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par Ahmed HALFAOUI

LA LOI ALGERIENNE DES FINANCES ET LES "DÉMOCRATES"

Ou comment on brouille les pistes ...

dimanche 27 février 2011

L’article de Ahmed HALFAOUIest une démonstration du cynisme conjugué des "démocrates" libéraux locaux et de leurs maîtres et compères des économies occidentales ; Ils sont larrons qui s’entendent sur le dos des populations du Sud paupérisées, déstructurées, politiquement et idéologiquement fragilisées par la fable du marché sauveur. Les soulèvements en cours ne déboucheront sur le vrai "printemps arabe" que si les acteurs engagent dans les faits les démystifications qui remettront enfin au centre des stratégies nationales de développement deux conditions de base : les capacités productives et la satisfaction des besoins sociaux. Ainsi seulement une démocratie réelle pourra-t-elle supplanter les régimes que Georges Corm qualifie à juste titre de "kleptocratiques".

On aurait bien voulu savoir si démocratiquement le peuple algérien aurait accepté le fameux plan d’ajustement structurel de l’économie nationale (P.A.S).
Dommage, on ne l’a pas consulté sur le sujet et les « démocrates » d’aujourd’hui, qui soutenaient cette option et en faisaient le pivot de leur programme, n’ont pas eu l’heur de mesurer le degré d’enthousiasme des masses vis-à-vis de leur trouvaille.
La situation imposait d’autres urgences, il fallait sauver sa vie plutôt que de discuter de la savante formule du Fonds monétaire international (FMI) et consorts.

Cela n’a pas empêché que soit signé et paraphé, ce traitement de choc censé sortir le pays du sous développement dans lequel il se trouvait.

Vingt ans ont passé, le pays a démantelé l’essentiel de son tissu industriel et surtout cet arsenal de lois et de règlements qui protégeait la production nationale, aussi bien publique que privée.
Mais, en dehors des recettes des hydrocarbures, rien n’est venu impulser ce développement tant promis par une nuée d’ « experts », de « spécialistes » et de « conseillers », qui répétaient à l’envi les bienfaits du retrait de l’État de la sphère économique.
Ceci, même si le pays n’y a gagné que d’être transformé en un immense déversoir de marchandises de toutes origines, qu’il a pu, heureusement ou malheureusement, absorber grâce à une exceptionnelle flambée des prix du pétrole.

Effet du P.A.S, le moins visible, médiatiquement parlant, des centaines de milliers de travailleurs licenciés et autant de chômeurs sans grands espoirs d’embauche. Pourtant, l’argent coule à flot dans ce qui est désormais consacré « économie de marché ».

Autre effet, pendant que la multitude vivait de débrouilles individuelles, la corruption et la gabegie sont instaurées comme facteur de réussite et presque comme des passages obligés.
Le temps faisant son œuvre le fatalisme a gagné toutes les couches de la société qui n’ont pas accès aux laboratoires qui fabriquent les politiques ou aux réseaux d’influence qui produisent les milliardaires.

Le FMI, mis à part quelques remontrances, adresse satisfecit sur satisfecit à l’élève zélé qu’est devenu l’Etat algérien. Hommes d’affaires, gros négociants ou cadres véreux, affichent sans coup férir une richesse dont l’insolence n’a d’égale que la certitude du bon droit dans lequel ils croient baigner.

Au sein de l‘économie réelle, rien ne bouge ou quelques investissements sporadiques, dont la rareté tranche avec les immenses fortunes qui prospèrent et qui refusent de se risquer dans l’industrie ou de l’agriculture, préférant servir d’intermédiaires aux économies étrangères en tant qu’importateurs ou, au mieux, comme simples transformateurs.

Un mot les désigne : les compradores. Le pire est qu’ils ont acquis et mis en place des relais dans la société, des intellectuels, des faiseurs d’opinion, des hommes politiques, et qu’ils bénéficient du soutien d’États intéressés. Apparemment, leur puissance financière leur donne, désormais, le poids politique dont ils ont besoin pour se défendre contre tout ce qui peut remettre en cause les conditions qui les servent.

L’idéologie de la prédation a, ensuite, le culot de se poser en discours libérateur et menace même d’en appeler au peuple. Leur « démocratie » n’aime pas la régulation et encore moins le protectionnisme, pourtant de plus en plus en plus vigueur partout dans les nations qui sont leurs références. Et dont les chancelleries voient leurs porte-voix politiques empressés venir chercher soit une bénédiction, soit un soutien.

A contrario, on ne peut que remarquer la faiblesse l’absence de l’encouragement aux producteurs nationaux de la part des institutions qui veillent au respect des règles de la libre-entreprise et la formidable levée de bouclier contre la timide loi de finances de 2009.

Cette initiative prise, en désespoir de cause, en vue de contenir la dégradation des termes de l’échange avec les partenaires étrangers et de booster le tissu industriel national, grâce aux investissements publics et au soutien à l’investissement du privé national, (en profitant opportunément de l’aisance financière providentielle dans laquelle se trouve le pays).

On apprend, à nos dépens, que ce qui est bon pour les puissances dominantes ne l’est pas pour les plus faibles. Sous la menace d’une « démocratisation » musclée, ils veulent imposer leurs directives, et les relais locaux se chargent de les applaudir, d’amplifier le message et de vendre, en grosses manchettes de une, le produit à l’opinion publique.

Une crise aurait éclaté, sans crier gare. Ne nous laissons pas tromper. Il ne s‘agit pas, bien sûr, de celle qui s’exprime depuis des années par des émeutes récurrentes en réponse justement à la politique d’attentisme économique où s’est confiné l’État, par égard aux accords conclus qui interdisaient qu’il intervienne.
Ce qui lui a d’ailleurs coûté de subir les sarcasmes des « spécialistes » de l’Algérie.
Un pays riche dont le peuple est pauvre, un jugement dont le cynisme nauséabond occulte le fait qu’eux-mêmes, en supplétifs militants de l’ultralibéralisme, sont parmi les premiers mentors de cette stratégie anti interventionniste.

Ce cynisme cache aussi le fait que ce qui est visé est ni plus, ni moins que d’obtenir un recul de l’État, voire son retour à la situation antérieure.
Les oripeaux « démocratiques » complètent, enfin, le maquillage et s’essaye à drainer tous les « mécontentements », y compris ceux qui seront aggravés, quitte à les tromper sur des objectifs difficiles à afficher.

Alors qu’il est patent qu’avec un surcroît de libéralisme, les libertés seront de plus en plus incompatibles avec le développement de l‘exclusion sociale et de l’accroissement du nombre de laissés pour compte, qui assurément voudront encore moins d’un pays riche dont le peuple est pauvre.

Ce qui devrait, « démocratiquement » parlant, imposer que ce peuple soit appelé à choisir s’il est pour ou contre ce qu’on lui prépare.

Les « démocrates » pourront à loisir faire campagne en expliquant comment ils comptent, dans le même temps, travailler pour les marchands, en enrichissant les pauvres.

Ahmed Halfaoui

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