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LE PRÉSIDENT HOLLANDE RÉPOND À JOSETTE AUDIN

lundi 17 décembre 2012

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Lundi 17 décembre 2012
Par Rosa Moussaoui, Alger,
envoyée spéciale
L’Humanité.fr

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On est loin de la sécheresse administrative de l’accusé de réception qui avait répondu à sa lettre au président de la République, en août dernier. Cette fois, François Hollande répond de façon circonstanciée à la demande de Josette Audin que soit « connue et reconnue » la vérité sur le sort de son mari, Maurice Audin, enlevé, torturé et assassiné par les parachutistes de Massu, Bigeard et Aussaresses, en juin 1957, à Alger (voir l’Humanité du 14 décembre).

« Plus de cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, l’État français doit faire face à ses responsabilités et au devoir de vérité qui lui incombe envers vous et votre famille d’abord, mais également envers l’ensemble des citoyens », écrit le chef de l’État dans une missive reçue vendredi matin par Josette Audin. À la veille de sa visite d’État en Algérie, mercredi et jeudi, François Hollande confirme qu’il se rendra « sur la place Maurice-Audin, à Alger, en hommage à la mémoire » du jeune mathématicien communiste qui avait embrassé la cause de l’indépendance algérienne.

« J’ai par ailleurs demandé à Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, de vous recevoir afin de vous remettre en mains propres l’ensemble des archives et documents en sa possession relatifs à la disparition de votre mari », conclut le président français.

Josette Audin, qui s’était vu opposer un silence assourdissant par Nicolas Sarkozy en 2007, juge cette réponse « positive », même si elle attend de connaître les termes précis de « l’hommage » promis par François Hollande et la nature exacte des documents qui lui seront remis par le ministre de la Défense. Le président de la République ne précise pas, en effet, si ce geste implique une levée du secret-défense sur tous les documents relatifs à l’affaire Audin. Autre difficulté, selon l’historienne Sylvie Thénault, spécialiste de la guerre d’Algérie : « Il n’est pas évident que des traces écrites témoignent d’un ordre d’exécution de Maurice Audin. En revanche, des témoins existent, ils doivent parler, dire la vérité. » En mars dernier, une enquête du Nouvel Observateur révélait de nouveaux éléments sur l’affaire Audin, extraits d’un manuscrit du colonel Godard, ancien commandant de la zone Alger-Sahel. Ce document contredit la thèse officielle selon laquelle Maurice Audin se serait évadé lors d’un transfert. Il confirme que le militant communiste a été tué par les militaires qui le détenaient et mentionne même le nom de celui qui l’aurait mis assassiné, le sous-lieutenant Gérard Garcet, aide de camp du général Massu. À plus de quatre-vingts ans, l’homme coule aujourd’hui une retraite tranquille en Bretagne.

Le général tortionnaire Paul Aussaresses racontait en 2008, dans l’un de ses sinistres déballages, que cet homme faisait partie de « l’état-major de la main gauche » chargé des « basses besognes »,en fait un escadron de la mort qui officiait à la villa des Tourelles, sur les hauteurs d’Alger.
D’après Aussaresses, condamné en 2002 pour « apologie de crime de guerre », la hiérarchie militaire comme les autorités politiques recevaient des rapports sur les exécutions sommaires : « Je le disais à Massu. En plus de la réunion quotidienne du matin, j’écrivais en quatre exemplaires tous les jours ce que nous faisions, de façon détaillée. Il y avait un exemplaire pour Massu, un pour le ministre résidant Lacoste et un pour le général Salan. Massu savait tout. Le gouvernement aussi. […] On ne faisait pas toujours des listes pour Paul Teitgen, le secrétaire général de la préfecture. Certains, on les attendait dehors et on les exécutait. Après, on les “assignait à résidence”. » Les barbouzes, liés par un « pacte du silence », se chargeaient ensuite de faire disparaître les corps. Parfois en les enterrant sur les lieux mêmes de leur exécution. Le plus cyniquement du monde, Aussaresses raconte que des exécutions sommaires, « il y en a eu quelques-unes, c’est vrai, à la villa des Tourelles. Des types arrivés de jour… On les a enterrés sur place. Ils doivent être encore dans le jardin ».

Rosa Moussaoui, 17 décembre 2012. L’Humanité.fr


Lettre de Josette Audin à François Hollande


sur socialgerie, lire aussi :


D’UNE RIVE A L’AUTRE, HONORÉ PAR DEUX PEUPLES - MAURICE AUDIN, SON ENGAGEMENT POUR L’INDEPENDANCE ET LA PAIX - par Sadek Hadjerès, le 26 MAI 2004 - article publié le 29 mai 2004 dans Le Matin, Le Quotidien d’Oran, et l’Humanité
mis en ligne socialgerie le 25 février 2010, article 201

RÉFLEXIONS SUR Maurice AUDIN ET LA TORTURE
(à l’occasion de l’inauguration d’une place Maurice Audin à Paris le 26 mai 2004) - par Sadek Hadjerès
format pdf. téléchargeable
http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/2004_05_26_Reflexions_sur_Maurice_Audin_et_la_torture.pdf


À L ’OCCASION D’UN HOMMAGE À MAURICE AUDIN
CONTRE LA TORTURE ? TOUT EST DANS LES NIVEAUX DE CONSCIENCE ET DE MOBILISATION - ENTRETIEN de Sadek Hadjerès, AVEC ALGER RÉPUBLICAIN LE 29 MAI 2004
… entretien donné par Sadek Hadjerès à Alger républicain en 2004., à l’occasion de l’hommage rendu à Maurice Audin par l’inauguration d’une place de Paris à sa mémoire.
Le problème a aujourd’hui encore des résonances douloureuses franco-algériennes et aussi algéro-algériennes en rapport avec les évolutions après l’indépendance...

mis en ligne socialgerie, article 200, le 24 février 2010

format pdf téléchargeable : http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/Audin_SH_Algerep.pdf


INTERPELLATION DU MINISTRE DE LA DÉFENSE AU SUJET DE MAURICE AUDIN - le 31 mai 2012
socialgerie - article 864

original pdf téléchargeable : http://www.socialgerie.net/IMG/pdf/letaudinledrian.pdf


GUERRE D’ ALGÉRIE : RÉVÉLATIONS SUR L’AFFAIRE AUDIN
PAR NATHALIE FUNES - "LE NOUVEL OBSERVATEUR" - le 1er mars 2012
mise en ligne socialgerie le 3 mars 2012, article 761 ;


HENRI ALLEG : « L’IDÉE INTERNATIONALISTE ÉTAIT PRIMORDIALE DANS NOTRE ENGAGEMENT » - entretien avec Rosa Moussaoui - L’Humanité - mars 2012 ;
Socialgerie, article 789 mis en ligne le 31 mars 2012

… malgré la censure, les saisies, ce livre a circulé sous le manteau. Cette diffusion était-elle organisée par des militants, ou le livre est-il passé spontanément de mains en mains ?
Henri Alleg. La seule chose que je sais, c’est qu’à Alger, personne ne l’avait eu, personne ne le connaissait au moment de la parution. C’est en France que “La Question” a eu une répercussion immédiate et formidable. Cet élan doit sans doute beaucoup à la stupidité du gouvernement français et à sa décision de saisir le livre. Très vite, Nils Andersson, un éditeur basé en Suisse, a pris contact avec Lindon pour lui demander l’autorisation de le publier. Lindon a accepté. Le livre était minuscule, des valises passaient clandestinement la frontière. Immédiatement après sa saisie, “La Question” a été traduite en anglais et publiée à Londres, puis aux Etats-Unis, ce qui lui a donné un écho international.

La bataille pour la vérité continue

Un demi-siècle après son enlèvement par des militaires français, on ne sait toujours pas dans quelles conditions a été assassiné votre ami et camarade Maurice Audin…
Henri Alleg. Cette bataille pour la vérité continue. Maurice Audin a été arrêté dans les mêmes conditions que moi. Très peu de temps après son enlèvement par les paras, on a annoncé à sa femme qu’il avait « disparu ». Il est invraisemblable que les autorités françaises, que les parachutistes aient pu prétendre ne rien savoir du sort de Maurice. C’est certain : il a été assassiné par ces équipes de tortionnaires couverts et tenus en main par les autorités policières et militaires.
Dans cette affaire, le refus d’ouvrir une enquête, l’attachement des autorités françaises au mensonge est à la fois odieux et absurde. À Alger, à Oran, dans les petites villes, lorsque les militaires annonçaient la « disparition » d’un prisonnier, personne n’ignorait qu’il était en fait question d’assassinat.
Dire et répéter, jusqu’à ce jour, que Maurice Audin a été « mal gardé », qu’il s’est évadé et qu’il a « disparu », c’est abject. La vérité, c’est qu’il a été assassiné, comme des centaines, des milliers d’autrjavascript:barre_raccourci(’’,’’,document.getElementById(’text_area’))es. Personne ne peut dire autre chose.

Que changerait la reconnaissance de la torture comme crime de guerre ?
Henri Alleg. La France, les autorités françaises prétendent incarner, aux yeux du monde entier, les droits de l’homme, les libertés, les grandes idées nées de la Révolution française. C’est une façon mensongère de présenter l’histoire. Pendant la guerre d’Algérie, les autorités françaises ont piétiné ces idées, ces principes. Comme ils sont encore piétinés aujourd’hui à Guantanamo et en Afghanistan. Le combat pour la vérité, qui est un combat d’aujourd’hui, doit se poursuivre sans relâche. On ne peut pas tout simplement parler de l’avenir sans respecter la vérité.


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