RÔLE STRATÉGIQUE DE L’ÉCOLE

pdf-3.jpg IL EST LÀ, EN NOUS, LE DAECH QUI NOUS MENACE, PAS DANS LES RIVAGES DE SYRTE

Mohamed Saadoune

Huffpostmaghreb

le 21 décembre 2015

n-enfants-algrie-large570.jpgDes enfants à El Abiodh Sidi Cheikh | daguett.fr/flickr

Quelques mois après avoir mené l’Algérie en bateau en créant la polémique aussi furieuse qu’inutile sur l’usage de la darija dans l’école, Mme Nouria Benghabrit donne des chiffres sur la performance du système éducatif national qui donnent froid dans le dos.

Et qui resituent la question de l’école dans sa vraie dimension – la qualité de l’enseignement, les moyens qu’on lui donne, les programmes, la pédagogie – au lieu de cette brumeuse histoire de Darija qui a permis d’allumer, une fois de plus, les fausses polarisations politico-idéologiques.

| Sur 1000 élèves admis à l’école primaire la même année, 41 seulement obtiennent le baccalauréat. Un désastre en chiffre qui nous dispense d’aller chercher une langue – arabe ou étrangère, c’est selon – comme bouc-émissaire d’une terrible absence de vision. |

Le chiffre est tellement bas que certains mettent en doute la fiabilité de l’information statistique donnée par Mme Benghabrit. Cela donne matière à discussion entre statisticiens, mais au-delà du chiffre, on sait que le système éducatif algérien va mal. Très mal. Même si le chiffre de la ministre peut-être sujet à discussion – et il en faut -, la question de l’école algérienne est centrale.

LIRE AUSSI : Parole d’enseignante: Je n’ai rien contre Nouria mais je n’enseignerai pas en Benghabrit

Le mouvement national algérien a fait de l’école une promesse aux générations à venir qu’ils ne vivront plus dans les ténèbres où l’ordre colonial a plongé leurs parents. À la veille du coup de rein de survie que furent les manifestations du 8 mai 1945, la France coloniale avait réussi à détruire les vieilles structures de l’enseignement pour propager l’ignorance généralisée. La clochardisation des algériens avait atteint des sommets.

L’école, une question existentielle

L’école était vue dans le discours des divers courants du mouvement national comme une injustice à réparer mais également une question existentielle: celle qui va donner à la nation l’armée des gens instruits et formés, des citadelles qui nous éviterons la situation infâme où l’ordre colonial avait mis les Algériens. Des indigènes, des sous-humains…

| Bien entendu, nos anciens pensaient qu’il nous faudrait une armée pour défendre le pays et ses frontières. Mais, même si souvent leur instruction n’était pas grande, ces anciens, nos parents, avaient compris que le grand bouclier de la nation qui permettrait à cette armée d’assumer bien son rôle, ce sont des femmes et des hommes instruits, bien formés, capables de déchiffrer le monde dans lequel ils vivent; des femmes et des hommes qui construisent le présent et l’avenir. |

La sécurité nationale, dans son sens le plus durable, est celle qui se forge à l’école. Le meilleur système de défense est dans le savoir, la formation, la compétence. Le meilleur système de défense ne réside pas dans le nombre des soldats et dans la qualité de son équipement.

LIRE AUSSI : Violences d’enseignants : Comment le petit Raouf a cessé d’aimer son école…

Une armée est plus utile et plus efficace dans un pays où le savoir est fortement diffusé. C’est dans l’école et son efficacité que se mesurent la force et le potentiel d’une nation et non l’émergence subite – et sans cause – de nouveaux riches, ces «Tycoon» d’opérettes qui nous ont fichu une honte planétaire.

L’échec de tous les clans

Et ce chiffre de 4% d’enfants algériens avancé par Mme Benghabrit est glaçant. Effrayant. Il est le signe de l’échec monumental des Bouteflika, des Toufik et de tous les clans qui se disputent le pouvoir et la rente.

Durant la dernière décennie – on n’en parle plus avec la chute du prix du baril – on a eu une multitude de propositions sur l’usage des surplus financiers algériens : fonds souverains, infrastructures, redistribution.

Quelques-uns, peu nombreux, ont suggéré de les investir dans la formation, l’enseignement, dans la modernisation radicale de nos universités. On pouvait même le faire par de l’importation d’enseignants-experts pour apporter une formation de qualité à nos enseignants, réhabiliter le circuit éducatif de l’école à l’université.

La dépense – ce mot qui fait frémir nos «libéraux »- aurait été autrement plus rentable qu’importer une autoroute pour importer ensuite les voitures qui roulent dessus. Et ensuite le gasoil pour les faire marcher…

Au lieu d’être exigeant dans ce domaine vital, existentiel même, de l’éducation, on a laissé les choses se dégrader. On s’est gargarisé des grands chiffres : le nombre d’élèves et d’étudiants et les « dépenses » censées être faramineuses que l’État « consent. »

De la pure démagogie dans un pays où le système politique a fait fuir la crème des élites, un système où il ne s’agit pas d’être compétent et instruit mais d’être capable de « frapper son coup » (Adhrab Dharbtak) et d’avoir des connaissances dans un des carrefours du pouvoir.

L’école n’a pas été mise à l’abri de cette régression. Nos valeureux militants de la cause nationale la pensaient comme un lieu privilégié de transmission du savoir avec des maîtres et des enseignants respectés prodiguant de la connaissance et l’appétit d’apprendre. Ils avaient une hiérarchie des valeurs où le savoir était en «haut».

Cette hiérarchie est aujourd’hui inversée. Le travail – et le savoir -, c’est pour les naïfs, ceux qui ne savent pas « frapper leur coup. » Cela donne cette réalité algérienne qui veut que les études ne mènent nulle part et que le savoir académique et scientifique ne pèse pas lourd devant une connaissance (une ma3rifa) dans l’administration ou au gouvernement.

On ne peut même pas se réjouir du nombre important ou non des bacheliers. Il suffit d’aller à l’université et de voir la qualité des diplômés qui en sortent. Nous avons là – moyennant quelques exceptions que la sociologie peut expliquer – la mesure d’une régression vers l’ignorance, ce terrain fertile de tous les charlatanismes dont le coût social – et politique – est très lourd.

On parle beaucoup de la surveillance des frontières de notre grand pays et des risques qui nous viennent de l’extérieur. On omet de regarder l’ampleur de la Bérézina du régime algérien. Elle est dans l’état lamentable de l’école. Il faut le répéter, en arabe, classique, darija et dans toutes les langues du monde: c’est là, chez nous, en nous, que se trouve le Daech qui nous menace, pas dans les rivages de Syrte.

LES TRAVAILLEURS DE LA SNVI ET L’ÉCONOMIE NATIONALE


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HYPOCRISIE NÉOLIBÉRALE FACE AUX OUVRIERS DE ROUIBA par Saoudi Abdelaziz – blog algerieinfos-saoudi – le 2 décembre 2015;


إشتباكات عنيفة في المؤسسة الوطنية للسيارات الصناعية سوناكوم snviVIDÉO – facebook – YouTube;


HONNEUR À NOS TRAVAILLEURS QUI DÉFENDENT L’ÉCONOMIE NATIONALE ET LEUR GAGNE PAIN!raina.dz – le 1er décembre 2015;


[
LA RÉVOLTE DES TRAVAILLEURS DU COMPLEXE DE VÉHICULES INDUSTRIELS DE ROUIBAAlger Républicain – le 2 décembre 2015;->#4]


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HYPOCRISIE NÉOLIBÉRALE FACE AUX OUVRIERS DE ROUIBA

par Saoudi Abdelaziz – blog algerieinfos-saoudi – le 2 décembre 2015

Les mouvements sociaux sont médiatiquement soutenus comme « masse de manœuvre » espèrent les partisans d’une rupture néolibérale franche au sommet de l’Etat. Rupture qui permettrait de rompre franchement avec les responsabilités sociales de l’Etat algérien, que l’équipe actuelle au pouvoir, encore sensible aux pressions sociales, hésite à abandonner.

Cette hésitation s’exprime dans la déclaration du secrétaire général du FLN . La Loi des Finances 2016 « n’a pas touché aux prix du pain et du lait », déclare Saadani, faisant mine d’ignorer l’annonce à l’APN par le ministre des finances du démantèlement du soutien des prix des produits de première nécessité, dans les deux années à venir.

Les pouvoirs discrétionnaires de modification budgétaire conférés au gouvernement par l’article 66 de la Loi des finances font craindre des mesures antisociales à plus cour terme, dans les mois à venir…

Louiza Hanoune, mouillée dans les luttes de clans du système depuis plus de vingt ans, semble personnifier le risque de grande mystification analogue à celle qui a conduit certains secteurs syndicaux à soutenir contre le président en place, les ambitions du maréchal Sissi. Certains sont aujourd’hui en prison, pendant que Sawiri vient d’acheter Euronews et se lance dans la politique, imité récemment par son congénère algérien Issad Rebrab.

Secteur public interdit dans l’industrie?

« Les travailleurs de la SNVI en colère » titre sur 8 colonnes à la une Liberté qui affiche une grosse photo de face à face spectaculaire -genre place Tian’an men– entre ouvrier solitaire et forces anti émeute ultra équipé. Frissons… “C’est la première fois dans l’histoire de la SNVI que les gendarmes pénètrent dans l’usine, cela ne s’est pas produit même lors des événements du 5 Octobre 1988”, rapporte Madjid T dont le reportage indique que le complexe est poussée inexorablement à une liquidation par le vide: caisses d’exploitation vide, 13 milliards de stock véhicules bloqués à la livraison pour de petites pièces non commandées, etc…

Le correspondant d’El Watan Kebbabi Ramdane énumère: « Nos pièces ont été bloquées au port durant 18 mois exprès pour saboter la SNVI et préparer le terrain pour sa privatisation». «Nos bus et nos camions sont très demandés sur le marché, mais si on n’a pas de pneus ou de pièces, on ne peut rien fabriquer». « l’entreprise Tahkout, s’est accaparée de grandes surfaces de terrain de la SNVI «avec la complicité de certains responsables».

La duplicite médiatique

Mais derrière le travail des journalistes rendant compte de ce qui se passe sur le terrain, la menace de liquidation de la SNVI ne semble pas émouvoir les maîtres de la ligne éditoriale.

Belle duplicité dans Liberté, où l’éditorialiste Omar Ouali brode sur le principe de base de la ligne éditoriale rébrabiste : l’industrie ne peut fonctionner en secteur public. Le journaliste a l’ironie facile: « la SNVI est plus connue pour ses poussées de fièvre syndicale que pour la marque de ses véhicules ». Il absout les pouvoirs publics: « Pourtant, on ne peut accuser l’État de n’avoir rien fait, puisque les gouvernements successifs ont eu à mettre en place plusieurs plans de refinancement, à coups de milliards de dinars ». Et de conclure: « Une chose est néanmoins sûre: ce mastodonte qu’est la SNVI est dans une situation ingérable de l’avis même de ses cadres ».

Kharroubi Habib conteste ce diagnostic néolibéral dans son analyse du Quotidien d’Oran: « L’on sait le collectif de cette entreprise très combatif quand il pressent que des gestions menacent sa pérennité (…) Si leur entreprise en arrive à « rater » l’opportunité de son redressement malgré les aides et autres soutiens accordés par l’Etat, cela est confirmation pour ses travailleurs que sa disqualification en tant qu’entreprise publique performante est toujours d’actualité pour les tenants de l’économie ultralibérale auxquels cette gestion aléatoire qui y règne donne prétexte pour faire valoir qu’il n’y a rien à attendre de concluant de cette entité industrielle tant qu’elle sera sous statut publique ».

Kharroubi ajoute: « Quand Rouiba bouge, cela a toujours été mauvais signe pour les gouvernants en place. Le coup de colère des travailleurs de la SNVI pourrait bien être le déclencheur d’une protesta d’une autre envergure. Les autorités ne s’y sont pas trompées et ont dépêché d’impressionnantes forces de sécurité sur les lieux ».

Pour les médias néolibéraux qui prône une approche différente que celle du chroniqueur oranais, dans le mécontentement de Rouiba, Il n’y a qu’une choses de réjouissante, c’est l’espoir que cette colère ouvrière soit le point de départ d’un mouvement généralisé en mesure de faire jonction avec les forces qui poussent à la « transition politique », comme moyen d’opérer la rupture néolibérale franche, délestée du « populisme », c’est à dire le changement rapide de Président préconisé par le Canal-historique, sans transformation raisonnée des règles du jeu politique.

Affirmant sa solidarité avec les revendication des travailleurs du complexe de Rouiba, Fateh Agrane, un ancien du Pags écrit:

« Honneur à nos travailleurs défendant l’économie nationale et leur gagne pain!

Solidarité avec nos cadres, nos producteurs, notre classe ouvrière!

Dans les actuelles circonstances des plus troubles vigilance, et toujours plus de vigilance pour que ces luttes ne soient détournées de leurs objectifs, comme le 5 octobre 1988. »

Sources blog algerieinfos

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إشتباكات عنيفة في المؤسسة الوطنية للسيارات الصناعية سوناكوم snvi

VIDÉO

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https://www.youtube.com/watch?v=PACMvWdoR2w

Sources: Facebook

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HONNEUR À NOS TRAVAILLEURS QUI DÉFENDENT L’ÉCONOMIE NATIONALE ET LEUR GAGNE PAIN!

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Fateh Agrane

raina.dz

le 1er décembre 2015

arton1060.jpgLes travailleurs de la SNVI de la zone industrielle de Rouïba Alger, qui sont sortis aujourd’hui, mardi 1er décembre, pacifiquement dans la rue. ont été réprimés par les forces de l’ordre, Ils ne l’ont pas fait pour des revendications strictement corporatistes. Il l’ont fait pour la défense de leur outil de production menacé, plus que jamais par la politique prédatrice néolibérale menée au forcing ,depuis cela un temps dans notre pays.

On veut étouffer SNVI en le privant de commandes et de plan de charge même des commandes de l’Etat!

Ils ne sont pas sortis pour demander des avantages fiscaux et parafiscaux, d’avantage de cadeaux, comme le fait «la famille oligarque», leurs revendications vont dans le sens des intérêts patriotiques du pays et de sa souveraineté ,de la défense de l’industrie nationale agressée!

La répression ne réglera jamais les problèmes , l’ouverture du dialogue avec les travailleurs est un devoir patriotique à privilégier

Honneur à nos travailleurs défendant l’économie nationale et leur gagne pain !
Solidarité avec nos cadres, nos producteurs, notre classe ouvrière !
Dans les actuelles circonstances des plus troubles, vigilance, et toujours plus de vigilance pour que ces luttes ne soient pas détournées de leurs objectifs, comme le 5 octobre 1988.

Fateh Agrane

Sources: raina.dz

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LA RÉVOLTE DES TRAVAILLEURS DU COMPLEXE DE VÉHICULES INDUSTRIELS DE ROUIBA

par Alger républicain

jeudi 3 décembre 2015

Mardi 2 décembre, les travailleurs de la SNVI sont de nouveau sortis pour dénoncer le retard dans le versement des salaires du mois d’octobre et de novembre.

Les promesses qui leur avaient été faites, par les premiers responsables de l’entreprise, n’ont pas encore été concrétisées. Ne pouvant plus attendre et pour se faire entendre, ils ont fermé la route qui relie Rouiba à Régahïa.

Immédiatement, les troupes anti-émeutes de la gendarmerie se sont amassées en grand nombre tout près du lieu de rassemblement des travailleurs et pour se préparer à intervenir. Les tentatives de négociations entreprises par les officiers de la gendarmerie n’ont pas convaincu les travailleurs décidés à continuer leur mouvement jusqu’à la satisfaction de leur revendication.

Vers les coups de 10h 30 mn les troupes anti-émeute ont lancé l’attaque, d’abord par tirs de bombes lacrymogènes puis en fonçant sur les travailleurs de manière à les forcer à rentrer dans l’enceinte de l’usine. Des échanges de jets de pierres et d’autres objets se sont poursuivis pendant quelques minutes avant que les travailleurs ne rejoignent leur usine et ferment le portail. Les quelques piétons qui se trouvaient dans les parages ont été scandalisés par la vue de ce spectacle montrant les gendarmes qui agressaient de manière violente les travailleurs qui ne demandaient rien d’autre que de pouvoir se consacrer paisiblement à leur travail.

rouiba_anp-1-12-2015.jpg Grève des travailleurs du Complexe des Véhicules Industriel de Rouiba .DR
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Déjà, avant leur précédente manifestation du 3 novembre, les travailleurs avaient, à plusieurs reprises, attiré l’attention des responsables de leur entreprise sur les blocages qui paralysent les activités de production depuis deux années, en raison des mesures des services des douanes de ne pas libérer les marchandises achetées par la SNVI pour les besoins de sa production.

Malgré les promesses du ministre de l’Industrie et du Premier ministre, les alertes des travailleurs n’ont pas eu l’effet escompté. Au contraire, ce sont leurs salaires qui commencent à enregistrer des retards dans leur versement. D’habitude, les salaires sont versés le 26 de chaque mois. Celui du mois d’octobre a pris du retard. La promesse qui leur a été faite de le recevoir le 2 novembre n’ayant pas été tenue, ils sont sortis le lendemain 3 novembre pour exprimer leur colère.

Colère qui en dit long sur leur désespoir et leur incompréhension de l’écart qui sépare le comportement et les discours des responsables au niveau de l’entreprise comme au niveau de l’Etat en ce qui concerne les problèmes qui paralysent leur entreprise depuis deux années. Cet écart n’est pas uniquement le résultat de l’incompétence, c’est aussi et surtout le fruit de manigances qui visent la destruction du secteur public pour laisser la porte grande ouverte à tous les aventuriers qui se proclament du jour au lendemain investisseurs et pour qui les caisses de l’Etat sont toujours généreusement disponibles pour qu’ils les vident sans retenue.

Cette dérive se déroule à ciel ouvert. Elle n’échappe à personne et surtout pas aux travailleurs de la SNVI. Chaque matin, ils constatent, au moment où leur usine est paralysée par des mesures incompréhensibles, les faveurs qui sont accordées au fabricant étranger, Mercedes Benz qui se trouve dans la même zone que leur usine. «Fabriquant»? En réalité, Mercedes Benz Algérie ne fait que du montage qui n’apporte strictement rien à la formation d’une main d’œuvre qualifiée ni ne se traduit par un transfert de technologie.. Contrairement à la SNVI qui détient un savoir-faire, accumulé pendant plusieurs dizaines d’années, dans toutes les opérations de fabrication du véhicule industriel, depuis la fonderie et l’usinage jusqu’au montage.

Faut-il rappeler que la SNVI a été le lieu où l’organisation de production industrielle a pris naissance en Algérie? Elle a été le creuset où se sont forgées les premières compétences qui ont servi à la création de l’industrie mécanique nationale. C’est aussi le lieu où sont pratiqués, avec une maitrise totale et dans les modes opératoires les plus complexes tous les métiers de la mécanique. Brisant ce processus bénéfique pour l’indépendance réelle du pays, les responsables du secteur, aux plus hauts niveaux de l’Etat, ont opté pour la voie de la facilité. Ou plus exactement pour la voie de l’enrichissement facile et rapide des hommes d’affaires de tout acabit. Au lieu de faire fructifier ce savoir et de le consolider par des mesures qui auraient renforcé le processus d’amélioration continue enclenché il y a déjà 45 ans, comme par exemple la promotion de la Recherche et Développement des Produits.

Ce 1er décembre, les travailleurs de la SNVI, sont sortis pour les mêmes raisons que le 3 novembre. Après deux mois sans salaires, mais avec une plus grande détermination qui ne cache pas le sentiment que quelque chose de grave se prépare et qui peut mettre en danger leur avenir et celui du pays. Les révélations de la presse sur le contenu de la loi de finances 2016 à l’APN n’ont pas été sans effets sur leur révolte légitime.

C.P.
03 décembre 2015

Sources: Alger Républicain

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PROJET DE LA LOI DE FINANCES 2016: L’OLIGARCHIE CONTRE LA SOCIÉTÉ

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le 29 novembre 2015

arton1057.jpg Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires. Elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de

vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.

La maternité et l’enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciale.

Tous les enfants, qu’ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même protection sociale. (Déclaration universelle des droits de l’homme)

En 2014, pour la première fois depuis des décennies, le montant des importations a dépassé celui des exportations, ces dernières étant constituées à 99 % des hydrocarbures et de leurs dérivés. En date du 08 novembre 2015 le ministre du commerce a affirmé que les opérations de surfacturation représentent environ 30% du montant des importations annuelles soit 20 milliards de dollars de transfert illicite de devises à l’étranger » et ce uniquement pour l’année 2014.

Et curieusement une grande partie des experts, occupés jusque-là à opérer des tirs croisés contre la baguette de pain et le sachet de lait subventionnés, se sont empressés à remettre en cause ces chiffres donnés par un ministre du commerce en exercice. Il est vrai que par sa déclaration, il a apporté une fausse note à la symphonie orchestrée contre les transferts sociaux et les subventions.

telechargement-13-9fea5.jpg Pourtant le montant estimé de ces transferts illicites (l’équivalent de 1 651 Mrds de Dinars) dépasse le montant total consacré aux transferts sociaux pour l’année 2014 (1 609 Mrds DA). Il représente même 7,73 fois le montant de la totalité des subventions aux prix des produits alimentaires tant décriées (213 Mrds de DA).

Le ministre des finances veut rassurer en affirmant devant l’APN que « les réserves de change, de l’ordre de 121 milliards de dollars à fin 2016, couvriront largement les importations de l’Algérie pendant 23 mois ». Il n’a pas dit deux années ou trois années mais 23 mois car le premier argentier du pays n’improvise pas et a le sens de la précision puisqu’il nous dit «Nous avons une vision stratégique. Nous savons pertinemment quelles seraient les recettes de l’Algérie mois par mois jusqu’à 2019».

Et 23 mois d’importations nous donnent un montant annuel de 63 milliards de DA soit un montant supérieur à celui enregistré pour 2014 (58,6 milliards de dollars).

Le débat sur le projet de loi de finance 2016 aurait dû être l’occasion pour une évaluation sans complaisance de cette hémorragie et pourquoi il aura suffi de quelques mois de baisse des prix du pétrole pour mettre en évidence la fragilité des équilibres macro-économiques du pays malgré des recettes cumulées qui dépassent les mille milliards de dollars ces dernières 15 années.

Pourquoi chercher puisque le bouc émissaire est vite trouvé? Ce sont les dépenses sociales tirées par la boulimie l’algérien lambda qui «coûte très cher» à l’état et qui doit se préparer à supporter le fardeau d’une austérité qui ne veut pas dire son nom.

Cette austérité a été inaugurée par la loi de finance complémentaire 2015, dictée par l’oligarchie, qui a décidé de financer ses cadeaux fiscaux par la population laborieuse puisque la rente pétrolière s’amenuisait avec la chute des prix du pétrole.

Malgré la chute des revenus du pays, la LFC 2015 n’a pas manqué d’octroyer de nouveaux cadeaux fiscaux au patronat et aux riches. De nouvelles exonérations fiscales (TVA) et réductions des taux (IBS et des droits de douanes) avaient été décidées.

Le taux d’imposition de l’impôt sur le patrimoine avait été relevé à 100 millions de DA (En 2013 ce seuil avait connu un premier relèvement de 30 MDA à 50 MDA).

Une amnistie fiscale partielle appelée pudiquement « Mise en Conformité Fiscale Volontaire » avait été décidée pour les auteurs de malversations financières tandis que les fraudeurs de la sécurité sociale en défaut d’affiliation ou de paiement voyaient leurs pénalités effacées. Pourtant les dizaines de milliards de pénalités effacées, annoncées par la presse, ne se sont pas répercutées par des nouvelles affiliations à la SS selon les prévisions de clôture 2015 de la CNAS établies après l’échéance accordée aux fraudeurs.

Mais le plus beau cadeau a été la réduction de 2 à 1 % du taux de la taxe sur l’activité professionnelle (TAP) qui, il faut le rappeler, constitue la ressource principale des budgets des collectivités locales. Et pour compenser le manque à gagner pour ces budgets suite à cette réduction on a décidé d’imposer d’avantage le pauvre citoyen y compris les smicards habitant les logements sociaux ou précaires :

Augmentation des droits de timbres fiscaux pour tous les documents administratifs, augmentation de la taxe foncière, doublement des tarifs de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères et augmentation des taux de la taxe d’habitation. Cette dernière taxe, en plus de sa hausse est dorénavant généralisée à toutes les communes (jusqu’à 2015 cette dernière était perçue uniquement dans les communes chefs-lieux de daïra pour les Wilaya autres que, Alger, Oran, Constantine et Annaba).

Avec le projet de loi de finance 2016 l’oligarchie passe à une vitesse supérieure dans le but de s’accaparer des richesses nationales quitte à ne laisser derrière elle que précarité, pauvreté et désolation.

1- En plus de reconduire toutes les mesures impopulaires de la LFC 2015, ce projet prévoit, à son tour, d’instaurer, au profit du patronat, d’autres réductions (taxe de publicité foncière) et exonérations fiscales (annulation de l’obligation de réinvestir une partie des bénéfices réalisés grâce aux avantages fiscaux. …)

2- Mais le plus grave nous vient de cette OPA sur le patrimoine public, qui vise la privatisation totale des entreprises publiques, l’annulation du droit de préemption, l’ouverture aux financements extérieurs, la remise en cause de la règle 51/49%, la main mise sur le foncier…). Ne dit-on pas que l’appétit vient en mangeant!

3- Et comme les prévisions ne semblent pas annoncer un relèvement des prix du pétrole on a décidé que c’est au pauvre citoyen de supporter le fardeau. Les prix de l’électricité, de l’eau et des carburants vont connaitre des augmentations. Ces augmentations toucheront de plein fouet 80 % de la population en érodant d’avantage son pouvoir d’achat déjà entamé par la dévaluation du dinar (- 40 % de sa valeur à ce jour). La dévaluation du dinar se répercutera sur les prix des produits de consommation au trois quart importés) et l’augmentation des prix énergétiques et de l’eau vont se répercuter sur le reste, plus particulièrement les produits agricoles et le transport.

La généralisation de la précarité guette 80 % de la population et non uniquement le premier quintile (les 20 % les plus démunis soit 8 millions) comme veulent nous le faire croire les décideurs et les experts néo libéraux.

En Algérie le gouvernement lui-même a reconnu qu’il y a 12 millions de personnes à qui il arrive de ne pas trouver quoi manger ou faire manger leurs enfants en annonçant qu’en 2015 1.7 millions de ménages avaient bénéficié du couffin de ramadan (selon l’ONS 2014 un ménage, des premiers quintiles, est constitué de 7 personnes en moyenne).

En réalité le nombre des démunis est supérieur à 12 millions car beaucoup de pauvres, par dignité, refusent de subir l’humiliation imposée par les procédés de distribution des couffins de ramadan.

Le FCE lui-même a identifié 24 millions d’algériens (3.4 millions de ménages) démunis, soit 60 % de la population totale, dans son plaidoyer-catastrophe remis au 1er ministre le 27/07/2015. Dans ce plaidoyer le forum, confondant le montant total des «transfert sociaux (1 711 Mrds de dinars)» avec celui du «soutien aux prix alimentaires (225.5 Mrds de dinars)» propose de supprimer la totalité des transferts sociaux (soutiens à la santé, à l’éducation et aux démunis compris) en contrepartie d’une insignifiante allocation (de 20 à 46 DA par personne et par jour) à octroyer aux 3.4 millions de ménages ayant un revenu inférieur à une fois et demie le SNMG.

En vérité ils sont plus que 24 millions car le FCE considère qu’avec un salaire supérieur à 1.5 fois le SNMG (30 000 DA/mois par exemple) on n’est pas démuni en Algérie.

L’amère réalité nous dit que le taux des algériens qui vivent dans l’extrême pauvreté, la pauvreté ou la quasi-pauvreté dépasse 80 %.

Les dispositions de ce PLF 2016 conjuguées aux effets de la dévaluation du dinar s’apprêtent à faire basculer dans la pauvreté ou la précarité les 4/5éme de la population.

Autant dire que c’est la fracture sociale qu’on continue à vouloir provoquer à un moment où la nécessité de la construction d’un front intérieur est une nécessité de survie pour le pays afin de faire face à l’appétit vorace de l’impérialisme et à la montée du danger terroriste aux frontières et à l’intérieur du pays.

Au sujet des subventions de l’électricité et des carburants:

Il n’y a pas de consensus international autour des politiques de subvention énergétiques ni même sur leur définition. Ainsi les institutions au service des multinationales (FMI , IEA, OCDE, Banque mondiale) considèrent qu’est subvention «tout ce qui ne conduit pas les agents producteurs de combustibles à recevoir l’entièreté de la rente qui se fixe par rapport au prix international pour les énergies exportables, ce que contestent les économistes des pays exportateurs et de l’OPEP. Ceux-ci considèrent légitime de prendre le coût marginal de long terme interne comme benchmark, puisque cela relève d’un choix politique qui revient à faire bénéficier les consommateurs locaux de la rente, et non pas la compagnie pétrolière nationale et au-delà le budget public» (Voir IEA et al. 2010 cités par Dominique FINON).

Pour le capital international la subvention à la production ne dérange pas pourvu qu’elle aille dans les coffres des multinationales mais la subvention à la consommation, en vigueur dans les pays producteurs, destinées à préserver le pouvoir d’achat des populations serait la cause de tous les malheurs de l’humanité et de l’environnement.

Tous les pays du monde ont recours aux subventions dans les différents domaines mais curieusement 90% des études, menées par ces institutions au niveau mondial, sont consacrées aux pays en voie de développement. Et bien sur ces études, reprises en chœur par certains de nos experts recommandent aux pays producteurs de supprimer ces subventions qui seraient la cause de la surconsommation de l’énergie, du réchauffement de la planète et des déséquilibres budgétaires. De plus ces subventions profiteraient 7 fois plus aux riches qu’aux pauvres.

Ainsi l’inondation du marché mondial par l’Arabie Saoudite (11, 505 millions de barils/jour en 2014, presque 2 fois son quota) qui fait chuter les prix du pétrole de 120$ à 46 $/baril est encouragée par le capital international pour qui cette surproduction ne provoquerait ni surconsommation ni augmentation des gaz à effet de serre qui seraient plutôt l’œuvre du goinfre algérien qui gaspillerait l’énergie subventionnée et polluerait l’environnement.

Pourtant dans tous les pays du monde les dépenses de consommation des ménages ne sont pas, dans leur totalité, supportées directement par ces derniers. Les dépenses de santé, d’éducation, de logement et de transport sont en partie plus ou moins importantes supportées par l’état ou la sécurité sociale. Cette prise en charge par la collectivité de la satisfaction d’une partie des besoins socio-économiques s’effectue par le biais de la redistribution fiscale et sociale. Elle prend la forme d’une subvention aux prix des produits à leur production ou consommation comme elle peut intervenir sous forme de prestations individuelles ou collectives prises en charge sur le budget de l’état ou de la sécurité sociale.

En Algérie, comme dans la majorité des pays en développement, les transferts sociaux et les subventions jouent un rôle important dans la lutte contre les inégalités et la pauvreté. Ils représentent une composante majeure de la protection sociale des populations car les prix internationaux élevés pour la nourriture et l’énergie sont hors de portée des revenus de la population.

Les salaires en Algérie sont très bas et, ce n’est un secret pour personne, l’impôt sur le revenu composé dans sa quasi-totalité par la contribution des salariés a, depuis 2011, dépassé l’impôt sur les sociétés.

Les experts nous disent « C’est normal, dans tous les pays du monde l’impôt sur le revenu est supérieur à l’impôt sur les sociétés-dixit Mr Lamiri».

Cette affirmation est vraie pour les pays développés pour la simple raison que la part des salaires dans le PIB y est partout supérieure à 50 % atteignant même 75 % pour certains d’entre eux alors que pour l’Algérie elle est à peine égale à 27,0% (calculée selon les données du ministère des finances 2014) alors qu’elle était de 34,7 % en 1993 .

Même dans les pays voisins l’impôt sur les sociétés est supérieur à celui des salariés bien que le ratio salaires/PIB est supérieur à celui de l’Algérie et dépasse les 35 %.

Même avec les subventions les prix à la consommation ne sont pas aussi bas pour un algérien. Selon les statistiques françaises (UFC-Que choisir-2014) le prix d’un litre d’essence super à la pompe représentait le salaire moyen de moins de 05 minutes de travail pour un français alors qu’à la même année un algérien devait travailler 6 minutes 20 sec pour s’acheter un litre d’essence.

Pour se procurer un litre de lait Il fallait 30 secondes de travail à un français contre 7 min à un algérien, 14 minutes à un français contre 40 min à un un algérien pour un litre d’huile, 5 min contre 6 heures 25 min pour un kg de viande de bœuf.

Pour s’acheter une chaussure à bas prix il fallait 1 heure de travail à un français contre 10heures à un algérien et enfin pour consulter un médecin généraliste un français devait travailler 1 heures 24 min alors que l’algérien devait le faire pendant 5 heures.

Il n’est pas vrai de dire qu’il y a surconsommation en Algérie:

Certains experts nous répètent souvent que l’algérien est un goinfre coupable de surconsommation et de gaspillage mais évitent soigneusement de nous préciser leur référence et leurs normes et lorsqu’ils leur arrivent de donner des chiffres ils nous balancent souvent des chiffres qui ne correspondent pas à la réalité.

Or que nous apprennent les chiffrent officiels?

L’analyse de l’évolution de la part de la consommation des ménages dans le PIB en comparaison avec celle de l’Investissement met en évidence l’iniquité de la répartition des richesses en Algérie au profit du capital et au détriment des citoyens qui vivent de leur labeur.

La part de la consommation des ménages était égale à 61,8 % en 1989 soit une valeur très proche de celles enregistrées dans les pays voisins et dans les pays de l’OCDE.

Depuis 1990 et sous l’effet du programme d’ajustement structurel imposé par le FMI, ce ratio n’a cessé de diminué pour atteindre 51,6% en 1995, 41,6% en 2000 et 30,2% en 2008.

À partir de 2009 et suite à la hausse relative des revenus salariaux elle a commencé à se redresser légèrement pour se situer à 36,4 % en 2014 mais sans jamais atteindre ses niveaux des années 1980.

À titre de comparaison la part de la consommation des ménages dans les pays voisins ainsi que la moyenne observée dans tous les pays de l’OCDE a, depuis les années 1980 oscillé entre 60 % et 70 % du PIB. En 2013 elle était égale à 60,8% au Maroc, 68 % en Tunisie, 80,8% en Egypte et 61,8% en moyenne dans les pays de l’OCDE.

Cette baisse de la consommation des ménages en Algérie s’est faite, bien sûr, au profit des entrepreneurs à travers la formation brute du capital fixe dont le ratio FBCF/PIB après avoir oscillé entre 20 et 25 % de 1989 à 2007 a explosé pour dépasser dès 2009 celui de la « consommation des ménages »/PIB (soit 36,7% contre 36,4% en 2014).

Pourtant cette évolution de l’investissement ne s’est pas traduite, ces dernières années, par des taux de croissance économique en rapport avec ce ratio.

Même exprimée en dollars 2005 constant (pour tenir compte de l’inflation) la consommation par an et par habitant des ménages en Algérie est inférieure à 1000 dollars alors qu’elle dépassait 1200 dollars durant la période 1981-1987.

L’enquête sur la consommation des ménages pour 2011 réalisée par l’ONS a mis en évidence que la part des dépenses globales pour l’alimentation a été de 41,78% en 2011 Mais une analyse par déciles permet d’affirmer que 80 % de la population (D1 à D8) consacrent plus de 50 % de leurs dépenses réelles (hors loyers fictifs) à l’alimentation (Ce coefficient budgétaire dépasse 60% pour les 30 % d’algériens les plus démunis contre 28 % seulement pour les plus aisés (D10)).

Certains ont conclu hâtivement que les algériens sont des boulimiques qui ne pensent qu’à leur ventre (comprenez l’algérien lambda car les riches n’y consacrent que 28 %).

En 1857, le statisticien prussien Engel mettait en évidence que « plus une famille est pauvre, plus grande est la proportion de ses dépenses consacrée à l’alimentation « .

Cette loi continue d’être pertinente aujourd’hui à tous les niveaux de développement et dans toutes les régions du monde. Elle met en évidence la pauvreté qui sévit en Algérie et les inégalités qui l’accompagnent comme l’illustrent les ratios ci-dessus mais aussi l’écart qui sépare le niveau de vie de l’algérien de celui d’un citoyen des pays de l’OCDE puisqu’en moyenne ce dernier ne consacre que 15 % à l’Alimentation.

En matière de consommation d’énergie les antis subventions ont recours parfois à la surenchère en guise d’arguments afin de frapper les esprits. Ils nous disent par exemple «qu’encouragée par les bas prix, la consommation énergétique de l’Algérie a triplé entre 2005 et 2014» et «la consommation moyenne d’énergie de l’Algérien est le triple de la moyenne mondiale »El Watan du 05/10/2015- .

En réalité, entre 2005 et 2014 la consommation n’a augmenté que de 73 % et non 200% (APRUE).

En 2012, par habitant et par an un Algérien a utilisé, en moyenne 1 237 kg d’équivalent pétrole (kgep) d’énergie contre une moyenne mondiale de 1 898 kgep/hab et 4 182 kgep pour un citoyen des pays de l’OCDE.

Même comparé aux citoyens de tous les pays exportateurs du pétrole du monde l’Algérien est celui qui consomme le moins d’énergie en comparaison avec le Libyen (2 729), l’Iranien (2 883), le Vénézuélien (2 558) et très nettement au-dessous de la consommation moyenne d’un résident des pays du Golf (supérieure à 6 000 kgep/hab dans chacun d’entre eux).(données banque mondiale 2015).

La même constatation peut être faite en matière de consommation d’électricité.

En 2012, l’Algérien a consommé en moyenne, 1236 kwh contre une moyenne mondiale de 3 064 kwh par habitant (8 082 kwh/hab pour les pays de l’OCDE).

Là aussi l’Algérien se retrouve dernier au classement en comparaison avec ce que consomment en moyenne les citoyens dans la totalité des pays exportateurs du pétrole. Cette consommation est de 2762 kwh/hab en Iran, 3413 au Vénézuéla et 4707 en Libye. Au même moment un citoyen des pays du golf a consommé entre 8 400 kwh/an (Arabie saoudite) et 16 000 kwh/hab (Qatar). Même en Tunisie (avec 1 411 kwh/hab/an) et en Egypte (1 700 kwh/hab), pays importateurs de pétrole et de gaz la consommation d’électricité par habitant a été supérieure à celle de l’Algérie. (BM-2015)

Même en termes de développement durable, en 2011 le taux d’émission de CO2 en Algérie (3.316 tm/hab) est largement inférieur à la moyenne mondiale observée (4.94 tm/hab) et à celui enregistré dans chacun des pays producteurs d’hydrocarbures. (BM-2015).

Au sujet des prix de l’électricité et des carburants

Comme noté plus haut tous les pays en voie de développement producteurs d’hydrocarbures subventionnent les prix de l’énergie en prenant comme référence le cout marginal de long terme afin de faire bénéficier leur population et non les multinationales ou les capitalistes locaux de la rente .

C’est ce que veulent annuler les néo libéraux pour orienter ce différentiel vers le capital pudiquement désigné sous le vocable investissement même s’ils nous disent que ce différentiel pourra être orienté vers la santé et l’éducation. Pourtant, ne craignant nullement la contradiction les antis subventions, dès qu’on leur parle santé, nous assènent que les soins coutent très cher à l’état et qu’il appartient au citoyen de mettre la main à la poche ou que la quantité n’a pas donné de résultats dans l’éducation et qu’il faut cibler la qualité maintenant en instaurant une sélection par l’argent bien sûr.

Le FMI, La banque mondiale, les spécialistes locaux, certains politiques et le gouvernement, pour justifier l’augmentation des prix de l’électricité et des carburants, nous balancent que «tous les pays abandonnent les subventions, le Koweït les a supprimées, les émirats arabes ont fait de même ainsi que les USA.

Or qu’en est-il en réalité?

En octobre 2014 Le Koweït a triplé le prix du diesel et du kérosène, carburants qui sont très peu consommés en les portant de 19 cents de dollar à 59 cents par litre mais a maintenu intacte la subvention de l’électricité et de l’essence qui est le carburant le plus utilisé dont le prix à la pompe est toujours 0.22 cents de dollars le litre. À titre comparatif en 2014 le litre d’essence coutait 0.27 cents de dollars le litre. En Arabie Saoudite le litre d’essence coute s (0.16 cents de dollars) et au Venezuela 0.08 cents de dollar le litre.

Mais le plus important est que les «subventions d’énergie» représentent une très grande part dans le revenu des algériens comparativement à ces pays qui ont des salaires autrement plus élevées qu’en Algérie. L’Arabie Saoudite par exemple a dès le début de l’hiver arabe, que certains appellent printemps, décidé d’octroyer l’équivalent de deux mois de traitement à tous ses fonctionnaires qui bénéficiaient déjà de très haut salaires. Ce qui est le cas de tous les pays du Golf.

Faut-il cibler les transferts sociaux ?

Le gouvernement a déclaré vouloir supprimer les transferts sociaux et les subventions en les remplaçant par des transferts ciblés en direction des démunis

Les sociologues suédois Walter Korpi et Joakim ont identifié ce qui est connu sous le vocable du paradoxe de la redistribution qui stipule que «plus les programmes sont ciblés vers les pauvres, plus leur qualité et leur taille s’amenuise, jusqu’à ne plus permettre de réduire véritablement la pauvreté et l’inégalité» (Korpi et Palme, 1998).

Amartya Sen a noté pour sa part que «les bénéfices destinés exclusivement aux pauvres finissent souvent par être de pauvres bénéfices» (Sen, cité dans Mkandawire, 2005).

Plusieurs études confirment que les mesures universalistes réduisent davantage la pauvreté que les programmes ciblant directement les pauvres, notamment parce que la taille du budget consacré aux mesures sociales n’est pas fixe (Pontusson, 2005 ; Mahler et Jesuit, 2006).

En 2012 un rapport de l’OCDE, organisme qui a pourtant toujours défendu le ciblage, notait que dans les pays ou les transferts ne sont pas universalistes mais ciblés «les inégalités du revenu disponible des ménages comme le taux de pauvreté sont nettement supérieurs à la moyenne de l’OCDE» (Inégalités de revenus et croissance : le rôle des impôts et des transferts-OCDE-2012.).

En 2014 l’OCDE, toujours, va plus loin en affirmant que « Lorsque les systèmes de transferts sociaux sont fortement ciblés, les baisses des dépenses sont davantage susceptibles de nuire aux plus démunis » (OCDE : panorama de la société 2014) et qu’au « Brésil les revenus du travail ont contribué pour 58% au recul des inégalités entre 2001 et 2011. Les transferts sociaux viennent en seconde position avec une contribution de 23 % tandis que les transferts monétaires conditionnels (transferts ciblés) y ont contribué pour 13 %». (OCDE novembre 2014).

Comme on le voit le ciblage ne vise qu’à réduire la protection sociale et ne fera que creuser les inégalités et augmenter la pauvreté.

Mais où trouver l’argent pour financer le budget de l’état ?

telechargement_1_-6-773f7.jpg 1– Bien sûr relancer la croissance par la relance de l’investissement productif et la lutte contre les compradores

2- La création de l’emploi et l’augmentation du taux d’activité surtout des femmes qui avec 15 % est l’un des plus faibles au monde

3- La lutte contre la corruption, l’instauration de la démocratie, de la transparence et de la justice sociale gages de la mobilisation et de la cohésion de la nation.

4- En 2013, les exonérations et autres réductions fiscales se sont élevées à 1 150 milliards de dinars (chiffres du ministère des finances) soit l’équivalent de 14.74 milliards de dollars sans contrepartie réelle pour l’économie.

5- Le rapport de la cour des comptes pour l’exercice 2011 fait ressortir un montant édifiant de restes à recouvrer (RAR) de l’ordre de 7 937 milliards de dinars au 31 décembre 2011.

6- Tous les, spécialistes évaluent l’évasion fiscale au bas mot à 300 milliards de dinars.

7- En 2013, six (06) millions 349 mille occupés sur un total (dix) 10 millions 788 mille relevaient du secteur privé dont 3 millions salariés et 3 millions 349 mille non-salariés (ONS 2013).

Le nombre des travailleurs salariés non déclarés à la sécurité sociale était de 4 millions 578 mille. Par statut trois salariés sur quatre (75,5 %) du secteur formel n’étaient pas affiliés contre deux indépendants sur trois (69%) pour le secteur informel. Autrement dit c’est dans le secteur formel que la plus grande fraude est enregistrée.

Calculée sur la base du salaire national moyen du secteur privé (ONS 2014) le montant de l’évasion sociale pour l’année 2014 est estimée ainsi à 650 milliards de dinars soit pratiquement l’équivalent de la totalité des pensions de retraite servies par la CNR et la CASNOS cette année. La moitié de cette évasion relève du secteur privé formel.

En conclusion les députés de la présente APN resteront l’histoire quel que soit leur vote.

Ils seront les représentants du peuple qui auront su dire non au bradage du patrimoine national tout en préservant la cohésion de la nation ou plutôt ceux qui ont légalisé ce bradage avec toutes ses conséquences annoncées.

Alger le 27 novembre 2015

Nouredine BOUDERBA

nbouderba@yahoo.fr

L’ISLAM COMPATIBLE AVEC LA DÉMOCRATIE

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Mustapha Benfodil

ElWatan

le 6 juillet 2015

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«Parmi les Algériens , 25% sont prêts à quitter le pays.» C’est ce qu’a déclaré le sociologue Nacer Djabi en s’appuyant sur les résultats d’un récent sondage.

C’était lors d’une rencontre organisée par le collectif Nabni autour de l’identité algérienne et le «récit national», qui s’est tenue samedi soir au restaurant Havana (Saïd Hamdine).

Outre l’éminent sociologue, Nabni a convié l’ancien gouverneur de la Banque centrale, Abderrahmane Hadj-Nacer, ainsi que l’ancien président du PRA, Noureddine Boukrouh, pour débattre de cette question.

À noter que cette thématique inaugure un nouveau cycle de réflexions sur des questions sociétales initié par le think tank, Nabni sous le titre «L’Algérie rêvée».

Ainsi, à l’heure où nous célébrons le 53e anniversaire de l’indépendance de notre pays, le quart de la population est disposé à s’exiler sous d’autres cieux si l’occasion lui en était offerte. Nacer Djabi a tenu à souligner que les personnes interrogées estiment que «les conditions économiques sont plus ou moins bonnes».

Par-delà les conditions socioéconomiques, ces chiffres mettent naturellement en cause la qualité de la vie en Algérie, estime le sociologue, indépendamment du niveau économique. Il n’est, dès lors, pas interdit d’inclure la situation politique et culturelle, et le «climat général» comme mobiles justifiant ce puissant désir de changer d’air qui travaille au corps des millions de nos compatriotes.

55% des Algériens «moyennement pratiquants»

Nacer Djabi a présenté au cours de sa brillante intervention d’autres chiffres, tout aussi significatifs, qui constituent un véritable tableau clinique de l’état de notre société. D’abord, quelques indications méthodologiques.

Contacté par nos soins, le sociologue a tenu à préciser que les résultats qu’il a présentés étaient, en vérité, le fruit de quatre sondages réalisés à différentes périodes : 2006, 2011, 2013 et 2015. Les trois premiers sondages ont été menés dans le cadre du programme Arab Barometer tandis que le sondage réalisé en 2015 a été fait dans le cadre du programme Arab Transformation (ArabTrans).

Il s’agit d’un projet de recherche chapeauté par l’université d’Aberdeen (Ecosse) et financé par l’Union européenne. Il a pour objectif d’étudier de plus près les effets du «printemps arabe».

Ce projet est mené en partenariat avec des centres de recherche de sept pays : l’Algérie, la Tunisie, le Maroc, la Libye, l’Egypte, l’Irak et la Jordanie. «Cela obéit à la démarche des sondages comparatifs», explique le sociologue. Pour la partie algérienne, c’est une équipe de recherche du Cread dirigée par Nacer Djabi qui a mené cette enquête d’opinion. Outre M. Djabi, chef de projet, celle-ci compte également les chercheurs Mohamed Benguerna, Louisa Aït Hamadouche et Fadila Akkache.

Le sondage réalisé en 2015 porte sur un échantillon de 2000 personnes réparties sur tout le territoire national. Nacer Djabi insiste sur le fait qu’il s’agit là d’un échantillon on ne peut plus représentatif quand on sait que l’échantillon standard adopté en sciences sociales tourne autour de 1200 personnes.

«L’une des questions centrales était : Comment les Algériens se perçoivent-ils ? Quelles représentations nos concitoyens ont-ils d’eux-mêmes ?», dit l’auteur d’Algérie, l’Etat et les élites (Chihab, 2008). «40% se définissent avant tout comme Algériens, 36% se définissent comme musulmans, 7,9% se présentent comme Arabes, 7,2% comme Amazighs et 3% se définissent en faisant référence à la région où à la ville dont ils sont issus», rapporte le sociologue.

Ainsi, selon ce sondage, la frange dominante est la référence à la patrie, tandis que le référent religieux arrive en second lieu. Explorant la relation qu’entretiennent les Algériens avec la religion, le conférencier indique que «55,6% répondent qu’ils sont ‘‘moutadayinine ila had ane ma’’ (pratiquants jusqu’à un certain degré) et 32% affirment qu’ils sont pratiquants assidus (‘‘moutadayinnine’’)». Toujours selon le même sondage, «entre 5 et 8% disent qu’ils sont non pratiquants (‘‘ghayr moutadayyinine’’)».

1,2% seulement des Algériens adhère à un parti politique

Le sociologue révèle, par ailleurs, que «76% des Algériens disent qu’ils ne font pas confiance à la majorité des gens» et seulement 18% font confiance à leurs compatriotes. Et ils font d’autant moins confiance à nos politiques : «1,2% des Algériens adhère à un parti politique», souligne le sociologue. «Le parti est l’institution la moins légitime aux yeux des Algériens», analyse-t-il.

Autre aspect abordé, la qualité de la gouvernance avec, à la clé, cette question : «Le gouvernement et l’Assemblée des députés élaborent-ils les lois selon la volonté des gouvernés ?» 50,4% répondent par oui tandis que 40% estiment que le gouvernement et les députés ne décident pas selon la volonté du peuple. Dans la foulée, cette question-clé: «Pensez-vous que les lois doivent être promulguées selon la charia islamique ?» Nacer Djabi affirme à ce sujet que 76% des personnes interrogées se disent favorables à ce que les lois de la République se basent sur la charia tandis que 12% sont contre.

Enfin, «50% des Algériens estiment que la démocratie est compatible avec l’islam», selon ce même sondage. Commentant ces résultats, le chercheur souligne que «les positions modernistes ouvertes sur l’universalité représentent un tiers de la société, soit un Algérien sur trois. Et les deux tiers expriment en général des positions conservatrices proches des courants religieux ou conservateurs».

Et de conclure : «Il y a un travail qui doit être fait en Algérie vis-à-vis des citoyens afin de changer ces proportions et faire en sorte qu’au lieu d’avoir un Algérien sur trois (acquis à la modernité), nous aurons deux Algériens sur trois concernant ces positions.» Nous reviendrons, par le menu, dans nos prochaines éditions, sur ce passionnant débat et notamment sur les interventions magistrales de Abderrahmane Hadj-Nacer et Noureddine Boukrouh. –

Mustapha Benfodil


SANTÉ ET TRAVAIL – SANTÉ AU TRAVAIL: ACTIONS POUR L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL D’UN CÔTÉ ET DE L’AUTRE DE LA MÉDITERRANÉE

L’intervention du Docteur A. Tiberguent aux 19e Journées nationales de médecine du travail d’Alger en janvier 2015 retient l’attention.

Son expérience professionnelle d’un côté et de l’autre de la Méditerranée lui permet de confronter le vécu au travail des travailleurs, dans des conditions différentes, mais avec une grande convergence de réflexion et de motivation quant à l’organisation des postes et des conditions de travail, et aux problèmes de santé au travail.

S’attachant particulièrement à l’organisation de la « prévention collective », il donne plusieurs exemples qui, chaque fois, et à chaque endroit (CVI de Rouiba – Algérie, et Paris- France), montrent que cette amélioration des conditions de travail -l’organisation de cette prévention – ne peut être réalisée qu’avec la nécessaire émergence d’un collectif de travail imprégné du pouvoir d’agir collectif dont les acteurs ont pris conscience des enjeux de santé au sein de l’entreprise en lien avec les conditions et l’organisation du travail.

M.R.


extrait :

[…] Les quelques exemples cités ici et là-bas ont montré des salariés agissant collectivement dans l’action et par l’action en développant leur pouvoir d’agir pour transformer et améliorer leur travail tout en intégrant dans leur démarche les enjeux de santé au travail.

Dans de nombreuses situations, c’est l’accident grave survenue sur les lieux de travail, c’est la maladie professionnelle déclarée et reconnue, ce sont également les plaintes inaudibles des salariés en souffrance qui constituent la porte d’entrée et le point d’appui pour l’engagement du pouvoir d’agir et la construction de la démarche de prévention collective.

[…] La conduite d’un projet de prévention collective dans les situation de travail s’appuie sur l’émergence du collectif de travail imprégné du pouvoir d’agir collectif dont les acteurs ont pris conscience des enjeux de santé au sein de l’entreprise en lien avec les conditions et l’organisation du travail.

[…]Il s’agit d’agir collectivement dans une dynamique de réflexion, de confrontation, de controverse, de concertation et de partage des savoir-faire et des retours d’expériences ; avec l’appui également, si nécessaire, des ressources internes d’une part et des compétences externes d’autre part (intervenants et chercheurs).

[…] « Il s’agit de développer le pouvoir d’agir des collectifs de travail, c’est-à-dire la possibilité pour eux de reprendre la main sur leur situation de travail. Cela passe par l’expérience du désaccord, par la confrontation des points de vue sur les critères du travail bien fait. La coopération se construit dans la controverse professionnelle, loin de l’idée convenue d’une homogénéité du collectif» .


Plan de la communication

[1. INTRODUCTION

2. OBJECTIFS

3. MÉTHODES ->#1]

[4. RÉSULTATS

4.1. La clinique médicale et les situations individuelles :

4.2. La prévention collective :

4.3. Le positionnement du médecin du travail : centralité du travail/travail humain contributeur à la santé->#4]

4.4. ICI et LA-BAS (En Algérie et en France) :

4.4.1. MES PRATQUES ICI (Alger-Algérie – CVI de Rouiba) :

  • 4.4.1.1- À la forge industrielle : forgeage estampage
  • 4.4.1.1- À la forge industrielle : peinture
  • 4.4.1.3- Atelier montage bus :
  • 4.4.1.4 – Atelier rivetage :

4.4.2. MES PRATIQUES LA-BAS (Paris, France)

  • 4.4.2.1- Le chantier du BTP
  • 4.4.2.2- L’extension d’un hôpital public
  • 4.4.2.3- L’atelier traitement de surface/ Electrolyse
  • 4.4.2.4- Les RPS dans le secteur tertiaire : assurances

5. CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE


SANTÉ ET TRAVAIL – SANTÉ AU TRAVAIL :

ACTIONS POUR L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL D’UN CÔTÉ ET DE L’AUTRE DE LA MÉDITERRANÉE

Mes pratiques en médecine-santé au travail ici et là-bas,

mes réflexions là-bas et ici ?

Dr. A.Tiberguent

médecin du travail, Paris.


Communication aux Journées de Médecine du Travail Algérie

Alger – 2014

1. INTRODUCTION

Le contexte actuel est marqué par une évolution trop rapide voire fulgurante sur le plan organisationnel, technique, économique et social. La médecine du travail n’a pas échappé et n’échappera pas à ce bouleversement continu. Les NTIC, par leurs équipements et leurs applications multiples ont transformé les situations et l’activité de travail. Les organisations ont taylorisé les processus de production et de gestion dans différents secteurs d’activité. Dans ce contexte, la santé au travail constitue un enjeu majeur. À côté des risques physiques et toxiques, se multiplient les situations de stress professionnel ; les risques psycho-sociaux (RPS) ou troubles psychosociaux (TPS). Les suicides en milieu professionnel sont devenus une réalité du monde du travail. Dans cet environnement, il y a lieu de s’interroger sur nos pratiques professionnelles.

2. OBJECTIFS

À partir de mes pratiques de médecine de travail-santé au travail, de praticien, d’intervenant, d’enseignant et de chercheur, ici et là-bas, je me questionne et je questionne les professionnels en santé au travail :

a)- sur le rôle et l’action du médecin du travail,

b)- sur les marges de manœuvres et l’éventail des possibles pour l’action,

c)- sur le pouvoir d’agir.

3. MÉTHODES

À partir des situations professionnelles concrètes vécues dans différents secteurs, ici et là-bas, questionner les pratiques entreprises afin d’arriver à une attitude réflexive sur l’action du médecin du travail.
Il ne s’agit pas d’analyse des pratiques professionnelles rentrant dans le cadre des protocoles et méthodes psychosociologiques pré-établis. Il s’agit seulement de discussion, débats, controverses entre médecins du travail qui partagent des questionnements, des interrogations, des conduites à tenir et avis des uns et des autres autour de situations de travail individuelles et/ou collectives.

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4. RÉSULTATS

  • 4.1. La clinique médicale et les situations individuelles :

    Les cas individuels d’aménagement de poste et/ou de restrictions de tâches étaient fréquemment abordés avec des résultats plus ou moins satisfaisants pour le salarié lorsqu’il n’est pas mis en situation de licenciement par l’employeur avec inaptitude au poste.

    L’alerte a fait également l’objet de nos discussions : alerter l’employeur, la hiérarchie, la DRH les membres du CHSCT sur les risques professionnels et les situations dangereuses : maladies et accidents du travail. Ici et là-bas, nos démarches informationnelles, pédagogiques et relationnelles trouvent parfois un écho favorable auprès des décideurs de l’entreprise quand, ce n’est pas «docteur, ne dramatisez pas, ne vous inquiétez pas, nous allons voir ça» et puis, plus rien, pas de retour.

  • 4.2. La prévention collective :

    Si dans les premiers cas abordés, il s’agit de situations individuelles, d’aménagement et le plus souvent de protection individuelle, dans les autres cas, la nature du problème intéresse la prévention collective et donc un plus grand nombre de salariés.

    C’est cette question de prévention collective[[La prévention collective contrôle le risque à la source, si bien qu’aucun travailleur ne sera exposé au risque, la protection individuelle, moins sécuritaire fait porter la prévention par les travailleurs, la prévention secondaire n’agit que lorsque une pathologie professionnelle existe déjà. Exemple pour l’exposition à un bruit dangereux pour la santé, la prévention collective contrôlera le niveau du bruit à la source, la protection individuelle, elle, est supportée par les travailleurs –casques, bouchons, durées d’exposition…, la prévention secondaire ne concerne que les travailleurs déjà atteints n dlr ]] qui a culminé, un moment donné, dans nos échanges. Protection individuelle, prévention secondaire, cela nous a semblé insuffisant dans nos pratiques médicales. Il nous a semblé que notre rôle se limitait à la seule clinique médicale, le plus souvent individuelle, même si les objectifs et les missions affichées et réglementées permettaient au médecin d’agir en prévention collective.

    Nos interventions de prévention collective, dans le cadre du tiers-temps, restaient en de ça des exigences et du temps nécessaire à de telles actions si nous devions améliorer les conditions de travail des travailleurs dont on a la charge. Le médecin du travail se voit donc limité dans son rôle : attelé presque exclusivement à identifier les risques professionnels, pratiquer la surveillance médicale, proposer un aménagement de poste et/ou restrictions de tâches (pour les travailleurs handicapés et/ou en invalidité pour AT ou MP dans le cadre du maintien dans l’emploi), alerter sur les MP et les AT et de plus en plus sur les plaintes des salariés en souffrance au travail en grande partie liée au mal-faire leur travail (ce qui communément qualifié aujourd’hui de RPS ou TPS).

    De ce point de vue, ici et là-bas, certains médecins du travail avançaient «Le champ de la clinique médicale du travail est resté en friche du fait que les objectifs assignés au médecin du travail dépasseraient ses compétences et que les moyens mis à disposition sont nettement insuffisants pour aborder la prévention collective et l’aménagement des situations et postes de travail»

    La question centrale posée, à plusieurs reprises, concerne l’efficacité de la médecine du travail, et le rôle du médecin du travail dans tout cela! En dehors des vaccinations, comment accéder à la prévention primaire, comment engager cette prévention qui a pour but de transformer les conditions et les situations de travail, d’apporter une amélioration collective dans le cadre du maintien de la santé des salariés et de leur permettre de développer leurs capacités et leurs ressources individuelles et collectives et leur intelligence au travail. Faire de telle sorte que le travail devienne un facteur de santé et de développement, que le travail reste humain. Car le travail déshumanisé, (haché, morcelé, cadencé, taylorisé…) ne pourra aboutir qu’à la dégradation de la santé physique et mentale des salariés et parallèlement au mode dégradé de leur activité et de leur production en qualité et en quantité.

    Le médecin du travail que je suis, doit-il s’isoler dans sa pratique, dans son mutisme, en restant essentiellement dans l’identification des risques professionnels et dans la comptabilité des maladies du travail normalisées cliniquement et réglementées institutionnellement. Rester seulement dans une position de donneur d’alerte dans les meilleurs des cas ? Sa conscience tranquille ? Ou discuter de sa pratique avec ses pairs, même confronté à débats passionnés et à des controverses.

    Cela voudrait dire que le médecin du travail devrait s’interroger sur ses pratiques. Ce sont ces questions qui m’ont interpellé et travaillé. Comment dire ? Comment faire ? Quel chemin prendre ? Avec qui ? Pour aboutir à quoi ?

  • 4.3. Le positionnement du médecin du travail : centralité du travail/travail humain contributeur à la santé :

    Cela voudrait dire que le médecin du travail devrait se positionner en tenant compte de deux points de vue essentiels : le travail doit être un contributeur de santé, il est central et complexe à la fois pour l’être humain.

    Prendre en compte la centralité du travail c’est dire que le travail n’est pas de nature instrumentale mais qu’il est au centre de notre développement individuel, collectif et social. Il contribue de ce fait à la construction de notre identité professionnelle, sociale et sociologique, à notre développement. Il alimente l’art de faire et d’être, il garantit notre utilité sociale et notre réflexion sociétale par l’action sur les objets et la production de biens matériels et intellectuels. Il donne du sens à notre vie d’humains. «Je travaille, donc j’existe»

    La centralité du travail s’observe ainsi dans le travail et dans la vie réelle de l’entreprise: organisation, temporalité, communication, règlement intérieur, contenu et règles, rythme, hiérarchie, travail collectif, collectif de travail, rapports sociaux, représentations, syndicalisation, CHSCT…

    Par ailleurs, le travail est complexe. La complexité s’inscrit dans une temporalité, elle est liée au contexte de l’entreprise, à son histoire, à sa singularité et aux nombreux déterminants de la situation de travail en interactions. Dans une situation de travail réel plusieurs déterminants de l’activité concourent à créer soit des conditions de travail favorables pour la santé et le travail bien fait, soit au contraire des facteurs défavorables ayant pour conséquences d’aggraver peu ou prou le risque professionnel, de dévaloriser et déshumaniser le travail humain et/ou d’altérer la santé physique, psychologique et psychique des salariés. Il s’agit d’une part des déterminants liés au travail (entreprise, organisation stratégique, managériale et financière, commandement, processus de production, technologie, dispositifs et équipements techniques, horaires et contraintes temporelles, aménagement des espaces de travail, environnement physique et relationnel…) et d’autre part des déterminants liés à l’homme au travail (âge, formation, expérience, métier, compétence, histoire et vécu personnel et collectif, variabilité interindividuelle…)

    « L’activité du travailleur est l’expression de son expérience, de sa sensibilité, de sa personnalité ; elle ne se déploie pas sur la base d’un raisonnement formalisé qu’il lui suffirait de verser au débat. C’est un point crucial : le travail est en partie obscur pour celui-là même qui l’accomplit. Déployer une activité efficace est une chose, en rendre compte dans le langage est tout à fait autre chose. Les discours préfabriqués ne rendent pas compte de l’activité et de ses conflits» Philippe Davezies.

    Par ailleurs, il n’échappe à personne, quelque soit son statut et son rôle dans l’entreprise, du cadre juridique, des prescriptions réglementaires en matière de santé et sécurité au travail, des recommandations et des normes en matière de protection, de prévention individuelle et collective et des méthodes de gestion et de management en santé au travail.

    Que faire, devant la complexité des logiques en présence dans l’entreprise : enjeux de production, enjeux financiers, enjeux technico-organisationnels. Bien entendu, notre positionnement devrait être déterminant et lié aux enjeux de santé en rapport avec le travail réel des salariés.

    Vous constaterez que cette démarche de l’agir collectif est exigeante en termes de positionnement, de détermination, de réflexion, de pédagogie, de relations sociales, d’information, de communication, de partage et de concertation. Le pouvoir d’agir crée la mise en mouvement de l’action (initialement implicite et/ou empêchée) en action partagée, explicite et visible prenant en compte la réalité de la situation de travail singulière dans un contexte déterminé pour la transformer. Il s’agit de déconstruire la situation présente pour co-construire de nouvelles perspectives en santé-travail.

    « Pouvoir d’agir : C’est un peu le rayonnement de l’activité, la manière dont individuellement et collectivement on parvient à faire autorité dans le travail. C’est la création professionnelle retrouvée, qui donne la capacité de dialoguer avec tous quand c’est possible. Et aussi le pouvoir de résister au pouvoir quand c’est nécessaire. Entre sens et efficience, la reconquête de la qualité du travail est au cœur du développement du pouvoir d’agir» Yves CLOT.

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4.4. ICI et LA-BAS (En Algérie et en France) :

Ici, dans le contexte de l’industrialisation des années 70-90, dans la zone industrielle de Rouiba-Alger-Est : recenser, déclarer, comptabiliser le nombre de surdité professionnelle, de dermatoses irritatives et/ou allergiques, d’asthme d’origine professionnelle ; la fatigue, les nombreux accidents du travail, était une activité importante du médecin du travail. Elle concernait des milliers de salariés tourmentés par l’organisation du travail qu’ils découvrent pour la première fois avec ses zones et modules homogènes d’activité, ses prescriptions, ses cycles de production, ses machines-outils, ses horaires, ses équipes alternantes (2X8, 3×8) et son environnement physique, psychologique, relationnel et social. Un nouveau monde du travail s’ouvre, les travailleurs découvrent une nouvelle vie, de nouveaux métiers, de nouveaux risques, de longs trajets et des durées de sommeil écourtées…

Là-bas, de l’autre côté de la mer méditerranée, en France, dans un contexte organisationnel et réglementaire différent, la prévention secondaire et tertiaire occupent une part importante de l’activité du médecin du travail. Ma pratique a consisté à dépister des maladies professionnelles :, TMS, amiante, cancers et affections d’origine allergiques, à aménager sur le plan individuel des poste de travail, à émettre des restrictions de tâches, à formuler un reclassement professionnel et maintien dans l’emploi.

On peut se poser cette question. Y a-t-il des actions de prévention collective, Ici et là-bas, au vu des enjeux en présence dans l’entreprise et de la complexité des situations de travail ? Certains, déployant le registre du pessimisme, vous diront qu’il n’y a rien à faire, que tout est plombé, que tout vient d’en haut et rien ne résiste à l’autorité et aux décisions stratégiques du top-management. Que les marges de manœuvres sont fermées. Que les degrés de liberté sont réduits. On oublie souvent dans ce verbatim, de rendre compte des controverses, des plaintes, du climat social, des points importants inscrits à l’ordre du jour du CHSCT, des affrontements au cours des séances extraordinaires du CHSCT, en somme des résistances et des points de vue divergents sur les conditions de travail et les stratégies alternatives d’actions de prévention.

Pour ma part, je dirai que le champ des possibles existe quand le pouvoir d’agir se construit pas à pas progressivement collectivement avec détermination, réflexion et patience. Ce qui voudrait dire que les principaux concernés interviennent dans une dynamique collective pour prendre en mains leur affaire. Ils s’approprient ainsi par la réflexion, l’échange, la controverse, le partage d’expériences et l’accompagnement (interne et/ou externe) les stratégies d’actions de prévention collective à mettre en œuvre.

Il s’agit en effet pour le médecin du travail de sortir de son isolement et d’inscrire son action dans l’agir collectif, impliquant différents acteurs en lien avec l’organisation du travail concernée par une situation de travail concrète. Il s’agit en effet pour le médecin du travail et pour les professionnels de santé au travail de conseiller et d’accompagner le collectif de travail, les salariés concernés, les cadres et managers de proximité, les responsables RH, les membres du CHSCT. Il n’est pas question de se substituer au collectif de travail.

Afin d’illustrer mes propos, j’évoquerai, ici et là-bas, quelques exemples de situations de travail où le pouvoir d’agir collectif a permis d’ouvrir des perspectives d’actions de prévention collective intéressant différents déterminants de l’activité de travail.

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4.4.1. MES PRATQUES ICI (Alger-Algérie) :

  • 4.4.1.1- A la forge industrielle :

    Suite à un accident mortel (projection du tassot au cours de l’opération forgeage-estampage), le collectif de travail d’estampeurs s’est interrogé sur les conditions de travail et l’activité d’estampage (modes et stratégies opératoire, travail collectif, postures et gestes professionnels, geste de prudence, communication dans une ambiance bruyante, charge physique et pénibilité…). Après discussion et échanges, débats et controverses sur les savoir-faire du métier, et les procédés techniques ; les travailleurs ont inscrit le problème à l’ordre du CHS extraordinaire. Ceci a permis de mettre en évidence l’inadéquation de l’organisation, du processus du travail et de la charge du travail : paramètres thermiques et durée opératoire pour éviter le collage de la pièce à la matrice, outil non conforme, maintenance de la matrice, contrainte thermique environnementale, fatigue…Cette réflexion et analyse sur le terrain et dans l’action a permis au collectif de comprendre les facteurs de danger et les risques d’accident. Cette démarche du collectif, en prenant les choses en mains avec la contribution de la maîtrise, a permis de concevoir autrement les postes d’estampeur en modifiant l’organisation, les règles thermique/durée, la modification de l’outil, les temps de pause, la durée de travail…
  • 4.4.1.1- A la forge industrielle :

    opérations de peinture par pulvérisation permettant le traitement de surface des différents ensembles du montage véhicules industriels se faisaient dans une zone dédiée à cette activité sans système de ventilation (cabine ou tunnel). Le risque professionnel est constaté, le travail mal fait est abordé, les plaintes des opérateurs sont portées auprès de leur hiérarchie directe, des délégués membres du CHS et du médecin du travail. La direction avisée attendait la dotation budgétaire pour procéder à la commande, la gestion du dossier prenant un retard important n’a pas permis de répondre à la demande. Que faire ? Un collectif s’est constitué comprenant les peintres au pistolet du secteur concerné, le responsable du secteur, des techniciens et ingénieurs, le préventeur et le médecin du travail ; une démarche technique est entreprise (documentation, modèle de fonctionnement d’une cabine existante dans un autre atelier, conception du modèle, faisabilité). Des contacts sont pris avec d’autres partenaires internes et ateliers du complexe industriel pour la réalisation de la cabine, les essais et mise en place. L’agir collectif a bien fonctionné en mettant en œuvre les compétences et les ressources professionnelles existantes dans le but de mieux travailler : qualité de travail dans des conditions favorables.
  • 4.4.1.3- Atelier montage bus :

    Au vu de la dégradation des conditions d’hygiène et d’organisation dans l’atelier (postes de travail, allées de circulation, encombrement, stockage des pièces…accidents du travail) la demande faite par les travailleurs de différents secteurs opérationnels s’est exprimée en termes d’organisation, d’amélioration des conditions du travail et du respect des règles d’hygiène et sécurité. Les travailleurs se sont rapprochés de leur maîtrise (chefs d’équipe et contre-maîtres), des responsables des îlots de production, du médecin du travail et du préventeur de l’atelier. La démarche a consisté à faire un diagnostic collectif, sous forme de visites des lieux et postes de travail, de réunions-débats, (énumération des faits, pratiques organisationnelles et productives controversées, des situations dangereuses accidentogènes). Le médecin du travail et l’ingénieur d’hygiène et de sécurité ont participé à ces actions initiées par les salariés concernés en impliquent et leur encadrement de proximité. Un plan d’actions a été élaboré où chaque acteur et chaque service devaient y contribuer. Les services généraux et de maintenance ont pris en charge la réfection et le nettoyage des sols de l’atelier, le traçage des surfaces délimitant les aires de production et de stockage, les allées de circulation et les zones de sécurité. Les services techniques ont été associés pour la maintenance des machines-outils. Les autres acteurs (salariés et hiérarchie) se sont attelés à améliorer l’organisation de la production : circuit, flux, intégration des moyens de protection collective (soudage à l’arc, traitement de surface par procédé époxy).L’équipe médicale a participé en informant les salariés, en formant certains parmi eux membres du CHS, en émettant des observations et des propositions de prévention. Le collectif a pu assurer le suivi du déroulement du plan d’actions élaboré de façon concerté. Cette démarche collective a eu un retour d’expérience positif dans les autres ateliers du complexe industriel (mécanique, carrosserie…)
  • 4.4.1.4 – Atelier rivetage :

    Le rivetage à chaud a été longtemps, dans cet atelier, une activité présentant un risque élevé d’atteinte auditive, baisse des seuils auditifs et plus particulièrement la surdité manifeste reconnue comme maladie professionnelle. Le médecin du travail et le préventeur ont alerté le chef d’atelier des dangers du bruit excessif et lésionnel généré par les opérations du rivetage à chaud. Les salariés concernés (les riveteurs) se sont plaints auprès de la médecine du travail et également auprès de leurs représentants et délégués au CHS. Le point a été inscrit à l’ordre du jour de cet organe. La direction a pris conscience du problème mais ne voyait pas de solution en dehors du port des équipements de protection individuelle (EPI). Cette manière de traiter le problème n’a pas été satisfaisante, de plus le niveau sonore atteignait 95-98 dBA et dans certains postes jusqu’à 100-110 dBA. Si le port des EPI était indiqué, il restait à trouver une autre solution organisationnelle et technique moins bruyante. La visite des entreprises mettant en œuvre des procédés de rivetage différents ont pu suggérer au collectif d’autres manières de faire leur travail. L’aménagement organisationnel et la mise en place d’un procédé de rivetage différent « à froid » dans cet atelier ont permis aux travailleurs de réaliser leur activité dans un environnement nettement moins bruyant.

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4.4.2. MES PRATIQUES LA-BAS (Paris, France)

  • 4.4.2.1- Le chantier du BTP :

    Suite à un accident mortel (écrasement de la tête d’un ouvrier maçon entre le ferraillage et le panneau de la banche) les responsables de l’entreprise ont conclu à une cause individuelle, une erreur du comportement de la victime : la victime n’a pas observé les consignes de sécurité prescrites. Le collectif de travail (ouvriers maçons et leur chef d’équipe) ayant tous participé à la manœuvre de l’opération béton sur banche n’étaient pas d’accord avec les conclusions hâtives de leur l’employeur. Ils ont unanimement rejeté cette « analyse ». Les ouvriers maçons et leurs délégués du CHSCT ont demandé et entrepris une formation-action sur l’analyse des accidents de travail ; ils ont été accompagnés pour mener leur propre enquête concernant l’accident mortel dont a été victime un membre de l’équipe. L’analyse de la situation de travail avec la participation des salariés concernés a montré de nombreux dysfonctionnements liés à l’organisation du travail, aux équipements, à l’environnement et à la zone de travail : travail dangereux et pénible engageant une nouvelle technique sans formation préalable de l’équipe, travail exigeant une haute qualité dans des délais courts (échéance à respecter à tout prix), des outils inadaptés à ce mode opératoire (barre à mine et crics métalliques), un environnement bruyant (travaux de démolition aux marteaux piqueurs), une atmosphère polluée (gaz de soudage à proximité), une zone de travail non stabilisée (plateforme dénivelée ne permettant pas la stabilité de la banche). L’activité exigeait un mode opératoire coordonné et synchronisé collectivement alors que communication verbale et gestuelle était empêchée. L’enquête-formation-action a permis au collectif d’identifier un accident de travail précédant l’accident mortel et ayant entraîné une blessure à la tête d’un opérateur d’une autre équipe travaillant sur le même chantier et utilisant la même technique. Ce premier accident n’a pas fait l’objet d’information et/ou d’enquête par l’entreprise considéré comme accident bénin malgré le transport de la victime vers une structure hospitalière. L’analyse factuelle, la réflexion et les échanges ont permis au collectif d’avancer des alternatives de transformation de leur situation de travail et de leur activité. Ces actions ont permis de transformer l’organisation et les méthodes de travail des ouvriers maçons : la technique de banchage, les équipements et outils, les modes opératoires, la charge physique et les contraintes posturales et gestuelles. Une formation adaptée sur le terrain leur a été dispensée.
  • 4.4.2.2- L’extension d’un hôpital public :

    La direction d’un hôpital public, face aux besoins de la population de son périmètre, a projeté l’extension d’un bâtiment dédié aux hospitalisations de moyen et long séjour. Après concours, le projet architectural est arrêté, mettant en exergue, un effet embellissant et répondant à l’environnement urbanistique de la ville en utilisant des matériaux nobles (pierre, bois, verre). Les premières réactions du personnel étaient le silence, rien à dire, ou plus discrètement « tout est beau mais qu’est-ce qu’il y a dedans » « tout est déjà ficelé », « ils ne prennent pas en compte notre travail, nos remarques et mos propositions, ce n’est pas la peine ». Par la suite, les professionnels de santé des services concernés (cadres de santé, personnel infirmier, auxiliaires de soins, personnel d’entretien et de maintenance) ont mesuré l’importance des enjeux, se sont interrogés et ont demandé de parler du projet de façon libre et dans un cadre indépendant de la direction. Les différentes présentations générales du projet en réunions collectives ont abouti à des groupes de réflexion (métiers-services). Des discussions passionnées et des débats fort controversés entre les différentes catégories du personnel (cadres, soignants et personnel technique) ont permis, petit à petit, aux uns et aux autres de prendre conscience des enjeux travail-santé (leur santé propre et celle des soignés et comment organiser le travail dans tout ça) et des interactions organisationnelles entre services cliniques entre-eux d’une part et entre les services cliniques et services technico-administratifs d’autre part (services administratifs, accueil, logistiques, entretien, maintenance…). Les différentes séances de travail étaient animées par l’intervenant extérieur qui accompagnait l’action du collectif. La présentation du plan d’extension (schéma, plan, services…) a donné lieu à de nombreux questionnements relatifs aux conditions de travail et aux activités futures dans les nouveaux locaux : organisation spatiale et activité de soins des services existants en interaction avec les services nouveaux dédiés aux mêmes spécialités, liaisons entre les différents services (soins, services techniques et laboratoires), déplacements du personnel soignant, flux des personnes malades et leur famille, les visiteurs, accessibilité aux personnes handicapées, circuit linge…Cette action collective de pouvoir d’agir ensemble, après concertation, a permis d’identifier les difficultés liées aux futures conditions de travail : les dysfonctionnement pouvant impacter l’activité des soignants et/ou l’accueil des malades, les modes dégradés de fonctionnement potentiels. A partir de cette réflexion et ce diagnostic collectif, des propositions ont été formulées par le collectif pour corriger le projet architectural intégrant trois aspects principaux : l’activité des personnels, la préservation de leur santé, l’accueil et l’accessibilité et la qualité d’hygiène et de soins pour les malades. La direction et le cabinet des architectes ont pris en considération les réaménagements introduits par le collectif, le pouvoir d’agir des personnels hospitaliers.
  • 4.4.2.3- L’atelier traitement de surface/ Electrolyse :

    Les salariés travaillant sur la chaîne de traitement de surface par électrolyse constataient de plus en plus la dégradation de leurs conditions de travail : charge de travail excessive, travail pénible, travail de nuit, contraintes temporelles (délais de production courts pour répondre rapidement aux clients), exposition aux contraintes gestuelles et posturales, aux contraintes thermiques, à l’exposition aux agents chimiques dangereux (chromage), à la pollution atmosphérique de l’environnement de travail (pulvérisation d’époxy). Le médecin du travail informé a signalé à plusieurs reprises ces mauvaises conditions de travail à la direction et au président du CHSCT. Aucune réponse n’est donnée, aucune action de prévention n’a été initiée par l’entreprise dans le but de préserver la santé et la sécurité des salariés et d’améliorer la qualité de leur travail (pollution d’outils de haute précision par les particules d’époxy). En effet, la chaîne de production a trop vieilli (presque 100 ans d’âge), dont les dysfonctionnements sont devenus nombreux générant des risques réels impactant la santé des opérateurs. Le mode dégradé de l’activité ne satisfait plus l’investissement professionnel engagé par les salariés. « Ils voyaient leur santé partir et leur travail également (rebuts) » Après plusieurs mois de discussion, d’interrogations, de réflexion et d’actions sur le terrain, le collectif de la chaîne a mobilisé les représentants du personnel et l’encadrement de proximité sur les conditions de travail dans cet atelier. Il a, par la suite, négocié difficilement et de façon déterminée la mise en place d’un nouvel atelier et participé aux modalités organisationnelles, techniques et sécuritaires pour sa mise en place.
  • 4.4.2.4- Les RPS dans le secteur tertiaire : assurances

    Le médecin du travail, au cours de sa consultation médicale, a pu noter des situations de travail évocatrices des risques psychosociaux (RPS) ou plutôt troubles psychosociaux (TPS) liés au contexte du travail sur le plan organisationnel ; technique, environnemental, managérial et relationnel. Les salariés décrivent leur mal-être et leur souffrance en évoquant l’introduction de nouvelles applications informatiques, avec ajout de nouvelles activités, une formation insuffisante pour maîtriser les outils, des opérations à accomplir dans l’urgence, des contraintes temporelles, une surcharge de travail et pression managériale … Avec le consentement des salariés, le médecin du travail alerte la direction de l’entreprise. Après entretien avec la DRH et réflexion, il transmet un projet d’actions de prévention collective des RPS à la direction dans le cadre de son plan d’activité. La direction de l’entreprise n’émet aucune observation et ne donne aucune suite à ce projet. Quelques temps plus tard, les salariés se sont rapprochés de leurs représentants membres du CHSCT et ont demandé avec insistance d’inscrire à l’ordre du jour du CHSCT le point relatif aux RPS. Après débat et discussion, les membres élus du CHCT ont demandé avec fermeté qu’une expertise soit faite par un organisme extérieur agréé et indépendant. La direction de l’entreprise n’a pas vu d’un bon œil cette démarche et a essayé de dissuader les membres du CHSCT porteur du projet. Les salariés et leurs représentants ont maintenu leur demande.

    L’intervention sur le terrain de l’équipe d’experts a donné lieu à des actions d’accompagnement des salariés ayant pour objectif d’analyser l’organisation et l’activité des salariés du service concerné par les RPS. Le diagnostic co-produit par les experts et les salariés a mis en évidence de nombreux dysfonctionnements liés aux conditions et à l’organisation du travail. La confrontation et le débat au CHSCT en présence de la direction et des experts ont permis de formuler une série d’actions pour améliorer l’organisation et les conditions de travail des salariés. Après discussion avec les différents acteurs et partenaires (salariés, représentants du CHSCT, encadrement et DRH), la direction de l’entreprise a été amenée à mettre en œuvre des actions de prévention des RPS préconisées par le CHSCT avec la participation des principaux concernés selon un calendrier et un suivi régulier de chaque étape. Le médecin du travail s’est impliqué dans la démarche en qualité de membre consultatif du CHSCT.

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5. CONCLUSION

Les quelques exemples cités ici et là-bas ont montré des salariés agissant collectivement dans l’action et par l’action en développant leur pouvoir d’agir pour transformer et améliorer leur travail tout en intégrant dans leur démarche les enjeux de santé au travail.

Dans de nombreuses situations, c’est l’accident grave survenue sur les lieux de travail, c’est la maladie professionnelle déclarée et reconnue, ce sont également les plaintes inaudibles des salariés en souffrance qui constituent la porte d’entrée et le point d’appui pour l’engagement du pouvoir d’agir et la construction de la démarche de prévention collective.

Le médecin du travail, par son expertise et son rôle d’animateur que lui confère la réglementation, occupe une position importante dans le domaine de la santé au travail, mais il ne peut à lui seul, intervenir dans une action prévention collective au sein de l’entreprise pour une transformation réelle et concrète des conditions et des situations de travail.

La conduite d’un projet de prévention collective dans les situation de travail s’appuie sur l’émergence du collectif de travail imprégné du pouvoir d’agir collectif dont les acteurs ont pris conscience des enjeux de santé au sein de l’entreprise en lien avec les conditions et l’organisation du travail.

L’action du médecin du travail en dehors de son expertise clinique médicale devrait se positionner dans les actions de prévention collective et de transformation des situations de travail en inscrivant sa contribution dans le pouvoir d’agir collectif.

La détermination et le positionnement du collectif s’inscrivent sur les valeurs étiques et déontologiques relatives au travail humain dans une démarche clinique du travail, individuelle et collective.

Il s’agit d’agir collectivement dans une dynamique de réflexion, de confrontation, de controverse, de concertation et de partage des savoir-faire et des retours d’expériences ; avec l’appui également, si nécessaire, des ressources internes d’une part et des compétences externes d’autre part (intervenants et chercheurs).

Le cadre réglementaire, les données normatives et/ou recommandées, les recherches documentaires et bibliographiques sont souvent nécessaires dans ce type de démarche.

« Il s’agit de développer le pouvoir d’agir des collectifs de travail, c’est-à-dire la possibilité pour eux de reprendre la main sur leur situation de travail. Cela passe par l’expérience du désaccord, par la confrontation des points de vue sur les critères du travail bien fait. La coopération se construit dans la controverse professionnelle, loin de l’idée convenue d’une homogénéité du collectif» .Yves CLOT. «Le travail souffre, c’est lui qu’il faut soigner!» Yves Clot.

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BIBLIOGRAPHIE :

1- Yves CLOT « Travail et pouvoir d’agir » Clot Yves, Travail et pouvoir d’agir, Paris, Presses Universitaires de France «Le Travail humain», 2008, 312 pages.

2- Yves CLOT « Le travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux» Paris La découverte 2010 p 192.

3- Yves Clot, Dominique Lhuilier« Agir en clinique du travail» Edition érès, Année : 2010
Yves Clot, Dominique Lhuilier «Travail et santé». Edition érès, Année : 2010

4- Philippe Davezies «Des origines de la souffrance au travail à sa prévention» Article publié dans le numéro 76 de la revue Santé et Travail, octobre 2011

5- Philippe Davezies« Reprendre la main sur le travail ? » Article publié dans Nouveaux regards, n°50, août, septembre, octobre 2010, p 22-24.

6- Philippe Davezies «Pouvoir d’agir, travail, santé mentale» (Clinique médicale du travail)
Intervention au congrès de l’Association Française de Sociologie, Session Violence et travail, 17 avril 2009, Paris.

7- François HUBAULT « L’approche ergonomique des questions santé / travail»

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Merci au Docteur Aziz Tiberguent de nous avoir autorisé à mettre en ligne son intervention.


CONTRER L’OFFENSIVE NÉOLIBÉRALE ET DÉFENDRE LES ACQUIS DES TRAVAILLEURS

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BOUDERBA Nouredine

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le 15 mai 2015

Contribution à l’occasion de la célébration du 1er mai 2015

Chaque année en Algérie comme partout dans le monde la journée du premier mai est célébrée comme journée des combats des travailleurs. Le 1er mai 2015 intervient dans un contexte très particulier pour les travailleurs et pour le pays.

Le contexte international

Les partisans du libéralisme économique, confortés par le triomphe du capitalisme international et le recul des syndicats mènent depuis deux décennies une offensive bien orchestrée contre les acquis des travailleurs obtenus après de grands sacrifices depuis plus d’un siècle. Partout dans le monde les travailleurs et leurs syndicats subissent les assauts répétés des libéraux appuyés par la finance internationale et ses instruments : le FMI, la banque mondiale, l’OCDE, l’Union européenne.

Précarisation de l’emploi, Mobilité du travailleur, plus de pénibilité et moins de protection en matière d’hygiène, de sécurité, de médecine du travail, fin de la sécurité sociale par répartition, individualisation des salaires et remise en cause de la négociation collective, des libertés syndicales et du droit de grève.

Les pays en voie de développement comme l’Algérie sont mis en concurrence en matière de précarité et de baisse du cout du travail, ce qui se traduit par un nivellement par le bas des prétentions des travailleurs.

Voilà résumé les axes d’attaque qui caractérisent cette offensive néo-libérale à l’échelle planétaire. C’est dans ce cadre que s’inscrit le « nouveau contrat social » pour reprendre des termes du FMI. Termes repris par les représentants du patronat à plusieurs reprises. (Débats sur l’avant-projet du code du travail, la constitution…).

Au plan national, attaques contre le contrat social en vigueur, menées essentiellement contre les travailleurs:

Au plan national le capitalisme spéculatif adossé à la rente a pris le dessus sur les forces productives et affiche clairement ses visées sur les richesses nationales ambitionnant de prendre les commandes du pays et de contrôler tous les secteurs y compris ceux relevant de la souveraineté nationale.

Le défi qui se pose aux travailleurs, à leurs syndicats et à toute les forces nationales est la mise en échec de la politique qui consiste à remettre en cause du contrat social en vigueur qui est le produit du mouvement de libération nationale qui a vu les travailleurs et les syndicalistes consentir les plus grands sacrifices pour l’édification d’un état national souverain, fort et indépendant ou règne la justice sociale. Ces mêmes sacrifices ont été renouvelés durant la décennie noire pour maintenir l’Algérie républicaine debout.

Selon le FMI et la Banque mondiale et leurs relais nationaux ce contrat social ne cadre plus avec le contexte actuel caractérisé, selon eux, par l’éclatement de la condition salariale et l’érosion par la mondialisation de toute politique nationale du travail à l’ombre du déclin de la syndicalisation qui relativise le rôle de la négociation collective et fait apparaitre la nature non syndiquée de la relation de travail.

Ainsi ils nous proposent ou plutôt veulent nous imposer une révision radicale de la condition salariale en Algérie ou le droit du travail protecteur du salarié sera transformé en droit du travail protecteur du capital.

Cela passe par la généralisation de la précarité de l’emploi, par une individualisation des salaires pour les tirer vers le bas etpar une limitation plus accrue des droits collectifs des travailleurs notamment le droit syndical, de grève et le droit à la négociation collective.Cette remise en cause englobera la politique de protection sociale des couches défavorisées,le droit à la santé et ce qui reste de la médecine gratuite, le droit au logement et à l’éducation. Enfin le système de sécurité sociale par répartition basé sur les principes de la solidarité est appelé à être démantelé pour être remplacé par un système par capitalisation soumis aux aléas des marchés financiers.

I.1Précarisation de l’emploi

L’avant-projet du code du travail en gestation depuis 10 ans va consacrer un nouveau contrat social ou le travailleur sera considéré comme une simple marchandise. Dans aucun pays au monde, une réforme de la législation du travail n’a apporté autant de remises en cause simultanées comme le fait cet avant-projet. Le droit constitutionnel au travail est remis en cause, le droit à la protection contre les risques professionnels et à la santé le sont aussi. Idem pour le droit au repos et à une vie familiale digne et émancipée. Le droit à la protection administrative et judiciaire contre le licenciement connaitra un net recul.

Cette généralisation de la précarité va aboutir à un nivellement par le bas des prétentions et revendications des travailleurs. Comme changements on aura :

  • La généralisation du CDD et la diversification des formes de contrat de travail précaires sans limitation de la durée maximale cumulée. Les titulaires de CDD et les travailleurs temporaires sont des victimes souvent sans défense de discrimination en terme de salaires, d’avancement, de conditions de travail, et de tout autre avantage autre que salarial.

    Pour mesurer l’ampleur de cette précarité il faut savoir qu’en Algérie les CDD représentent plus de 40 % de la structure de l’emploi salarié total (80 % chez le privé) et il n’est pas rare de trouver des travailleurs en CDD durant dix (10) voire quinze (15 ans) grâce aux techniques d’espacement des dates entres deux contrats et avec ça on veut plus de précarité et moins de règlementation.
  • Des facilités de licenciement au moindre coût, même sans raison, seront accordées à l’employeur sans grande possibilité pour la majorité des travailleurs victimes d’un licenciement de retrouver un emploi et sans amortisseurs sociaux comme l’allocation chômage.
  • Des pouvoirs importants et injustifiés seront accordés à l’employeur pour aménager unilatéralement les horaires de travail, prolonger leur durée, reporter la journée de repos hebdomadaire et la fixer par roulement. La définition du travail de nuit sera revue pour éviter des majorations de la rémunération horaire et l’interdiction d’affecter les femmes ou les apprentis au travail de nuit sera levée.
  • Le travail de mineurs ne sera plus interdit comme ne seront pas interdits dans la pratique l’affectation des femmes et des mineurs à des travaux dangereux ou dont l’effort exigé dépasse leur capacité.

    En matière d’hygiène et de sécurité on retrouve aussi cette précarité qui s’appliquera à la santé et même à la vie des travailleurs au vu des changements introduits dans les obligations faites à l’employeur en matière de sécurité et de santé et de médecine du travail et surtout dans l’assouplissement des sanctions en cas d’infractions.

I.2 Limitation de la protection des travailleurs :

Les pouvoirs et attributions de l’inspecteur du travail en matière de surveillance et de contrôle de l’application de la législation du travail ainsi que le droit de poursuite en cas d’infraction seront limités.

La justice du travail ne sera plus du côté de la partie faible du contrat et dans certains cas servira de chambre d’enregistrement de la volonté des employeurs.

Tous les jugements rendus par les sections sociales seront susceptibles d’appel y compris dorénavant ceux relatifs à la réintégration, l’annulation des sanctions, la délivrance de certificats de travail ou de bulletins de paie ou ordonnant l’application d’un accord de conciliation. Avec ce changement les travailleurs seront moins protégés contre l’abus.

De plus les jugements de réintégration même ayant acquis la force de la chose jugée (après appel) ne pourront plus donner lieu à un jugement sous astreinte journalière pour obliger l’employeur de les appliquer.

Même l’exécution provisoire de plein droit pour les décisions judiciaires relatives au paiement des salaires et indemnités de plus de six (06) mois qui est sans caution sera modifiée pour devenir avec caution dans le seul but de décourager le travailleur de la demander.

L’assistance judiciaire de plein droit à tout travailleur dont la rémunération est inférieure à deux (02) fois le SNMG sera supprimée.

Le taux de l’astreinte journalière a été réduit de 25 % du Salaire mensuel minimum garanti à 15%.

I.3 Limitation des droits collectifs :

Cette réforme à travers la précarisation aboutira à l’individualisation de la relation de travail et des salaires qui ne manquera pas d’affaiblir les syndicats et la négociation collective. Tous les obstacles actuels qui limitent le droit syndical des travailleursetle droit de grève ont été maintenus.

Ces atteintes seront renforcées par d’autres obstacles pour constituer un syndicat, créer une fédération ou une confédération syndicale ou exercer le droit de grève.

La représentation syndicale (élection de délégués syndicaux) n’est reconnue qu’aux collectifs qui réunissent au minimum 20 travailleurs. Cette disposition exclut des centaines de milliers de travailleurs de s’organiser en Syndicat particulièrement dans le privé.

Le droit à la négociation collective sera limité notamment dans les domaines se rapportant à l’emploi et aux conditions de travail.La négociation collective au niveau national n’est pas instituée.

Le droit d’extension, procédé par lequel le domaine d’application de la convention peut être étendu, par le ministre du travail, à tous les employeurs et tous les travailleurs compris dans le champ d’application professionnel et territorial de la convention, qu’ils aient été parties ou non à la convention ne sera pas institué. Ce droit d’extension aurait permis la protection de millions de travailleurs non couverts par la négociation collective notamment dans le secteur privé national et étranger. Il aurait aussi permis aux entreprises publiques de faire face à une concurrence déloyale que leur font les entreprises étrangères et privées qui ne respectent pas la législation et les droits fondamentaux des travailleurs.

Le droit à la participation sera revu à la baisse à travers la limitation des attributions du Comité de participation en matière d’information, de consultation et de surveillance. Ces limitations se rapportent notamment à la politique de l’emploi, aux contrats de travail et à la participation au conseil d’administration (ou de surveillance) des sociétés puisque les administrateurs de droit n’auront plus que le statut « d’observateurs » avec voix consultative. Ce changement de statut est très important et se répercutera sur tous les pouvoirs découlant de l’actuel statut (droit d’information, droit d’alerte, participation aux assemblées générales de la société etc…). Même leur invitation à la totalité des réunions du conseil d’administration ne sera plus garantie.

Dans l’actuelle législation l’obligation de constitution du comité de participation ainsi que l’obligation de moyens (autrement dit l’organisation des élections des délégués du personnel) reposent sur l’employeur et la non mise en place du Comité de participation ou son non renouvellement constitue un délit d’entrave.
Curieusement cette obligation a disparu dans le nouveau code Ce qui constitue un encouragement à l’employeur de ne pas mettre en place cet organe social obligatoire.
Par contre l’avant-projet a introduit une disposition habilitant l’employeur à organiser une assemblée générale pour retirer un mandat à un délégué du personnel alors que ce cas aurait dû relever de l’inspection du travail ou d’un juge du travail.

Aucune protection contre les sanctions y compris le licenciement ne sera plus assurée effectivement pour les délégués du personnel.

II La part des travailleurs dans la répartition des richesses nationales :

II.1 L’article 87 bis : Une injustice qui dure

L’article 87 bis institué en 1994 sur injonction du FMI « afin de contenir les salaires » a eu pour conséquence une réduction drastique de la part des salaires dans la répartition du revenu national qui est passée de 34,7% en 1993 (à la vielle de l’application du 87 bis) à 26,1 % en 2013 après être descendue au-dessous de la barre des 20 % en 1999-2000. Ce ratio est de 36 % au Maroc, 37 % en Tunisie et dépasse les 50 % dans les pays de l’OCDE atteignant pour certains d’entre eux 75 %.

Durant cette période (1993-2013) la part de l’accumulation du capital à travers l’Excédent Net d’Exploitation et les amortissements des actifs de l’entreprise (Consommations de Fonds Fixes) est passée de 49.6% à 59.6 %. Autrement dit l’affectation de la richesse nationale a connu une évolution injuste au détriment des travailleurset au profit du capital.

Lors de la tripartite tenue en 2005, alors que tous les indicateurs économiques étaient sur une courbe ascendante, le chef du gouvernement avait affirmé qu’il «était conscient que la situation découlant de l’article 87 bis est vécue comme une injustice par le monde du travail » promettant d’œuvrer progressivement à faire disparaitre cette injustice. Mais dix années après,l’absence de combativité syndicale autour de cette question due à la proximité avec les centres de décision pour certains syndicats avec à leur tête l’UGTA et à un certain esprit corporatiste pour d’autres, on se retrouve non pas avec une abrogation mais devant une redéfinition de l’article 87 bis qui se répercute grâce aussi à des artifices réglementaires, par des augmentations insignifiantes pour les corps communs de la fonction publique. Ceci en attendant ce que vont donner les négociations collectives dans le secteur économique public et surtout ce que vont concocter les patrons privés face à l’absence de syndicats et au laissez faire des pouvoirs publiques.

On est très loin de la dérive salariale imaginée par les experts attitrés du patronat qui nous informaient il y a pas longtemps que cette révision allaient engendrer un impact de l’ordre de 6-7 milliards de $ pour les uns et 11-12 milliards de $ pour d’autres. Un expert qui revient sur la question à la vielle de chaque tripartite nous avait même alerté qu’à cause de cet impact la masse salariale globale allait passer (en 2014) de 54 à 88 milliards de $ soit une augmentation de 34 milliards de $. Pour se rendre à l’évidence il n’y a qu’à consulter la loi des finances 2015 qui a abrogé l’article 87 bis pour découvrir que l’impact réel qui sera généré par cette redéfinitionsera inferieur à 150 milliards de DA (soit moins de 2 milliards de $) c’est-à-dire ne dépassera pas 1 % du PIB contre 6% voire 17 % avancé par nos experts attitrés qui ont curieusement brillé par leur silence depuis cette loi des finance et la promulgation en février 2015 du décret redéfinissant le contenu du SNMG.

Je rappelle que dans une contribution1datée du 25 septembre 2014 j’avais souligné je cite « Comment peut-on nous parler de l’impact qui sera généré par cette mesure lorsque les « experts économiques » prennent un plaisir fou pour intervenir à la veille de chaque tripartite afin de peser de tous leurs poids contre toute décision favorable à cette abrogation ou à une augmentation du SNMG en prenant appui sur des chiffres erronés ne correspondant nullement à la réalité ». Avant de conclure plus loin « Accepter la redéfinition du 87 bis au lieu de son abrogation c’est accepter de perpétuer l’injustice vécue par les travailleurs pour paraphraser l’ancien chef du gouvernement Mr Ouyahia ». Fin de citation

II.2 Un SNMG dévoyé et dérisoire et une politique des salaires injuste.

J’avais mis en évidence cette politique salariale injuste toujours dans la contribution du 25 septembre 2014 citée ci-dessus. Elle est tellement d’actualité que je me permets de la reprendre de nouveau. Qu’on lise ensemble :

« Au lieu d’assurer une augmentation des salaires cohérente en abrogeant le 87 bis et en augmentant les minimas à travers le SNMG les pouvoirs publics sous la pressions du patronat et avec l’assentiment de l’UGTA ont préféré ouvrir des chantiers de revalorisations des salaires obéissant à la logique des rapports de force et sans aucun pouvoir de contrôle et/ou d’harmonisation pour l’état

L’abrogation du 87 bis et une augmentation du SNMG se seraient traduites par une augmentation générale des salaires en particulier ceux des travailleurs des secteurs privés dont le salaire net moyen est le plus bas du bassin méditerranéen.

Ainsi grâce à cette politique, renforcée par le crédit à la consommation, le patronat a pu fouetter la demande de consommation et renforcer ses carnets de commande sans avoir à consentir des augmentations de salaire à ses propres travailleurs.

C’est cette politique qui explique les disparités actuelles et les difficultés pour certains secteurs d’absorber les augmentations qui seront induites par l’abrogation du 87 bis.

Encore une fois pour l’année 2015 on ne compte ni supprimer carrément le 87 bis ni augmenter le SNMG mais on se prépare à ré-instituer le crédit à la consommation qui n’aura pour conséquences que l’augmentation des importations puisque même pour « la production nationale » le taux d’intégration moyen ne dépasse pas 15 % et un appauvrissement à moyen terme des travailleurs qui auront demain à rembourser le crédit d’aujourd’hui avec un pouvoir d’achat plus réduit. Le seul bénéficiaire sera encore une fois le patronat.»1 . Fin de citation.

Soulignons d’abords que le crédit à la consommation a été ré institué par la loi des finances 2015 mais le taux d’intégration nationale minimal (40 %) retenu initialement par le groupe de travail de la tripartite sera abandonné. Résultat : des produits dont la plus-value nationale ne dépasse pas 10 % seront éligibles au crédit qui va relancer la consommation et fouetter …les importations puisque 90 % de leurs inputs seront importés c’est-à-dire qu’on va financer l’emploi des travailleurs des pays fournisseurs. Le résultat très symbolique de cette opération est l’inscription de la Renault Symbol au bénéfice de ce crédit et la direction de l’UGTA a décidé d’exposer cette voiture à la maison du peuple à l’occasion du 1er mai. Il faut juste rappeler que le taux d’intégration national de cette voiture oscille entre 12 et 17 % selon les déclarations contradictoires faites à la presse par les responsables de l’industrie.

Pour revenir aux salaires Il faut savoir que ceux de 40 % des salariés gravitent autour du SNMG dont le montant journalier (600 DA) ne permet même pas d’acheter 500 grammes de viande. Et la valeur de ce SNMGn’a pas été révisée depuis janvier 2012 et curieusement aucune revendication à ce sujet n’a été entendue ou lue.

Cette politique salariale injuste a créé des disparités entre les différents secteurs (fonction-publique-secteur économique publique- secteur économique privé). Mais aussi entre les catégories socio-professionnelles d’un même secteur. En effet pour ne prendre qu’un exemple le SNMG est passé de 12 000 DA à 18 000 DA entre le 1er janvier 2010 et le 1er janvier 2012. Cette augmentation a amélioré le salaire annuel des Smicards de l’ordre de 80 000 DA (08 millions de cts) alors que les cadres dirigeants et les cadres supérieurs de l’Etat dont le salaire et les primes sont indexés sur le SNMG ont vu leur revenu annuel gagner entre 150 millions et 200 millions de cts.

II.3 L’IRG : une politique fiscale qui aggrave les inégalités au lieu de les corriger.

Entre 2008 et 2013 l’évolution d’IRG a été comme suit : 117 Mrds DA (1.1 % du PIB) en 2008, 183 Mrds DA (1.8 % du PIB) en 2009, 245 Mrds DA (2 % du PIB) en 2010, 383 Mrds DA (2.6 % du PIB) en 2011, 553 Mrds DA (3.5 % du PIB) en 2012 et 489 Mrds DA (2.8 % du PIB) en 2013.

Durant la même période l’impôt sur les bénéfices des sociétés a connu l’évolution suivante : 135 Mrds DA (1.2 % du PIB) en 2008, 228 Mrds DA (2.3 % du PIB) en 2009, 254 Mrds DA (2.1 % du PIB) en 2010, 246 Mrds DA (1.7 % du PIB) en 2011, 248 Mrds DA (1.6 % du PIB) en 2012 et 258 Mrds DA (1.5 % du PIB) en 2013.

Comme on le voit l’IRG des salariés qui représentait 64 % de l’IBS en 2008 en représente 190 % en 2013.

Et ce n’est pas tout, en réalité la part des entreprises Algériennes dans l’IBS est beaucoup plus insignifiante que ne le laissent paraitre les chiffres. A cet effet le rapport de la cour des comptes de 2011 nous apprend que « La contribution des entreprises nationales à l’lBS (pour l’année 2010) n’est que de 44,885 Mrds DA, soit 17 %, les 83% restant, soit plus de 210 Mrds DA, sont réalisés avec des entreprises étrangères par voie de retenues à la source ».

Autrement dit la part de l’IBS dans le PIB payée par les entreprises nationales n’est que de l’ordre de 0.37 % contre 2.8 % pour l’IRG.

Et l’argument qui veut expliquer que la part de l’IRG a augmenté à cause de « l’explosion des salaires » ne tient pas la route puisque comme on l’a vu plus haut la part des salaires dans l’affectation du revenu national n’est plus que de 26.1 % en 2013 contre 36 % au Maroc et 37 % en Tunisie. Si l’augmentation des salaires peut expliquer l’augmentation de l’IRG correspondante dans l’absolu elle ne peut expliquer l’importance de l’augmentation de ce dernier comparativement à l’IBS.

En conclusion on ne peut parler de juste répartition des richesses nationales sans l’abrogation pure et simple du 87-bis, une revalorisation conséquente du SNMG et un rééquilibrage de la politique fiscale en faveur des salariés et des retraités.

III) les transferts sociaux : Parlons en :

Les transferts sociaux sont des mécanismes de redistribution du revenu national destinés à corriger les inégalités socio-économiques. Depuis quelques années nous lisons régulièrement des experts, des représentants du patronat et même du gouvernement nous répéterà l’unisson que les transferts sociaux représentent 60 milliards de $ soit 30 % du PIB et coutent cher à l’état.

Or chaque Algérien averti sait qu’il n’en est rien et que derrière ce travestissement de la réalité se cachent des velléités d’appauvrir d’avantage les pauvres pour enrichir les riches.

es 60 milliards de $ (30 % du PIB) ne représentent pas du tout les transferts sociaux qui de 2012 à 2015 ont oscillé entre 11, 75 % et 9.1 % du PIB et non 30%.

Ce ratio est en deçà des ratios en vigueur dans les pays de l’OCDE et sensiblement égal si ce n’est inférieur à ce qui se pratique chez nos voisins du Maghreb.

Il faut noter par exemple que dans ces transferts sociaux sont comptabilisées annuellement 50 milliards de DA représentant le montant des allocations familiales que l’état prend en charge au lieu et place des entreprises bien que le patronat avait lors de la tripartite de 2005 donné son accord pour revenir aux normes universelles et prendre en charge ces AF. Cette décision n’est pas mise en œuvre 10 années après occasionnant au trésor une perte de l’ordre de 500 milliards de DA.

La différence ,entre les 30% et les 9% du PIB , soit 19 à 21 % du PIB représentent des subventions économiques implicites (non budgétisées) et profitent aussi bien à l’entreprise (surtout privée) qu’à la population puisque plus que le tiers de ces subventions économiques implicites est représenté par les exonérations fiscales et liées au foncier qui étaient respectivement de l’ordre de 942,6 et 65.8 milliards de DA (2012) et 1 081,0 et 66.85 milliards de DA (en 2013). Les deux tiers restants sont représentés par les subventions liées aux produits énergétiques (gaz, électricité et carburants.) dont les entreprises privées nationales et étrangères sont des grands bénéficiaires.

III.2La remise en cause rampante du droit à la santé et à l’éducation :

Les dépenses globales de santé (DGS) c’est à dire le montant global que la société dépense pour ses besoins sanitaires s’élève à 439 $ par habitant et par an contre 4 000 $/hab/an pour les pays de l’OCDE (chiffres de la banque mondiale 2012).
Autrement dit un citoyen de l’OCDE dépense en moyenne 10 fois plus pour se maintenir en bonne santé qu’un citoyen Algérien.
Ramenées au PIB les DGS de l’Algérie représentent 5.3% du PIB contre 6.6 fois le PIB au Maroc et 7 fois le PIB en Tunisie.
Ce retard est encore plus accentué pour les populations défavorisées si l’on prend en compte la répartition interne des revenus affectés aux besoins de santé et le favoritisme existant pour l’accès aux services publics de santé.

La politique de la marchandisation de la santé suivie cette dernière décennie est caractérisée par une remise en cause graduelle de la médecine gratuite et le désengagement de l’état qui ont eu pour conséquence l’effort insoutenable imposé aux ménages pour financer les couts liés à la santé.

Certains experts affirment que la part des ménages dans le financement des DGS qui était de l’ordre de 10% dans les années 70’s et 80,s s’élèvent aujourd’hui à 35-40 %.

La promulgation de la nouvelle loi relative aux mutuelles sociales et le projet de loi relative à la santé s’inscrivent en droite ligne dans cette politique.

Les experts ultralibéraux nous disent que l’Algérie en optant pour la démocratisation de l’éducation dépense beaucoup pour un résultat médiocre et qu’il faut réduire ces dépenses inutiles.

Les derniers chiffres connus (Banque mondiale- 2008) nous indiquent que les dépenses publiques consacrées à l’éducation par l’Algérie représentent 4.33 % de son PIB contre 6.5 % pour le Maroc et la Tunisie.

III.3 Les attaques contre la sécurité sociale basée sur la répartition.

Pour les experts Algériens porte-parole des ultralibéraux « les cotisations socialesabsorbent les gains de productivité au détriment de l’emploi et des salaires directs ».

Autrement dit, ils accusent la sécurité sociale d’être responsable des bas salaires et même du chômage pas moins. Aussi ils préconisent de remettre en cause le système de sécurité sociale par répartition basé sur la solidarité. C’est-à-dire que chaque assuré cotise en fonction de ses moyens et reçoit des prestations en fonction de la réalisation des risques pour lequel il est assuré. Ils veulent le remplacer par le système par capitalisation ou les cotisations des assurés sont soumis aux risques du marché financier et ou chaque assuré social ne reçoit des prestations qu’en proportion avec ses cotisations.

Si le nouveau contrat social des ultralibéraux se réalise le droit à l’assurance maladie, à la maternité, à la couverture des accidents de travail et des maladies professionnelles ainsi qu’à la retraite ne seront plus assurés pour une grande partie des travailleurs et les inégalités sociales et économiques vont augmenter.

Le droit au travail, le droit à l’éducation, le droit à la santé et à la couverture sociale basée sur la solidarité et la répartition ainsi que le droit au logement doivent être constitutionalisés à côté des autres droits démocratiques d’association, syndical et de grève.

Alger le 01 mai 2015
BOUDERBA Nouredine
ex membre de la FNTPGC UGTA
Email : nbouderba@yahoo.fr

GAZ DE SCHISTE: VIGILANCE ET MOBILISATION POPULAIRES

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SIX MOIS APRES, LES MANIFESTANTS DE IN SALAH POURSUIVENT LEUR PROTESTATION CONTRE LE GAZ DE SCHISTE

HuffPost Algérie | Par Nejma Rondeleux

Publication: 05/06/2015

n-in-salah-6-mois-large570.jpgIn Salah 6 mois

Six mois plus tard, ils sont encore là. Sur la Sahat Essoumoud (Place de la Résistance) où bat le cœur de la contestation anti gaz de schiste à In Salah depuis le 31 décembre.

Ni les 40° C du thermomètre, ni les vents de sable, ni le silence du gouvernement, n’ont eu raison des militants. Chaque jour, vers 18H30, à l’heure où la chaleur s’apaise, ils se retrouvent sur la Place autour d’un verre thé.

« Il y a moins de monde qu’avant mais nous sommes toujours une trentaine à nous réunir », témoigne Djamel, fidèle manifestant de In Salah.

Les femmes, mobilisées aux côtés des hommes dès le début du mouvement, continuent de venir Place Somoud et de cuisiner de temps en temps pour tous les présents, en particulier le vendredi.

Même si les mois ont passé et que les voix ont diminué, le mouvement a évolué et ses racines se sont implantées, comme celles des 55 arbustes de la Place qui ont bien poussé depuis fin février.

o-arbre-soumoud-570.jpgarbre soumoud

L’opposition s’est même relevée de ses cendres. Le petit musée du Somoud qui raconte en dessins et photos les six mois de lutte, a été reconstruit après son incendie le 9 mai dernier.

o-muse-somoud-570.jpg musée somoud

L’inauguration a eu lieu, mercredi 3 juin, avec un grand gâteau aux slogans des manifestations.

o-gteau-in-salah-570.jpg gâteau in salah

Incident technique

Au niveau des actions, c’est autour du second puits en phase de tests que les regards des habitants d’In Salah se tournent à présent.

« Depuis que les expérimentations du premier puits sont terminées et que le matériel a été déplacé, nous concentrons notre vigilance sur le second puits », explique Djamel qui relève d’ailleurs qu’un « problème a dû arriver » car il y a eu « un va et vient d’experts américains et norvégiens » pendant trois semaines au niveau de la base d’Halliburton.

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Une forte vibration a été ressentie par plusieurs personnes, souligne un autre militant qui affirme que le « second puits est fracturé dans des conditions anormales ». « Plus de 40 jours de travail entre la fracturation et la mise en torche, ce n’est pas normal, pour le conventionnel ça ne dure que deux semaines », souligne cet habitué des plateformes pétrolières.

Nouvelle lettre au gouvernement

Outre la surveillance, les militants tiennent toujours leurs réunions. Une nouvelle déclaration réaffirmant les positions initiales de la société civile d’In Salah a ainsi été rédigée hier, 4 juin et envoyée au secrétariat du gouvernement ainsi qu’au nouveau ministre de l’énergie, Salah Khebri.

Nous réitérons notre demande « d’une annonce solennelle de l’arrêt de la fracturation hydraulique pour plusieurs années et de l’ouverture d’un débat national », ont écrit les citoyens d’In Salah.

Une fois de plus.


1

Matin

slide_398364_4906178_free.jpg Nejma Rondeleux pour le HuffPost Algérie

Les habitants commencent à affluer vers la Place dès le levé du soleil vers 6H30.


2

Périmètre de sécurité

slide_398364_4906180_free.jpg Nejma Rondeleux pour le HuffPost Algérie

Un barrage artisanal bloque l’entrée aux voitures, seuls les motos et les pick-up de marchandises sont autorisés à entrer.


3

Débats

slide_398364_4906182_free.jpg Nejma Rondeleux pour le HuffPost Algérie

La journée débute toujours par des prises de paroles où chacun(e) exprime librement un avis, un commentaire, un encouragement, une idée sur le mouvement.


4

Logistique

slide_398364_4906184_free.jpg Nejma Rondeleux pour le HuffPost Algérie

Une sono et deux haut-parleurs géants ont été installés pour permettre à tous d’entendre les discours. Ils sont rangés et réinstallés quotidiennement.


pour lire l’article et accéder aux photos
cliquer sur le lien: http://www.huffpostmaghreb.com/2015/06/12/schiste-in-salah-opposition_n_7520692.html?utm_hp_ref=algeria


ou aller sur le lien: (…)

PREMIER MAI À ALGER – RENCONTRE AU LOCAL DE LA LDH: LA NÉCESSITÉ DE S’UNIR ET DE DÉPASSER LES CLIVAGES

Compte rendu d’une activité pour le 1er Mai à Alger sur le site de RAINA

Premier mai à Alger,

raina.dz

par Keltoum Staali

mardi, 12 mai 2015

Dans le local exigu de la LDH à Alger ce matin du premier mai, des militants politiques et syndicaux, des citoyens, se pressent pour assister à la célébration de la fête des travailleurs. Ils ne sont pas nombreux, une cinquantaine tout au plus, mais ils ne rateraient pour rien au monde ce rendez-vous.

Parmi eux, des personnalités du monde syndical et politique. La réunion présidée par Hocine Zehouane, président de la LDH, s’ouvre sur un espoir que vont conforter les interventions les plus remarquées : la nécessité de s’unir et de dépasser les clivages.

Après avoir rappelé les principales étapes de la lutte anti-coloniale au travers de cette date, il conclut : « nous sommes tous aujourd’hui orphelins concernant le 1er mai ».

Une déclaration commune a été élaborée, appelant à contrer l’offensive néo-libérale et la remise en cause des acquis sociaux et démocratiques des travailleurs. Elle rappelle également le contexte très particulier que connaît l’Algérie aujourd’hui, contexte marqué par les menaces sécuritaires, la déstabilisation des pays de la région, les pressions du capital international et de ses institutions financières et les conséquences prévisibles de la baisse du prix du pétrole.

La déclaration exprime une vive inquiétude autour de la remise en cause du statut salarial en Algérie à la faveur de l’avant-projet du code du travail, mais également des menaces qui pèsent sur le système de santé, la remise en cause de la démocratisation de l’éducation et de la protection sociale.

Cet appel est signé par la LADH, le MDS, le PST, la Moubadara du 24 février et le Comité National de Défense des Libertés Syndicales.

À la tribune, une intervention remarquée de Nouredine Bouderba, syndicaliste, ex-membre de la FNTPGC-UGTA, revient longuement sur une analyse de la situation du pays en insistant sur ce qui fait le « moteur » de l’Algérie aujourd’hui, à savoir la lutte entre les travailleurs et les partisans du capital au niveau national et international.

Dans un rapport de forces qui n’est pas en faveur des travailleurs, on assiste à un recul syndical. Il rappelle les dangers qui guettent la société : précarisation de l’emploi, mise en concurrence en matière de précarité et de coût du travail des pays en développement. Il dénonce le danger d’un nouveau contrat social prôné par le FMI qui se traduit par les tentatives de la part du capitalisme spéculatif en Algérie de prendre les commandes du pays et de contrôler tous les secteurs y compris ceux relevant de la souveraineté nationale : « Le FMI veut imposer une révision de la condition salariale en Algérie pour transformer le droit du travail protecteur du salarié en droit du travail protecteur du capital ».

D’autres interventions, dont celles du MDS représenté par Yacine Téguia, reviennent sur l’agressivité du capital spéculatif qui produit plus de chômage, plus de précarité tout en rappelant les luttes réprimées par le pouvoir. Le MDS propose même de lancer un collectif de solidarité avec les chômeurs actuellement détenus.

Le PST, en la personne de Mahmoud Rechidi, quant à lui insiste sur la question de la reconstruction de l’unité d’action des travailleurs et des masses populaires. Selon lui, l’objectif pour l’avenir est bien de construire dans l’unité et dans les actions concrètes, une véritable résistance face à la politique néo-libérale qui remet en question tous les acquis du mouvement ouvrier depuis le XIX siècle.

Pour la Moubadara, la menace que représente cette offensive néo-libérale et impérialiste, s’exprime par la dislocation des acquis sociaux, la destruction des moyens de production et d’échanges, en remettant en cause toutes les traditions du combat démocratique et social forgées durant des décennies par les luttes des travailleurs.

Après les déclarations des représentants des différents groupes signataires, la parole est donnée à la salle. Des militants regrettent que les organisateurs n’aient pas opté pour un rassemblement « visible » au grand air. Le débat d’idées, les séances d’étude et de réflexion pouvant se tenir à tout moment de l’année, le 1er mai méritait sans doute une action plus spectaculaire et symbolique.

Cette rencontre a tout de même été l’occasion d’échanges riches et de haut vol et permis de souligner la volonté largement partagée par les participants de se rassembler pour affronter l’adversité qui menace le pays.

Keltoum Staali


notes: sur socialgerie voir:


CONTRE QUI ET POUR QUI LA SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DU PARTI DES TRAVAILLEURS EST -ELLE EN GUERRE?

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Mohamed Saadoune

Huffpost maghreb

le 9 mai 2015

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Mais qu’est-ce qui fait courir Louisa Hanoune? Même ceux qui préfèrent continuer à retenir la période héroïque des années 90 où elle était, avec Abdelhamid Mehri et Hocine Aït Ahmed notamment, dans une opposition franche au régime, se posent la question.

Aujourd’hui d’ailleurs, Louisa Hanoune et le PT n’évoquent pratiquement plus le contrat national signé à Rome en 1995 comme s’il s’agissait d’une erreur de jeunesse ou d’une hérésie commise dans un moment d’égarement.

En tout cas le discours d’aujourd’hui de Hanoune condamnerait sans le moindre doute cette réunion comme un encouragement à l’ingérence étrangère, exactement comme l’a fait le régime à cette époque.

On peut observer que la « ligne » a commencé à s’infléchir à la fin des années 90 avec un discours hyper-alarmiste sur un État-Nation menacé de l’extérieur. Une traduction mécanique, disent certains, du mot d’ordre de l’internationale lambertiste de défense les États-Nations contre la mondialisation capitaliste.

Cela aurait pu être d’ailleurs une opportunité d’élargir la réflexion politique et de poser également la question de la part « nationale » de cette menace contre l’État-Nation. Or, cela s’est traduit surtout par un soutien permanent à la présidence de Bouteflika même si on critique chemin faisant certains ministres.

La visibilité politique de Louisa Hanoune s’est perdue dans le bouteflikisme. Sa campagne actuelle n’est pas lisible non plus. Est-ce de la rancœur à l’égard d’un éventuel « lâchage » du clan présidentiel? Ou est-ce la confirmation d’un ralliement au « DRS Canal-Historique » comme le note un ancien du PAGS qui suit avec attention le semblant de vie politique algérienne?

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Acharnement et oublis

Beaucoup de questions? Il reste que son acharnement actuel contre la ministre de la Culture, Nadia Labidi, commence, sans préjuger de la réalité des accusations qui sont portées contre elle -et qu’en théorie la justice officiellement saisie devrait démêler- a déjà un effet contraire à ce qu’elle souhaite.

Un courant de « sympathie » pour la ministre de la Culture commence à s’exprimer dans les réseaux -ou le PT parait singulièrement absent-, en raison même de cette agressivité avec laquelle Mme Hanoune vitrifie à chacune de ses sorties Nadia Labidi.
Cette « sympathie » ne découle pas d’une conviction que Mme Labidi est « clean » ou qu’elle aurait une gestion inattaquable. Elle exprime surtout cette réticence bien algérienne à l’égard de celui qui agresse les « petits ».

La manière dont Hanoune massacre régulièrement Mme Labidi est perçue comme une Hogra -elle-même utilise cette formule méprisante de « petite oligarque » en parlant d’elle- car en matière « d’affaires », la dirigeante du parti des travailleurs avait des cibles potentielles autrement plus pesantes que Mme Labidi.

Mme Louisa Hanoune, observe-t-on, n’a jamais dit un traître mot de la décision prise en catimini, sans l’aval du conseil d’administration de la Cnas, par Abdelmadjid Sidi Saïd, secrétaire général de l’UGTA, de placer l’argent des travailleurs -et au sens propre du terme- dans la Khalifa Bank.

C’était d’ailleurs l’événement le plus retentissant du procès de la Khalifa Bank de 2007 avec ce fameux aveu suivi d’un « j’assume » qui n’a pas provoqué -comme on aurait pu le penser en situation normale- une quelconque information judiciaire.

Louisa Hanoune n’a pas non plus éprouvé de répulsion morale ou politique à faire cause commune avec Abdelmadjid Sidi Saïd et à défendre en quelque sorte le syndicat « unique ». Bien sûr, il y a également les attaques contre l’homme d’affaires, Ali Haddad, président du FCE, et proche du cercle présidentiel.

La description qu’elle fait d’une oligarchie tentaculaire qui est en train de constituer un État parallèle, qui « privatise » la décision économique et qui est porteuse d’un « projet criminel d’assassinat de l’État algérien » est grave.

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Les milliards du FCE sont-ils suffisants pour assassiner l’État?

Si une telle entreprise existe réellement et contre laquelle Mme Hanoune entend nous prémunir -on admet que les complots ça peut exister même si l’histoire n’est pas une succession de complots- alors il y a un problème de casting.

Ali Haddad et les hommes d’affaires du FCE constituent effectivement une force qui grandit et qui, un jour ou l’autre, aspire à faire de la politique et à peser politiquement. Ali Haddad qui ne cache pas sa proximité avec le frère de Bouteflika a gagné probablement de l’influence.

Mais tous les milliards réunis des chiffres d’affaires des patrons du FCE ne leur donnent pas cette capacité fantastique que leur prête Louisa Hanoune « d’assassiner l’État ». Ils sont dans le meilleur des cas une « force d’appoint », ils n’ont pas, pour l’instant du moins, le pouvoir d’assassiner l’État.

Louisa Hanoune pense peut-être -on essaie toujours de chercher une « rationalité » à sa démarche- que Labidi et le FCE sont les maillons « faibles » de ce complot ourdi dans lequel elle a tendance, par glissement, à mettre aussi des contestations, indéniablement populaires, comme le mouvement anti-gaz de schiste de In Salah.

Le problème est que ces « maillons faibles » en question ont été aussi désignés par Abdelaziz Bouteflika qu’elle a constamment soutenu et présenté comme une sorte de digue contre la mondialisation et contre l’ultra-libéralisme.

Il y a certes de la redistribution -fortement accélérée d’ailleurs par le printemps arabe qu’elle voue aux gémonies « globalement et dans le détail »- mais c’est une redistribution inégalitaire. Ce qui est dans « l’ordre des choses », le régime n’ayant pas changé.

Les ressources pétrolières ont permis une redistribution populiste -qui n’a rien à voir, il faut le rappeler, avec le respect du droit des classes populaires à investir le champ politique- qui risque de ne pas être durable.

Louisa Hanoune est-elle en train de revenir de son soutien à Bouteflika qui est resté indéfectible y compris pour son « droit » à un quatrième malgré son état de santé?

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Parler politique au lieu de complot ourdi

Ce n’est pas certain. Elle continue à marteler qu’il y a des bons ministres qui seraient des ultra-patriotes propres et des mauvais ministres qui seraient des ripoux et inscrits dans des agendas susceptibles de les mener devant les tribunaux pour haute trahison puisqu’il est question « d’assassinat » de l’État algérien.

Il est évident que la situation du pays n’est pas bonne, qu’il y a un sérieux problème de gouvernance et que les institutions sont vides ce qui renforce le caractère informel du pouvoir et de la prise de décision. La situation est d’autant plus délicate que l’Algérie se trouve dans un espace géopolitique et culturel fortement déstabilisé et probablement promis à de fortes turbulences.

Ce constat le FFS comme Mouloud Hamrouche l’ont fait en veillant à ne pas entrer, volontairement ou non, dans le jeu des clans qui a empêché l’État Algérien de se cristalliser réellement et de s’accomplir dans un État de droit et dans la démocratie.

Poser les questions en termes politiques est plus sérieux que de hurler au complot. Selon El-Khabar, Mme Hanoune a déclaré hier qu’elle « bénéficiait du soutien et de la sympathie de responsables au sein de l’État et dans de nombreux secteurs dans la lutte qu’elle mène contre les symboles de la corruption dans le pays et dans l’État ».

Qui sont donc ces « responsables » qui ont vent d’un complot ourdi aussi grave qu’un projet de liquidation de l’État mais qui ne font rien et se contentent d’exprimer, dans l’ombre, leur soutien à Hanoune?
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AUTOUR DES DOSSIERS DE LA CORRUPTION, DÉBAT AU CPP (VIDÉO)

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Le CPP sur le terrain miné des contrats militaires de l’ANP

par Ahmed Ferki

Maghreb Émergent

le 2 mai 2015

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https://www.youtube.com/watch?v=qBw3NhhGmUk&feature=youtu.be

Emporté par le vent des affaires, enivré par ce qui se dit autour du procès de l’affaire de l’autoroute est-ouest, le Café Presse Politique de Radio M, s’est encore laissé glisser dangereusement, ce jeudi 30 avril, au point d’évoquer la corruption sur les marchés militaires.

Pourquoi trouver des noms d’officiers supérieurs du DRS dans le procès, a demandé Souhila Benali, animatrice de l’émission? « C’est l’inverse qui aurait été surprenant, dans un pays où l’armée a un pouvoir exorbitant », a répondu El Kadi Ihsane.

« Dans un écosystème qui carbure autour de la corruption, pourquoi l’armée ne serait pas l’institution la plus corrompue, alors c’est elle qui a le plus de pouvoir, et c’est elle qui se situe le plus en dehors du droit ? Qui contrôle le budget de l’armée ? L’APN ne peut pas le contrôler. S’il y a un domaine d’impunité du contrat, c’est bien le domaine militaire », a affirmé El Kadi Ihsane.

Akram Kharief, animateur du site Secret Difa3, spécialisé dans les questions militaires et de défense, a rappelé que « la décision économique est parasitée par un système formel et informel », et que « des officiers supérieurs sont présents dans toutes les administrations, dans toutes les entreprises publiques ».

Connexion entre l’armée et la corruption

Ce qui se passe « tend à prouver qu’il y a une connexion entre l’armée et la corruption », à cause d’un « défaut de transparence dans la gestion des affaires de l’Etat », dit-il, ajoutant toutefois qu’au sein de l’armée, il existe une « commission des marchés dont le fonctionnement est très efficace ». L’armée algérienne « n’est pas une armée corrompue, ce n’est pas une armée bananière », et « la commission des marchés très bien organisée », avec des membres qui changent régulièrement.

Comment dès lors expliquer cette affaire de corruption concernant un marché d’hélicoptères Augusta auprès d’une firme italienne ? Il s’agit d’une centaine d’appareils commandés par l’Algérie, et à propos desquels une enquête est en cours en Italie. « Cela se passe en amont », lors de l’élaboration du cahier des charges, estime Akram Kharief. Selon lui, les hélicoptères commandés par l’Algérie ne sont, d’ailleurs, « pas adaptés à ses besoins ».

« Les hélicoptères Augusta sont d’excellente qualité, mais inadaptés », dit-il. « Ni la police ni l’armée ne les ont utilisés dans le désert ». Il rappelle aussi que l’ancien patron de la firme italienne, Giuseppe Ordi, purge une peine deux ans de prison dans une affaire de commission lors d’un contrat avec l’Inde.

Sortie du cadre institutionnel

Pour Abed Charef, le cadre commun à toutes ces affaires de corruption, qu’il s’agisse de l’autoroute est-ouest, de l’affaire Sonatrach ou du contrat d’achat des hélicoptères, c’est « quand la décision sort de son cadre institutionnel ». Saïd Djaafar va dans le même sens, mais relève que « c’était limité à des cercles restreints. Maintenant, ça s’est élargi, pour déboucher sur l’impotence du système et le sentiment que tout est pourri ».

Abdou Semmar, animateur du site Algérie Focus, se demande si le juge peut convoquer un officier cité dans une enquête. Il note aussi que le procès de l’affaire de l’autoroute pose une série de questions, parmi lesquelles l’usage de la torture dont des prévenus affirment en avoir été victimes. « Comment un procès peut se tenir sur la base d’aveux extorqués sous la torture », se demande-t-il.

Abed Charef fait deux remarques sur le procès de l’affaire de l’autoroute. Il rappelle qu’en Algérie, « il y a légalement une justice à deux vitesses ». « Les ministres ne sont pas poursuivis devant les juridictions normales. Ensuite, avec les seules informations rendues publics, lors du procès, n’importe quel service de renseignement étranger peut faire chanter la moitié du gouvernement algérien », note-t-il.

Monsieur l’officier traitant

Le CPP a aussi évoqué l’état de la presse algérienne, à la veille de journée de la liberté de la presse, célébrée le 3 mai. Abdou Semmar, qui participait à l’émission « Djazaïria week-end » suspendue la semaine dernière, a déploré que les patrons de la chaine El-Djazaïria aient affirmé que l’arrêt de l’émission a été décidé par l’équipe qui la réalise. « La chaine a le droit de se préserver, je comprends », mais l’attitude du patron de la chaine « n’est pas acceptable » dit-il. Abdou Semmar a, d’ailleurs, affirmé avoir « rencontré des problèmes surtout avec les patrons de presse » plutôt qu’avec les autorités.

Saïd Djaafar a demandé la permission de faire le rabat-joie à ce sujet. Pour lui, l’existence de ces chaines relève d’une « ingénierie de combine ». Il rappelle que « les patrons (de ces chaines, ndlr) étant officiellement des correspondants de chaines étrangères ». « L’Etat a contourné la loi avec un message implicite » adressé à ces patrons de chaînes : « vous êtes des nôtres ». Ce sont donc « des télés fragiles, n’importe quel responsable peut leur dire d’arrêter les frais ».

Abed Charef trouve difficile d’être solidaire avec une télé informelle. Ces chaines doivent devenir « des télé algériennes obéissant à la loi algérienne ». Autrement, la création d’une chaine est le résultat « d’un deal avec l’officier traitant du DRS ».

Une polémique s’ensuit avec El Kadi Ihsane. « Ce n’est pas vrai », dit-il. « Tous les gens qui ont décidé de créer une télé n’ont pas signé un deal avec le pouvoir ». Saïd Djaafar réplique : « on ne donne pas le statut de correspondant étranger à n’importe qui, on leur donne de l’avance sur les autres et sur la loi ».