moqué des chrétiens, et, parfois, des juifs ; toutefois, ni le journal danois, ni Charlie ne se seraient permis, et c’est heureux, de publier une caricature présentant le prophète Moïse, avec une kippa et des franges rituelles, sous la forme d’un usurier à l’air roublard, installé au coin d’une rue. Il est bon, en effet, que dans la civilisation appelée, de nos jours, « judéo-chrétienne », il ne soit plus possible de diffuser publiquement la haine antijuive, comme ce fut le cas dans un passé pas très éloigné. Je suis pour la liberté d’expression, tout en étant opposé à l’incitation raciste. Je reconnais m’accommoder, bien volontiers, de l’interdiction faite à Dieudonné d’exprimer trop publiquement, sa « critique » et ses « plaisanteries » à l’encontre des juifs. Je suis, en revanche, formellement opposé à ce qu’il lui soit physiquement porté atteinte, et si, d’aventure, je ne sais quel idiot l’agressait, j’en serais très choqué… mais je n’irais pas jusqu’à brandir une pancarte avec l’inscription : « je suis Dieudonné ».

En 1886, fut publiée à Paris La France juive d’Edouard Drumont, et en 2014, le jour des attentats commis par les trois idiots criminels, est parue, sous le titre : Soumission, « La France musulmane » de Michel Houellebecq. La France juive fut un véritable « bestseller » de la fin du 19ème siècle ; avant même sa parution en librairie, Soumission était déjà un bestseller ! Ces deux livres, chacun en son temps, ont bénéficié d’une large et chaleureuse réception journalistique. Quelle différence y a t’il entre eux ? Houellebecq sait qu’au début du 21ème siècle, il est interdit d’agiter une menace juive, mais qu’il est bien admis de vendre des livres faisant état de la menace musulmane. Alain Soral, moins futé, n’a pas encore compris cela, et de ce fait, il s’est marginalisé dans les médias… et c’est tant mieux ! Houellebecq, en revanche, a été invité, avec tous les honneurs, au journal de 20 heures sur la chaine de télévision du service public, à la veille de la sortie de son livre qui participe à la diffusion de la haine et de la peur, tout autant que les écrits pervers de Soral.

Un vent mauvais, un vent fétide de racisme dangereux, flotte sur l’Europe : il existe une différence fondamentale entre le fait de s’en prendre à une religion ou à une croyance dominante dans une société, et celui d’attenter ou d’inciter contre la religion d’une minorité dominée. Si, du sein de la civilisation judéo-musulmane : en Arabie saoudite, dans les Emirats du Golfe s’élevaient aujourd’hui des protestations et des mises en gardes contre la religion dominante qui opprime des travailleurs par milliers, et des millions de femmes, nous aurions le devoir de soutenir les protestataires persécutés. Or, comme l’on sait, les dirigeants occidentaux, loin d’encourager les « voltairiens et les rousseauistes » au Moyen-Orient, apportent tout leur soutien aux régimes religieux les plus répressifs.

En revanche, en France ou au Danemark, en Allemagne ou en Espagne où vivent des millions de travailleurs musulmans, le plus souvent affectés aux tâches les plus pénibles, au bas de l’échelle sociale, il faut faire preuve de la plus grande prudence avant de critiquer l’islam, et surtout ne pas le ridiculiser grossièrement. Aujourd’hui, et tout particulièrement après ce terrible massacre, ma sympathie va aux musulmans qui vivent dans les ghettos adjacents aux métropoles, qui risquent fort de devenir les secondes victimes des meurtres perpétrés à Charlie Hebdo et dans le supermarché Hyper casher. Je continue de prendre pour modèle de référence le « Charlie » originel : le grand Charlie Chaplin qui ne s’est jamais moqué des pauvres et des non instruits.

De plus, et sachant que tout texte s’inscrit dans un contexte, comment ne pas s’interroger sur le fait que, depuis plus d’un an, tant de soldats français sont présents en Afrique pour « combattre contre les djihadistes », alors même qu’aucun débat public sérieux n’a eu lieu en France sur l’utilité où les dommages de ces interventions militaires ? Le gendarme colonialiste d’hier, qui porte une responsabilité incontestable dans l’héritage chaotique des frontières et des régimes, est aujourd’hui « rappelé » pour réinstaurer le « droit » à l’aide de sa force de gendarmerie néocoloniale. Avec le gendarme américain, responsable de l’énorme destruction en Irak, sans en avoir jamais émis le moindre regret, il participe aux bombardements des bases de « daesch». Allié aux dirigeants saoudiens « éclairés », et à d’autres chauds partisans de la « liberté d’expression » au Moyen-Orient, il préserve les frontières du partage illogique qu’il a imposées, il y a un siècle, selon ses intérêts impérialistes. Il est appelé pour bombarder ceux qui menacent les précieux puits de pétrole dont il consomme le produit, sans comprendre que, ce faisant, il invite le risque de la terreur au sein de la métropole.

Mais au fond, il se peut qu’il ait bien compris ! L’Occident éclairé n’est peut-être pas la victime si naïve et innocente en laquelle il aime se présenter ! Bien sûr, il faut être un assassin cruel et pervers pour tuer de sang-froid des personnes innocentes et désarmées, mais il faut être hypocrite ou stupide pour fermer les yeux sur les données dans lesquelles s’inscrit cette tragédie.

C’est aussi faire preuve d’aveuglement que de ne pas comprendre que cette situation conflictuelle ira en s’aggravant si l’on ne s’emploie pas ensemble, athées et croyants, à œuvrer à de véritables perspectives du vivre ensemble sans la haine de l’autre.

Shlomo Sand

(Traduit de l’hébreu par Michel Bilis)

Sources: Union Juive France pour la Paix UJFP
http://www.ujfp.org/spip.php?article3768

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RÉSISTONS À L’ESPRIT DE GUERRE

LE MONDE

le 08 janvier 2015

Par Dominique de Villepin (Ancien Premier ministre)

Nous sommes aujourd’hui sidérés par le déchaînement de violence froide et calculée qui a tué douze personnes et grièvement blessé tant d’autres, qui visait à réduire au silence un organe de presse par la liquidation méthodique de toute sa rédaction pour intimider la liberté elle-même. Ils sont morts parce qu’ils étaient journalistes, morts parce qu’ils étaient libres, morts pour ce qu’ils représentaient. Nos forces de l’ordre ont payé un lourd tribut à la protection de la sécurité de nos concitoyens. Le pays fait face, uni, à l’attentat terroriste le plus meurtrier depuis près de deux siècles, par des manifestations spontanées de solidarité. La tentation est grande dans ces moments de recourir à des formules martiales. L’émotion est intense, mais l’intelligence de ce qui se passe est indispensable.

Une peur construite pour nous enfermer tous

La France glisse lentement dans un climat de guerre. Une guerre étrange qui ne dit pas son nom. Une guerre qui efface les frontières entre dehors et dedans. À l’intérieur semblent s’imposer des images, des postures, des logiques de guerre civile larvée. Le terrorisme change de visage. Les réseaux de poseurs de bombe semblent avoir laissé place aux loups solitaires qui eux-mêmes cèdent aujourd’hui le terrain à une nouvelle violence, des commandos aux méthodes mafieuses et aux équipements militaires se fixant pour but d’éliminer des cibles symboliques représentant la démocratie et la liberté. Ce n’est plus la terreur chaotique, c’est la peur organisée, construite pierre à pierre pour nous enfermer tous.

À l’extérieur, nous voyons se cristalliser de mois en mois la ligne de front cauchemardesque d’une guerre de civilisations opposant l’Occident à l’Islam, sous les traits déformés et monstrueux de l’islamisme. Les interventions occidentales font système : elles semblaient des opérations indépendantes, mues par des ambitions diverses; elles ont abouti à un résultat unique, l’émergence d’un ennemi djihadiste insaisissable et l’effondrement des États et des sociétés civiles de la région.

Nous le savons, d’autres opérations s’annoncent: en Libye, que l’opération de 2011 et l’implosion depuis cette date a transformée en repère terroriste du Sahara; au Sahel et en particulier au Nigeria, aux confins du Camerounet du Tchad où Boko Haram étend son emprise barbare. Mais ces guerres nourrissent toujours de nouvelles guerres, chaque fois plus grandes, chaque fois plus impossibles. Elles nourrissent le terrorisme chez nous en promettant de l’éradiquer. Car on ne viendra à bout du djihadisme là-bas et du terrorisme ici qu’en apportant des solutions concrètes aux crises du monde musulman, qui sont à la fois des conflits territoriaux, sociaux, politiques, économiques, que nous simplifions en ne regardant que le symptôme islamiste.

«L’esprit de guerre est un piège.»

L’esprit de guerre est un piège. C’est un engrenage qui nous conduit chaque jour davantage vers une guerre hors de tout contrôle. Notre devoir est de résister à l’esprit de guerre au nom de nos valeurs démocratiques. La seule victoire que puissent espérer les fanatiques, c’est de nous convaincre que nous menons une guerre totale. C’est de nous mener dans l’impasse de la force que nous croyions être un raccourci.

Nous avons trois adversaires redoutables à affronter.

Il y a d’abord, le plus évident, les terroristes. Nous ne pouvons tolérer que des assassins de masse circulent encore dans le pays et que les apôtres de la haine sèment leurs paroles impunément. Tous les moyens de l’Etat de droit doivent être mis en œuvre pour les appréhender et les traduire en justice. Nous devons améliorer les dispositifs de prévention, de surveillance et de protection des lieux sensibles, empêcher la radicalisation notamment dans les prisons. Face à un ennemi sans frontières, il ne peut y avoir de lutte efficace qu’à travers une coopération policière et judiciaire sans cesse renforcée, à l’échelle de l’Europe mais également avec les autres pays concernés. Là où il y a vingt ans il n’y avait que quelques foyers terroristes, aujourd’hui le monde entier est concerné.

Il est urgent de tarir tous les financements de l’extrémisme islamiste en France, notamment venant de pays du Moyen-Orient. C’est dans ce but que, ministre de l’intérieur, j’avais proposé de réformer le financement des constructions de lieux de culte musulman par une Fondation des œuvres de l’islam permettant de réduire les financements étrangers, et permettre ainsi l’épanouissement d’un islam de France
.

Perte des repères démocratiques

Il y a un second ennemi, c’est la peur . Le sentiment d’une violence imprévisible, divisés, faibles, repliés sur nous-mêmes; un pays blessé qui perd son sang. Les polémiques littéraires, les démagogies partisanes, nous montrent que l’enjeu n’est pas tant de nous sauver des autres, d’invasions ou de remplacements supposés, mais de nous sauver de nous-mêmes, de notre renoncement, de notre narcissisme du déclin, de notre tentation occidentaliste et suicidaire.omniprésente et soudaine suscite un désir de sécurité qu’il sera impossible de combler. L’expérience nous l’enseigne, les attaques terroristes favorisent le renoncement aux valeurs démocratiques, le souci de notre sécurité nous disposant à sacrifier les libertés de tiers, chez nous ou à l’étranger. La spirale de défiance créée aux Etats-Unis par le Patriot Act et la légitimation durable de la torture ou des détentions illégales a aujourd’hui plongé ce pays dans la perte de repères moraux. Nous avons vu le vertige de la guerre civile en Algérie durant les années de plomb. Nous voyons de plus en plus de pays qui ont peur, qui s’emmurent, qui s’éloignent des valeurs démocratiques.

Il y a un troisième ennemi aujourd’hui, c’est le rejet . Notre pays se crispe de jour en jour. Ses élites se tournent chaque jour davantage vers des discours de division et d’exclusion permettant tous les amalgames. L’Histoire nous enseigne que lorsque les digues sautent, le pays risque l’effondrement. Si nous aimantons la violence, c’est parce que nous sommes

Dans l’épreuve, chacun d’entre nous a un devoir à accomplir. Agissons avec responsabilité, sang-froid et dans l’unité, ripostons par l’exemplarité démocratique, redevenons ce que nous sommes, des républicains qui croient au dialogue, à la force de la culture et de l’éducation et à la paix.
• Dominique de Villepin (Ancien Premier ministre)

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/01/08/resistons-a-l-esprit-de-guerre_4552133_3232.html#lvkAgPBAKVyuGoar.99
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ATTENTATS DE PARIS.

Une enquête de Mediapart

repris sur le blog algerieinfos-saoudi

le 10 Janvier 2015

« Le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a donc induit l’opinion publique en erreur en déclarant, vendredi, que « rien ne témoignait du fait » que les frères Kouachi et Amedy Coulibaly « pouvaient s’engager dans un acte de ce type. Leur situation n’avait pas été judiciarisée ».

Sous le titre « Kouachi-Coulibaly, le réseau terroriste oublié par les services de renseignement » Mediapart publie aujourd’hui 10 janvier une enquête de Fabrice Arfi et Karl Laske.

EXTRAITS

Les archives ont parlé. Dans les heures qui ont suivi l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo, la police a compris qu’elle avait un dossier pour remonter très vite aux assassins. L’oubli – délibéré ou non – de la carte d’identité de Saïd Kouachi, l’un des deux auteurs du massacre avec son frère Chérif, dans une voiture pendant leur fuite, le 7 janvier, a suffi. Le nom des Kouachi a aussitôt fait émerger le dossier de l’enquête antiterroriste ouverte en 2010 sur l’opération visant à faire évader de prison plusieurs chefs islamistes, parmi lesquels Smaïn Aït Ali Belkacem, l’artificier des attentats parisiens de 1995. La police a ainsi rapidement multiplié les perquisitions en région parisienne (…).
Déjà condamné en 2008 dans le dossier de la filière de recrutement djihadiste dite “des Buttes-Chaumont”, Chérif Kouachi avait été soupçonné, en 2010, d’avoir rejoint ce nouveau réseau chargé de l’évasion de Belkacem. Tout comme Amedy Coulibaly, mis en cause dans les assassinats de Montrouge et de la porte de Vincennes, ces 8 et 9 janvier. Actuellement recherchée pour son implication présumée dans les dernières actions, Hayat Boumeddienne, la compagne de Coulibaly, avait elle aussi été arrêtée, entendue et perquisitionnée dans cette même affaire. Alors que Kouachi a bénéficié d’un non-lieu à l’issue de l’instruction, Coulibaly a été condamné à cinq ans de prison, le 20 décembre 2013 (…).
Amedy Coulibaly, mort vendredi lors de l’assaut du magasin HyperCacher porte de Vincennes, où quatre otages ont également péri, n’est pas un inconnu des services de police. Alors qu’il est employé chez Manpower, il a déjà été impliqué dans seize affaires de vols à main armée, violences et trafic de stupéfiants. Présenté comme un « islamiste rigoriste » en mai 2010 par la sous-direction antiterroriste (SDAT) de la police judiciaire, il minimise pourtant sa radicalité religieuse devant les enquêteurs lorsqu’il est entendu.(…)
Des écoutes téléphoniques effectuées en mars et avril 2010 sur le portable de « Doly » montrent « sans ambiguïté » , selon les enquêteurs, « sa foi radicale » et « l’emprise idéologique » exercée sur lui par Djamel Beghal. L’artificier des attentats de 1995, Smaïn Aït Ali Belkacem, le considère pour sa part comme un militant « fiable et déterminé » . « En plus, il est bien dans la religion, il est en dedans. Il est sérieux dans la religion » , jugeait le terroriste islamiste durant une conversation téléphonique interceptée sur un portable utilisé clandestinement en prison (…).
Même s’il a bénéficié d’un non-lieu, la justice ayant estimé n’avoir « pas assez d’éléments démontrant son implication » dans les projets d’évasion, Chérif Kouachi est cependant apparu au fil de l’enquête comme un membre actif du réseau. Étroitement surveillé par les policiers en avril 2010, il a rejoint Djamel Beghal dans le Cantal pendant une semaine, accompagné de deux autres islamistes déjà condamnés pour des faits de terrorisme.
Lors de ses onze auditions en mai 2010 par les policiers, Kouachi s’est montré obstinément mutique. « L’intéressé garde le silence et fixe le sol » , ont noté jusqu’à l’agacement les enquêteurs de la SDAT. « Avez-vous conscience que votre refus à tout dialogue avec nous, y compris sur les choses les plus anodines, le refus d’effectuer une page d’écriture, le refus de regarder les photos qui vous sont présentées, le refus de vous alimenter, relève d’un comportement typique et habituellement constaté chez les individus fortement endoctrinés et appartenant à une organisation structurée ayant bénéficié de consignes à suivre durant une garde à vue ? » , ont fait remarquer les policiers au futur auteur du massacre de Charlie Hebdo.
Les archives informatiques de Kouachi, elles, ont été plus bavardes. De nombreux textes – la plupart anonymes –, découverts dans son ordinateur ou sur des clés USB, témoignent d’un enrôlement djihadiste structuré. Il s’agit la plupart du temps de textes sur des opérations martyres et la conduite à tenir. Tous ont été téléchargés en 2009.
L’un d’entre eux, baptisé Opérations sacrifices, décrit un modus operandi qui n’est pas sans rappeler l’attentat contre Charlie Hebdo . « Un moudjahid (combattant – ndlr) entre par effraction dans la caserne de l’ennemi ou une zone de groupement et tire à bout portant sans avoir préparé un plan de fuite ni avoir pensé à la fuite. L’objectif est de tuer le plus d’ennemis possibles. L’auteur mourra très probablement » (…)
Un autre texte, intitulé Le Prophète de la Terreur, commence par ces mots : « Je suis venu vous apporter le carnage. » Habillé de références religieuses, le texte est en réalité un appel au terrorisme : « Le Coran parle de se préparer le plus que l’on peut à terroriser l’ennemi. » Mieux encore : « horrifier l’ennemi » , souhaite-t-il.
Un ouvrage de l’imam salafiste jordanien Abou Mohamed al-Maqdisi développe quant à lui des « séries de conseils sur la sécurité et la prévention » à l’attention des militants radicaux. Exemple : « Il n’est pas indispensable dans la plupart des circonstances, pour un financeur, de savoir quand et où l’opération aura lieu, ni par quelles mains. De même, pour ceux qui vont exécuter le stade final de l’opération (c’est-à-dire le pirate de l’air, le kidnappeur, celui qui se sacrifie, l’assassin, etc.), il n’est pas indispensable pour eux de savoir qui finance la cellule ou le groupe. » (…)
L’enquête de 2010 sur la cellule Beghal avait clairement montré que ses membres étaient déterminés à passer à l’attaque. Un proche de Kouachi et Coulibaly, un certain Teddy Valcy, alias “Djamil” (condamné à 9 ans en 2013), avait été arrêté en possession d’une kalachnikov, avec un chargeur engagé contenant vingt-deux cartouches. « Cette arme m’appartient et je n’aurais pas hésité à l’utiliser contre vous si j’en avais eu le temps » , avait-il déclaré aux policiers au moment de son interpellation.
Dans une vidéo enregistrée sur son téléphone portable en avril 2010, il apparaît vêtu d’une djellaba, portant son fusil-mitrailleur à l’épaule. Il prononce alors un discours de guerre : « Il est venu le temps où il faut agir. La communauté musulmane est en danger (…). La dignité des musulmans est bafouée. Nous n’avons pas d’autres solutions que de prendre les armes pour défendre notre communauté. Je vous exhorte à prendre les armes le plus vite possible, avec une très grande détermination, et n’oubliez pas la récompense du martyr (…). On nous appelle “terroristes” mais le mot est faible parce qu’on doit vraiment plus les terroriser, les ennemis, les infidèles. Il n’y a pas de discussion avec eux. » Les 7, 8 et 9 janvier 2015, une partie du réseau Beghal a répondu à l’appel.
Source : mediapart.fr

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JE NE SUIS PAS CHARLIE !

braniya chiricahua blog

messaoud Benyoucef

samedi 10 janvier 2015

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Explication : le 22 juillet 1987, le caricaturiste palestinien Naji El Ali était assassiné à Londres par un agent du Mossad. Margaret Thatcher avait fait fermer l’antenne du Mossad et expulser deux espions de Tel-Aviv. Et ce fut tout.

Le lendemain des « attentats » du 11/9, le quotidien « Le Monde » -dirigé alors par Jean-Marie Colombani- titrait en une « Nous sommes tous des Américains ». Cri du cœur, cri de vérité alors que l’on ne savait encore rien des probables auteurs des attentats. Peu importe disait le journal : l’Amérique est attaquée, nous sommes avec elle, mieux nous sommes elle. C’est dire autrement qu’en dernière analyse, nous nous sentons profondément américains parce que l’Amérique, c’est notre culture, notre civilisation -les yankees ont inventé la notion de « choc des civilisations » justement pour cela, obtenir l’alignement des Européens derrière eux, contre l’Autre, l’inconnu, le barbare. Hier, le barbare était le communiste, aujourd’hui, c’est le musulman.

Aujourd’hui, on nous suggère qu’il faut dire, clamer, écrire : « Je suis Charlie ». Et c’est un Philippe Val larmoyant qui a soufflé ça aux médias ! P. Val, celui qui a embringué Charlie-Hebdo dans la guerre que les néocons criminels ont déclaré à la religion musulmane sous couvert de défense de la liberté d’expression, et qui porte une responsabilité écrasante dans la dérive insensée du journal. Mais souvenons-nous comment Val a défendu la liberté d’expression de l’un de ses caricaturistes, Siné, qui avait simplement conclu ironiquement la chronique des épousailles du fils Sarközy avec l’héritière des magasins Darty par un « Il ira loin ce petit ! » Gros tintamarre des médias-coolies des officines sionistes. Val s’empresse de licencier Siné qui sera encore traîné devant les tribunaux (qui le relaxeront). Liberté d’expression ? De grâce, assez de mensonges, d’hypocrisie et de lâcheté !

Pas plus qu’hier, après le 09/11, je n’étais yankee -bien au contraire, j’avais pris une mesure de rétorsion immédiate, celle de ne plus jamais acheter Le Monde-, pas plus aujourd’hui je ne suis Charlie. Être Charlie, c’est cautionner la ligne néocon du journal. Être Charlie, c’est être aux côtés de Philippe Val, de Caroline Fourrest, d’Antoine Sfeir, de Mohamed Sifaoui et de Jean-Baptiste Bothul (le philosophe que le monde envie à la France), ce qu’à Dieu ne plaise ! Être Charlie, c’est être manipulé comme l’ont été les caricaturistes de Charlie-Hebdo eux-mêmes et les Kelkal, Merah, Kouachi et consorts.

Il faut voir les choses dans leur développement. Déjà, des éléments nouveaux se sont fait jour qui ne laisseront pas d’interroger les gens qui ne veulent pas bêler avec le troupeau :

1-La voiture de police fixe -celle qui était en faction en permanence devant l’entrée de l’hebdomadaire avec deux policiers-,aurait été supprimée du dispositif de sécurité récemment. C’est Jeannette Bougrab, ancienne secrétaire d’Etat de Sarközy et compagne de Charb (Stéphane Charbonnier, directeur de Charlie-Hebdo), qui l’a dit (sur France 2).

2-Les services secrets algériens ont alerté leurs homologues français le 06 janvier de l’imminence d’un attentat à Paris. Ce qui veut dire que les services algériens ont des taupes dans ces milieux. À chacun de tirer la conclusion qui lui semble découler logiquement de cet état de faits. Personnellement, cette information me glace l’échine.

3-Le « New-York Times » a révélé que l’un des frères Kouachi a fait une formation dans un centre d’entraînement d’El Qaïda au Yémen. Cette « information » a mis les services français dans une situation embarrassante. Le ministre de l’Intérieur (sur France 2) s’est montré sceptique sur la validité de cette information. Rappelons que le New-York Times -les autochones l’appellent le « Jew-York… » – est le porte-parole de la communauté juive new-yorkaise et celui des néocons. Il s’est particulièrement distingué par son acharnement en faveur d’une intervention en Irak. Chacun en tirera les conclusions.

4-La chaîne BFM vient de révéler qu’elle a pris contact, téléphoniquement, avec les présumés auteurs des attentats contre Charlie-Hebdo et contre la supérette casher. Le plus étrange est que ces contacts ont été pris au moment où les forces de police encerclaient les présumés auteurs. La question essentielle que posait BFM était de savoir si les présumés auteurs se réclamaient d’une organisation et laquelle. C’est comme si BFM savait que les présumés auteurs n’allaient pas sortir vivants du siège et que la chaîne n’avait rien de plus urgent que de valider l’information du New-York Times. Plus urgent que de s’enquérir du sort des otages ou de conseiller aux présumés auteurs de se rendre.

Après le choc, viennent les sentiments, bons ou mauvais ; après, viendra le temps de la raison, le temps où l’on regrette généralement de s’être laissé berner par des manipulateurs sans religion ni nation comme disent les Arabes.

http://braniya.blogspot.fr/2015/01/je-ne-suis-pas-charlie.html

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UN ANCIEN DE CHARLIE-HEBDO PARLE

braniya blog – messaoud benyoucef

le vendredi 9 janvier 2015

et reprise de l’article de Olivier Cyran

« LA MACHINE À RAFFINER LE RACISME BRUT »

braniya, le 29 décembre 2013

Cet article avait été mis en ligne sur ce blogue le 29 décembre 2013, sous le titre « La machine à raffiner le racisme brut ». Je l’avais fait précéder d’un « chapeau » qui précisait le contexte dans lequel son auteur, Olivier Cyran, l’avait rédigé.

Aujourd’hui, 9 janvier 2015, deux jours après la tuerie qui a décapité la rédaction de Charlie-Hebdo, je le remets en ligne. Tout est déjà là dans ce remarquable écrit : la dérive funeste d’un journal satirique devenu une machine de guerre néoconservatrice sous la houlette de son directeur Philippe Val, coolie d’Israël et de ses groupes de pression en France. Sarközy le récompensera en le nommant à la direction de France Inter. Les socialistes, revenus au pouvoir, ne l’ont pas viré : c’est dire qu’entre droite et gauche, il n’y a pas de différence au niveau de l’acceptation de la domination sioniste sur le pouvoir d’état. Le zèle judéophile déployé par Manuel Valls en est une illustration éloquente.
Machine de guerre néoconservatrice veut bien dire que Charlie-Hebdo a été partie prenante d’une guerre, d’une rare perfidie, celle du « choc des civilisations », concoctée à Washington et Tel-Aviv. Cette guerre prend pour cible le monde arabo-musulman pour deux raisons principales : 1) Tel-Aviv a un intérêt vital à détruire tous les états arabes en les présentant comme des barbares et en se présentant lui-même comme le poste avancé de la civilisation. 2) Washington ne supporte pas que ce monde arabo-musulman résiste à son pouvoir de séduction (soft power) et persévère dans son être.
Les deux acolytes rêvent d’un monde d’où toute diversité aurait été effacée, un monde d’individus isolés et décérébrés, des buveurs de Coca-Cola et des mangeurs de Mac-Do, auxquels il leur sera facile d’imposer leur domination. Avec un gouvernement mondial (à leur botte) siégeant de préférence à Jérusalem, comme le préconise Jacques Attali.
De ce point de vue, la boucherie du 07 janvier apparaît d’ores et déjà comme une réédition du 11/9 : un attentat sanglant sous faux drapeau. Les jours prochains apporteront des éléments nouveaux sur l’identité exacte des assassins et de leurs commanditaires. Quoi qu’il en soit, les tireurs de ficelles auront utilisé et sacrifié des caricaturistes exactement comme ils ont utilisé et sacrifié les Khaled Kelkal, Mohamed Merah et autres.

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Le dessin illustrant l’article montre à quel niveau de provocation était tombé le journal. N’en déplaise au troupeau bêlant qui sautille comme un cabri en criant « Liberté d’expression! », la notion de sacré existe encore pour certaines gens et ces gens ont le droit d’être respectés. Non, on ne peut pas tout tourner en dérision ni offenser les croyants sincères. Et dire cela participe également de la liberté d’expression.

La rédaction de Charlie Hebdo vient de faire paraître dans les colonnes du quotidien Le Monde, sous forme de tribune libre, un plaidoyer pro domo dans lequel elle se défend d’être devenue un journal raciste. Un de ses anciens journalistes, Olivier Cyran (Allemand vivant en France), lui répond.
La méticulosité de l’argumentaire qu’il y déploie, la profondeur de l’analyse qu’il met en œuvre ainsi que la richesse de la culture qu’il convoque nous font le devoir de dire que nous avons affaire, là, à une démonstration magistrale qui fait honneur à son auteur -et au journalisme, au vrai- et pointe implacablement la dérive de l’hebdomadaire anciennement satirique vers les eaux glauques et puantes du néoconservatisme.

Ci-dessous, un florilège de citations extraites de l’article que l’on pourra retrouver dans son intégralité ici :
http://www.article11.info/?Charlie-Hebdo-pas-raciste-Si-vous#nb3

Je me permets d’encourager vivement les visiteurs de Braniya à le lire. Une fois cela fait, ils comprendront qu’on ne puisse pas dire que tous les journalistes sont des moutons ni que tous les Européens (les « Blancs ») sont islamophobes.

« Ainsi donc Le Monde vous a charitablement ouvert son rayon blanchisserie, pour un repassage express de votre honneur tout chiffonné. À vous entendre, il y avait urgence : même plus moyen de sortir dans Paris sans qu’un chauffeur de taxi vous traite de racistes et vous abandonne les bras ballants sur le bord du trottoir…

S’il m’est arrivé à moi aussi, par le passé, de griffonner quelques lignes fumasses en réaction à tel ou tel de vos exploits, je ne me suis jamais appesanti sur le sujet. Sans doute n’avais-je ni la patience ni le cœur assez bien accroché pour suivre semaine après semaine la navrante mutation qui s’est opérée dans votre équipe après le tournant du 11 septembre 2001. Je ne faisais déjà plus partie de Charlie Hebdo quand les avions suicide ont percuté votre ligne éditoriale, mais la névrose islamophobe qui s’est peu à peu emparée de vos pages à compter de ce jour-là m’affectait personnellement, car elle salopait le souvenir des bons moments que j’avais passés dans ce journal au cours des années 1990. Le rire dévastateur du « Charlie » que j’avais aimé sonnait désormais à mes oreilles comme le rire de l’imbécile heureux qui se déboutonne au comptoir du commerce, ou du cochon qui se roule dans sa merde…

Raciste, Charlie Hebdo ne l’était assurément pas du temps où j’y ai travaillé. En tout cas, l’idée qu’un jour le canard s’exposerait à pareil soupçon ne m’a jamais effleuré. Il y a avait bien quelques franchouillardises et les éditos de Philippe Val, sujets à une fixette inquiétante et s’aggravant au fil des ans sur le « monde arabo-musulman » , considéré comme un océan de barbarie menaçant de submerger à tout instant cet îlot de haute culture et de raffinement démocratique qu’était pour lui Israël…

À peine avais-je pris mes cliques et mes claques, lassé par la conduite despotique et l’affairisme ascensionnel du patron, que les tours jumelles s’effondrèrent et que Caroline Fourest débarqua dans votre rédaction. Cette double catastrophe mit en branle un processus de reformatage idéologique qui allait faire fuir vos anciens lecteurs et vous en attirer d’autres, plus propres sur eux, et plus sensibles à la « war on terror »

Le nouveau tropisme en vigueur imposa d’abjurer le tempérament indocile qui structurait le journal jusqu’alors et de nouer des alliances avec les figures les plus corrompues de la jet-set intellectuelle, telles que Bernard-Henri Lévy ou Antoine Sfeir, cosignataires dans Charlie Hebdo d’un guignolesque « Manifeste des douze contre le nouveau totalitarisme islamique»

À Charlie Hebdo, il a toujours été de bon ton de railler les « gros cons » qui aiment le foot et regardent TF1. Pente glissante. La conviction d’être d’une essence supérieure, habilitée à regarder de très haut le commun des mortels, constitue le plus sûr moyen de saboter ses propres défenses intellectuelles et de les laisser bailler au moindre courant d’air…

Le pilonnage obsessionnel des musulmans auquel votre hebdomadaire se livre depuis une grosse dizaine d’années a des effets tout à fait concrets. Il a puissamment contribué à répandre dans l’opinion « de gauche » l’idée que l’islam est un « problème » majeur de la société française. Que rabaisser les musulmans n’est plus un privilège de l’extrême droite, mais un droit à l’impertinence sanctifié par la laïcité, la république, le « vivre ensemble »…

Je veux bien tâcher d’éclairer vos lanternes sur ce point : l’islam-religion-conquérante qui fait rien qu’à croquer la planète. L’islamisation de l’archipel indonésien a commencé au XIIIe siècle, quand des princes de Sumatra se sont convertis à la religion des marchands perses et indiens qui faisaient bombance dans leurs ports –non sous la contrainte, mais par désir d’intégrer un réseau commercial prospère. Plus tard, au XVIIIe siècle, ce sont les colons hollandais, chrétiens irréprochables, qui se sont arrangés pour imposer l’islam à Java, en vue de soustraire sa population à l’influence séditieuse des Balinais hindouistes. On est loin de l’imagerie du farouche bédouin réduisant à sa merci des peuples exotiques, à laquelle se résume apparemment votre connaissance du monde musulman…

Vous avez raison, arabe et musulman, ce n’est pas la même chose. Mais vous savez quoi ? Musulman et musulman, ce n’est pas pareil non plus. Sachez qu’il y en a de toutes sortes, riches ou pauvres, petits ou grands, sympathiques ou revêches, généreux ou rapiats, désireux d’un monde meilleur, réactionnaires ou même, oui, intégristes. Or, dans Charlie Hebdo, rien ne ressemble davantage à un musulman qu’un autre musulman. Toujours représenté sous les traits d’un faible d’esprit, d’un fanatique, d’un terroriste, d’un assisté. La musulmane ? Toujours une pauvre cloche réductible à son foulard, et qui n’a d’autre fonction sociale que d’émoustiller la libido de vos humoristes…

Ce qui définit la vision dominante du « racialisé », « c’est qu’il est tout entier contenu dans ce qui le racialise ; sa culture, sa religion, sa couleur de peau. Il serait comme incapable de s’en sortir, incapable de voir plus loin que son taux de mélanine ou le tissu qu’il porte sur la tête, observe sur son blog Valérie CG, une féministe pas très intéressante puisqu’elle ne vous a pas montré ses seins. Musulman devient une sorte de nouvelle couleur de peau dont il est impossible de se détacher. »

Dans votre texte du Monde, vous invoquez la salutaire remise en cause des « si grands pouvoirs des principaux clergés » , mais sans préciser en quoi l’islam – qui n’a pas de clergé, mais on ne peut pas tout savoir, hein – exerce en France un « si grand pouvoir » . Hors de la version hardcore qu’en donnent quelques furieux, la religion musulmane ne me paraît pas revêtir chez nous des formes extraordinairement intrusives ou belliqueuses. Sur le plan politique, son influence est nulle : six millions de musulmans dans le pays, zéro représentant à l’Assemblée nationale. Pour un parlementaire, il est plus prudent de plaider la cause des avocats d’affaires et de voter des lois d’invisibilité pour les femmes voilées que de s’inquiéter de l’explosion des violences islamophobes. Pas un seul musulman non plus chez les propriétaires de médias, les directeurs d’information, les poids lourds du patronat, les grands banquiers, les gros éditeurs, les chefferies syndicales. Dans les partis politiques, de gauche comme de droite, seuls les musulmans qui savent réciter par cœur les œuvres complètes de Caroline Fourest ont une petite chance d’accéder à un strapontin…

… Vous revendiquez le droit sacré de « rire » pareillement des imams, des curés et des rabbins. Pourquoi pas, si encore vous appliquiez vraiment ce principe. On oublie l’épisode Siné ou il faut vous faire un dessin ? Un constat avéré d’islamophobie, et c’est l’éclat de rire. Une mensongère accusation d’antisémitisme, et c’est la porte. Cette affaire remonte aux années Val, mais la pleutre approbation que votre patron d’alors a recueilli auprès de « toute la bande » , et plus particulièrement auprès de toi, Charb, démontre que le deux poids deux mesures en vigueur à cette époque n’était pas le fait d’un seul homme. La même règle a perduré. À ce jour, me dit-on, le numéro spécial « Charia Hebdo » ne s’est toujours pas dédoublé en un « Talmud Hebdo »…

Vous vous réclamez de la tradition anticléricale, mais en feignant d’ignorer en quoi elle se différencie fondamentalement de l’islamophobie : la première s’est construite au cours d’une lutte dure, longue et acharnée contre un clergé catholique effectivement redoutable de puissance, qui avait – et a encore – ses journaux, ses députés, ses lobbies, ses salons et son immense patrimoine immobilier ; la seconde s’attaque aux membres d’une confession minoritaire dépourvue de toute espèce d’influence sur les sphères de pouvoir…

« Encoder le racisme pour le rendre imperceptible, donc socialement acceptable » , c’est ainsi que Thomas Deltombe définit la fonction de l’islamophobie, décrite aussi comme une « machine à raffiner le racisme brut » . »

Publié par messaoud benyoucef
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2 commentaires:
1.
Ziani Ouas29 décembre 2013
Salut Messaoud,

Olivier Cyran me fait penser à John Swinton. Ci-après son célèbre propos, plus que centenaire :

À New York, lors d’un banquet, le 25 septembre 1880, le célèbre journaliste John Swinton se fâche quand on propose de boire un toast à la liberté de la presse :

« Il n’existe pas, à ce jour, en Amérique, de presse libre et indépendante. Vous le savez aussi bien que moi. Pas un seul parmi vous n’ose écrire ses opinions honnêtes et vous savez très bien que si vous le faites, elles ne seront pas publiées. On me paye un salaire pour que je ne publie pas mes opinions et nous savons tous que si nous nous aventurions à le faire, nous nous retrouverions à la rue illico. Le travail du journaliste est la destruction de la vérité, le mensonge patent, la perversion des faits et la manipulation de l’opinion au service des Puissances de l’Argent. Nous sommes les outils obéissants des Puissants et des Riches qui tirent les ficelles dans les coulisses. Nos talents, nos facultés et nos vies appartiennent à ces hommes. Nous sommes des prostituées de l’intellect. Tout cela, vous le savez aussi bien que moi ! » (Cité dans : Labor’s Untold Story, de Richard O. Boyer and Herbert M. Morais, NY, 1955/1979.)
Réponses
1.
messaoud benyoucef30 décembre 2013
Salut ZO,

Oui; les médias mainstream offrent aujourd’hui l’image caricaturale -tellement grosse que personne ne songe à la nier- de cette « prostitution » vis-à-vis des riches et des puissants dont parle Swinton. L’élément nouveau, aujourd’hui, c’est Internet qui a permis un formidable progrès : la libre expression des opinions et leur circulation. Le résultat immédiat (que les puissances d’argent essaient désespérément de cacher) en est que les médias mainstream (en Europe tout du moins) sont carrément à l’agonie. Et, à la faveur de cette donne nouvelle, les intellectuels « free lance » qui font œuvre de journalisme – du vrai-, comme O. Cyran, émergent.
De grands changements sont à venir : l’Histoire nous a appris que les grandes transformations sociales et politiques sont généralement précédées d’avancées décisives dans le domaine technologique.

Sources : http://braniya.blogspot.fr/2013/12/la-machine-raffiner-le-racisme-brut.html

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LA TUERIE DE CHARLIE-HEBDO – AUTREMENT VUE

Braniya – messaoud benyoucef

le jeudi 8 janvier 2015

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Ce qui suit est un florilège de citations d’articles glanés sur la Toile concernant la tuerie perpétrée au siège du journal satirique Charlie-Hebdo. L’empathie -personnellement, j’avais rencontré le jeune Tignous au début des années 90, au Centre culturel français d’Oran, et il m’était apparu très sympathique-, l’empathie, dis-je, n’empêche pas de réfléchir et, pour cela, de garder la tête froide. L’onde de choc de ce carnage contribuera à alourdir un climat déjà détestable, fait de délire anti-musulman sans cesse alimenté par les mêmes officines, les mêmes « experts », les mêmes médias, les mêmes femmes et hommes politiques qui s’évertuent à faire croire qu’ils ne font que critiquer une religion quand tout leur discours transpire la haine de l’Arabe. La paranoïa anti-musulmane est une « machine à recycler » le bon vieux racisme anti-arabe dont certains partis politiques et autres organisations ne se cachent même plus. La preuve ? Ceux qui alimentent sans désemparer cette paranoïa sont ceux-là mêmes qui manifestent bruyamment leur admiration et leur servilité à l’égard de l’état juif. Voilà comment il faut traiter les Arabes ! comme la Haganah et l’Irgoun ont traité ceux de Deir Yassine, comme l’état juif traite Gaza.
Les éclairages apportés par les citations qui suivent permettront de penser plus juste. Cela étant, je suis d’accord avec Jacob Cohen (cf son article ci-dessous) pour dire que le malheur a frappé à la porte de Charlie-Hebdo, le jour où Philippe Val en a pris les rênes.

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« Ce n’est pas au Caire, à Riyad ou à Kaboul que l’on prône le « choc des civilisations », mais à Washington et à Tel-Aviv.

Les commanditaires de cet attentat savaient qu’il provoquerait une fracture entre les Français musulmans et les Français non-musulmans. Charlie Hebdo s’était spécialisé dans des provocations anti-musulmanes et la plupart des musulmans de France en ont été directement ou indirectement victimes. Si les musulmans de France condamneront sans aucun doute cet attentat, il leur sera difficile d’éprouver autant de peine pour les victimes que les lecteurs du journal. Cette situation sera perçue par certains comme une complicité avec les meurtriers.
C’est pourquoi, plutôt que de considérer cet attentat extrêmement meurtrier comme une vengeance islamiste contre le journal qui publia les caricatures de Mahomet et multiplia les « unes » anti-musulmanes, il serait plus logique d’envisager qu’il soit le premier épisode d’un processus visant à créer une situation de guerre civile.
L’idéologie et la stratégie des Frères musulmans, d’Al-Qaïda et de Daesh ne préconise pas de créer de guerre civile en « Occident », mais au contraire de la créer en « Orient » et de séparer hermétiquement les deux mondes. Jamais Saïd Qotb, ni aucun de ses successeurs, n’ont appelé à provoquer d’affrontement entre les musulmans et les non-musulmans chez ces derniers.
Au contraire, la stratégie du « choc des civilisations » a été formulée par Bernard Lewis pour le Conseil de sécurité nationale états-unien, puis vulgarisée par Samuel Huntington non plus comme une stratégie de conquête, mais comme une situation prévisible. Elle visait à persuader les populations membres de l’Otan d’un affrontement inévitable qui prît préventivement la forme de la « guerre au terrorisme ».
Nous devons nous souvenir que, depuis le démembrement de la Yougoslavie, l’état-major états-unien a expérimenté et mis en pratique dans de très nombreux pays sa stratégie des « combats de chiens ». Elle consiste à tuer des membres de la communauté majoritaire, puis des membres des minorités en renvoyant les responsabilités dos-à-dos jusqu’à ce que chacun soit convaincu d’être en danger de mort. C’est de cette manière que Washington a provoqué la guerre civile aussi bien en Yougoslavie que dernièrement en Ukraine. »

Thierry Meyssan
http://www.voltairenet.org/article186408.html

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« …Charlie Hebdo, journal satirique, anarchiste, révolutionnaire, caustique, ennemi de tous les pouvoirs et dénonciateur de tous les abus … a été pris en otage par un certain Philippe Val, qui avait des casseroles à se faire pardonner, et qui s’est mis au service de BHL, transformant Charlie Hebdo en organe pro-sioniste, dénigrant les Arabes et en particulier les Palestiniens, adorant le CRIF et ses valets, poussant sa logique jusqu’à reprendre la bannière de l’islamophobie gratuite et délirante, vomissant tout ce qui représentait l’islam ou les musulmans.
La morale de l’histoire, et on peut étendre ce principe à d’autres collabos, Philippe Val a été nommé directeur de France Inter. Et Charlie Hebdo a poursuivi dans cette belle voie de la collaboration avec les puissants du moment, ce qui lui a apporté soutiens financiers médiatiques et politiques.Ce n’est pas la 1ère fois que le lobby judéo-sioniste réussit à « retourner » un organe de presse, comme on « retourne » un espion. Je citerai 2 exemples qui me semblent particulièrement révélateurs. D’abord Les Lettres Modernes, revue créée après la guerre par Jean-Paul Sartre et qui représentait le summum de la réflexion anti-impérialiste. Revue reprise par Claude Lanzmann, l’auteur du film Shoah qui lui a rapporté des millions, et qui en a fait un torchon au service du sionisme. L’autre exemple c’est Libération sur lequel je ne m’étendrai pas tellement sa collusion avec le sionisme est flagrante et sa haine de l’islam incommensurable.
Ces campagnes de propagande islamophobe et de soutien à l’Amérique et à Israël ont pour conséquence de créer un climat détestable et de susciter des pulsions de violence et de revanche aveugle. Ce que l’on reproche généralement au « terrorisme ». »

Jacob Cohen
jacobdemeknes.blogspot.fr

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« Depuis 2011, la France sarkozyste, puis hollandaise, s’est engagée dans une entreprise nauséabonde de soutien explicite au terrorisme wahhabite, le même qui entache le nom même de l’islam. Par simple appât de gain, pour quelques milliards de pétrodollars, les ministres français ont fait de Riyad et de Doha leurs temples, tournant le dos aux idéaux que la France non-américanisée des années 50-60 défendait encore ! Paris a voué aux gémonies la Syrie, ce pays dont la population lui vouait, elle, amour, intérêt et respect..
Les traîtres à l’État syrien ont été hébergés sur le sol français, la France a favorisé le trafic d’armes à destination des terroristes takfiris et s’est alignée systématiquement sur la ligne belliciste d’une Turquie néo-ottomane, d’un Qatar fou des Frères et enfin d’une Arabie assoiffé du sang des non-wahhabites… La France s’est rendue complice des atrocités commises tour à tour en Libye, en Syrie, en Irak…
Alors qui a tué les caricaturistes de Charlie Hebdo ? »

http://french.irib.ir/info/international/item/354944-qui-a-tu%C3%A9-les-caricaturistes

« La fabrication médiatique du « problème musulman » –érigé en « problème de civilisation » par Alain Finkielkraut– favorise une libération de la parole raciste et une stigmatisation des musulmans et de leurs pratiques religieuses avec la bénédiction des journalistes du système. Le battage médiatique autour du dernier roman de Michel Houellebecq, ouvertement islamophobe, la complaisance des médias vis-à-vis des dérapages d’Alain Finkielkraut, l’islamophobie déclarée de certains journalistes, l’hostilité rencontrée par un mouvement qui prône la réconciliation avec les populations issues de l’immigration post-coloniale montrent que la classe politico-médiatique dans sa majorité encourage le rejet des musulmans. On peut être surpris de cette tolérance vis-à-vis d’opinions discriminatoires et parfois même racistes surtout au regard de la censure qui frappe impitoyablement les critiques, même mesurées, de la politique israélienne.

Nicolas Bourgoin
bourgoinblog.wordpress.com

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« … pour lire article en entier cliquer sur le lien (…)

Sources : braniya http://braniya.blogspot.fr/2015/01/la-tuerie-de-charlie-hebdo-autrement-vue.html

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Michel Onfray : « LES RÉGIMES ISLAMIQUES NE MENACENT L’OCCIDENT QUE DEPUIS QUE L’OCCIDENT LES MENACE »

Assawra, le 10 janvier 2015

reprise d’un article du Point – même date

Peut-on penser un peu l’événement et se défaire un tant soit peu de l’émotion, du pathos, du compassionnel qui ne mange pas de paix et dans lequel communient les tenants de l’unité nationale ? Il ne suffit pas de crier à la barbarie des tireurs du commando et d’affirmer que ces barbares attaquent notre civilisation pour se croire quittes !
Le matin même, aux informations de 7 heures, j’apprenais que la France avait dépêché un sous marin nucléaire dans le golfe persique. Nous sommes en guerre. Et cette guerre a été déclarée après le 11 septembre par le clan des Bush. Hormis l’épisode à saluer de Chirac refusant d’y aller, de Mitterrand à Hollande en passant par Sarkozy, nous avons bombardé des pays musulmans qui ne nous menaçaient pas directement : Irak, Afghanistan, Libye, Mali, aujourd’hui l’Etat Islamique, et ce en faisant un nombre considérable de victimes musulmanes depuis des années. Voit-on où je veux en venir ?
Précisons. A qui peut-on faire croire qu’hier le régime des Talibans en Afghanistan, celui de Saddam Hussein en Irak ou de Kadhafi en Libye, aujourd’hui celui des salafistes au Mali ou du califat de l’Etat Islamique menaçaient réellement la France avant que nous ne prenions l’initiative de les attaquer ? Que maintenant, depuis que nous avons pris l’initiative de les bombarder, ils ripostent, c’est, si l’on me permet cette mauvaise formule, de bonne guerre !
Mais l’on confond la cause et la conséquence : les régimes islamique de la planète ne menacent concrètement l’Occident que depuis que l’Occident les menace. Et nous ne les menaçons que depuis que ces régimes aux sous-sols intéressants pour le consumérisme occidental ou aux territoires stratégiquement utiles pour le contrôle de la planète, manifestent leur volonté d’être souverains chez eux. Ils veulent vendre leur pétrole ou les produits de leurs sous-sols à leur prix et autoriser leurs bases à leurs seuls amis, ce qui est parfaitement légitime, le principe de la souveraineté des pays ne souffrant aucune exception.
Si les droits de l’homme étaient la véritable raison des attaques françaises aux côtés, comme par hasard, des Etats-Unis, pourquoi n’attaquerions nous pas les pays qui violent les droits de l’homme et le droit international ? Pourquoi ne pas bombarder la Chine ? Cuba ? L’Arabie Saoudite ? L’Iran ? Le Pakistan ? Le Qatar ? Ou même les Etats-Unis qui exécutent à tour de bras ? Il suffit de lire le rapport d’Amnesty International pour choisir ses cibles, elles ne manquent pas…
Les politiques qui n’ont d’idées qu’en fonction de leurs élections ou de leurs réélections n’ont pas pensé la guerre. Ils regardent les crédits de la défense et ils coupent pour faire des économies, mais ils n’ont aucune théorie en rapport avec le nouvel état des lieux. La géostratégie est le cadet de leur souci.

(10-01-2015 – Le Point.fr)

Michel Onfray est un philosophe français, né le 1ᵉʳ janvier 1959 à Argentan qui défend une vision du monde hédoniste, athée et anarchiste.

Sources : assawra
http://assawra.blogspot.fr/2015/01/michel-onfray-les-regimes-islamique.html

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LES DÉGÂTS INVISIBILISÉS DES INÉGALITÉS SOCIALES ET DES DISCRIMINATIONS RACISTES ET SEXISTES

SAÏD BOUAMAMA

le 7 janvier 2015|

http://michelcollon.info/Les-degats-invisibilises-des.html

<« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première. La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres. Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. » (Don helder Câmara)

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Les statistiques dites « ethniques » sont interdites en France. Cette hypocrisie collective a pour résultat une sous-estimation de la violence institutionnelle de notre système social et de ses dégâts sur les personnes. Les statistiques « sociales » ne sont pas interdites (pas encore ?) et permettent une première approche de cette violence. Toutes les exploitations et dominations sont des violences. Les victimes de ces violences ne sont jamais inactives. Elles ne peuvent pas être passives. Soit elles retournent la violence vers l’extérieur, soit elles la dirigent vers elles-mêmes dans un processus d’autodestruction. La prison et l’hôpital psychiatrique sont deux analyseurs de l’ampleur de cette violence institutionnelle contre les classes populaires et plus particulièrement leurs composantes féminines et issues de l’immigration postcoloniale.

Prison, justice et classes sociales

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Bien que légales, les études sur la population carcérale à partir de l’appartenance de classe en France, sont extrêmement rares. Elles sont, de surcroît, entièrement absentes du discours médiatique et politique. Il est vrai qu’elles sont immédiatement parlantes. Le fait qu’il ne soit pas possible de citer de chiffres récents est en lui-même significatif. Il indique non pas l’existence d’un complot du silence mais la production systémique d’une occultation sociale à partir de multiples processus : déterminants des recherches scientifiques, valorisation de certaines thématiques de recherches et dévalorisation d’autres, échos médiatiques des recherches, procédures d’accès aux terrains, préoccupations des chercheurs et des labos, etc. Dans les rares travaux existant citons l’enquête de l’INSEE publié en 2000 à partir d’un échantillon de 1700 détenus hommes.

Les employés forment ainsi 11.8 % de la population carcérale masculine, les ouvriers 49.8 % et les « sans profession » 13.7 %. Ces trois catégories sociales constituant les classes populaires, ces dernières représentent 75. 3 % de la population étudiée. En comparaison les « cadres et professions intellectuelles supérieures ne représentent que 3.3 % de la population carcérale [[ Francine Cassan et Laurent Toulemon, L’histoire familiale des hommes détenus, INSEE première, n° 706, avril 2000, p. 2.]]. Il ne s’agit pas d’un simple reflet de notre structure sociale dans les prisons. La comparaison entre la part quantitative de ces catégories dans la structure sociale et la part dans la population carcérale fait apparaître une surreprésentation incontestable : les ouvriers par exemple comptent pour 36.4 % de la population totale mais pour 49.8 % de la population carcérale.

Ces chiffres ne signifient pas l’absence de délinquance dans les autres classes sociales. Ils indiquent simplement les implicites de classes de notre système de justice. Bruno Aubusson et Thierry Godefroy[[Bruno Aubusson et Thierry Godefroy, Les forces cachées de la justice, Le Centurion, Paris, 1980, et Condamnation et condamnés. Qui condamne-t-on ? à quoi ? Pourquoi ?, Service d’études pénales et criminologiques, Doc n° 29, 1981.]] ont démontrés depuis longtemps l’existence de deux types de délinquances inégalement sanctionnés : celle des classes populaires dite « délinquance traditionnelle » (vol, violence contre les personnes, trouble à l’ordre public, etc.) et celle des catégories plus aisées dite « délinquance professionnelle » (infraction financière, fiscales, infraction au droit du travail, etc.). La première fait courir le risque de la prison et la seconde au pire celui de l’amende.
La prison française reflète et amplifie la structuration en classe sociales de notre société. Ce constat banal mérite d’être répété lorsque certains à « gauche » osent proclamer que la « sécurité n’est ni de droite ni de gauche » [[Manuel Valls, Entretien au Parisien, 29 juillet 2013.]]. Continuer à parler de sécurité dans l’absolu sans la relier à l’insécurité sociale que génère notre système social pour les classes populaires est à la fois une ineptie et une hypocrisie. La surreprésentation des classes populaires en prison est un effet de la violence de la domination de classe.

Continuer à parler des conséquences (la délinquance, la violence du dominé, etc.) sans les relier à leurs causalités est bien un raisonnement de droite qui malheureusement tend à s’étendre largement à « gauche ».

Prison, justice et sexe

Les femmes pour leur part sont sous-représentées en prison :

On est effectivement là face à une très nette dissymétrie sexuelle. À toutes les étapes de la chaîne pénale, les femmes sont très largement sous-représentées en termes statistiques : elles représentent 14% des individus mis en cause par la police et la gendarmerie, 9% des personnes mises en cause par la justice et 3,4% de la population carcérale [[Coline Cardi et Geneviève Pruvost, Penser la violence des femmes, La Découverte, Paris, 2012.]].

L’explication de ce faible taux de féminité de la population carcérale ne signifie pas que les femmes soient moins actrices de violences. Elle peut également renvoyer à un traitement pénal différencié comme le souligne les deux auteures citées. La violence des hommes est en quelque sorte considérée comme normale, rationnelle, logique, naturelle. Celle des femmes comme anormale, irrationnelle, illogique et non naturelle. La violence des hommes aurait donc à être punie alors que celle des femmes à être « soignée ». La négation de la violence des femmes a ainsi pour conséquence sa pathologisation c’est-à-dire la négation de ses causalités sociales c’est-à-dire encore l’occultation de son caractère de réponse aux violences sociales subies. Nous retrouvons ici les vieilles théorisations sexistes du « tempérament » et de l’hystérie féminine[[Elsa Dorlin, La matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la Nation française, La Découverte, Paris, 2006.]].

Si nous portons notre regard du côté de la dépression, de la consommation de médicament, de l’hôpital psychiatrique, etc., les proportions sont inversées. Les raisons n’ont rien à voir avec les hormones mais avec les violences subies d’une part et par un traitement médical sexué d’autre part :

Plusieurs travaux ont démontré que loin d’être objectifs dans ce domaine, les médecins avaient au contraire des biais systématiques. Ainsi, devant des symptômes identiques, les médecins prescrivent plus facilement des tranquillisants s’ils ont affaire à une femme plutôt qu’à un homme, considérant plus souvent que la maladie est due entièrement ou partiellement à la dépression [[Carole Sereni,Daniel Sereni, On ne soigne pas les femmes comme les hommes, Odile Jacob, Paris, 2002.]].

La « vulnérabilité » dont nous parlons n’est pas liée aux différences biologiques mais aux multiples discriminations que les femmes subissent au long de leur trajectoire c’est-à-dire encore aux violences sociales et systémiques.

Prison, justice et race

L’état de la statistique empêche d’avoir un regard objectivé sur la réalité carcérale selon l’origine. L’absence d’analyse incluant la donnée de l’origine laisse la voie ouverte à une instrumentalisation par l’extrême droite. Des constats d’apparentes évidences fleurissent dans la presse d’extrême-droite et étendent leurs métastases bien au-delà : « Les prisons sont majoritairement peuplées de noirs et d’arabes » ou « la grande majorité des détenus sont musulmans » selon l’actualité dominant la période. Ces « constats » sont avancés en appui à une argumentation affirmant explicitement ou suggérant implicitement « qu’il y a « quelques choses » (la culture, l’éducation, la religion …) qui relie la délinquance et l’immigration de façon substantielle[[Laurent Mucchielli, Délinquance et immigration : des préjugés à l’analyse, L’essor de la gendarmerie nationale, n° 457, mai 2013, p. 16.]]».
Laurent Mucchielli met en évidence dans l’article ci-dessus cités deux biais dans ce type d’affirmation :

  1. « Il est exact que, dans les maisons d’arrêt, et surtout dans celles situées à proximité des grandes agglomérations, la majorité des détenus ne sont pas blancs de peau. Mais ce qui est vrai dans les maisons d’arrêt de Fresnes ou de Fleury-Merogis (région parisienne) ne l’est pas forcément dans celles de Saint-Brieuc ou d’Agen »;
  2. « la population carcérale ne se réduit pas aux maisons d’arrêt. Si l’on observe les Centrales accueillant des longues peines, et notamment des condamnés pour crimes sexuels, le constat est souvent inverse : la majorité des détenus y ont la peau blanche [[Ibid, p. 16.]] ».

Les causalités ne sont donc pas de type culturaliste. Il existe cependant réellement une surreprésentation des noirs et des arabes dans les prisons proches des grandes agglomérations. « C’est l’aboutissement, souligne la juriste et criminologue Fabienne Brion, « logique » de toute une politique d’exclusion et de répression » [[Fabienne Brion, Réflexion, in Jean Pierre Borloo, Pauvre justice ou l’inégalité des citoyens devant la loi, EPO, Bruxelles, 1997, p. 155.]].

Nous pouvons même, selon moi, utiliser l’expression de «carrière de discriminé» dans laquelle les discriminations racistes subies dans la vie sociale (dans la recherche de stage au cours de la scolarité[[Fabrice Dhume-Sonzogoni, Entre l’école et l’entreprise: la discrimination en stage. Une sociologie publique de l’ethnicisation des frontières scolaires, Presses universitaires de Provence, Aix-en-Provence, 2014.]], dans l’orientation[[Fabrice Dhume, Suzana Dukik et Séverine Chauvel, Orientation scolaire et discrimination. De l’(in)égalité de traitement selon l’origine, HALDE-Documentation française, Paris, 2011.]] scolaire ou de formation, dans l’accès à l’emploi[[Jean François Amadieu, Le poids des apparences, Odile Jacob, Paris, 2002 ou encore : E. Cediey et F. Foroni, Les discriminations à raison de « l’origine » dans les embauches en France selon la méthode du Bureau International du Travail, BIT, Genève, 2006.]], dans la recherche d’un logement[[Simon Patrick, Chafi Malika, Kirszbaum Thomas, Les Discriminations raciales et ethniques dans l’accès au logement social, Groupe]], etc.) sont complétées par un contrôle au faciès récurent[[Fabien Jobard et René Lévy, Police et minorités visibles : les contrôles d’identité à Paris, Open society, New York, 2009.]].

Les discriminations sociales et leurs effets économiques, la surveillance particulière, le contrôle policier d’exception et ses effets d’humiliation[[Didier Fassin, La force de l’ordre : une anthropologie de la police des quartiers, Seuil, Paris, 2011.]] suscitent inévitablement des réactions qui conduisent plus fréquemment devant la justice[[Laurent Mucchielli, Aurore Delon, Christophe Daadouch et Manuel Boucher, Justice des mineurs et émeutes urbaines, CLARIS la revue, n° 1, octobre 2006 ou encore Daniel Welzer-Lang, et Patrick Castex, Comparutions immédiates : quelle justice ?, Eres, Paris, 2012.]] (petite délinquance, rébellion à agent, fraude dans les transports en commun, etc.). La confrontation à la justice est, à son tour, un autre moment de confrontations avec la discrimination raciste : celle de notre système judiciaire. «Nous sommes face à une justice, résume le criminologue Sébastien Roché, qui concentre son énergie à condamner des jeunes d’origine étrangère » [[Cité dans Anais Moutot, L’immigration responsable de la délinquance ?, http://presumeinnocent.com/objections/limmigration-responsable-de-la-delinquance/, consulté le 24-12-2014.]].

Après de longue année de négation, les données de la recherche sont désormais suffisantes pour attester d’une discrimination raciste systémique impactant violemment les trajectoires des étrangers en France mais aussi les français issus de l’immigration postcoloniale.

La non prise en compte de cette question sociale majeure par les programmes des différentes organisations de « gauche » ou sa relégation à une place secondaire est explicative du décalage grandissant entre les classes populaires et ces organisations. Le résultat dans les urnes a été nettement palpable aux dernières municipales.

Classe, race, sexe et hôpital psychiatrique

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Ma préoccupation sur les effets en « maladie mentale » des inégalités sociales et discriminations racistes et sexistes est issue d’un constat récurrent lors de conférences dans les quartiers populaires. À chaque fois que j’abordais la question des conséquences des discriminations subies sur les trajectoires et que je citais parmi de nombreuses autres (repli sur soi, intégration du stigmate, violence sur soi, etc.), la « maladie mentale », le débat tendait à se focaliser sur ces dernières. À l’issue du débat, systématiquement des personnes venaient me faire part de leur vécu personnel en la matière (un parent, un ami, un voisin, etc.). Cette présence récurrente du thème était en dissonance avec le silence politique, médiatique, de la recherche sur cette question. La violence des discriminations subies conduit à des fragilisations mentales destructrices conduisant fréquemment à l’hôpital psychiatrique. Cette conclusion est une banalité pour les habitants des quartiers populaires.

Le facteur « classe sociale » peut s’approcher par le biais de ce qui est appelé « souffrance psychique d’origine sociale » pour la distinguer « d’une perspective étiologique ou causaliste de nature médicale » [[Jean Furtos, Les effets cliniques de la souffrance psychique d’origine sociale », Souffrance et société, Mental’idée, N° 11, p. 24.]]. Les processus de paupérisation et de précarisation qui depuis plus de trois décennies diffusent une insécurité sociale dans les classes et quartiers populaires ne se traduisent pas seulement en baisse du niveau de vie ou en accès plus difficile aux biens et services, mais également en effets psychique. Le psychiatre des hôpitaux et directeur scientifique de l’observatoire national des pratiques de santé mentale, Jean Furtos, décrit ces effets comme suit :

Pourquoi « souffrance »? Parce qu’il s’agit d’un mot de sens commun qui n’a pas besoin d’être défini et qui ne se déduit pas d’une localisation anatomique, comme la douleur organique d’une rage de dents ou d’un rhumatisme chronique ; il s’agit d’une douleur d’existence, d’une souffrance qui peut certes accompagner une douleur organique mais aussi l’humiliation, le mépris social, ou pire l’indifférence. Cette souffrance est « psychique » parce qu’elle est soumise au travail psychique qui peut être sidéré, comme dans le traumatisme traumatisant, ou plus ou moins élaboré[[Ibid, p. 24.]].

Le facteur « race » laisse apparaître des effets aussi destructeurs sur la santé mentale des racisés. Le constat d’une surreprésentation de la psychose pour les populations issues de l’immigration est établi par plusieurs études épidémiologiques. Ainsi l’étude du docteur Ali Amad et de son équipe de recherche sur le département du Nord publiée en 2013 permet par de « valider l’existence du sur-risque de schizophrénie pour les populations immigrées en France, et leurs descendants » [[Edouard Leaune et Halima Zeroug-Vial, Psychose et migration : entre clinique, épidémiologie et politique, Rhizome, n° 52, juin 2014, p. 14.]]. Ce sur-risque est mesuré au moins jusqu’aux petits-enfants d’immigrés[[Ali Amad, Dewi Guardia, Julia Salleron, Pierre Thomas, Jean-Luc Roelandt et Guillaume Vaiva, Increased prevalence of psychotic disorders among third-generation migrants : Results from the French Mental Health in General Population survey, Schizophrenia Research, volume 147, juin 2013.]]. Les explications dominantes de ce constat qui pendant longtemps se sont centrées sur des explications à tendances biologistes et culturalistes s’orientent désormais de plus en plus vers la prise en compte des inégalités et des discriminations :

L’insuffisance des explications génétiques ou neurodéveloppementales (rôle des virus neurotropes, des troubles obstétricaux, du déficit en vitamine D notamment) avancées à la fin du XXème siècle associée au manque de pertinence de la thèse de l’erreur diagnostique due à une mécompréhension transculturelle ont amené la communauté scientifique à se pencher plus en détail sur les causes sociales. Différentes études ont ainsi porté sur le rôle de « l’adversité sociale » (social adversity), du sentiment « d’échec social » (social defeat) ou de la discrimination. La conjonction de facteurs psychosociaux défavorisant (isolement, chômage, exclusion, discrimination) vulnérabiliserait les personnes à l’égard de phénomènes pré-psychotiques puis psychotiques en cas de pérennisation de l’état d’adversité [[Edouard Leaune et Halima Zeroug-Vial, Psychose et migration : entre clinique, épidémiologie et politique, op.cit., p. 14.]].

Les discriminations sexistes ont des conséquences tout autant dramatiques. Ici aussi les explications biologistes tendent à masquer l’ampleur des violences sociales subies productrices d’une « vulnérabilité sociale ». Les témoignages de 25 femmes salariées recueillies par Nadine Jasmin fait apparaître les conséquences suivantes des violences quotidiennes subies au travail et à l’extérieur de l’entreprise : « perte de confiance en soi, détresse, souffrance, isolement, repli, avec leur cortège de symptômes et de conséquences psychosomatiques. Tout aussi graves : la démotivation, le doute, la défiance, l’écœurement, la blessure morale » [[Nadine Jasmin, Exploitées. Le travail invisible des femmes, Eclats de Voix, Paris, 2009, p. 145. ]]
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Quelques chiffres complémentaires non exhaustifs permettent d’approcher l’ampleur de la violence systémique subie par les femmes : 65 % des tentatives de suicide[[État des lieux du suicide en Fance, Ministre des Affaires sociales et des droits des femmes,http://www.sante.gouv.fr/etat-des-l…. , consulté le 2 Janvier 2015]]. sont le fait de femmes pour un nombre total estimé entre 176 000 et 200 000 ; dans neuf cas sur dix l’anorexie et la boulimie concernent des femmes[[Nathalie Godard et Bruno Falissard, Troubles des conduites alimentaires : un adolescent sur quatre concerné, La santé de l’homme, n° 394, mars-avril 2008, p. 16.]] pour un total de 30 000 à 40 000 personnes par an pour la première et 220 000 pour la seconde[[La lettre du réseau de Santé-Ville-Hôpital en addictologie, n° 27, mai 2013, p. 1.]]; une femme sur cinq contre un homme sur dix sont sujet à la dépression[[La dépression en France (2005-2010), La santé de l’homme, n° 421, septembre-octobre 2012, p. 43. ]]; etc.

Pour être diffuse, la violence systémique des inégalités de classes et des discriminations sexistes et racistes n’en est pas moins une violence destructrice s’attaquant à l’intégrité physique et psychique. Frantz Fanon a démontré depuis bien longtemps déjà le mécanisme de cette violence subie à propos du racisme. Sans la prise de conscience des causes sociales et de la violence systémique subie, le dominé intériorise la responsabilité de sa situation : « S’il y a complexe d’infériorité, c’est à la suite d’un double processus : -économique d’abord ; – par intériorisation ou, mieux épidermisation de cette infériorité ensuite » [[Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Seuil, Paris, 1952, p. 8. ]]. Le même auteur a également souligné la tendance à retourner contre soi la violence lorsque qu’aucun horizon d’émancipation collectif n’est disponible. Parlant de la violence coloniale et de ses effets sur le colonisé, il précise : « Cette agressivité sédimentée dans ses muscles, le colonisé va la manifester d’abord contre les siens. C’est la période où les nègres se bouffent entre eux … » [[Frantz Fanon, Les damnés de la terre, La Découverte, Paris, 2002, p. 53. ]].

La violence subie a besoin d’un canal d’expression politique collectif faute de quoi, elle se transforme en violence autodestructrice. Nous n’avons pas le choix : l’auto-organisation ou la destruction, l’émancipation collective ou la barbarie.

Source : Investig’Action – > Analyses et témoignages > Société > Les dégâts invisibilisés des inégalités sociales et des discriminations

http://michelcollon.info/Les-degats-invisibilises-des.html

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NOAM CHOMSKY, COMPRENDRE LES ÉVÉNEMENTS DU 11 SEPTEMBRE 2001 AUX ÉTATS-UNIS

Noam Chomsky, décembre 2001. Traduction : Le Monde Diplomatique

« Qu’est-ce que le terrorisme ? » , interroge Noam Chomsky. Il poursuit : «Dans les manuels militaires américains, on définit comme terreur l’utilisation calculée, à des fins politiques ou religieuses, de la violence, de la menace de violence, de l’intimidation, de la coercition ou de la peur. Le problème d’une telle définition, c’est qu’elle recouvre assez exactement ce que les États-Unis ont appelé la guerre de basse intensité, en revendiquant ce genre de pratique. D’ailleurs, en décembre 1987, quand l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution contre le terrorisme, un pays s’est abstenu, le Honduras, et deux autres s’y sont opposés, les États-Unis et Israël. Pourquoi l’ont-ils fait ? En raison d’un paragraphe de la résolution qui indiquait qu’il ne s’agissait pas de remettre en cause le droit des peuples à lutter contre un régime colonialiste ou contre une occupation militaire. »

Ces propos peuvent-ils nous aider à comprendre ce qui s’est passé en France ces jours derniers ? Poursuivons donc avec Noam Chomsky…

Michel Peyret

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TERRORISME, L’ARME DES PUISSANTS

par Noam Chomsky

écrit en 2001

Pourquoi, s’interrogeait le président Bush, des gens «peuvent nous détester» , alors que «nous sommes si bons»? Les dirigeants américains n’ont pas toujours conscience des effets à moyen et à long terme de leur détermination à toujours l’emporter contre n’importe quel adversaire. Et leurs exploits d’hier peuvent se payer demain d’un prix très lourd. M. Ben Laden fut le produit de la victoire des Etats-Unis contre les Soviétiques en Afghanistan ; quel sera le coût de leur nouveau triomphe dans ce pays?

Il nous faut partir de deux postulats. D’abord que les événements du 11 septembre 2001 constituent une atrocité épouvantable, probablement la perte de vies humaines instantanée la plus importante de l’histoire, guerres mises à part. Le second postulat est que notre objectif devrait être de réduire le risque de récidive de tels attentats, que nous en soyons les victimes ou que ce soit quelqu’un d’autre qui les subisse. Si vous n’acceptez pas ces deux points de départ, ce qui va suivre ne vous concerne pas. Si vous les acceptez, bien d’autres questions surgissent.

Commençons par la situation en Afghanistan. Il y aurait en Afghanistan plusieurs millions de personnes menacées de famine. C’était déjà vrai avant les attentats; elles survivaient grâce à l’aide internationale. Le 16 septembre, les Etats-Unis exigèrent pourtant du Pakistan l’arrêt des convois de camions qui acheminaient de la nourriture et d’autres produits de première nécessité à la population afghane. Cette décision n’a guère provoqué de réaction en Occident. Le retrait de certains personnels humanitaires a rendu l’assistance plus problématique encore. Une semaine après le début des bombardements, les Nations unies estimaient que l’approche de l’hiver rendrait impossibles les acheminements, déjà ramenés à la portion congrue par les raids de l’aviation américaine.

Quand des organisations humanitaires civiles ou religieuses et le rapporteur de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont demandé un arrêt des bombardements, cette information n’a même pas été rapportée par le New York Times; le Boston Globe y a consacré une ligne, mais dans le corps d’un article traitant d’autre chose, la situation au Cachemire. En octobre dernier, la civilisation occidentale s’était ainsi résignée au risque de voir mourir des centaines de milliers d’Afghans. Au même moment, le chef de ladite civilisation faisait savoir qu’il ne daignerait répondre ni aux propositions afghanes de négociation sur la question de la livraison de M. Oussama Ben Laden ni à l’exigence d’une preuve permettant de fonder une éventuelle décision d’extradition. Seule serait acceptée une capitulation sans condition.

Mais revenons au 11 septembre. Nul crime, rien, ne fut plus meurtrier dans l’histoire – ou alors sur une durée plus longue. Au demeurant, les armes ont, cette fois, visé une cible inhabituelle: les Etats-Unis. L’analogie souvent évoquée avec Pearl Harbor est inappropriée. En 1941, l’armée nippone a bombardé des bases militaires dans deux colonies dont les Etats-Unis s’étaient emparés dans des conditions peu recommandables; les Japonais ne se sont pas attaqués au territoire américain lui-même.

Depuis près de deux cents ans, nous, Américains, nous avons expulsé ou exterminé des populations indigènes, c’est-à-dire des millions de personnes, conquis la moitié du Mexique, saccagé les régions des Caraïbes et d’Amérique centrale, envahi Haïti et les Philippines – tuant 100 000 Philippins à cette occasion. Puis, après la seconde guerre mondiale, nous avons étendu notre emprise sur le monde de la manière qu’on connaît. Mais, presque toujours, c’était nous qui tuions, et le combat se déroulait en dehors de notre territoire national.

Or on le constate dès qu’on est interrogé, par exemple, sur l’Armée républicaine irlandaise (IRA) et le terrorisme : les questions des journalistes sont fort différentes selon qu’ils exercent sur une rive ou l’autre de la mer d’Irlande. En général, la planète apparaît sous un autre jour selon qu’on tient depuis longtemps le fouet ou selon qu’on en a subi les coups pendant des siècles. Peut-être est-ce pour cela au fond que le reste du monde, tout en se montrant uniformément horrifié par le sort des victimes du 11 septembre, n’a pas réagi de la même manière que nous aux attentats de New York et de Washington.

Pour comprendre les événements du 11 septembre, il faut distinguer d’une part les exécutants du crime, d’autre part le réservoir de compréhension dont ce crime a bénéficié, y compris chez ceux qui s’y opposaient. Les exécutants ? En supposant qu’il s’agisse du réseau Ben Laden, nul n’en sait davantage sur la genèse de ce groupe fondamentaliste que la CIA et ses associés : ils l’ont encouragé à sa naissance. M. Zbigniew Brzezinski, directeur pour la sécurité nationale de l’administration Carter, s’est félicité du «piège» tendu aux Soviétiques dès 1978 et consistant, au moyen d’attaques des moudjahidins (organisés, armés et entraînés par la CIA) contre le régime de Kaboul, à attirer ces Soviétiques sur le territoire afghan à la fin de l’année suivante (1).

Ce n’est qu’après 1990 et l’installation de bases américaines permanentes en Arabie saoudite, sur une terre sacrée pour l’islam, que ces combattants se sont retournés contre les Etats-Unis.

Appui à des régimes brutaux

Si l’on veut maintenant expliquer le réservoir de sympathie dont disposent les réseaux Ben Laden, y compris au sein des couches dirigeantes des pays du Sud, il faut partir de la colère que provoque le soutien des Etats-Unis à toutes sortes de régimes autoritaires ou dictatoriaux, il faut se souvenir de la politique américaine qui a détruit la société irakienne tout en consolidant le régime de M. Saddam Hussein, il faut ne pas oublier le soutien de Washington à l’occupation israélienne de territoires palestiniens depuis 1967.

Au moment où les éditoriaux du New York Times suggèrent qu’«ils» nous détestent parce que nous défendons le capitalisme, la démocratie, les droits individuels, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, le Wall Street Journal, mieux informé, explique après avoir interrogé des banquiers et des cadres supérieurs non occidentaux qu’ils «nous» détestent parce que nous avons entravé la démocratie et le développement économique. Et appuyé des régimes brutaux, voire terroristes.

Dans les cercles dirigeants de l’Occident, la guerre contre le terrorisme a été présentée à l’égal d’une «lutte menée contre un cancer disséminé par des barbares». Mais ces mots et cette priorité ne datent pas d’aujourd’hui. Il y a vingt ans, le président Ronald Reagan et son secrétaire d’Etat, M. Alexander Haig, les énonçaient déjà. Et, pour mener ce combat contre les adversaires dépravés de la civilisation, le gouvernement américain mit alors en place un réseau terroriste international d’une ampleur sans précédent. Si ce réseau entreprit des atrocités sans nombre d’un bout à l’autre de la planète, il réserva l’essentiel de ses efforts à l’Amérique latine.

Un cas, celui du Nicaragua, n’est pas discutable: il a en effet été tranché par la Cour internationale de justice de La Haye et par les Nations unies. Interrogez-vous pour savoir combien de fois ce précédent indiscutable d’une action terroriste à laquelle un Etat de droit a voulu répondre avec les moyens du droit a été évoqué par les commentateurs dominants. Il s’agissait pourtant d’un précédent encore plus extrême que les attentats du 11 septembre: la guerre de l’administration Reagan contre le Nicaragua provoqua 57 000 victimes, dont 29 000 morts, et la ruine d’un pays, peut-être de manière irréversible (lire «Occasion perdue au Nicaragua» et «“Contras” et “compas”, une même amertume).

À l’époque, le Nicaragua avait réagi. Non pas en faisant exploser des bombes à Washington, mais en saisissant la Cour de justice internationale. Elle trancha, le 27 juin 1986, dans le sens des autorités de Managua, condamnant l’ «emploi illégal de la force» par les Etats-Unis (qui avaient miné les ports du Nicaragua) et mandant Washington de mettre fin au crime, sans oublier de payer des dommages et intérêts importants. Les Etats-Unis répliquèrent qu’ils ne se plieraient pas au jugement et qu’ils ne reconnaîtraient plus la juridiction de la Cour.

Le Nicaragua demanda alors au Conseil de sécurité des Nations unies l’adoption d’une résolution réclamant que tous les Etats respectent le droit international. Nul n’était cité en particulier, mais chacun avait compris. Les Etats-Unis opposèrent leur veto à cette résolution. À ce jour, ils sont ainsi le seul Etat qui ait été à la fois condamné par la Cour de justice internationale et qui se soit opposé à une résolution réclamant… le respect du droit international. Puis le Nicaragua se tourna vers l’Assemblée générale des Nations unies. La résolution qu’il proposa ne rencontra que trois oppositions : les Etats-Unis, Israël et El Salvador. L’année suivante, le Nicaragua réclama le vote de la même résolution. Cette fois, seul Israël soutint la cause de l’administration Reagan. À ce stade, le Nicaragua ne disposait plus d’aucun moyen de droit. Tous avaient échoué dans un monde régi par la force. Ce précédent ne fait aucun doute. Combien de fois en avons-nous parlé à l’université, dans les journaux?

Cette histoire révèle plusieurs choses. D’abord, que le terrorisme, cela marche. La violence aussi. Ensuite, qu’on a tort de penser que le terrorisme serait l’instrument des faibles. Comme la plupart des armes meurtrières, le terrorisme est surtout l’arme des puissants. Quand on prétend le contraire, c’est uniquement parce que les puissants contrôlent également les appareils idéologiques et culturels qui permettent que leur terreur passe pour autre chose que de la terreur.

L’un des moyens les plus courants dont ils disposent pour parvenir à un tel résultat est de faire disparaître la mémoire des événements dérangeants; ainsi plus personne ne s’en souvient. Au demeurant, le pouvoir de la propagande et des doctrines américaines est tel qu’il s’impose y compris à ses victimes. Allez en Argentine et vous devrez rappeler ce que je viens d’évoquer: «Ah, oui, mais nous avions oublié!»

Le Nicaragua, Haïti et le Guatemala sont les trois pays les plus pauvres d’Amérique latine. Ils comptent aussi au nombre de ceux dans lesquels les Etats-Unis sont intervenus militairement. La coïncidence n’est pas forcément accidentelle. Or tout cela eut lieu dans un climat idéologique marqué par les proclamations enthousiastes des intellectuels occidentaux. Il y a quelques années, l’autocongratulation faisait fureur: fin de l’histoire, nouvel ordre mondial, Etat de droit, ingérence humanitaire, etc.

C’était monnaie courante alors même que nous laissions se commettre un chapelet de tueries. Pis, nous y contribuions de façon active. Mais qui en parlait? L’un des exploits de la civilisation occidentale, c’est peut-être de rendre possible ce genre d’inconséquences dans une société libre. Un Etat totalitaire ne dispose pas de ce don-là.

Qu’est-ce que le terrorisme? Dans les manuels militaires américains, on définit comme terreur l’utilisation calculée, à des fins politiques ou religieuses, de la violence, de la menace de violence, de l’intimidation, de la coercition ou de la peur. Le problème d’une telle définition, c’est qu’elle recouvre assez exactement ce que les Etats-Unis ont appelé la guerre de basse intensité, en revendiquant ce genre de pratique. D’ailleurs, en décembre 1987, quand l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution contre le terrorisme, un pays s’est abstenu, le Honduras, et deux autres s’y sont opposés, les Etats-Unis et Israël. Pourquoi l’ont-ils fait? En raison d’un paragraphe de la résolution qui indiquait qu’il ne s’agissait pas de remettre en cause le droit des peuples à lutter contre un régime colonialiste ou contre une occupation militaire.

Or, à l’époque, l’Afrique du Sud était alliée des Etats-Unis. Outre des attaques contre ses voisins (Namibie, Angola, etc.), lesquelles ont provoqué la mort de centaines de milliers de personnes et occasionné des destructions estimées à 60 milliards de dollars, le régime d’apartheid de Pretoria affrontait à l’intérieur une force qualifiée de«terroriste», l’African National Congress (ANC). Quant à Israël, il occupait illégalement certains territoires palestiniens depuis 1967, d’autres au Liban depuis 1978, guerroyant dans le sud de ce pays contre une force qualifiée par lui et par les Etats-Unis de «terroriste», le Hezbollah. Dans les analyses habituelles du terrorisme, ce genre d’information ou de rappel n’est pas courant. Pour que les analyses et les articles de presse soient jugés respectables, il vaut mieux en effet qu’ils se situent du bon côté, c’est-à-dire celui des bras les mieux armés.

Dans les années 1990, c’est en Colombie que les pires atteintes aux droits humains ont été observées. Ce pays a été le principal destinataire de l’aide militaire américaine, à l’exception d’Israël et de l’Egypte, qui constituent des cas à part. Jusqu’en 1999, derrière ces pays, la première place revenait à la Turquie, à qui les Etats-Unis ont livré une quantité croissante d’armes depuis 1984. Pourquoi à partir de cette année-là? Non pas que ce pays membre de l’OTAN devait faire face à l’Union soviétique, déjà en voie de désintégration à l’époque, mais afin qu’il puisse conduire la guerre terroriste qu’il venait d’entreprendre contre les Kurdes.

En 1997, l’aide militaire américaine à la Turquie a dépassé celle que ce pays avait obtenue pendant la totalité de la période 1950-1983, celle de la guerre froide. Résultats des opérations militaires : 2 à 3 millions de réfugiés, des dizaines de milliers de victimes, 350 villes et villages détruits. À mesure que la répression s’intensifiait, les Etats-Unis continuaient de fournir près de 80 % des armes employées par les militaires turcs, accélérant même le rythme de leurs livraisons. La tendance fut renversée en 1999. La terreur militaire, naturellement qualifiée de«contre-terreur» par les autorités d’Ankara, avait alors atteint ses objectifs. C’est presque toujours le cas quand la terreur est employée par ses principaux utilisateurs, les puissances en place.

Avec la Turquie, les Etats-Unis n’eurent pas affaire à une ingrate. Washington lui avait livré des F-16 pour bombarder sa propre population, Ankara les utilisa en 1999 pour bombarder la Serbie. Puis, quelques jours après le 11 septembre dernier, le premier ministre turc, M. Bülent Ecevit, faisait savoir que son pays participerait avec enthousiasme à la coalition américaine contre le réseau Ben Laden. Il expliqua à cette occasion que la Turquie avait contracté une dette de gratitude à l’égard des Etats-Unis, laquelle remontait à sa propre «guerre antiterroriste» et au soutien inégalé que Washington y avait alors apporté.

Réduire le niveau de terreur

Certes, d’autres pays avaient soutenu la guerre d’Ankara contre les Kurdes, mais aucun avec autant de zèle et d’efficacité que les Etats-Unis. Ce soutien bénéficia du silence ou – le mot est peut-être plus juste – de la servilité des classes éduquées américaines. Car elles n’ignoraient pas ce qui se passait. Les Etats-Unis sont un pays libre après tout ; les rapports des organisations humanitaires sur la situation au Kurdistan appartenaient au domaine public. À l’époque, nous avons donc choisi de contribuer aux atrocités.

L’actuelle coalition contre le terrorisme comporte d’autres recrues de choix. Le Christian Science Monitor, sans doute l’un des meilleurs journaux pour ce qui concerne le traitement de l’actualité internationale, a ainsi confié que certains peuples qui n’aimaient guère les Etats-Unis commençaient à les respecter davantage, particulièrement heureux de les voir conduire une guerre contre le terrorisme. Le journaliste, pourtant spécialiste de l’Afrique, citait comme principal exemple de ce retournement le cas de l’Algérie. Il devait donc savoir que l’Algérie conduit une guerre terroriste contre son propre peuple. La Russie, qui mène une guerre terroriste en Tchétchénie, et la Chine, auteur d’atrocités contre ceux qu’elle qualifie de sécessionnistes musulmans, ont également rallié la cause américaine.

Soit, mais que faire dans la situation présente ? Un radical aussi extrémiste que le pape suggère qu’on recherche les coupables du crime du 11 septembre, puis qu’on les juge. Mais les Etats-Unis ne souhaitent pas avoir recours aux formes judiciaires normales, ils préfèrent ne présenter aucune preuve et ils s’opposent à l’existence d’une juridiction internationale. Mieux, quand Haïti réclame l’extradition de M. Emmanuel Constant, jugé responsable de la mort de milliers de personnes après le coup d’Etat qui a renversé le président Jean-Bertrand Aristide, le 30 septembre 1991, et présente des preuves de sa culpabilité, la demande n’a aucun effet à Washington. Elle n’est même pas l’objet d’un débat quelconque.

Lutter contre le terrorisme impose de réduire le niveau de la terreur, pas de l’accroître. Quand l’IRA commet un attentat à Londres, les Britanniques ne détruisent ni Boston, ville dans laquelle l’IRA compte de nombreux soutiens, ni Belfast. Ils cherchent les coupables, puis ils les jugent. Un moyen de réduire le niveau de terreur serait de cesser d’y contribuer soi-même. Puis de réfléchir aux orientations politiques qui ont créé un réservoir de soutien dont ont ensuite profité les commanditaires de l’attentat. Ces dernières semaines, la prise de conscience par l’opinion américaine de toutes sortes de réalités internationales, dont seules les élites soupçonnaient auparavant l’existence, constitue peut-être un pas dans cette direction.

Noam Chomsky, décembre 2001. Traduction : Le Monde Diplomatique

Sources «Le Monde Diplomatique»
http://www.monde-diplomatique.fr/2001/12/CHOMSKY/8234

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SOLIDARITÉ ALGÉRIENNE AVEC LES LUTTES DU PEUPLE GREC

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SOLIDARITÉ ALGÉRIENNE AVEC SYRIZA POUR LE SUCCÈS DE SYRIZA ET DES LUTTES DU PEUPLE GREC CONTRE LE DÉSASTRE NÉOLIBÉRAL

L’appel suivant a recueilli une trentaine de premières adhésions de personnalités du monde culturel, politique, universitaire, médiatique et associatif algérien.

Les signataires appellent à une large diffusion de cet appel contre les politiques d’austérité que les responsables de la crise économique aggravée cherchent à faire supporter aux peuples et aux couches les plus défavorisées.

Les nouvelles listes de signatures sont à envoyer à l’adresse électronique suivante :
adomichelak@gmail.com
Madame Akiki Papadomichelaki, cadre de SYRIZA
& Correspondante des quotidiens AVGHI et ISKRA, ainsi que de la radio TO KOKKINO

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Une importante bataille électorale et politique, aux enjeux nationaux et internationaux multiples, va s’ouvrir en Grèce avant et après le 25 janvier.

L’aggravation d’une politique d’austérité meurtrière ne concerne pas seulement le peuple grec qui rejette la politique de misère et de subordination nationale aux diktats de la « Troïka » (FMI, Commission de Bruxelles et Banque Centrale européenne). Les récentes évolutions économiques et géopolitiques mondiales et régionales confirment que des dégradations, encore pires, menacent les peuples s’ils ne s’opposent pas efficacement aux politiques qui tendent littéralement à les écraser.

Cette bataille touche aux intérêts vitaux communs des travailleurs, des sans-emploi, des peuples et des Etats tout autour de la Méditerranée. Menacés dans leur souveraineté et leurs intérêts légitimes par les menées hégémonistes de l’OTAN, ces peuples affrontent dans leur quotidien, les assauts, de plus en plus violents, du néolibéralisme mondial contre leur niveau de vie, leurs acquis sociaux, leurs droits et libertés démocratiques, leurs aspirations à la paix et à la sécurité.

Les forces mobilisées autour de SYRIZA, apportent à tous la preuve qu’il est non seulement nécessaire mais surtout possible de mettre en échec le pillage des ressources nationales et les chantages réactionnaires. Ces menées et pressions visent à faire supporter aux peuples les conséquences désastreuses de la crise structurelle du capitalisme financier néolibéral. Ce qui effraie le plus ce dernier qui prétend dicter le vote des citoyens contre leurs propres intérêts légitimes, c’est que les luttes animées par la gauche radicale grecque proposent un programme alternatif -sérieux, constructif et mobilisateur- au chaos destructeur des politiques d’AUSTERITE. Ce programme et ces luttes ouvrent de nouvelles perspectives aux peuples et à leurs résistances, en Europe et partout dans le monde.

Ces luttes sociales et politiques en Grèce méritent notre solidarité active, sous toutes formes d’initiatives possibles. Tout comme la résistance nationale des peuples dominés, particulièrement celle du peuple palestinien pour le droit à la reconnaissance internationale de son Etat, ainsi que les luttes pour le respect des droits et de la dignité des immigrés et des réfugiés partout dans le monde. Ceci commence par donner une information appropriée sur les enjeux de cette bataille, face aux méga-mensonges et pilonnages médiatiques.

Soyons aux côtés des forces de gauche en Grèce contre la paupérisation et l’hégémonisme. C’est ainsi servir la cause commune des peuples, y compris le peuple algérien, pour faire reculer l’oppression et l’exploitation.

Le 7 janvier 2015.


LES PREMIERS SIGNATAIRES

Mohammed HARBI. Historien du mouvement national ;
Sadek HADJERES. Ex-dirigeant communiste (1952-90) ;
Daho DJERBAL. Universitaire historien ;
Abdelkrim ELAIDI. Professeur universitaire ;
Lemnouer MERROUCHE. Historien ;
Abdelaziz SAOUDI. Journaliste (blog algerie.infos-saoudi) ;
Omar BENDERRA. Militant associatif ;
Amel Dahane FARDEHEB. Doctorante historienne ;
Aïssa KADRI. Professeur émérite ;
Messaoud BENYOUCEF, écrivain
Ahmed MAHI. Dr-ing. Ancien membre direction du PAGS ;
Hocine BELALLOUFI. Militant associatif et analyste géopolitique ;
Youcef TOUNSI. Consultant, écrivain ;
Farid CHERBAL. Maître de conférences et de recherche à l’USTHB ;
Noureddine SAADI. Universitaire et écrivain ;
Saci BELGAT. Universitaire et militant associatif ;
Arezki METREF. Ecrivain-journaliste ;
Aziz BENSADEK. Militant pour une alternative démocratique et sociale ;
Mustapha GHOBRINI. Militant MDS ;
Mohamed LOUNIS. Docteur en toxicologie, expert en santé-environnement ;
Khider LOUELH. Auteur et militant associatif ;
Boukkhalfa BENABDESSLAM. Docteur en médecine ;
Mokhtar CHAALAL. Ecrivain ;
Salah BOUDI. Militant associatif ;
Saïd BOUAMAMA. Sociologue, écrivain et militant associatif ;
Ahmed DAHMANI. Enseignant-chercheur ;
Madjid BENCHIKH. Professeur émérite en Droit, ancien Doyen de la Faculté de Droit, ancien président d’Amnesty International Algérie ;
Fernand GALLINARI. Universitaire et ingénieur de projet ;
Ali BENSAAD. Universitaire ;
HOURRIYA. Militante associative ;
Allal TEWFIQ. Militant associatif ;
Omar BOURABA. Militant associatif ACDA ;
Samir GHEZLAOUI. Doctorant en communication et Journaliste ;
Aziz CHOUAKI. Ecrivain, metteur en scène ;
Ali GUENOUN. Historien ;
Belaid ABANE. Professeur en médicine, écrivain ;
Azedine LATEB. Doctorant
Horri Djelloul Naceur, Dr en médecine, ancien membre de la direction du PAGS
Nadir Boumaza, professeur émérite des Universités