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LES ORIGINES SOCIALES DE LA RÉVOLUTION EN EGYPTE

par Salah Adly, porte-parole du Parti communiste d’Egypte

jeudi 7 avril 2011


Discours de notre camarade Salah Adly, membre du Bureau politique et porte-parole du Parti communiste d’Egypte lors de la conférence des partis communistes et ouvriers organisée à Chypre les 25 et 26 février sur invitation du parti AKEL.

Chers camarades,

Je viens depuis l’Egypte embrasée par la révolution. La révolution du 25 janvier, qui a touché tout le pays, est une révolution sociale lancée par la jeunesse, et le peuple Egyptien dans toutes ses composantes, hommes et femmes, vieux et jeunes, Musulmans et chrétiens, ouvriers aux côtés des autres travailleurs et des couches moyennes et marginalisées ont participé à une épopée héroïque et à des manifestations de plusieurs millions de personnes exigeant le renversement du régime, et le principal slogan de la révolution était : Liberté, justice sociale, dignité humaine.
Ces manifestations de masse ont été menées dans toutes les provinces d’Egypte d’une façon civilisée, pacifique et morale qui a permis de mettre en échec toutes les manœuvres du régime afin de les écraser ou de les réprimer en usant de son puissant arsenal sécuritaire, puisque les forces nationales de sécurité sont composées de 1,7 millions de personnes, soit trois fois le nombre de militaires avec leurs armes, leurs véhicules blindés, leurs bombes et leur balles réelles venant de snipers postés sur les toits des bâtiments, mais le grand peuple Egyptien a réussi à triompher et à annuler toutes les intrigues contre-révolutionnaires fomentées par le régime, ses agents, la police secrète, la direction du parti au pouvoir, et les patrons pilleurs du peuple, en plus de son crime consistant à couper internet et à désactiver tous les réseaux de mobile à la veille du « Vendredi de la colère », le 28 janvier, qui indiquait qu’il y avait intention de commettre un massacre, mais le peuple en révolte a également mis en échec cette manœuvre, et triomphé de ce système gigantesque.
Ils ont orienté leur colère contre les figures répressives du régime, puisque 2000 véhicules et postes de police, en plus du siège du parti au pouvoir et de ses sections dans les provinces, ont été incendiés, perçus comme des symboles et des instruments de l’oppression quotidienne, de la torture, et de l’humiliation des citoyens…

La conspiration fasciste a été vaincue aussi à cause de l’attitude patriotique des militaires, qui ont refusé d’utiliser la violence contre les manifestants, et à cause de la vigilance des révolutionnaires qui ont constitué des comités sociaux dans tous les quartiers. Ces comités sociaux ont protégé les bâtiments, les installations et les citoyens.
Après la manifestation rassemblant plus d’1 million de personnes le mardi 1er février, les forces de la contre-révolution ont tenté d’organiser des manifestations, financées par le régime, pour le dictateur Moubarak. Ce mercredi 2 février sanglant, ils ont déployé des criminels et des voyous, afin de dissoudre la révolution, et de virer les manifestants de la place Tahrir, qui est devenue le symbole de la révolution et un appel à persévérer et à continuer.
Mais les révolutionnaires pouvaient résister à ces barbares, les vaincre et libérer la « Place de la Libération ». Ce jour sanglant fut un jour crucial pour la victoire de la révolution sur la scène historique, qui a révélé au monde entier toute la barbarie et la brutalité du régime en place, qui a utilisé des chevaux, des chameaux et des balles réelles créant une opposition claire entre une sauvagerie digne du sombre moyen-âge d’une part, et d’autre part un peuple civilisé et des manifestations pacifiques de plusieurs millions de personnes où même pas une pierre ne fut lancée, et où n’a même pas été constaté le moindre incident d’intolérance religieuse, ou d’harcèlement sexuel pendant les 18 jours qu’ont duré les sit-ins et les manifestations, jusqu’à la chute du dictateur.
Et il a été ainsi prouvé aux masses et aux gouvernants du monde entier la fausseté des mensonges selon lesquels le peuple Egyptien était inapte à la pratique démocratique.

Le peuple Egyptien a payé un lourd tribut de sa résistance et de son obstination à renverser le dictateur Moubarak, et selon les statistiques officielles, le nombre officiel de martyrs a atteint les 365, en plus des 5 500 blessés. Ils ont écrit à l’encre de leur sang des pages immaculées, et ont réalisé un rêve, ce que le peuple Egyptien attendait depuis plusieurs décennies.

Il ne fait aucun doute que les révolutions Egyptiennes et Tunisiennes ont repensé le concept de révolution sociale, les partisans du système capitaliste prétendant qu’il était dépassé, et les masses ont prouvé que la révolution était la locomotive de l’histoire comme le disait Marx, et que c’est le révélateur de la capacité des masses à enclencher des changements démocratiques profonds et pacifiques face à des régimes répressifs totalitaires qui ferment toutes les portes au changement par la voie démocratique traditionnelle.

La révolution du 25 janvier ne s’est pas produit par hasard, ni par une décision prise en haut lieu, mais elle se produisit comme résultat d’une crise révolutionnaire intégrale, pour laquelle les conditions objectives et subjectives étaient réunies, et qui fut précédée de milliers de manifestations, de grèves, de sit-ins, dont la vie politique et sociale en Egypte était émaillée dans les dernières années, et que les ouvriers, les étudiants et les travailleurs ont menés.
Ces manifestations ont représenté les signaux de l’imminence de la naissance de cette grande révolution, dont personne ne pouvait prévoir le moment, et qui a surpris tout le monde avec une participation sociale riche et variée, les potentialités formidables de la jeunesse ainsi que le haut niveau politique des revendications et des objectifs posés dès le tout premier jour de la révolution.

Avec cette insistance inflexible à accomplir les objectifs de la révolution quelques puissent être les sacrifices à endurer. Le succès de la révolution Tunisienne, qui a renversé le dictateur Ben Ali, a également été un élément important d’inspiration pour le peuple Egyptien, en tant qu’il a mis en valeur la capacité des masses à remporter la victoire et à changer le destin de leurs pays.

Et peut-être que quelques chiffres officiels donnent des indications importantes sur l’intensification de la crise révolutionnaire et l’aggravation de la détérioration des conditions de vie du citoyen en conséquence des politiques et pratiques d’un régime au pouvoir autocratique, qui s’allie à l’impérialisme Américain, et l’exécuteur fidèle des politiques économiques néo-libérales, imposées par les institutions du capitalisme mondial.
En Egypte, nous avons 48 millions de pauvres, 1 109 quartiers de bidonvilles (Rapport du FMI pour le développement agricole), 40% des Egyptiens sont sous le seuil de pauvreté gagnant moins d’1 dollar par jour, 12 millions d’Egyptiens sont sans-abri, 500 000 Egyptiens vivent dans des cimetières (Agence centrale pour la mobilisation et les statistiques). 46% des familles Egyptiennes ne se nourrissent pas assez pour garantir des déplacements et une activité normales, l’Egypte vient en premier en termes d’accidents de la route, puisque 8 000 Egyptiens meurent et des dizaines de milliers sont blessés chaque année (Agence centrale pour la mobilisation et les statistiques) (…)
L’Egypte vient en dernière position parmi 134 Etats pour ce qui est de la pratique du népotisme à divers niveaux de pouvoir, elle vient à la 115ème position sur 134 Etats pour ce qui est de l’index d’estimation de la corruption (Index de la compétitivité mondiale), et vient à la 115ème place dans l’index de transparence et d’équité (Transparence internationale).
Nous avons le plus haut taux de mortalité infantile au monde, avec un taux de 50 pour 1 000, et le taux le plus élevé d’infection par l’Hépatite (declaration du ministre Egyptien de la santé).
Nous avons dix millions de chômeurs entre 15 et 29 ans, soit 22% de la main d’œuvre. (…)
Si nous ajoutons le sujet de la succession héréditaire du pouvoir à Gamal Moubarak, qui fut l’objet d’un véritable battage médiatique, et la fraude électorale systématique et incessante jusqu’aux toutes dernières élections, où le PND a complètement dominé le Parlement (97% des sièges totaux), et le contrôle de la police d’Etat sur toute la vie politique et économique, les syndicats, les corporations, les universitaires et les organisations de la société civile, tout cela s’ajoutant aux pratiques quotidiennes de répression et de torture aux postes de police, sous état d’urgence depuis 30 ans.
Tout cela laisse supposer qu’il était impossible que cela continue ainsi, et que la révolution était imminente et inévitable, puisque les conditions objectives étaient réunies comme Marx le disait, pour que le peuple et la jeunesse ne puissent plus accepter de vivre comme avant, leur avenir s’est assombri, et le régime ainsi que ses institutions est devenu incapable de gouverner en usant des méthodes du passé, étant donné sa sénilité, sa pourriture, ses conflits internes et sa dépendance sur les appareils répressifs.
L’existence également d’un moment révolutionnaire a également joué un rôle majeur, à cause de l’accumulation d’actions menées par les forces politiques et la cristallisation de programmes politiques, économiques et nationaux d’alternative, donc on peut dire avec confiance qu’il s’agit d’une révolution qui a ses traits originaux, et qui n’est pas juste un mouvement ou un soulèvement.

Le peuple Egyptien, dans les jours de la révolution, a prouvé que des dizaines d’années difficiles ne pouvaient en finir avec ses valeurs, ses habitudes de tolérance et sa persévérance. (…)
L’attitude de l’Armée a également contribué à la réalisation des exigences populaires et au renversement du régime.
Les Egyptiens ont également prouvé, par des manifestations réunissant des millions de personnes, que la révolution était en marche.
Les mots de d’ordre de la révolution, scandés avec insistance par la foule, ont été source d’inspiration. En même temps, il n’était possible pour aucune force politique de prétendre avoir mobilisé les masses.
Les illusions du chaos, du terrorisme, et les tensions religieuses, mises en avant et utilisées par le régime pour intimider le peuple et l’éloigner de la révolution, ont été éliminées également.

Les origines sociales de la révolution en Egypte

Traduction MA pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/


Voir en ligne : http://solidarite-internationale-pc...

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