LES TREIZE DE KASSERINE

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LES 13 DE KASSERINE

publié par Saoudi Abdelaziz, blog algerieinfos

le 19 février 2016

sources Mediapart

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Khaled Fakraoui, 35 ans, diplômé en droit, chômeur en grève de la faim. Photo Eros Sana

Sous le titre « En Tunisie, «du travail ou la mort» », Mediapart publie hier un reportage d’Eros Sana réalisé à Kasserine auprès des 13 chômeurs grévistes de la faim dont elle fait le portrait illustré de photos. « Il n’arrêteront pas tant qu’ils n’auront pas obtenu un travail. Pour démontrer leur détermination, ils se sont cousu la bouche »

Portraits

Khaled Fakraoui, 35 ans, diplômé en droit, chômeur en grève de la faim.
Il est le leader des Treize. En 2011, il était de toutes les manifestations et protestations durant la révolution qui a mené à la chute de Ben Ali. Il s’est déplacé jusqu’à Tunis et a manifesté pour faire tomber le dictateur.
Mais aujourd’hui, il est amer: «Nous, les chômeurs, avons lancé cette révolution, pour lutter contre la dictature et pour que nous ne soyons plus au chômage. Il y a encore plus de chômage et quand nous manifestons, le pouvoir nous qualifie de terroristes.»
À l’instar de ses douze compagnons, la grève de la faim qu’il a entamée le 29 janvier ne lui a pas enlevé sa détermination. «Diplômés ou non diplômés, nous avons le droit à un travail, nous avons le droit à la dignité humaine (…). Nous sommes treize individus, mais un seul corps, nous aurons un travail ensemble, ou nous mourrons ensemble ! Un travail, ou la mort!»

Wajdi Khardaoui, 27 ans, sans diplôme, est le porte-parole charismatique du mouvement des chômeurs de Kasserine.
Au moment où il est pris en photo, un camarade de lutte lui tend une baguette et lui dit : «Comme ça, on relance à la fois les émeutes du pain et la révolution!»
Wajdi était trop jeune pour avoir participé aux émeutes de 1984 quand Kasserine se soulevait contre la décision du pouvoir d’augmenter le prix du pain affamant les plus pauvres des Tunisiens.
Mais en décembre 2010 et janvier 2011, alors que cette partie de la Tunisie se soulève et déclenche la “Révolution de Jasmin”, Wajdi est de toutes les manifestations. Certains de ses amis tomberont sous les balles de la police et deviendront «martyrs de la révolution».

De gauche à droite et de haut en bas:
Icham Bouazizi, 29 ans, chômeur en grève de la faim.
Malek Bouazizi, 28 ans, diplômé en mathématiques, chômeur en grève de la faim.
Mohassen Moulay, 35 ans, trois enfants, chômeur en grève de la faim.
Mouncef Farkaoui, 22 ans, deux enfants, chômeur en grève de la faim. Il est le plus jeune des treize.

Khaled montre les photos qu’il a gardées du jour où il avait la bouche cousue pour signifier sa détermination à ne pas s’alimenter. Il a dû retirer les fils de ses lèvres lorsque sa mère est venue lui rendre visite. Elle n’a pas supporté de le voir dans un tel état. Aujourd’hui, tous ont de nouveau la bouche cousue.

Rebeh Fezai, 28 ans, porte une minerve sous son voile. Elle est tombée durant une manifestation, aggravant la maladie génétique dont elle souffre et qu’elle ne peut soigner convenablement faute d’argent. Diplômée en biologie, elle ne trouve pas de travail et ne peut acheter le matériel orthopédique indispensable à son état de santé. En dépit de ça, elle est l’une des premières à avoir occupé la wilaya car elle exige «la dignité pour chaque femme de Tunisie qui, après avoir étudié, doit être considérée et travailler».

De gauche à droite et de haut en bas. Hocine Allagui, 25 ans, diplômé de français, chômeur en grève de la faim.
Fayçal Bouazizi, 41 ans et cinq enfants, chômeur en grève de la faim.
Lamine Derbeli, 46 ans, marié, diplômé d’une maîtrise de mathématiques, chômeur en grève de la faim.
Jamel Bouazizi, 28 ans, chômeur en grève de la faim. Malgré sa licence en anglais, il n’est convaincu que par une chose : soit il trouve un travail, soit «il quitte ce pays par tous les moyens».
La mort de Ridha Yahyaoui lui a fait prendre conscience que les seules solutions qui lui restaient étaient «la lutte, le départ ou la mort».

Manaem Tarchi a 30 ans et a obtenu un diplôme en droit foncier en 2009. Depuis, elle ne survit que grâce à des petits boulots.

Icham Lebaoui, 36 ans, sans diplôme, chômeur en grève de la faim. Depuis le début du mouvement, il a essayé à deux reprises de se suicider par pendaison. Deux fois, ses camarades lui sont venus en aide.
Taher Labbaoui, 31 ans, chômeur en grève de la faim.
Mohassen Khadraoui, 35 ans, trois enfants, chômeur en grève de la faim.
Fatih Labraoui, 43 ans, trois enfants, chômeur en grève de la faim. Le 9 février, désespéré, il a tenté de se pendre à l’immense drapeau tunisien qui trônait sur l’un des immeubles de la wilaya. Il ne sait plus comment nourrir sa famille.

Source : mediapart.fr

BACHAR AL-ASSAD N’EST PAS L’AVENIR DE LA SYRIE, IL EST L’UN SE SES « PRÉSENTS »

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Huffpostmaghreb

 le 24 novembre & le 19 décembre 2015

Mohamed Saadoune

pdf-3.jpg Bachar Al-Assad ne peut être l’avenir de la Syrie. Le propos, vieux de Laurent Fabius, ministre français des affaires étrangères, répété il y a trois jours en Afrique du Sud, sonne creux. Il n’est d’aucune utilité.

Sauf peut-être à essayer de masquer que la France et les autres pays occidentaux ont mené en Syrie une politique d’apprentis-sorciers dont l’effet boomerang se fait sentir et pousse une partie des opinions à se demander pourquoi « est-on allé se fourvoyer dans cette galère ».

Après les attentats de Daech à Paris, on continue à marteler – pour la forme probablement – qu’on ne s’est pas fourvoyé en faisant du « départ » de Bachar Al-Assad un « préalable » à la solution de la crise en Syrie.

C’est pourtant un discours creux. C’est une lapalissade, Bachar Al-Assad, celui qui a si mal compris qu’il pouvait se donner un destin de réformateur au lieu d’être le représentant d’une dictature aveugle, n’est pas l’avenir de la Syrie.

L’histoire l’a déjà condamné. Les Syriens, si leur pays continuera à exister et retrouvera un peu de sérénité, le décideront. Mais si le président syrien n’est pas « l’avenir de la Syrie », il est encore son présent. Cela dépasse largement sa petite personne qui s’est avérée, même en restant dans la logique d’un système autoritaire, particulièrement décevante.

L’histoire est dite

Le « jeune » Assad qui a « succédé » à son paternel n’a fait que du « vieux » et en pire car il n’a pas su percevoir – comme Saddam avant – les retournements des « amis ». Cela est valable pour l’ensemble des systèmes autoritaires arabes: seule une démocratisation sérieuse permettant de souder les liens entre l’Etat et la société pouvait conjurer l’impact des ingérences extérieures.

L’islamisme radical qui ne reconnait pas les « Etats-nations » étant le vecteur idéal des entreprises de déstabilisation grâce aux fonds des pays du Golfe et les fatwas que des cheikhs obscurs et obscurantistes émettent sur commande.

Sur des aspects fondamentaux, pour Bachar Al-Assad, l’histoire est dite. Même en mettant en exergue le rôle des ingérences extérieures, sa responsabilité est tellement lourde qu’il est difficile de croire qu’il puisse encore être un « avenir » de la Syrie. Mais continuer à faire de Bachar Al-Assad un préalable est hors-sujet.

Ce seront les Syriens qui le décideront. Aujourd’hui, Bachar Al-Assad est un des « présents », les autres étant ceux de Daech, d’une partie substantielle de la population syrienne en exil, des jeux des puissances.

Laurent Fabius, les saoudiens, les américains, les turcs ou les qataris, ont fait une erreur d’évaluation grave en tablant sur une chute rapide de Bachar Al-Assad. Dans le monde arabe, beaucoup ne croient pas à une erreur d’évaluation: on savait que Bachar ne tomberait pas mais que la Syrie, elle, pourrait s’effondrer et ouvrir la voie à la création de cantons « ethno-religieux » qui est au cœur du fameux du GMO.

Dans un article publié dans le Quotidien d’Oran (7 janvier 2013) nous relevions que la guerre en Syrie restera indécise jusqu’à ce qu’elle avale le pays morceau par morceau. L’ingérence étrangère sur fond de bataille géopolitique a fixé le pays dans la guerre au nom du « préalable » du départ du Bachar Al-Assad.

Le dépassement du régime dans un « après » démocratique – qui reste le seul horizon possible si tant est que la Syrie puisse un jour renaître dans ses actuelles frontières – est devenu une chimère, la guerre renforçant les positionnements sur des bases ethno-religieuses.

Un préalable inutile

Bachar Al-Assad même s’il voulait démissionner n’aurait pu le faire. Les siens attendaient de lui qu’il dise « non » à ceux qui voulaient son départ. Il a dit non. Il continue aujourd’hui à dire non.

« Il n’y a rien d’imprévisible dans le discours de Bachar Al-Assad d’hier. Ceux qui l’applaudissaient et les « chefs » militaires ont perdu de leur superbe, mais ils attendaient de lui qu’ils disent « non » à ceux qui réclament son départ, qu’ils soient syriens ou étrangers. Non pas par amour pour lui, ni par volonté de se sacrifier pour lui. Juste par conviction (fausse ou vraie cela ne compte pas beaucoup dans ces situations) que son départ serait une défaite qui ouvrirait le champ à des représailles à grande échelle.

Bachar Al Assad est devenu, paradoxalement, au bout de ses terrifiantes erreurs, leur assurance de pouvoir négocier leur statut et leur place dans une autre Syrie. Et plus les opposants et les pays étrangers réclament son départ comme un préalable et plus ils s’y attachent. On est dans le registre de la psychologie. Mais dans une guerre, c’est un aspect qui n’a rien de négligeable. »

Ce constat fait en janvier 2013 reste encore valable aujourd’hui. Mais le «préalable » n’est pas un présent. La Russie et l’Iran viennent de le réaffirmer avec force. La Syrie qui se reconnait pas dans Bachar Al-Assad ne l’acceptera pas non-plus. Bachar n’est pas pour eux l’avenir de la Syrie. Mais il est celui à travers lequel ils négocieront leur propre avenir.

L’ALGÉRIE A BIEN FAIT DE NE PAS REJOINDRE « L’OTAN SUNNITE » LANCÉ PAR RYAD!

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pdf-3.jpg Mohamed ,Saadoune

Huffpost Maghreb

le 16 décembre 2015

L’Algérie ne fait pas partie de la coalition « sunnite » de 34 pays musulmans menée par l’Arabie Saoudite pour officiellement «  »combattre le terrorisme militairement et idéologiquement ». Même si la diplomatie algérienne – reflet de sa situation interne – a cessé d’être active, il faut s’en féliciter.

À défaut de pouvoir agir, l’Algérie se dispense ainsi de participer à une entreprise fumeuse et dangereuse. La coalition aux objectifs douteux menée par l’Arabie Saoudite a été annoncée subitement, sans aucun préalable, comme sortie miraculeusement de la Abaya des saoudiens.

Elle serait destinée à combattre « Daech », cette évolution mutante née de l’intervention américaine en Irak en 2003 et qui a trouvé, par la suite, les appuis financiers des pays du Golfe pour se tailler des territoires et se proclamer « Dawla ».

Il n’est pas inutile de souligner que l’idéologie du Daech n’est que l’accomplissement de celle en cours en Arabie Saoudite et qui, avec les moyens de communications modernes et en association avec un Occident en lutte contre la gauche et les nationalistes arabes, a réussi à dévaster les esprits.

Cette « réussite » saoudienne s’explique aussi par la confiscation des libertés par les pouvoirs autoritaires au lendemain des indépendances. Mais cela est un autre sujet.
Pour l’heure, puisqu’il s’agit d’une coalition créée par les saoudiens, il faut relever avec insistance que la matrice idéologie, mentale et politique du Daech et d’Al-Qaïda se trouve en Arabie Saoudite.

Depuis quelques mois, les religieux saoudiens obéissant à l’ordre Roi leur demandant de sortir du « silence et de la paresse » se sont mis à parler du Daech et d’Al-Qaïda, comme des « phénomènes étrangers (Gharib) à nos sociétés « .

Pour ceux qui observent depuis longtemps le discours des religieux saoudiens, ces « idées » ne sont pas étrangères à l’Arabie Saoudite, ils en sont les produits le plus exportés avec le pétrole.

Les idées de Daech ne sont pas « étrangères » à l’Arabie Saoudite

Cette volonté de se débarrasser – fort tardivement de tout lien avec Daech – ne leurre personne. On continue au demeurant d’armer et de financer en Syrie, des groupes liés à Al-Qaïda ou à Daech.

Comme le soulignait l’écrivain irakien Ali Al-Sarraf, « celui dont la culture, le comportement et la barbarie sont les mêmes que ceux de Daech, ferait preuve de la plus haute hypocrisie s’il lui jette la pierre ». L’Arabie Saoudite est une matrice – The Matrix – qui fabrique des Daech en tout genre. Il peut leur faire de temps à autre la guerre, il continuera à en produire « en interne » indéfiniment.

L’Algérie a été bien avisée de ne pas participer à cette coalition suspecte qui se pique de combattre les terroristes « quel que soit leur maddhab ». Une manière grossière de désigner ceux qui combattent l’intervention saoudienne au Yémen, le Hezbollah au Liban etc…

Cet « Otan sunnite » pour reprendre la formule de l’éditorialiste Abdelbari Atwan entre dans la démarche saoudienne classique qui consiste à aiguiser à la haine sectaire chiite-sunnite avec pour finalité la destruction des Etats-Nations et leur remplacement par des entités de type confessionnel sectaire.

C’est une logique infernale qui consiste à renforcer le poison sectaire qui mine l’Irak et la Syrie et menace d’autres Etats. Derrière la lutte en apparence consensuelle de lutte contre le terrorisme se profile tout simplement la haine et la division sectaire entre sunnite-chiite opportunément relancée par les saoudiens depuis la chute du Chah et dont les fruits empoisonnés sont aujourd’hui visibles.

Où se trouve Daech actuellement? En Syrie et en Irak! Aucun de ces deux pays ne fait partie de la coalition « sunnite » et cela ne relève pas du hasard. L’Iran, non plus, n’en fait pas partie. C’est cousu de fil blanc. L’Algérie qui a refusé avec constance de participer à l’entretien de ce clivage empoisonné doit continuer à le faire.

L’Arabie Saoudite a décidé de « combattre » Daech, elle continue de le fabriquer en permanence. Elle continue à armer les divisions sectaires que des religieux obscurantistes se chargent de diffuser. Avec un réel impact sur des sociétés affaiblies par la pauvreté, l’absence des libertés et la défaillance des Etats.

L’Arabie Saoudite veut faire oublier qu’elle est la matrice. L’Algérie n’a pas à participer à cet enfumage grossier qui note Al-Qods Al-Arabi est un prélude à des « interventions terrestres en Syrie, Irak et Libye avec un soutien occidental ».

Cet Otan-sunnite, est une « aventure saoudienne très dangereuse » avec une guerre contre « le terrorisme » qui s’étendra à une autre guerre, contre l’Iran et ses alliés… » écrit Abdelbari Atwan.

Oui, n’oublions pas la Matrice !

Sources Huffpostmaghreb.com

YEMEN

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LA GUERRE AU YEMEN ET LES DESSOUS DE LA « COALITION ARABE »

Conn Hallinan

Investig’Action – Michelcollon.info l’info décodée

Archives – Analyses et témoignages

le 29 mai 2015

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Le Yémen est le pays le plus pauvre du monde arabe. Dépourvu de ressources, fracturé par des divisions tribales et religieuses, il est aujourd’hui gangrené par la guerre civile.

Et pourtant, ce petit pays du sud de la péninsule Arabique fait éclater de vieilles alliances et fait s’en former de nouvelles pour le moins surprenantes. Pendant que l’Arabie saoudite continue ses frappes aériennes sur les insurgés Houthis, les défenseurs et opposants à la monarchie de Riyad tentent de remodeler le paysage politique de façon à ce qu’il ne s’effrite pas une fois que les combats auront cessé.

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La version saoudienne de la guerre, est que L’Iran chiite essaie de s’emparer du Yémen sunnite en utilisant des intermédiaires –Les Houthis- afin de menacer les frontières sud du Royaume et d’affirmer leur contrôle sur le détroit stratégique de Bab-el-Mandeb, situé sur la mer Rouge. Les Iraniens se défendent en affirmant qu’ils n’ont aucun contrôle sur les Houthis, aucunes vues sur le détroit, et que la guerre au Yémen reste un problème interne au pays, que les Yéménites devront résoudre par eux-mêmes.

Les Saoudiens ont bâti ce qui, au premier abord, semble être une formidable coalition composée de la Ligue Arabe, des pays membres du Conseil de Coopération du Golfe, de la Turquie et des Etats Unis. Cependant, la « coalition » n’est pas aussi solide quelle n’y paraît et elle s’avère plus intéressante par rapport à ceux qu’elle n’inclut pas plutôt qu’à ses propres membres. L’Egypte et la Turquie sont les piliers de cette alliance, mais il y a plus de paroles que d’actes véritables dans leur soutien.

Dans un premier temps, l’Egypte à fait courir le bruit qu’elle pourrait envoyer des troupes au sol. L’armée saoudienne ne peut pas contenir les Houthis et leurs alliés. Depuis, sous la pression de Al- Monitor, l’ambassadeur du Caire au Yémen Youssef al-Sharqawy a éclairci sa position : « Je ne suis pas celui qui décidera d’une telle intervention au Yémen. Cette décision appartient à l’évaluation de l’autorité suprême égyptienne, et dépend de la sécurité nationale du pays ».

Depuis que l’Arabie Saoudite a soutenu le coup d’état égyptien contre les Frères Musulmans et a appuyé le régime avec des sommes d’argent considérables, Riyad pourrait faire pression sur Le Caire pour envoyer des troupes au Yémen. Cependant, la dernière fois que l’Egypte a combattu les Houthis, elle a perdu des milliers de victimes. De plus, l’Egypte est déjà préoccupée par l’insurrection islamique au Sinaï.

Lorsqu’il a engagé le soutien d’Ankara dans une « Intervention saoudienne » et demandé le retrait des « Iraniens et des groupes terroristes », le président turc Recep Tayyip Erdogan a pris le temps de dire qu’il « pourrait potentiellement offrir un appui logistique, selon l’évolution de la situation ».

Erdogan veut punir l’Iran pour son soutien au régime d’Assad en Syrie et sa présence militaire en Iraq, là où Téhéran aide le gouvernement de Bagdad contre le Front islamique. Il essaie également de récupérer l’argent saoudien. En effet, l’économie turque est en difficulté, sa dette publique a atteint son plus haut niveau depuis 10 ans, et les taux d’intérêt augmentent partout dans le monde. Avec une élection primordiale en juin, Erdogan espère une intervention des Saoudiens.

Mais, pour le moment, il y a d’autres préoccupations. Les Turcs pensent que les Saoudiens sont dans le pétrin—Il sera très difficile de gagner une guerre au Yémen, et les assauts aériens n’ont aucune chance de porter leur fruits sans l’intervention de troupes au sol.

Lorsque les Iraniens ont réagi vivement aux commentaires d’Erdogan, le président a fait marche arrière. L’Iran est un partenaire commercial capital pour les Turcs et, avec la fin possible des sanctions internationales contre Téhéran, les Turcs veulent faire partie de la ruée vers l’or qui s’en suivra. Durant le récent voyage d’Erdogan à Téhéran, le président turc et le ministre des affaires étrangères Mohammad Javad Zarif sont arrivés à un arrangement pour appeler à la fin de la guerre au Yémen et pour trouver une « solution politique ». On est loin de la belligérance initiale d’Erdogan.

La Ligue Arabe soutient la guerre, mais seulement à un degré mesuré. L’Irak s’oppose aux attaques saoudiennes et l’Algérie garde ses distances en appelant à la cessation de « toute intervention étrangère ». Même le conciliant GCC, qui représente les intérêts des monarchies pétrolières du Golfe, avait un transfuge. Oman est accolé au Yémen et son dirigeant, le sultan Qaboos, a peur que le chaos arrive jusqu’à ses frontières. Et, alors que les Emirats Arabes Unis conduisent des missions aériennes sur le Yémen, ils sont également prêts à mettre la main au porte-monnaie si les sanctions de Téhéran prennent fin. « L’Iran est notre porte d’entrée, nous nous devons d’y être présents », indiquait Marwan Shehadeh, un homme d’affaire des Emirats, au Financial Times. « Cela pourrait redistribuer les cartes ».

L’absence la plus notable au sein de la coalition saoudienne reste cependant le Pakistan, un pays qui a reçu des milliards de dollars d’aide de l’Arabie saoudite, et dont le premier ministre Nawaz Sharif a été accueilli à Riyad lors des combats sanglants de son pays en 1999.

Lorsque les Saoudiens ont fait part de leur intention d’attaquer le Yémen, ils ont inclus le Pakistan dans leur coalition. Un orgueil qui leur a porté préjudice. Le parlement pakistanais a demandé un débat sur ce sujet et a finalement voté à l’unanimité la neutralité dans cette affaire. Pendant qu’Islamabad déclarait son intention de « défendre la souveraineté de l’Arabie saoudite », personne ne pensait que les Houthis étaient sur le point de marcher sur Djeddah.

La guerre yéménite est profondément impopulaire au Pakistan et les décisions du parlement ont été largement soutenues. Un journaliste a même appelé à rejeter le « Dictat du GCC ». Seule l’organisation extrémiste Lashkar-e-Taiba, qui avait planifié les massacres de Mumbai en 2008, a accordé son soutien aux Saoudiens. En effet, le Pakistan a profité des cadeaux saoudiens et, en échange, a assuré la sécurité à Riyad, mais cette relation ne tient qu’à un fil. Premièrement, il y a le fait que les Saoudiens soutiennent des groupes islamistes extrémistes, dont certains sont en guerre avec le gouvernement pakistanais. L’année dernière, une de ces organisations, les Tehrik-i-Taliban, a massacré 145 personnes, dont 132 étudiants à Peshawar. Le combat contre ces groupes dans le Nord Waziristan a fait subir de lourdes pertes à l’armée pakistanaise qui doit également protéger ses frontières de son voisin du sud, l’Inde.

Les Saoudiens, avec leur interprétation rigoureuse de l’Islam (le Wahhabisme), sont aussi critiqués pour avoir fait naître des tensions entre les sunnites et les chiites au Pakistan.

Deuxièmement, Islamabad approfondit sa relation avec la Chine. Mi-avril, le président chinois Xi Jining avait promis d’investir 46 milliards de dollars pour financer la nouvelle route de la soie de Pékin, qui part de l’ouest de la Chine et se termine dans le golfe Persique. Ces travaux incluront une extension considérable du port de Gwadar, situé sur le territoire agité du Balûchistân. Un port que Bruce Riedel considère destiné à « rivaliser avec Dubaï ou Doha, en tant que pôle économique régional ».

Riedel, chercheur à l’institut Brookings et professeur à John Hopkins, est un expert en sécurité de l’Asie du Sud. Dubaï se situe aux Emirats Arabes Unis et Doha au Qatar. Les deux sont membres du GCC.

La Chine s’inquiète de la situation au Balûchistân et de ses insurrections à répétitions contre le gouvernement en place, mais aussi de la résistance actuelle des turcophones, en grande partie musulmans, et des Ouïghours, un peuple de la province de Xinjiang, dans l’ouest chinois. Les Ouïghours, que l’on estime à un peu plus de 10 millions, sont marginalisés par un afflux de Chinois Han, l’ethnie chinoise dominante.

Les riches Saoudiens ont aidé à financer certains de ces groupes, ce qui n’a plu ni à Pékin, ni à Islamabad. Le Pakistan s’est engagé à créer une « Division sécuritaire spéciale » de 10 000 hommes pour protéger les investissements chinois. Selon Riedel, les Chinois auraient dit aux Pakistanais qu’ils « se tiendraient aux côtés du Pakistan si sa tentative de rapprochement vers l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis échouait ».

Les Etats unis ont joué un rôle important, quoique peu confortable, dans la guerre au Yémen. Ils ont aidé les renseignements Saoudiens, ciblé les informations et ravitaillé leurs avions de guerre en plein ciel. Ils ont également intercepté une flottille iranienne qui se rendait au Yémen. Les Américains ont indiqué qu’elle contenait des armes destinées aux Houthis. Cependant, l’Iran nie toute cargaison de ce type, et il y a peu de preuves que Téhéran fournisse des armes aux insurgés. Mais, pendant que Washington soutenait les Saoudiens, les Américains ont également exhorté Riyad de rappeler ses avions de chasse et de préférer une solution politique. Les Américains s’inquiètent de l’anarchie qu’a amenée la guerre, puisqu’elle pourrait permettre à Al-Qaïda de s’imposer dans la péninsule arabique. Les Houthis, désormais assiégés, étaient le principal adversaire du groupe terroriste.

La crise humanitaire au Yémen devient critique. Plus de 1000 personnes, dont énormément de civils, ont été assassinées, bombardées, et les combats ont généré 300 000 réfugiés. Le blocus maritime américano-saoudien et la destruction récente de l’aéroport international du Yémen empêchent les ravitaillements de nourriture, d’eau et de médicaments dans un pays qui est déjà largement dépendant de ses importations alimentaires. Cependant, les Américains ne veulent pas froisser davantage les Saoudiens, qui sont déjà en colère puisque Washington a négocié un traité nucléaire avec l’Iran. Au-delà de l’aide américaine apportée aux attaques saoudiennes, les Etats Unis ont une fois de plus ouvert grands leurs bras à Riyad.

Le traité nucléaire avec l’Iran a amené à l’alliance la plus imprévue de la région : Israël et l’Arabie Saoudite. Riyad est sur la même longueur d’onde que le gouvernement de Netanyahou sur le sujet iranien et les deux pays font pression pour saboter le traité. Selon le journaliste d’investigation Robert Perry, l’alliance entre Tel Aviv et Riyad a été scellée par un cadeau secret de 16 milliards de dollars déposés par Riyad sur un compte de « Développement Israélien » en Europe, le même genre de compte qui avait servi à construire des bases illégales en territoires occupés.

Les Saoudiens et les Israéliens sont aussi du même côté dans la guerre en Syrie, et malgré les belles paroles de Riyad, les seuls pays membres du GCC à avoir aidé financièrement la Palestine à reconstruire Gaza après les attaques Israéliennes de l’année dernière sont le Qatar et le Koweït.

Tous ces engrenages amèneront à une fin imprévisible. La seule chose qui est claire, c’est que, malgré leur puissance financière, les Saoudiens ne peuvent pas ramener les principaux acteurs régionaux sous leur coupe (mis à part Israël). Et une alliance avec Israël -un pays qui est de plus en plus isolé à cause de ses politiques d’occupation controversées- ne serait pas très stable. Robert Fisk, un correspondant de longue date au Moyen Orient du journal The Independant, pense que les Saoudiens vivent dans la « peur » de l’Iran, des Chiites, de l’Etat Islamique, d’Al-Qaeda, d’une trahison potentielle des Américains, d’un complot israélien, et d’eux-mêmes.

Mais d’où viendra le déclencheur d’une révolution sunnite en Arabie saoudite, sinon de la famille royale elle-même ? C’est cette « peur » qui a amené la guerre au Yémen. Elle est la raison pour laquelle les Etats Unis devraient cesser de souffler sur les braises, et plutôt rejoindre l’Union Européenne pour demander un cessez-le-feu immédiat, une aide humanitaire, et soutenir une solution politique qui serait prise par les Yéménites eux-mêmes.

Traduit de l’anglais par T.F. pour Investig’Action

Source : Investig’Action

Source originale : Counter Punch

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photo de Zied Benromdhane
http://ziedbenromdhane.net/?page_id=571

UN ÉTAT DES LIEUX DE LA GAUCHE POLITIQUE EN ISRAËL

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MICHEL WARSCHAWSKI: « SI DEPUIS UN AN JE PARLE DE FASCISME… »

adressé par Michel Peyret

le 20 mai 2015

« Ce qu’on appelle ici la gauche radicale, indique Michel Warschawski, est très modeste, définie essentiellement par son positionnement sur les questions politiques (conflit colonial et guerres), même si en général cette extrême gauche défend par ailleurs une orientation anticapitaliste. Elle n’a pas, dans la population juive, de parti dans lequel elle pourrait se structurer, et c’est dans des collectifs qu’on la trouve, que ce soit sur des questions d’ordre politique (occupation, racisme) ou d’ordre social (refugiés économiques, droits des femmes, logement…) Quand il y a des élections, elle vote par défaut pour un des « partis arabes », en particulier le Parti communiste. Ce dernier se défend d’ailleurs d’être « un parti arabe », même si 85 % de son électorat provient de la population palestinienne d’Israël… »

Reprenons avec Michel Warschawski…

Michel Peyret


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Israël, Juifs et Arabes : la perspective révolutionnaire d’un vivre-ensemble. Europe solidaire sans frontières (Essf)

le 19 mars 2015

http://eric.et.le.pg.over-blog.fr/

Après avoir passé ses premières années à Strasbourg, Michel Warschawski[[Michel Warschawski milite depuis de longues années en Israël. Il a retracé sa biographie dans un de ses ouvrages, Sur la frontière (Stock, 2002).]] a décidé à 16 ans de partir pour Jérusalem où il a entrepris des études talmudiques. Il a rejoint en 1968 l’Organisation socialiste israélienne fondée en 1962 par des exclus du PC israélien et des militants plus anciens influencés par le trotskysme. Le groupe était surtout connu par le nom de son journal, Matzpen (« La boussole » en hébreu). Matzpen était une organisation révolutionnaire qui considérait le sionisme comme un projet colonial et combattait pour une coexistence entre Juifs et Arabes sur la base d’une complète égalité. Dès juin 1967, Matzpen appelait au retrait complet, immédiat et inconditionnel d’Israël de tous les territoires occupés et affirmait son soutien au droit du peuple palestinien à combattre pour sa libération.
Malgré un effectif restreint, les actions et positions de Matzpen ont eu un écho qui en a fait un « ennemi intérieur » dénoncé par les sionistes de droite comme de gauche, et dont les militants étaient fréquemment arrêtés. Bien que formé en majorité de militants juifs, Matzpen s’efforçait à la fois de de mobiliser la jeunesse juive israélienne et de développer des liens avec les Palestiniens d’Israël et les organisations de la gauche palestinienne et de pays arabes.
Dans les années 1970, un débat s’est ouvert au sein de Matzpen sur ses perspectives. Matzpen et des militants de la gauche palestinienne ont décidé de créer en 1984 le Centre d’information alternative (AIC), organisme d’information et de solidarité dont Michel Warschawski est le directeur.
Matzpen a ensuite cessé d’exister comme organisation bien que nombre de ses militants demeurent actifs dans divers mouvements. En 1989, Michel Warschawski a été condamné à plusieurs mois de prison ferme pour« prestations de services à organisations illégales » (il s’agissait de l’impression de tracts).

Sources : L’Anticapitaliste n°61 (janvier 2015)

par Henri Wilno

le 23 février 2015

Henri Wilno : Dans un texte de l’été 2014, tu parles de « fascisation » en Israël. Quelles sont les racines de ce processus ? Est-ce seulement le produit de l’état de guerre ? Peut-on dire que désormais c’est l’extrême droite qui gouverne ?

Michel Warschawski : Je parle d’un processus long qui remonte a la campagne de haine et de délégitimation qui a précédé l’assassinat de Yitzhak Rabin en 1995. Les assassins du Premier ministre ont pris le pouvoir et sont en fait le pouvoir depuis. J’y inclus l’épisode Ehud Barak (1999-2001) qui, certes, a été le candidat des Travaillistes, mais défendait une politique d’extrême droite et a tout fait pour qu’Ariel Sharon devienne Premier ministre et lui son ministre de la Défense.
Vingt ans donc de pouvoir continu de la droite, qui ont changé la donne, pas tant dans le domaine de la politique coloniale envers les Palestiniens, mais dans le régime interne de l’Etat d’Israël.
Le racisme s’est lâché, dans le discours politique, dans la rue et dans la législation qui culmine avec la proposition de modification de la « Loi Fondamentale – Israël, Etat-Nation du peuple Juif ». Une série de lois liberticides et ouvertement discriminatoires contre la minorité palestinienne d’Israël a déjà été votée, d’autres, pires encore, sont en route. La Cour Suprême, qui a été pendant de nombreuses années le garant d’un système qui jonglait entre « Etat juif » et « Etat démocratique », est depuis quelque temps l’objet d’attaques violentes de députés d’extrême droite. Plusieurs projets de loi visent à réduire son pouvoir.
Le gouvernement s’appuie sur un bloc de trois partis d’extrême droite, bloc dans lequel Netanyahou fait figure de modéré !
Si depuis un an je parle de fascisme, c’est parce qu’à tout ce que je viens de mentionner s’ajoute la violence contre les militants et organisations démocratiques, de la part de petits groupes fascistes ou même de passants. Gouvernement d’extrême- droite + lois liberticides + violence qui vise à terroriser toute parole critique = fascisme.

Henri Wilno : Israël est désormais un des Etats où les inégalités sociales sont les plus fortes (y compris parmi les Juifs), les politiques néolibérales démantèlent les acquis sociaux. Et, pourtant, vu de l’extérieur, le débat social et politique dans la partie juive de la population israélienne semble se polariser complètement autour de deux axes : la religion et la « sécurité ». Est-ce exact ? Les questions sociales ont-elles disparu du paysage ?

Michel Warschawski : Effectivement, Israël est, dans le groupe des pays industrialisés, le second dans le fossé qui sépare les riches et les pauvres : une bourgeoisie très riche et beaucoup de très pauvres. Selon les données de la sécurité sociale israélienne, 32 % des enfants israéliens – juifs et arabes – vivent sous le seuil de pauvreté ! Le démantèlement de l’Etat social et de ses acquis s’est fait avec une brutalité et une rapidité qui auraient fait pâlir de jalousie Margareth Thatcher.
Et pourtant les luttes sociales, en particulier les luttes syndicales, restent extrêmement limitées. Il y a trois raisons à cela : la réussite économique d’Israël qui permet de laisser des miettes aux travailleurs, le fait que le taux de chômage est très bas (inférieur à 2 %), l’absence de tradition et d’organisation syndicales dignes de ce nom. 50 ans de pouvoir absolu de la Histadrout, qui n’avait rien a voir avec une organisation syndicale, même de collaboration de classes, ont empêché la formation d’une conscience de classe, aussi primitive fût-elle. S’il y a des luttes, elles restent cantonnées à une entreprise (en général sur des licenciements) ou dans des secteurs plus privilégiés et mieux organisés (infirmières, enseignants).

Henri Wilno : Les classes populaires réagissent-elles aux politiques d’austérité ? Qu’est devenu le mouvement des « Indignés » d’il y a deux ans ? Que représente le syndicat Koach la-Ovdim qui semble se renforcer au détriment de la Histadrout ?

Michel Warschawski : Le mouvement des Indignés a été un feu de paille : une gigantesque mobilisation qui a entraîné des centaines de milliers de personnes pour un retour à l’Etat providence mais n’a enfanté qu’une commission nationale (la Commission Trachtenberg)… dont quasiment toutes les recommandations ont été rejetées par le gouvernement.
Koach la-Ovdim, qui est la première confédération syndicale indépendante de la Histadrout, reste une organisation modeste, comparée à cette dernière, mais a pu animer des grèves et autres luttes revendicatives de certains des secteurs les plus délaissés, entre autre les travailleurs de l’entretien dans certaines grandes administrations ou encore dans une carrière proche de Jérusalem.
Pour la majorité des travailleurs israéliens, les positionnements, y compris les identités, sont d’abord de l’ordre du politique et du « national », et, très loin derrière, de l’appartenance sociale. On demande à quelqu’un ce qu’il est, il répondra : Juif, puis Israélien, puis Tunisien ou Russe d’origine. Ensuite il dira « religieux » ou traditionaliste. Très rarement il dira « ouvrier » ou « employé ».

Henri Wilno : Qu’est devenu le « camp de la paix? » ? Est-il en situation de peser en quoi que ce soit ?

Michel Warschawski : 3000 personnes environ ont manifesté contre l’agression de Gaza. C’est très peu et représente surtout ce qu’en France on appellerait l’extrême gauche. En ce sens, le mouvement de la paix de masse qu’on a connu dans les années 1980 et 1990 ne s’est pas encore remis de sa déroute en août 2000. Cette date est à retenir, car elle marque une cassure, une espèce d’août 1914 du mouvement de la paix : quand Ehud Barak revient des négociations de Camp David (qu’il a sabotées avec la collaboration de l’administration Clinton), celui qui avait été élu sur la base d’une alternative à la politique d’occupation de la droite, réussit a convaincre son propre camp que Yasser Arafat se servait des négociations pour endormir Israël, y créer des lignes de fracture pour finalement jeter les Juifs a la mer (sic !). Il ajoute : la droite avait raison, c’est nous, les pacifistes, qui nous étions trompés.
Le problème est que ce méga-mensonge a été reçu cinq sur cinq par le mouvement de la paix… Et Sharon a été élu avec une large majorité, pour entreprendre la reconquête des territoires gérés par l’Autorité palestinienne et des quelques acquis résultant des négociations entre Israël et l’OLP.
Le mouvement de la paix ne s’est pas remis de cette déroute, et nous sommes encore loin d’une renaissance de ce dernier, comme mouvement de masse capable de peser sur les choix politiques du gouvernement.

Henri Wilno : Tu as expliqué, je crois, que par son ignorance des questions sociales, une partie de la gauche israélienne et du camp de la paix avait rejeté les sépharades dans les bras du Likoud et de l’extrême droite : est-ce définitif ?

Michel Warschawski : Les couches populaires et plus particulièrement les Juifs pauvres originaires des pays arabes (qu’on appelle à tort « sépharades »), ont fait, depuis la fin des années 1970, le choix de la droite, non par identification avec son idéologie du Grand Israël, mais parce qu’elle représentait l’opposition au pouvoir absolu, totalitaire et raciste – envers les Juifs non Européens – de la pseudo-gauche.
La « gauche » n’a aucune chance de regagner l’électorat populaire, car sa réalité et son image sont bourgeoises, et son racisme anti-oriental colle à son identité. L’immigration massive des Russes a d’ailleurs encore renforcé cette ligne de fracture. Pour reprendre pied dans les couches populaires, une nouvelle gauche est à construire, mais ceci est la tâche de la prochaine génération.
Ceci dit, les mariages intercommunautaires sont de plus en plus nombreux, et je pense que l’appartenance ethnique, au sein de la communauté juive-israélienne, tend à perdre petit a petit de sa pertinence.

Henri Wilno : Que représente l’extrême gauche en Israël ? Les Anarchistes contre le mur ? D’autres mouvements ?

Michel Warschawski : Ce qu’on appelle ici la gauche radicale est très modeste, définie essentiellement par son positionnement sur les questions politiques (conflit colonial et guerres), même si en général cette extrême gauche défend par ailleurs une orientation anticapitaliste. Elle n’a pas, dans la population juive, de parti dans lequel elle pourrait se structurer, et c’est dans des collectifs qu’on la trouve, que ce soit sur des questions d’ordre politique (occupation, racisme) ou d’ordre social (refugiés économiques, droits des femmes, logement…) Quand il y a des élections, elle vote par défaut pour un des « partis arabes », en particulier le Parti communiste. Ce dernier se défend d’ailleurs d’être « un parti arabe », même si 85 % de son électorat provient de la population palestinienne d’Israël.
Les Anarchistes contre le Mur, certaines organisations féministes, les divers groupes qui luttent contre l’occupation ou les injustices sociales, ou encore le Centre d’information alternative (AIC), se retrouvent dans des campagnes spécifiques (contre le mur, contre les groupes fascistes, pour les sans-papiers, etc.), mais il n’existe pas de structures pérennes.
Un des problèmes auxquels nous sommes confrontés est ce que j’ai appelé, il y a des années, l’« ONGisation » de la politique, une professionnalisation autour de petites boutiques, souvent bien financées pour leurs activités par des fondations ou des Etats européens. Les ONG font certes un bon travail d’information et de sensibilisation, mais elles ne peuvent en aucun cas être la base d’un mouvement de masse. Certains diront même qu’elles en sont, involontairement, un obstacle.

Henri Wilno : Comment évoluent les discriminations envers les Arabes israéliens ? La sécession entre Juifs et Arabes israéliens est-elle désormais complète ? Ou bien y-a-t-il des espaces communs de coopération et de lutte ?

Michel Warschawski : Depuis 2000 (en octobre 2000, Ehoud Barak ordonnait une répression sanglante des manifestations de solidarité, dans les localités arabes, avec la révolte palestinienne des territoires occupés), nous avons été témoins d’une rupture du front judéo-arabe qui caractérisait le mouvement d’opposition à l’occupation et aux discriminations contre la minorité palestinienne d’Israël (qui fait 20 % de la population). Les Palestiniens ne viennent plus à Tel Aviv pour manifester et ont fait le choix de se mobiliser dans leurs villes et villages. C’est ce qui explique pourquoi les manifestations dans les grandes villes juives sont passées de dizaines de milliers à quelques milliers seulement.
Derrière ce choix, s’exprime aussi une volonté d’autonomie, car dans le « front judéo-arabe », le PC poussait à une hégémonie juive, dont la présence de drapeaux israéliens et la sur-représentation d’orateurs juifs étaient les signes extérieurs.
La minorité arabe est représentée à la Knesset par trois partis de poids plus ou moins égal : le PC (sous la forme du Front pour la paix et l’égalite), le Rassemblement national démocratique (Balad – nationalistes radicaux), et la Liste arabe unifiée, nationaliste conservatrice.
Un amendement à la loi électorale peut pousser les partis arabes à faire à l’avenir liste commune, s’ils veulent avoir des élus, et si cette perspective se réalise, il pourrait y avoir dans la prochaine Knesset un groupe parlementaire arabe d’une quinzaine de députés (sur 120…) A moins que n’aboutissent les tentatives de l’extrême droite d’interdire à certains partis arabes de se présenter. A ce propos, les prochaines semaines seront déterminantes.
Pour que le front judéo-arabe se reconstruise, il est indispensable que les militants juifs acceptent de se débarrasser de leur volonté hégémonique et de devenir une force d’appoint à un mouvement qui est d’abord un mouvement national arabe.

Henri Wilno : Quel est l’écho de l’AIC dans le contexte actuel ?

Michel Warschawski : La spécificité du Centre d’information alternative est d’être, trois décennies après sa constitution, toujours la seule organisation commune israélo-palestinienne. L’AIC regroupe des militants, connus et reconnus, de la gauche palestinienne et des antisionistes israéliens. Si, comme son nom l’indique, elle fait un travail d’information et d’analyse politique et sociale (en particulier sur son site alternativenews.org), son originalité et son importance résident dans son choix d’être une brèche dans le mur qui sépare les deux sociétés, y compris dans le monde militant, et de promouvoir une perspective de coopération et de partenariat entre les mouvements des deux côtés de la « ligne verte ».
Dans un contexte où la séparation est perçue comme une valeur quasi-absolue, la perspective d’un vivre-ensemble est éminemment révolutionnaire, et elle passe par la nécessité d’un combat commun.

Pour en savoir plus :


ÉGYPTE – 16 MAI 2015 : 106 PEINES DE CONDAMNATIONS À MORT

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L’ÉGYPTE A BESOIN D’ENTENDRE AUTRE CHOSE QUE « VIVA LA MUERTE »Saïd Djaafer – directeur éditorial du Huffington Post Algérie – le 17 mai 2015;


MARZOUKI LANCE UNE PÉTITION INTERNATIONALE CONTRE LES JUGEMENTS INJUSTES À LA PEINE DE MORT DE DIZAINES D’ACTIVISTES POLITIQUES ÉGYPTIENSgnet.tn – le 26 Mai 2015;


DES PALESTINIENS DÉJÀ MORTS… CONDAMNÉS À MORT EN EGYPTE AINSI QU’UN DÉTENU DEPUIS 19 ANSMalik Tahir – la 17 mai 2015 – Huffpost Maghreb Algérie;


L’ÉGYPTE A BESOIN D’ENTENDRE AUTRE CHOSE QUE « VIVA LA MUERTE »

Saïd Djaafer

directeur éditorial du Huffington Post Algérie

le 17 mai 2015

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« Accablé ». C’est le mot utilisé par un confrère après l’annonce, samedi, des condamnations à mort de masse prononcées par un juge égyptien contre l’ancien président Mohamed Morsi, les hauts dirigeants de l’organisation des Frères Musulmans et de nombreux palestiniens dont des morts et un homme emprisonné depuis près de 20 ans.

Accablement car cela rappelle l’engrenage des années 90 en Algérie et comment dans l’enchaînement des actions et des réactions un processus démocratique est mort et un pays s’est déchirée. Accablement et frayeur de voir que les expériences ne servent à rien.

L’Égypte n’est pas l’Algérie, certes. Mais cela pourrait être pire que nos années 90 dont nous avons grand peine à sortir politiquement et moralement. Le contexte actuel est en effet encore plus anxiogène et plus critique que nos années 90.

Les conséquences d’une situation où des milliers de Frères Musulmans basculeraient dans la violence, faute d’option politique ou de recours -et ils ont hélas la démonstration que la justice n’en est pas un- seraient calamiteuses.

Les explications de la crise algérienne des années 90 -dont on n’est pas sorti- sont variées, elles épousent les divergences idéologiques et les positionnements politiques. Pourtant, les représentants de toutes les tendances en sont revenus et quand ils ne le clament pas publiquement, ils l’admettent en aparté: ce fut un terrible et gigantesque gâchis.

LIRE AUSSI: Égypte: la condamnation à mort de Mohamed Morsi indigne la toile.

Le bannissement de la politique

L’ancien président tunisien et toujours militant des droits de l’Homme, Moncef Marzouki, notre voisin, connait parfaitement cet engrenage où la politique disparaît totalement et donc de la possibilité de négocier et de recréer des consensus. Ce bannissement du politique corollaire d’un choix d’exclusion ne laisse de place qu’au rapport de forces violent et dévastateur.

Marzouki a réagi rapidement au verdict sidérant en condamnant un « jugement politique et injuste ». Au-delà de la solidarité affichée à l’égard de Mohamed Morsi et des condamnés à mort, l’ancien président tunisien met surtout en garde les responsables égyptiens dans cette dérive grave où la justice cesse d’être un recours, un arbitre, pour se transformer en machine de guerre, en instrument à éliminer.

Il n’est pas certains que les responsables égyptiens entendent son « appel à la raison » dans le climat cynisme politico-médiatique qui règne en Égypte et où les faiseurs de propagande ont tendance à s’auto-intoxiquer.

Mais cela n’enlève rien à la justesse de l’appel aux dirigeants égyptiens à « ne pas continuer dans des choix qui ne peuvent apporter que des calamités à l’Égypte que nous aimons et dont nous sommes soucieux de la stabilité ».

Moncef Marzouki appelle à ne pas commettre l’irréparable -l’exécution des peines de morts- et à engager une « politique de réconciliation nationale pour préserver la paix sociale et la vraie sécurité ».

L’ancien président tunisien en a profité pour affirmer en direction de l’ensemble des peuples, des partis et « notamment islamistes » de l’impératif de « bannir la peine de mort de nos pays ».

LIRE AUSSI: Égypte: l’ex-président islamiste Mohamed Morsi condamné à mort.

Une justice à télécommande

« Ces nouveaux drames confirment que la peine capitale est justifiée par le besoin de punir les crimes » mais que son « but principal était et reste la vengeance politique, de classe » et une volonté de « terroriser les peuples pour maintenir l’oppression ».

Les dégâts de la peine de mort « sont énormes » alors que ses résultats contre le crime sont négligeables, a-t-il affirmée, appelant à rejoindre rapidement le « club des États démocratiques et des peuples civilisés qui ont banni la peine de mort ».
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Moncef Marzouki n’est pas un islamiste, c’est un vieux militant des droits de l’Homme. Sa parole est précieuse à un moment où les politiques menées en Égypte sont entrain de miner profondément et dangereusement le tissu social.

Il est également salutaire de voir que des égyptiens marqués à gauche se positionnent avec force contre ce verdict.

C’est le cas des « Socialistes révolutionnaires » égyptiens qui soulignent dans un communiqué que leurs divergences avec les Frères Musulmans ne les empêcheront pas de dénoncer des condamnations de masses sans « précédent dans l’Histoire de l’Égypte contemporaine ». C’est « un verdict catastrophique » qui montre que la justice est « gérée par la télécommande ».

Il n’est jamais trop tard pour stopper un enchaînement d’actions et des réactions qui finissent par créer leurs propres dynamiques destructrices. Il est bon que des hommes comme Marzouki et des militants de gauche le disent. L’Égypte a besoin d’entendre autre chose que les sinistres « Viva La Muerte ».

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LIRE AUSSI SUR LES BLOGS: Les pays nord-africains sont-ils condamnés à vivre sous la dictature?

Sources: Huffpost Maghreb Algérie

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MARZOUKI LANCE UNE PÉTITION INTERNATIONALE CONTRE LES JUGEMENTS INJUSTES À LA PEINE DE MORT DE DIZAINES D’ACTIVISTES POLITIQUES ÉGYPTIENS

gnet.tn
publié le Mardi 26 Mai 2015

Des politiciens, hommes de culture, activistes de la société civile, universitaires, journalistes, syndicalistes et acteurs sociaux lancent une pétition internationale suite aux jugements injustes à la peine de mort contre des dizaines d’activistes politiques égyptiens, à leur tête l’ancien président, Mohamed Morsi, jugé en violation des dispositions prévues dans la constitution.

Les signataires dénoncent dans cette pétition parue sur la page officielle, de l’ancien président, Moncef Marzouki, les jugements à la peine capitale et tous les procès politiques en Egypte, et condamnent l’exécution de six jeunes sans avoir bénéficié d’un jugement équitable.

Ils appellent les autorités égyptiennes à surseoir aux jugements et à mettre un terme à la répression contre les activistes politiques.

Ils mettent en garde contre la violence et l’escalade pouvant découler de ces jugements, ce qui prépare le terrain à une guerre civile, dont seuls les ennemis de la démocratie et de la stabilité profiteront.

Ils appellent l’ensemble des forces vives en Egypte à se rassembler autour d’un dénominateur commun national et fédérateur, et à unifier les efforts pour sauver l’Egypte, et baliser le terrain à la reprise du processus de transition démocratique.

Ils appellent les sages de la nation, les amis du peuple égyptien parmi les libres de ce monde défenseurs de la démocratie, des droits de l’Homme, et du droit des peuples à choisir leur régime et dirigeants, à une action rapide, forte et efficiente pour suspendre ces jugements, aider le peuple égyptien à la transition démocratique et lui épargner les affres de la guerre civile.

Pour signer cette pétition, il convient d’envoyer un mail à l’adresse suivante petition.masr@gmail.com , en indiquant le nom complet, la qualité, l’organisme et le pays.
Gnet

Ci-après le texte de la pétition dans sa version originale :

عريضة دولية

على اثر الأحكام الظالمة بالإعدام على العشرات من الناشطين السياسيين المصريين وعلى رأسهم الدكتور محمد مرسي أول رئيس منتخب ديمقراطيا والمحاكم اليوم دون احترام للإجراءات المنصوص عليها في الدستور، وما يمكن أن ينجرّ عن هذه الأحكام من انزلاق نحو العنف والاحتراب الأهلي في مصر في سياق وضع اجتماعي شديد الاحتقان، فإنّنا نحن السياسيين والمثقفين ونشطاء المجتمع المدني والمجال العام حقوقيين وجامعيين وإعلاميين ونقابيين وفاعلين اجتماعين، نعبّر عن:

تنديدنا بأحكام الإعدام وشجبنا لكل المحاكمات السياسيّة في مصر، واستنكارنا الشديد لتنفيذ أحكام الإعدام في حق 6 من الشباب لم يحظوا بمحاكمة عادلة،

دعوة السلطات المصريّة إلى إيقاف الأحكام وما يتعرّض له الناشطون السياسيون من قمع وسجن وتشريد بسبب تمسكهم باستحقاقات ثورة 25 ينايرفي الحريٌة والكرامة.

تحذيرنا ممّا يمكن أن ينجرّ عن هذه الأحكام من تصعيد للعنف يمهّد لحرب أهليّة لن يستفيد منها إلاّ أعداء الديمقراطيّة والاستقرار.

دعوة كلّ قوى المجتمع المصري من أحزاب سياسيّة وقوى مدنية وروابط شبابيّة ومراجع فكريّة وثقافيّة وأخلاقيّة إلى الالتقاء حول مشترك وطني جامع وتوحيد الجهود لإنقاذ مصر ومنع الانزلاق نحو العنف والانتقام والتمهيد لاستئناف مسار الانتقال الديمقراطي.

دعوة العقلاء في الأمّة وكلّ أصدقاء الشعب المصري من أحرار العالم المدافعين عن الديمقراطيّة وحقوق الإنسان وحق الشعوب في اختيار حكّامها وأنظمتها إلى التحرّك السريع والقويّ والفعّال لإيقاف هذه الأحكام ومساعدة الشعب المصري على الانتقال إلى الديمقراطيّة وتجنيبه ويلات الحرب الأهليّة
***********************
التوقيع
الرجاء توقيع العريضة عبر إرسال رسالة الى البريد الالكتروني التالي:
petition.masr@gmail.com
فيها المعطيات التالية:
الاسم الكامل – الصفة – الهيكل – الدولة.

Sources:

PALESTINE- 15 MAI 1948: LA NAKBA

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PALESTINE LE 15 MAI 1948: LA NAKBAVidéo de Youssef Boussumah – mai 2014 – YouTube


L’ESPOIR DU RETOUR EN PALESTINE: LES RÉFUGIÉS D’AL-JALIL TRACENT LE CHEMINAssawra – Fadwa Nassr – le 14 mai 2015;


VIDÉO
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par Youssef Boussoumah

SOURCES:

  • YouTube le 15 mai 2014

    https://www.youtube.com/watch?v=R9ppmSJGb2Y
  • blog algerieinfos-saoudi:

    http://www.algerieinfos-saoudi.com/2015/05/15-mai-1948-la-nakba.html

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L’ESPOIR DU RETOUR EN PALESTINE:
LES RÉFUGIÉS D’AL-JALIL TRACENT LE CHEMIN

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« Dix jours après le départ forcé de la population d’al-Nahr, la Haganah a attaqué ce joli village. Elle n’y a trouvé que 16 vieillards âgés entre 80 et 90 ans, et deux hommes handicapés.. Mohamad Akr et Mohammad Raghib. Elle les a tous rassemblés dans un lieu et a tiré sur eux, et les a laissés noyés dans leur sang…

Ce témoignage fut rapporté par Tawfiq Raghib Salim, qui s’était caché dans les vergers aux alentours, et qui est entré au village après qu’ils (les sionistes) se soient retirés. Il a enseveli les morts.. Cet homme est resté pendant deux mois, vivant dans les vergers pendant la journée et dormant au village la nuit. Puis, n’ayant plus d’espoir de rester, il prit la route, de nuit, vers Tarshiha puis au Liban, où sa famille l’avait devancée.

Puis les sionistes ont fait exploser toutes les maisons du village et détourné l’eau des sources du village vers un lieu inconnu. Le village et ses vergers sont restés sans eau. Ceci est un clair exemple de ce qui s’est passé dans la région de Akka et de ce qu’a commis la Haganah ».

D’autres témoignages récemment publiés rapportent que les Palestiniens ont d’abord fui leurs villages, lorsque ces derniers étaient attaqués par les sionistes et l’armée britannique, mais sans quitter le pays, où ils sont restés des mois parfois à le parcourir, vivant dans les vergers des villages non encore attaqués, dans l’espoir de retourner chez eux.

Certains villageois sont même retournés chez eux, au cours de ces mois de 1948, où ils ont cueilli les olives et les autres fruits, bravant les groupes sionistes qui encerclaient les villages, avant de les envahir. Certains villageois ont même été tués, parce qu’ils avaient refusé de se soumettre aux ordres et ont continué à travailler dans leurs terres.

Ce genre de témoignages doit être multiplié par mille, concernant seulement les réfugiés de la région d’al-Jalil, situé au nord de la Palestine.

L’encyclopédie « Pour ne pas oublier » (Kay lâ Nansa) publiée il y a presque deux décennies cite 416 villages palestiniens entièrement détruits par les hordes sionistes.

Dans al-Jalil, les régions de Safad et de Tabaraya furent entièrement vidées de leur populations : outre les deux villes, Safad et Tabaraya dont les pittoresques maisons furent prises d’assaut par les colons, 77 villages de la région de Safad et 25 villages de la région de Tabaraya disparurent de la carte sioniste. A leur place, s’installèrent des colons venus d’ailleurs.

Ces villages étaient non seulement habités, mais en expansion et développement, avant l’occupation britannique puis la colonisation sioniste. Les centaines de témoignages des réfugiés sur la vie quotidienne, les relations sociales, économiques, culturelles et politiques, de la population palestinienne d’al-Jalil indiquent l’ampleur du crime perpétré par les hordes sionistes et la communauté internationale d’alors, les puissances occidentales et leurs valets dans le monde, à l’encontre du peuple palestinien.

Les villages de Loubié et Shajara, dans la région de Tabaraya, les villages de Taytaba, Naamé ou Khalissa, dans la région de Safad, les villages de Bassa, Kweikat, Shaab dans la région de Akka, n’existent plus sur la carte sioniste, mais existent toujours et de plus en plus intensément, dans la mémoire de leur population, réfugiée dans les camps du Liban et de Syrie, ou parmi les « réfugiés internes » vivant en Palestine occupée.

Après avoir commis des centaines de massacres, et notamment dans les villages d’al-Jalil (al-Jish, Safsaf, Majd al-Koroum, Salha) et expulsé les Palestiniens, l’entité coloniale sioniste a changé les noms des lieux, transformé le paysage (en plantant parfois des forêts), rasé tout ce qui pouvait en rappeler la vie, sans cependant gagner la bataille car pour les réfugiés, ce qui existe aujourd’hui, c’est ce qui existait avant 1948 : al-Jalil et ses villages, les colonies implantées n’étant que des décors passagers d’une tragédie qui doit prendre fin.

Si les témoignages rassemblés au cours de ces dernières années restent ceux des Palestiniens ayant vécu en Palestine avant l’exil, même pour quelques années, c’est-à-dire aujourd’hui des vieux et des vieilles qui ont pris le chemin de l’exil, pourchassés par les hordes coloniales, il n’en demeure pas moins que leur mémoire a été transmise, et que leurs descendants savent qu’ils appartiennent à ces lieux et à cette région, et à la Palestine.

Et ils savent surtout qu’ils y retourneront, et que ni les sionistes, ni les puissances occidentales, ni la communauté internationale, ne les en empêcheront.

Car la Palestine vers laquelle ils tendent et celle pour laquelle ils luttent, n’est pas celle de l’Autorité Palestinienne, où al-Jalil et d’autres régions en sont exclues. Elle n’est pas non plus celle « d’un seul Etat » où les colons partageraient à égalité le pays et ses ressources avec les Palestiniens. Elle sera celle issue de la résistance et de la libération, celle d’une Palestine retournée à son environnement arabo-islamique, où le terme même « d’Israël » disparaîtra. Même un siècle de colonisation ne peut effacer la civilisation et l’histoire d’al-Jalil et des autres régions de la Palestine occupée, d’autant plus que la tentative de les remplacer par des mythes juifs inventés de toutes pièces a échoué.

L’éclat apparent de l’entité coloniale, les colonies implantées en Palestine, le nombre des colons qui y vivent, l’armée sophistiquée qui mène les guerres destructrices, l’industrie de pointe qui gagne des marchés dans le monde, tout cela ne peut cacher ni faire oublier que l’entité coloniale, soutenue et encouragée par les puissances impériales dans le monde, est bâtie sur des massacres, qui se poursuivent jusqu’à présent, sur des expulsions, des crimes, des pillages de terres et de propriétés et sur une terrible répression militaire de toute une société, sans oublier la nature raciste de l’idéologie sioniste, fondatrice de l’entité, ni sa nature expansionniste visant à dominer la région. Pendant combien de temps une telle entité peut-être survivre dans un environnement hostile ? Ou plutôt, sa survie ne dépend-elle pas de la destruction de cet environnement arabo-musulman ? Ce qui veut dire que la lutte entre l’entité coloniale sioniste et son environnement n’est pas une simple guerre de frontières à dessiner, mais une lutte pour que le monde arabo-musulman soit libéré des chaînes de son assujettissement.

C’est en cela que la Palestine, et al-Jalil par-dessus tout pour les réfugiés, restent au cœur de notre libération. Et c’est parce que al-Jalil vit encore et toujours dans nos cœurs que nous avons espoir de la libérer.

Fadwa Nassar

Jeudi, 14 mai 2015

Sources: Assawra

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JÉRUSALEM : DU MYTHE AU NETTOYAGE ETHNIQUE

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Pierre Stambul

Assawra

le 17 avril 2015

Le 7 juin 1967, l’armée israélienne s’emparait de Jérusalem Est. Cette conquête fut sanglante. Les lieux où, par centaines, les soldats jordaniens sont tombés, ont été nettoyés et leur mémoire a été oubliée.

Les sionistes fêtent le 7 juin, niant plus que jamais l’histoire, la dignité et la mémoire du peuple palestiniens. C’est ainsi qu’aura lieu le 7 juin 2015 à Montpellier la 39e journée de Jérusalem. Ces festivités négationnistes sont indignes.

Dans son livre «Comment la terre d’Israël fut inventée», l’historien israélien Shlomo Sand, qui faisait son service militaire, décrit le messianisme dévoyé qui s’empare de l’armée et de la population israéliennes au moment de la conquête.

L’annexion

Par milliers, croyants ou pas, les Israéliens affluent au Mur des Lamentations, qui est le vestige du mur de soutènement (dit mur occidental) du deuxième temple détruit par Titus en 70 après Jésus-Christ. Pourtant, il semble bien que ce mur ait été construit très peu de temps auparavant, alors que la Judée avait déjà été totalement soumise par les Romains, ce qui rend peu compréhensible sa valeur symbolique.

Dès la prise de Jérusalem Est, la chanson « Yéroushalayim shel zahav » (= Jérusalem d’or) de Naomi Shemer, devient un « tube » mondial. Le dernier couplet célèbre « la réunification » de Jérusalem.

Très vite, la ville est annexée par un vote de la Knesset (le Parlement israélien) et Jérusalem devient par ce texte la « capitale indivisible » de l’Etat d’Israël (statut qui ne sera pas reconnu par la grande majorité des pays). La propagande présentera désormais Jérusalem comme le symbole exclusif du judaïsme. La partie annexée est 10 fois plus grande que la Jérusalem jordanienne : elle va de Ramallah à Bethléem et coupe en deux la Cisjordanie rendant impossible tout « Etat palestinien » sur le reste des territoires occupés. Ce « grand Jérusalem » annonce déjà la colonisation.

Du mythe à la réalité

Les fondateurs du sionisme, dans leur majorité, n’étaient pas croyants. Mais ils ont utilisé la Bible comme un livre de conquête coloniale. Ils ont considéré que les faits décrits dans la Bible étaient des événements historiques qui justifiaient leur « retour » après un long exil. On sait aujourd’hui que cette théorie de l’exil et du retour est une fiction.

En ce qui concerne Jérusalem, les faits décrits dans la Bible concernant le «royaume unifié» de David et Salomon sont tout à fait légendaires. L’archéologie est têtue : à l’époque présumée de ce royaume, Jérusalem était un village de l’âge de fer d’au plus quelques centaines d’habitants. Le grand temple, la reine de Saba, c’est une belle histoire, mais c’est une légende. S’il y a eu un roi David, c’était tout au plus un conducteur de troupeaux. Pourtant aujourd’hui, dans le quartier palestinien de Silwan, on détruit des maisons, on expulse par milliers les habitants, on arrête les résistants au nom du roi David. L’occupant a déclaré que ce grand roi avait vécu là. Alors on construit la maison du roi David, le parc du roi David, le musée du roi David et on « judaïse » ce quartier à coup de bulldozers et d’expéditions policières punitives.

Pour essayer de «prouver» que les archéologues et les historiens ont tort de nier l’historicité du récit biblique, le gouvernement israélien multiplie les provocations en creusant des tunnels sous l’esplanade des mosquées. Tout ce qui est découvert est très antérieur ou très postérieur à la période mythique.

Jérusalem et les Juifs

Après l’écrasement de la dernière grande révolte juive (Bar-Kokhba, 135 après Jésus-Christ), la ville a été rasée et interdite aux Juifs. La population de la région s’est en majorité convertie au christianisme, puis, après la conquête arabe du VIIe siècle en majorité à l’islam. Après la prise de la ville par les Arabes en 637 après Jésus-Christ, le calife Omar a autorisé les Juifs, jusque là bannis par les Byzantins, à revenir à Jérusalem.

Deux mosquées (al-Aqsa et le Dôme du Rocher) ont été construites sur la colline où se trouvait le temple détruit et la ville est devenue un lieu saint de l’islam.
Le christianisme a fait de Jérusalem un symbole. Les pèlerinages chrétiens se sont multipliés et la « délivrance du Saint-Sépulcre » a servi de prétexte aux Croisades.

Pour les Juifs, rien de semblable. Quasiment aucun pèlerinage. La religion juive est une religion messianique de l’exil. Pour les Juifs orthodoxes (harédis), le retour à Jérusalem avant l’arrivée du Messie est interdit. « L’an prochain à Jérusalem », ça ne veut pas dire « ôte-toi de là que je m’y mette, je vais construire un Etat à Jérusalem », ça exprime simplement le souhait de l’arrivée prochaine du Messie.

Après 1492, quand les Juifs chassés d’Espagne sont accueillis par l’empire ottoman, leurs principales destinations seront Salonique, Smyrne, Sarajevo.
Certains s’installeront en Galilée (à Safed) mais pas à Jérusalem qui est une conquête récente ottomane.

C’est vers 1800 que quelques Juifs venus principalement de Pologne ou du Maroc s’installent à Jérusalem. Ils sont très religieux et se regroupent dans le quartier de Méa Sharim.

La propagande sioniste essaie aujourd’hui de dire à coup de pseudo recensements, que les Juifs sont majoritaires à Jérusalem depuis 200 ans. Double invention. La mère de Leila Shahid, Sirine Husseini (décédée en 2008) décrit la municipalité de Jérusalem que dirigeait son père où musulmans, chrétiens et juifs cohabitaient en bonne intelligence au conseil municipal. Les Juifs palestiniens n’étaient pas sionistes, ils craignaient que cette idéologie n’affecte les bons rapports qu’ils avaient avec les musulmans et les chrétiens.

D’un nettoyage ethnique à l’autre

Le plan de partage de 1947 avait prévu que Jérusalem serait internationalisé (au milieu de l’Etat palestinien) et serait la ville sainte des 3 grandes religions monothéistes. Depuis les années 30, il y avait un accord secret de partage de la Palestine entre les sionistes et la dynastie hachémite (le roi de Jordanie, lire à ce sujet La guerre de 1948 en Palestine d’Ilan Pappé). C’est parce que la future armée israélienne violait cet accord en attaquant un à un tous les villages palestiniens entre Tel-aviv et Jérusalem que la légion arabe jordanienne est entrée en guerre. Le 9 avril 1948, les milices fascistes de l’Irgoun (dirigée par Menachem Begin) et du groupe Stern (dirigé par Yitzhak Shamir) ont massacré la population civile du village de Deir Yassin situé à 5 Km du centre de Jérusalem. Le but était de provoquer l’exode de la population palestinienne. Quand la guerre a éclaté officiellement le 15 mai 1948, la quasi-totalité des Palestiniens habitant l’Etat donné par l’ONU aux Juifs avaient déjà été contraints à l’exil.

Deir Yassin fait partie des centaines de villages palestiniens rayés de la carte. C’est en face de là que les Israéliens ont construit le musée du génocide nazi Yad Vashem. Sur le territoire de Deir Yassin, il y a aujourd’hui le « nouveau quartier » de Givat Shaul. Le tunnel routier qui passe en dessous s’appelle Menachem Begin (du nom de l’assassin). Et les victimes de l’attentat antisémite de la Porte de Vincennes ont été enterrées au cimetière de Givat Shaul. Quel symbole !

Pour avoir les mains libres à Jérusalem, les terroristes du groupe Stern assassinent le 17 septembre 1948 le représentant de l’ONU Bernadotte et son adjoint, le colonel Sérot. Les assassins parfaitement identifiés seront intégrés dans le premier gouvernement israélien d’union nationale.

Jérusalem Ouest, agrandi avec les « nouveaux quartiers », est vidée de toute présence palestinienne. Des nouveaux immigrants s’y installent.

Au moment de l’armistice de 1949, la partie Est de Jérusalem échappe aux Israéliens. Elle contient la vieille ville et quelques quartiers autour. Jérusalem-Est est annexée par la Jordanie. Il n’y a qu’un seul point de passage (surtout pour les pèlerins) entre les deux parties de la ville, c’est la porte Mandelbaum. Et pour accéder à Jérusalem Ouest, malgré les nombreux villages rasés, les Israéliens doivent contourner l’enclave de Latrun restée jordanienne.

En 1949, Ben Gourion avait été accusé par la « droite sioniste » de ne pas avoir conquis toute la Palestine mandataire. Il s’était justifié en expliquant que ce n’était que partie remise. En juin 1967, les sionistes sont maîtres de toute la Palestine. Environ 250000 Palestinien-ne-s sont expulsé-e-s, s’ajoutant aux millions de réfugié-e-s. Et à Jérusalem Est, le nettoyage commence.

Effacer la présence et la mémoire palestiniennes

Dès la conquête, la vieille ville est séparée en quatre « quartiers » : chrétien, arménien, musulman et juif. Dans le quartier juif, toute la population palestinienne est expulsée. Elle est remplacée par des riches venus d’Israël ou des Etats-Unis.

On trouve dans ce quartier juif qui jouxte le Mur des Lamentations un musée sur les gens expulsés en 1948 et leur martyr. Il ne s’agit pas des 800000 Palestinien-ne-s chassé-e-s au moment de la Nakba, mais des quelques centaines de Juifs qui vivaient dans la partie de la Palestine qui a été jordanienne entre 1948 et 1967. La manipulation de la mémoire est en marche.

Très vite, les Israéliens vont réquisitionner des terres qu’ils affirment « vacantes » pour construire des « nouveaux quartiers ». Ils ont pour nom Ramot, Atarot, Gilo, Pisgat Zeev et, plus loin du centre, Gush Etzion et Maale Adoumim.

Har Homa était une splendide forêt entre Bethléem et Jérusalem. Elle a mystérieusement brûlé le premier jour des discussions entre Yasser Arafat et Ehud Barak. C’est aujourd’hui une colonie en pleine extension, prévue pour 30000 habitants et qui sépare totalement Bethléem de Jérusalem.

La judaïsation de Jérusalem Est recevra une aide extérieure : ce sont des capitalistes français (Alstom et Véolia) qui construiront le tramway reliant Pisgat Zeev au centre ville. Ce sont les Chrétiens sionistes américains (d’authentiques antisémites) qui financeront la construction de Maale Adoumim. Cette luxueuse colonie de 40000 habitants domine le désert de Judée, coupe en deux la Cisjordanie en rendant impossible tout Etat palestinien viable et pille l’eau de la région. Elle servira aussi de prétexte à l’expulsion des Bédouins qui ont toujours vécu le long de la route qui descend à Jéricho et à la confiscation de leurs terres.
Avec les accords d’Oslo, la « Maison d’orient » dirigée par Fayçal Husseini (décédé en 2001) était censée défendre les droits des Palestiniens de Jérusalem.

Ceux-ci ont « bénéficié » d’un statut à part après 1967 : ni citoyens, ni étrangers mais « résidents ». Ils bénéficient de la plaque orange sur les voitures qui leur permet de se déplacer plus facilement. Ils disposent du droit de vote aux élections municipales (ils ne s’en servent pas car ils ne reconnaissent pas l’annexion) mais pas aux élections nationales. Tout est fait (notamment le prix des loyers et l’impossibilité pour eux de construire des logements) pour les pousser à quitter Jérusalem et donc à perdre leur statut de résident.

Ariel Sharon avait compris l’enjeu que représente Jérusalem. Il avait acquis une maison en plein « quartier musulman » de la vieille ville avec plein de drapeaux israéliens et la présence pesante de nombreux soldats. C’est à Jérusalem, sur l’esplanade des mosquées le 28 septembre 2000, qu’il a fait la provocation qui a déclenché la deuxième Intifada et l’a mené au pouvoir.

En 2001, la maison d’Orient a été fermée.

Dans toutes les négociations (qui étaient en fait des demandes de capitulation) entre Israéliens et Palestiniens, les premiers sont restés « inflexibles ». Même les travaillistes ont signifié que tous les « nouveaux quartiers » resteraient israéliens et ils ont proposé qu’Abu Dis (petite ville palestinienne incluse dans le grand Jérusalem et séparée de la ville par le tracé du mur) devienne la capitale de l’Etat palestinien.

Jérusalem, ville de résistance

Aujourd’hui il y a un peu moins de 300000 habitants à Jérusalem-Ouest et un peu plus de 500000 à l’Est. Les Palestinien-ne-s sont à peine majoritaires dans ce qui aurait dû être en théorie la capitale de leur Etat.

Les attaques sont incessantes dans les quartiers palestiniens et on parle d’une troisième Intifada qui commencerait à Jérusalem. La tension est extrême dans tous les quartiers :

  • Silwan où, depuis 1991, des centaines de colons intégristes sont installés, provoquant la bunkerisation du quartier et une répression permanente contre la population. À plusieurs reprises des enfants ont été arrêtés.
  • Cheikh Jarrah, quartier envahi par des colons depuis 2000 et bien sûr la cour suprême leur a donné raison. Dans ces deux quartiers, des comités de citadins organisent la résistance
  • La vieille ville. Depuis longtemps, une secte intégriste menace de dynamiter l’esplanade des mosquées pour reconstruire le Temple. Jusque-là, ils ne pouvaient pas accéder à l’esplanade. En les laissant parader et revendiquer le droit pour les Juifs de venir prier au mont du Temple, Nétanyahou les utilise pour provoquer des violences quand il le décide.
  • C’est dans le quartier palestinien de Chouafat qu’un jeune Palestinien de 16 ans, Mohamed Abou Khdeir a été brûlé vif par des colons quelques jours avant le début de l’attaque contre Gaza en juillet 2014.
  • C’est à Jérusalem qu’une école mixte pour Juifs et Arabes a été incendiée et couverte de slogans racistes : «mort aux Arabes, stop à l’assimilation ».

Alors non. Jérusalem n’est pas la « capitale indivisible » d’un Etat juif qui opprime les non-Juifs. Cette ville appartient à tout le monde, croyants de toutes les religions ou non-croyants. C’est à Jérusalem que doit être imposée la seule solution raisonnable à cette guerre séculaire : l’égalité totale des droits et le vivre ensemble.

Pierre Stambul,
Avril 2015


SOLIDARITÉ AVEC LA TUNISIE

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COMMENT L’ALGERIE PEUT AIDER SA VOISINE TUNISIENNE?

HuffPost Algérie
par Nejma Rondeleux
le 19 amars 2015

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Au lendemain de l’attaque terroriste meurtrière qui a frappé la Tunisie, mercredi 18 mars, les Algériens s’interrogent sur les moyens d’aider, concrètement, leurs frères tunisiens, au-delà des mots de sympathie et des manifestations de solidarité.

Le café presse politique de Radio M, le talk hebdomadaire des journalistes, s’est fait l’écho, dans l’émission de ce matin, des ces propositions, relayées sur les réseaux sociaux et commentées dans la presse du jour: du soutien économique à la lutte contre le terrorisme en passant par la liberté de circulation.

LIRE AUSSI: Les Algériens choqués et solidaires: « ne laissons pas la Tunisie seule… »

Cet été, tous en Tunisie!

« Les Algériens ont un devoir de solidarité de partir en Tunisie », a d’emblée déclaré le journaliste Ihsane El Kadi qui a exprimé le souhait de voir « tous les Algériens se rendre en masse en Tunisie cet été pour soutenir l’économie tunisienne ». Une campagne dans ce sens a d’ailleurs été lancée sur Twitter à travers le hashtag #IwillcometoTunisia et sur Facebook via la page « Les Algériens aiment la Tunisie ».

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Photo postée sur le groupe Facebook « Les Algériens aiment la Tunisie ».

Investissements massifs

Au-delà du tourisme, l’Algérie à la possibilité de soutenir l’économie de la Tunisie en investissant « puissamment » le marché tunisien a souligné Ihsane El Kadi qui a rappelé « les tournants ratés de l’Algérie depuis 2011 ».

« On a prêté cinq milliards de dollars au Fonds monétaire international (FMI) en 2012, il était possible d’en réserver la moitié en aides directes à la Tunisie », a estimé le directeur de publication de Maghreb Emergent. « On n’a pas créé de fonds souverain mais on aurait dû dégager des possibilités d’investissement ».

La symbolique du FSM

Dans cinq jours s’ouvrira à Tunis le Forum social mondial (FSM) que les organisateurs ont décidé de maintenir malgré l’attaque terroriste, comme ils l’ont annoncé dans un communiqué diffusé, hier, 18 mars.

« Le comité d’organisation du FSM appelle toutes les composantes du forum social mondial à intensifier leurs efforts en vue de la mobilisation pour le succès de la prochaine session du FSM afin d’assurer la victoire de la lutte civile et pacifique contre le terrorisme et le fanatisme religieux qui menacent la démocratie, la liberté, la tolérance et le vivre ensemble ».

Une vingtaine d’associations et organisations algériennes ont annoncé leur intention d’y participer au côté des 2.967 organisations originaires de 111 pays enregistrées sur le site internet du Forum.

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Logo du FSM 2015

L’occasion pour Ihsane El Kadi de lancer un appel au Président de la République algérienne: « Je demande à Bouteflika de ne pas empêcher les altermondialistes algériens de se rendre en Tunisie pour le FSM comme l’a fait la police algérienne des frontières lors du FSM 2013 en empêchant deux bus de militants de rentrer en Tunisie ».

LIRE AUSSI: D’Alger à Sousse, du tout-gratuit au ralenti au tout-payant à vive allure

Coopération sécuritaire

La nécessité de trouver une solution rapide au cas libyen a été partagée par tous les journalistes du CPP. « Il faut faire plus d’efforts sur la Libye car c’est devenu le lieu central des problèmes de la région », a déclaré Hacen Ouali, journaliste à El Watan.

En participant à la résolution du conflit en Libye, l’Algérie joue son rôle de leadership régional a affirmé Mounir Boudjema, journaliste à Liberté. « Aider la Tunisie c’est notre devoir, en même temps c’est notre profondeur stratégique en terme de frontière commune ».

LIRE AUSSI: Début du dialogue inter-libyen mardi à Alger, la solution politique comme unique alternative

« Il y a un besoin d’Algérie en Tunisie qui doit aujourd’hui se faire de manière très forte, pas uniquement dans l’aspect sécuritaire », a conclu Saïd Djaafer, directeur du Huffington Post Algérie.

Café presse politique du 19 mars.2015
On SoundCloud

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PUBLICATIONS DE LA REVUE NAQD

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par Nadir Kadi
Reporters.dz
le 19 mars 2015

VIENT DE PARAÎTRE

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Hors série de la revue NAQD

Revue d’étude et de critique sociale Naqd

LES ENJEUX HISTORIOGRAPHIQUES AU MAGHREB ET AU MACHREK

Dernier titre de la série intitulée « Ecritures historiennes au Maghreb et au Machrek», le nouveau hors série de la revue Naqd est actuellement disponible en librairie à un prix avoisinant les 500 dinars.

Réunissant les contributions d’universitaires et de chercheurs exerçant notamment en Tunisie, en Belgique et en France, l’ouvrage traite d’historiographie, qui désigne l’écriture de l’histoire, et plus précisément ici, l’étude de la manière dont est écrite cette même histoire.

Il s’apparente, est-il indiqué dans la présentation, a un compte rendu «des contributions les plus significatives» des «journées d’études organisées à Tunis et à Bruxelles en 2010 et 2011» et consacrées aux enjeux historiographiques actuellement à l’œuvre au Maghreb et au Machrek.

Le dernier hors série de Naqd, dont la lecture reste accessible malgré un style d’écriture souvent académique, et dont les huit contributions présentées sont toutes traduites en langue arabe, conserve également une certaine «parenté» avec les précédents numéros de la revue, notamment consacrés, en plus des questions géopolitiques, à l’évolution des Etats indépendants depuis les années 1960.

L’objectif étant ici, sur près de 230 pages, «de mettre en lumière les évolutions récentes des historiographies du Maghreb et au Machrek» , souligne, en effet, Noureddine Amara, Candice Raymond et Jihane Sfeir, qui ont tous trois piloté la rédaction de l’ouvrage.

Ajoutant, cependant, que l’étude de l’écriture de l’histoire était très différente au Maghreb et au Machrek, notant en ce sens l’existence d’un «cloisonnement» entre
les travaux des historiens des deux espaces, il est également mentionné qu’au moment où au Machrek les «questionnements demeuraient embryonnaires», résultant essentiellement de travaux «individuels», la dernière décennie avait vu s’ouvrir dans les pays du Maghreb de nombreux «chantiers réflectifs» pavant la voie aux historiens à un effort «collectif d’introspection disciplinaire» sur les sujets politiques et sociétaux, centre des études historiques.
Textes également écrits en proposant des « approches critiques» et mêlant le théorique au factuel, la présentation des huit études proposées dans «Ecritures historiennes au Maghreb et au Machrek »,

le partage, par ailleurs, en trois chapitres principaux, «Fabrique narrative de la nation», «Échappées ottomanes» et «Retours à la marge», ce dernier étant consacré aux faits historiques marginalisés par la mémoire collective,

avec notamment un texte intitulé «Minorités noires et esclavage au XIXe siècle dans l’historiographie du Maghreb» , écrit par Inès Mrad-Dali, enseignante et chercheuses à la Faculté des lettres et des sciences humaines de Sousse. Ou encore une étude de Jocelyne Dakhlia, du centre d’étude EHESS (Paris), sur l’image du «harem au Maghreb» . Documents de qualité, proposés aujourd’hui par Naqd, l’une des rares revues du type existant en Algérie,

le chapitre «Fabrique narrative de la nation» retient également l’attention par la mise en parallèle de deux textes abordant deux « expériences historiques distinctes », deux exemples concrets d’écriture de l’histoire, que sont le cas de l’Algérie post-indépendance et celui de l’histoire palestinienne, qui s’écrit, selon l’auteur, sur la mémoire de la « Nakba » de 1948.

Ces deux textes sont respectivement signés par Karima Dirèche, chercheuse au CNRS (France), et Jihane Sfeir, maître de conférences en histoire à l’Université libre de Bruxelles.

Pour rappel, la revue Naqd est fondée en 1991 à Alger par une douzaine d’intellectuels réunis jusqu’en 1993 sous la direction de l’historien Saïd Chikhi.

Le titre, bisannuel, aujourd’hui placé sous la direction de l’historien Daho Djerbal, avait consacré son numéro publié au début de l’année 2014 et toujours disponible dans certaines librairies, aux questions géopolitiques.

En effet, en écho à l’actualité, il avait été intitulé «Machrek Maghreb Sahara Sahel. La nouvelle donne géostratégique».

Auteur: Nadir Kadi

sources: http://www.reporters.dz/revue-detude-et-de-critique-sociale-naqd-les-enjeux-historiographiques-au-maghreb-et-au-machrek-au-menu-du-dernier-numero/45926


Voir aussi

كريتيكا |دحو جربال ورسيد سيدي بومدين |حلقة كاملة

Émission de KBC avec DEHOU DJERBAL et RACHID SIDI MOUMEDIENNE

VIDÉO YouTube
https://www.youtube.com/watch?v=8jKRQimrfnA

elkhabar kbc

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reprise sur raina le 13 mars 2015 1

Débat intéressant entre Dehou Djerbal et Rachid Sidi Boumédienne autour des problèmes actuels de notre pays et la contribution de la Revue NAQD
dans ce domaine.

http://www.raina-dz.net/spip.php?article769

imp*http://www.raina-dz.net/spip.php?page=imprimir_articulo&id_article=769


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